Accueil > Industrie > SESAM-Vitale : quels logiciels sont les plus utilisés pour la télétransmission ? SESAM-Vitale : quels logiciels sont les plus utilisés pour la télétransmission ? En janvier 2024, plus de 400 000 professionnels de santé avaient recours à SESAM-Vitale pour dématérialiser leurs feuilles de soins. mind Health a analysé les données du groupement d’intérêt économique afin d’identifier les logiciels et les éditeurs les plus courants, pour une quinzaine de professions différentes. Par Aymeric Marolleau, Coralie Baumard et Othélie Brion. Publié le 23 avril 2024 à 22h43 - Mis à jour le 24 avril 2024 à 15h17 Ressources Le 5 avril, lors du sixième comité des entreprises du numérique en santé, ont été dévoilés les chiffres du déploiement de l’appli carte Vitale. À fin février 2024, 132 633 assurés l’avaient activée et 1 361 professionnels de santé l’utilisaient. Cette carte Vitale dématérialisée sur smartphone est aujourd’hui en test dans huit départements, son déploiement à l’échelle nationale est prévu pour 2025. Tout comme la carte Vitale classique, elle permet d’accéder aux services et fonctionnalités de l’Assurance Maladie, tels que la facturation SESAM-Vitale, l’accès aux téléservices intégrés de l’assurance maladie obligatoire et, pour les pharmaciens, au dossier pharmaceutique des patients. Le groupement d’intérêt économique SESAM-Vitale est à l’initiative des travaux de l’appli carte Vitale débutés en 2015. Créé et missionné par l’Assurance Maladie en 1993, cet opérateur privé doté d’une mission de service public gère également la télétransmission, c’est-à-dire le fait, pour un professionnel de santé, d’envoyer des feuilles de soins à l’Assurance Maladie sous format électronique. Chaque mois, SESAM-Vitale partage sur son site le nombre de professionnels ayant recours à cette méthode de dématérialisation. Fin janvier, ils étaient plus de 404 000 à utiliser une solution de facturation agréée ou homologuée, répartis dans 17 professions différentes. Il y a ainsi plus de 92 000 infirmiers, 76 000 masseurs kinésithérapeutes, 52 300 médecins généralistes, etc. mind Health s’est appuyé sur ces données afin de connaître l’identité des éditeurs et les logiciels qui sont les plus utilisés en télétransmission, profession par profession. Avec toutefois une nuance : les industriels peuvent refuser la publication de leurs parts de télétransmission. Un nombre indéterminé d’entre eux ont fait ce choix. Ces “autres” logiciels sont ainsi associés à près de 30 000 des 404 000 professionnels, soit un peu plus de 7 % du total. Vega est l’outil de gestion et télétransmission le plus largement adopté En janvier 2024, les professionnels de santé avaient recours à 112 logiciels différents pour dématérialiser leurs feuilles de soins. Chacun est utilisé, en moyenne, par 3 611 professionnels. Mais certains le sont bien davantage. Vega, créé en 1993 par l’éditeur Epsilog, arrive en tête, puisque 12,6 % des professionnels l’ont adopté. Epsilog a été acquise par l’Allemand CompuGroup Medical (CGM, 1,19 milliard d’euros de CA en 2023) en 2019 pour 72 millions d’euros. La société basée à Castries, dans l’Hérault, a réalisé 19,3 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022. “Nous avons démarré notre parcours sur le marché français avec les logiciels pour médecins avec les logiciels pour médecins AxiSanté et HelloDoc, notamment. Depuis le début, nous avons en tête le parcours de soins patient dans sa globalité, c’est pourquoi nous travaillons depuis très longtemps sur la coordination et l’interopérabilité entre les différentes couches logicielles. L’acquisition de Vega nous a permis de nous ancrer dans une partie importante du parcours de soins auprès des auxiliaires médicaux, principalement kinésithérapeutes et infirmières, qui entretiennent une relation quotidienne de proximité avec leurs patients”, indique Franck Frayer, Senior Vice President Europe de CompuGroup Medical. Vega devance Medi+4000 (Cegedim, 8,4 % des professionnels) et Agathe You – E.Motion (CBA, 6,7 %). Vega équipe les professionnels de cinq spécialités différentes, dont 34 212 masseurs kinésithérapeutes (45,2 % des 75 685 qui pratiquent la télétransmission), 11 254 infirmiers (12,1 % d’entre eux), 4 636 orthophonistes (23 %), 419 orthoptistes (13 %) et 135 pédicures-podologues (1,7 %). Le logiciel qui le suit en deuxième position, Medi+4000, a une clientèle plus dispersée, puisqu’il est présent dans le cabinet de 12 professions différentes sur 17 : plus de 21 000 masseurs kinésithérapeutes (28 % d’entre eux), 4 600 orthophonistes (23 %), 2 900 infirmiers (3,1 %), etc. Il s’agit du logiciel présent chez le plus grand nombre de catégories différentes, à égalité avec Ingenius, développé par la société Saficard, mais qui n’est installé que chez 3 200 professionnels. À l’inverse, l’usage d’Agathe You – E.Motion ne repose que sur les infirmiers, qui sont 29 % à l’avoir adopté. À l’instar d’Agathe You – E.Motion, 28 logiciels ne sont présents que chez une seule catégorie de professionnels. Pour Emmanuel Bertrand, vice-président Commerce de Cegedim Santé (MEDI+4000, Simply-Vitale, Crossway, Maiia Gestion…), “il convient de distinguer deux types de logiciel. Ceux, dits “complets”, dont nos logiciels font partie, qui intègrent une brique de facturation, donc de télétransmission, mais gèrent aussi le dossier médical, la relation entre professionnels de santé via des messageries sécurisées, la posologie ou encore la prescription. À l’instar d’Intellio (édité par Orisha Healthcare France, ndlr), d’autres logiciels référencés ne font que de la télétransmission. Toute notre gamme de logiciels créée depuis un an et demi, comme Maiia Kiné, et toutes les gammes à venir s’inscriront dans cette dynamique où la gestion du cabinet, la facturation, le dossier médical mais aussi les services utiles associés comme la prise de rendez-vous en ligne ou la téléconsultation par exemple sont rassemblés et synchronisés dans une seule et même solution pour simplifier la prise en main de nos clients pros de santé.” Chaque profession utilise en moyenne 24 logiciels différents Toutes les professions utilisent plusieurs logiciels différents, 24 en moyenne, mais ils ne sont par exemple que cinq à équiper les laboratoires, contre 57 pour les médecins spécialistes et 45 chez les médecins généralistes. Certains logiciels sont particulièrement bien implantés auprès de certaines professions. Kalisil (Dedalus France) équipe ainsi 53 % des 3 500 laboratoires, Cosium Center (Cosium) 48 % des 4 500 audioprothésistes et LGPI (Equasens Interactive) 40 % des 20 600 pharmacies. Cegedim Santé, éditeur privilégié Au-delà de l’identité des logiciels, les données de SESAM-Vitale permettent de connaître le nom des sociétés qui les éditent, qui sont au nombre de 61. Si la majorité d’entre elles (62 %) ne proposent qu’un seul service, certaines en ont bien plus : sept pour Orisha Healthcare France (ex DL Software, 5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2020), neuf pour Cegedim (76 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023), et même 10 pour Sofia Développement, né en 2019 du rapprochement entre IDEA (Topaze et Télévitale) et SNAL (Albus). Si l’on tient compte de l’ensemble de leurs solutions, Cegedim équipe 15,5 % des professionnels, devant Epsilog (CompuGroup Medical) avec le seul Vega (12,5 %), et Sofia Développement (8,9 %). Emmanuel Bertrand confirme que cette multiplication des solutions découle d’une vision stratégique : “L’orientation de Cegedim Santé a toujours été de développer des solutions propres à chaque métier. Elles sont toutes différentes parce qu’un kiné, une infirmière ou un médecin n’exerce pas de la même manière.” Emmanuel Bertrand, vice-président Commerce de Cegedim Santé La pluralité des logiciels proposés par Cegedim résulte également de la politique d’acquisition de l’éditeur. Sur le segment des logiciels médecin, il a ainsi acquis Mediclick en 1993, Crossway en 2003 et Médimust en 2021, auxquels s’ajoute notamment MLM (Mon Logiciel Médical), sa solution 100% web. “Cegedim Santé et Doctolib sontles principaux éditeurs du 100% web chez les médecins”, précise-t-il. Avec sa solution 100 % web Maiia Kiné, lancée en 2023, le groupe français a également inauguré un nouveau modèle économique. “Historiquement, les abonnements pour les cabinets de kinés étaient facturés à la structure et non pas par poste utilisateur. Avec Maiia Kiné, nous avons été les premiers à porter un modèle à l’utilisateur avec l’engagement d’une solution tout-en-un, évolutive et proche de leurs attentes. Aujourd’hui, nous avons plus de 5000 clients. Doctolib nous a ensuite suivi sur un modèle économique similaire. C’est une vraie tendance de marché”, souligne Emmanuel Bertrand. À horizon dix ou quinze ans, Cegedim Santé estime que la solution comptera près de 30 000 télétransmetteurs. À terme, l’éditeur espère cependant restreindre le nombre de ses solutions en raison de l’investissement que cela représente. “Nous sommes sur un marché de grande fidélité. Certains clients sont chez nous depuis 20 ans ou 30 ans et ce n’est pas facile pour eux de changer de logiciel. La moyenne d’âge des médecins dépasse aujourd’hui 55 ans. Certains d’entre eux redoutent de perdre des données patients en basculant sur le web. L’arrêt naturel de nos logiciels on premice (hebergé sur un serveur interne, ndlr) se fera dès lors que la plupart de ses clients sur ces logiciels seront partis à la retraite. Nous faisons partie de ces éditeurs qui doivent continuer à maintenir, travailler, enrichir beaucoup de logiciels et nous avons pour cela des équipes de développement dédiées conséquentes.” Cegedim indique avoir une équipe de près de 200 collaborateurs produit/tech. Les nouveaux enjeux des éditeurs Si Cegedim opte pour les logiciels 100 % web afin de moderniser son offre, Vega s’apprête, de son côté, à lancer une application mobile afin de mieux répondre aux attentes des professionnels de santé. “Historiquement, c’était un logiciel client lourd (installé en local, ndlr). Nous allons lancer à la fin de l’année une nouvelle version, qui prendra la forme d’une application mobile 100 % cloud afin que les professionnels aient leur cabinet à portée de main. Nous allons commencer par la proposer aux infirmières, puis nous la déclinerons pour les autres professions, notamment les kinés”, annonce Franck Frayer. Franck Frayer, Senior Vice President Europe de CompuGroup Medical L’éditeur compte également tirer parti du Ségur pour étendre le périmètre de son logiciel. “La vague 1 pour les paramédicaux, concomitante avec la vague 2 des médecins, va apporter beaucoup de services supplémentaires comme le dossier médical partagé (DMP) et la messagerie sécurisée de santé (MSSanté). En rendant le périmètre fonctionnel presque équivalents à celui des logiciels médecins, les paramédicaux vont probablement finir par avoir besoin de logiciels d’aide à la prescription comme les médecins. Les infirmières en pratiques avancées sont notamment concernées”, souligne le Senior Vice President Europe de CompuGroup Medical. En mai 2023, la société a noué un partenariat avec la start-up Synapse Medicine qui développe une solution d’aide à la prescription médicamenteuse assistée par l’IA. Vague 1 du Ségur du numérique : quel bilan pour les éditeurs ? Cegedim a profité du Ségur pour renforcer l’interopérabilité. “Toutes nos solutions pour les médecins sont conformes aux attendus du Ségur et nous travaillons déjà sur les prochains couloirs qui concerneront notamment les paramédicaux. L’enjeu, c’est de faire voyager les données, pas les patients et d’apporter les outils nécessaires aux professionnels de santé pour faciliter les parcours de soins coordonnés” indique Emmanuel Bertrand. Un axe d’autant plus important que le marché se concentre aujourd’hui sur les maisons de santé pluridisciplinaire, les centres de santé et les communautés professionnelles territoriales de santé, selon Franck Frayer. “La problématique va donc être de gérer tous les échanges entre professionnels de santé de manière à assurer la coordination et une permanence des soins. Cette permanence des soins va reposer sur la capacité des professionnels à être en contact avec leurs patients avant, pendant et après le soin. Pour cela, nous allons par exemple équiper les professionnels de système de collecte de documents au moment de la prise de rendez-vous. En Allemagne, les patients remplissent des questionnaires sur leur logiciel de prise de rendez-vous, cela peut être systématisé en France pour aider les médecins. Plusieurs acteurs ont aujourd’hui la capacité de le faire”, estime-t-il. La mise en place de systèmes de communication entre le patient et le professionnel par tchat ou SMS pour assurer une permanence des soins et la téléexpertise sont également des pistes explorées. Autre sujet d’attention des éditeurs, l’intelligence artificielle, qui promet de faire évoluer fortement les logiciels. “Ils vont intégrer très vite beaucoup de services pour aider les professionnels de santé dans la documentation du dossier patient et la codification. Ce n’est pas encore tout à fait au point, mais cela va l’être et rendre le dossier patient plus intelligent et interopérable. Nous ambitionnons d’avoir des logiciels qui favorisent une expérience utilisateur sans couture, cela nécessite une intégration fine et donc de réaliser nous-mêmes ces services en ayant recours à l’intelligence artificielle plutôt sur les couches basses. Il y a aujourd’hui un compromis à trouver entre le partenariat et les réalisations propres, c’est une vraie discussion chez les éditeurs de logiciel car les réalisations propres sont de plus en plus simples avec l’amélioration de la pertinence des modèles généralistes”, juge Franck Frayer. Concernant la télétransmission, Emmanuel Bertrand considère que le véritable enjeu des éditeurs est de gérer la fracture générationnelle. “Nous devons continuer à répondre aux attentes de nos clients historiques. Mais l’arrivée sur le marché des jeunes médecins et l’intégration dans les formations de modules dédiés au numérique en santé vont provoquer un changement qui va s’amplifier dans les dix prochaines années”. Explorez les données de SESAM-Vitale Qui sont les professionnels de santé qui pratiquent la télétransmission ? En janvier 2024, les infirmiers représentaient 23 % des praticiens qui dématérialisent leurs feuilles de soins. C’est la part la plus importante, devant les masseurs-kinésithérapeutes (18,7 %) et les médecins spécialistes (15,3 %). A contrario, les professionnels de l’appareillage représentent seulement 0,2 % des professionnels qui pratiquent la télétransmission. Toutes les catégories de professionnels de santé n’ont pas adopté la télétransmission dans les mêmes proportions. Ainsi, les 21 000 pharmacies ne représentent certes que 3,5 % des professionnels de santé français, mais c’est la spécialité médicale qui y a le plus recours, puisque 98,2 % d’entre elles acceptent la carte vitale. Au contraire, les 112 000 médecins spécialistes français ne sont que 55 % à être équipés d’un terminal dédié. Méthodologie Chaque mois, SESAM-Vitale met à jour sur son site internet un tableau où figurent le nombre de professionnels de santé faisant de la télétransmission SESAM-Vitale avec une solution de facturation agréée ou homologuée SESAM-Vitale. Outre le nom des logiciels, le nom de leurs éditeurs est également précisé. Il y a toutefois une limite : les industriels peuvent refuser la publication de leurs parts de télétransmission. Un nombre indéterminé d’entre eux ont fait ce choix. Ces “autres” logiciels sont ainsi associés à près de 30 000 des 404 000 professionnels, soit un peu plus de 7 % du total. Contacté SESAM-Vitale n’a pas répondu à nos sollicitations. Fin mars 2024, mind Health a récupéré les dernières données disponibles, correspondant à janvier 2024. Aymeric Marolleau, Coralie Baumard et Othélie Brion Application mobileéditeurLogicielmédecinStratégie Besoin d’informations complémentaires ? 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