Accueil > Financement et politiques publiques > Biotech : de meilleures perspectives d’accès à l’innovation en France Biotech : de meilleures perspectives d’accès à l’innovation en France Focus sur la biotech en France : selon France Biotech, l’association qui fédère les entrepreneurs de l’innovation dans la santé, les autorités vont dans la bonne direction afin de réduire les délais de commercialisation des nouveaux médicaments. Le faible prix des médicaments et la lourde fiscalité qui pèse sur le secteur demeurent toutefois des défis de taille. Par Pharma Intelligence. Publié le 25 octobre 2022 à 22h08 - Mis à jour le 20 février 2023 à 17h55 Ressources Deux initiatives clés prises par le gouvernement français au cours des deux dernières années permettent d’améliorer l’accès des patients à des médicaments innovants, explique France Biotech, l’organismereprésentatif des acteurs de l’innovation dans ce secteur.Ces initiatives permettent de réformer la procédure d’autorisation temporaire d’utilisation (ATU) et la possibilité pour les nouveaux produits d’être lancés dès réalisation de l’évaluation des technologies desanté (Health Technology Assessment ou HTA) et avant finalisation des procédures de tarification et de remboursement. “Clairement, le gouvernement essaie d’accélérer l’accès à l’innovation pour les patients et pour les professionnels de santé. Il s’agit également d’aider les entreprises de la biotech en général à commercialiser plus rapidement leurs produits”, explique Frédéric Girard, vice-président de France Biotech. “C’est aussi bien évidemment le moyen d’aider au financement des entreprises”, ajoute-t-il, mais aussi de collecter des données pour “accéder ensuite au processus de remboursement normal.”Les initiatives d’accès aux médicaments sont le résultat de deux lois consécutives de financement de la sécurité sociale, promulguées en décembre 2020 (LFSS 2021) et décembre 2021 (LFSS 2022).La LFSS 2021 a introduit la réforme de la procédure ATU, destinée à faciliter la rapidité d’accès aux médicaments pour les patients souffrant d’une pathologie sévère ou rare, dans les secteurs où il existe d’importants besoins médicaux non encore satisfaits. Aux termes de cette réforme, les autorités de santé ont simplifié la procédure ATU, réduisant à deux les six systèmes existants, a expliqué Frédéric Girard à Pink Sheet, à l’occasion de l’événement organisé à Paris le 7 juillet dernier pour célébrer le 25e anniversaire de France Biotech.Ces deux systèmes sont l’autorisation d’accès précoce (AAP), qui inclut la cohorte ATU, et l’autorisation d’accès compassionnel (AAC), qui comporte des ATU individuelles. La réforme est entrée en vigueur à la mi-2021. (cf. “France Implements New Early Access Pathway For Innovative Medicines”, Pink Sheet, 5 juillet 2021).Les fabricants doivent désormais déposer leurs demandes d’AAP auprès de l’organisme en charge de l’évaluation HTA, la Haute autorité de santé (HAS), plutôt qu’auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).“Mais on demande aussi aux entreprises de collecter des données de vie réelle, qui pourront ultérieurement intégrer le dossier médico-économique pour l’évaluation HTA, comme cela a été convenu et acté”, explique Frédéric Girard. France Biotech 2022Plongée tous azimuts dans l’industrie biopharmaceutique française.Le 7 juillet dernier, France Biotech organisait une conférence à Paris pour célébrer son 25e anniversaire. Les publications de Pharma Intelligence ont interrogé les membres de son comitédirecteur sur les tendances thérapeutiques et financières, mais aussi sur les défis uniques liés à la réglementation en France et sur l’importance croissante de l’innovation dans la medtech. Le concept d’accès direct La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour l’année 2022 a introduit le concept d’ “accès direct” pour les médicaments, au terme duquel certains produits, pour une indication spécifique, peuvent bénéficier d’un remboursement des services de santé jusqu’à un an, dès publication de l’avis de la HAS.Selon un article de la société KPMG publié en janvier dernier, l’objectif de cette mesure est de “permettre aux patients et aux fabricants d’accéder rapidement au marché, par rapport au délai habituel de 180 jours, et d’assurer une jonction avec la législation de droit commun, dans l’éventualité d’une période de négociation exceptionnellement longue.”Ce système, qui vient compléter la procédure d’accès précoce permise par la LFSS 2021, offre un plus large périmètre que l’autorisation d’accès précoce et cible essentiellement les médicaments qui ne seraient pas éligibles dans le cadre de ce programme. “En permettant à l’entreprise de commercialiser ses produits immédiatement après l’évaluation HTA, on gagne pratiquement douze mois pour le patient, afin de lui permettre d’accéder à l’innovation.” Frédéric Girard, vice-président de France Biotech Pour bénéficier d’un accès direct, l’entreprise doit déposer une demande auprès du ministère de la Santé et de la Sécurité sociale, au plus tard dans le mois qui suit l’avis donné par la HAS sur l’intégration d’un produit dans l’une des listes de médicaments remboursés.Avec ce système, “sous certaines conditions, après évaluation économique, on est en mesure de commercialiser son produit avec un tarif libre et son remboursement, parallèlement aux négociations tarifaires”, explique Frédéric Girard.“Tout cela est extrêmement important, dans la mesure où, en France, l’ancienne procédure d’accès au marché après enregistrement des médicaments est d’environ 520 jours – l’une des plus lentesd’Europe. Cela représente normalement six mois pour l’évaluation HTA, le reste du calendrier concernant la négociation tarifaire. En permettant donc à l’entreprise de commercialiser ses produits immédiatement après l’évaluation HTA, on gagne pratiquement douze mois pour le patient, afin de lui permettre d’accéder à l’innovation.” Tarification et remboursement Frédéric Girard fait également observer que le niveau de remboursement d’un médicament dépend actuellement de la notation qui lui est appliquée au terme de l’évaluation HTA. Les notations appliquées en France, explique-t-il, “sont en moyenne inférieures, ce qui conduit à des prix moinsélevés.” Au cours des vingt ou trente dernières années, les niveaux de prix en France ont fortement diminué. Les prix n’étaient pas extraordinaires, note Frédéric Girard, mais “ils étaient toutefois d’un bon niveauet ils deviennent maintenant parmi les plus bas d’Europe.”L’une des pistes de tarification actuellement examinée en France s’intéresse aux coûteuses thérapies géniques, capables de guérir des maladies graves et onéreuses dans leur traitement au moyen d’une seule administration. “On paie une seule fois pour un avantage qui va durer toute la vie.Une question reste toutefois posée : comment les intégrer dans le budget gouvernemental ?”, s’interroge Frédéric Girard. Dans le cadre des réglementations actuelles, le coût est comptabilisé dès que le traitement est délivré, alors même que les avantages vont durer bien au-delà. L’industrie française des biotechnologies discute donc d’une forme d’amortissement du coût de la thérapie génique, en répartissant par exemple cette dépense sur une période de trois ou cinq ans, “ce qui reflète en fait la réalité de ces traitements.”Une telle mesure serait facilitatrice, dans la mesure où les autorités de santé disposent d’une enveloppe budgétaire très stricte, et si le montant en est dépassé le secteur doit s’acquitter d’une taxe spéciale, explique Frédéric Girard. “Si ce système était en place, cela faciliterait indéniablement l’accès à l’innovation, à la thérapie génique ou à la thérapie cellulaire.”Le vice-président de France biotech note également d’autres nouveautés mises en œuvre avec la LFSS 2022. L’une d’entre elles permet au comité de tarification des médicaments de prendre en compte la production intérieure lors de l’établissement du prix des médicaments remboursables. Objectif ? “Soutenir l’indépendance de la France en termes de production stratégique”.Pour autant, il reste beaucoup de chemin à parcourir, explique-t-il, en termes de niveaux de prix des médicaments, “parce que nous avons perdu la position que nous avions dans le passé, et que nous sommes aujourd’hui un marché avec des prix très bas”. Avec pour conséquence pratique “un impact sur l’image du pays”. Taxation et environnement opérationnel Si l’on observe le contexte opérationnel et fiscal de l’industrie française en général, Frédéric Girard souligne qu’il s’agit en fait d’une “situation contrastée.” La France bénéficie en effet d’un “avantage unique” sous forme des crédits recherche, “au moyen desquels on peut obtenir un crédit d’impôt pour chaque investissement réalisé dans la recherche. Jecrois que cela n’existe pas ailleurs, tout au moins avec un système de cette ampleur”, explique Frédéric Girard, qui rappelle que ce système n’est cependant pas spécifique à l’industrie pharmaceutique et qu’il s’applique à d’autres secteurs. “On peut obtenir un crédit d’impôt pour larecherche et le développement. C’est le côté positif des choses.”Il y a toutefois un côté négatif. “Il existe une dizaine de taxes spécifiques appliquées à l’industrie pharmaceutique que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans le monde.” Il cite à cet égard un rapportpublié fin mai par la société de conseil PwC, qui montre que “l’industrie pharmaceutique en France paie deux fois plus d’impôts” que dans les autres pays. Actualisé avec les chiffres 2021, le rapport de PwC réalisé pour le compte du Leem, le syndicat du milieu pharmaceutique, explique que la France “figure encore à la dernière place, derrière tous les autres pays européens, en termes de politique fiscale.” La France a le plus haut niveau de taxation spécifique à un secteur d’activité en Europe et “cette charge fiscale qui pèse sur les sociétés pharmaceutiques rend le pays moins attractif que ses voisins européens au niveau des investissements de production provenant de l’extérieur.”Bien que situation générale de la fiscalité connaisse des améliorations en France, avec des réductions dans les taxes appliquées aux entreprises et à la production, ces évolutions sont encore loin de compenser la charge importante que constitue la taxation spécifique imposée à l’industrie pharmaceutique, “alors même que cette industrie est identifiée comme un secteur d’importance stratégique pour la reprise économique, au sortir de la crise », comme le stipule le rapport de PwC.Pour autant, Frédéric Girard estime que les autorités “vont dans la bonne direction” pour améliorer l’image de la France en termes d’accès au marché. “Il y a eu des changements très importants sur lemarché français au cours des deux dernières années”, reconnaît-il volontiers.Les autorités doivent s’assurer qu’elles sont en mesure de tenir leurs promesses, rappelle Frédéric Girard, pour contribuer à améliorer l’accès aux médicaments innovants. “Nous devons maintenant être certains que tout cela va fonctionner normalement et, in fine, nous assurer que l’innovation pourra parvenir plus rapidement au marché, à un meilleur prix.” Article de Ian Schofield et Ayisha Sharma initialement publié sur Pharma Intelligence le 28 juillet 2022. Cet article est proposé gracieusement par notre partenaire, Pharma Intelligence, un leader mondial d’analyses de marché, d’intelligence, et de données dédiées au secteur pharmaceutique. Pharma Intelligence BiotechsDonnées cliniquesFinancementsGénétiqueInnovationMédicamentPharma IntelligenceSécurité sociale Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire analyses Biotechs : après une année folle d’introductions en bourse, la fête est finie Fonds européens : comment bien saisir cette opportunité ? Comment financer son projet d’innovation en santé ?