À l’ASCO, les Instituts Gustave Roussy et Curie témoignent de l’utilité des données de vie réelle

Très actifs dans le domaine de la recherche, les deux CLCC (Centres de Lutte Contre le Cancer) français ont présenté cette semaine à Chicago le fruit de leurs investigations cliniques. Si les présentations de l’Institut Gustave Roussy et celles de l’Institut Curie démontrent principalement la place majeure prise par les thérapies ciblées et l’immunothérapie, l’un des enseignements de ce congrès de l’ASCO porte aussi sur les méthodes de recherche et sur l’importance de l’analyse des données de vie réelle. Ces dernières sont particulièrement utiles pour évaluer la toxicité de certains traitements anti-cancéreux, comme en témoignent deux études, l’une de Gustave Roussy, l’autre de Curie.

De l’importance des données de vie réelle

L’étude SACHA

Mise en place en mars 2020, SACHA (Sécurisation de l’Accès aux molécules innovantes en Cancérologie et en Hématologie pour les enfants, les Adolescents et les jeunes adultes) est une étude prospective observationnelle promue par Gustave Roussy. Cette étude collecte de façon exhaustive dans les 31 centres SFCE (les centres hospitaliers reconnus par la Société Française des Cancers et des leucémies de l’Enfant et de l’adolescent) les données de toxicité et d’efficacité des thérapies innovantes administrées en accès compassionnel ou hors-AMM. Les patients concernés sont des enfants, adolescents et jeunes adultes (moins de 25 ans) en rechute d’un cancer ou en échec thérapeutique et non éligibles à un essai clinique.

SACHA permet ainsi d’encadrer et de sécuriser les prescriptions de thérapies innovantes grâce à la mise en place d’un suivi organisé, en vie réelle. Les données de pharmacovigilance générées (tolérance, événements indésirables graves, toxicité) permettent de justifier l’arrêt de certaines prescriptions individuelles lorsqu’elles sont mal tolérées et/ou inefficaces, ou de recommander l’ouverture d’un essai clinique en cas de taux de réponse effectif. En avril 2022, 340 enfants, adolescents ou jeunes adultes avaient déjà participé à l’étude et 52 médicaments ont pu être évalués.

Données d’hormonothérapie

À l’Institut Curie, l’importance des données de vie réelle a aussi été mise en lumière, au travers d’une étude des données d’hormonothérapie dans les cancers du sein.  Ces cancers, rappelle l’Institut Curie, sont hormono-dépendants dans 70 % des cas. Les cellules cancéreuses comportent en effet des récepteurs hormonaux (RH) aux œstrogènes et à la progestérone. L’hormonothérapie tient une place très importante dans leurs traitements. Parmi ces tumeurs RH+, pour celles surexprimant HER2 (des récepteurs qui favorisent la croissance des cellules cancéreuses lorsqu’ils augmentent, ndlr), la place de l’hormonothérapie est moins bien définie car les traitements anti-HER2 sont plus souvent associés à la chimiothérapie.

Les Drs Luc Cabel et Marcela Carausu ont donc effectué une analyse de données de vie réelle à partir de la base française ESME qui rassemble plus de 20 000 dossiers de cancers du sein. Leurs travaux suggèrent que l’hormonothérapie pourrait être une alternative intéressante et moins toxique à la chimiothérapie, en association avec un traitement anti-HER2. La chimiothérapie pourrait alors être différée en seconde ligne, après analyse de l’efficacité du traitement combinant hormonothérapie et traitement anti-HER2.