Tout comprendre à la chute de Silicon Valley Bank

La banque coqueluche des pépites tech de la Silicon Valley a sombré en moins de 48 heures, asphyxiée par une panique bancaire qui a poussé ses clients à retirer leur argent en masse. Retour sur une crise en 4 actes.

Fondée en 1983, SVB était devenu un acteur incontournable du financement des sociétés technologiques aux Etats-Unis et en Europe. Avec 209 milliards de dollars d’actifs consolidés à fin 2022, elle était la 16ème banque commerciale des États-Unis. Quarante ans plus tard, la banque a été brusquement fermée par les régulateurs américains.

Acte 1 : un afflux de liquidités pendant le Covid

Au cours de la pandémie du Covid-19, la banque a enregistré un afflux de liquidités. Les dépôts sont passés de 60 milliards de dollars à la fin du premier trimestre 2020 à près de 200 milliards de dollars au terme du premier trimestre 2022. Sa maison-mère SVB Financial a employé ces ressources excédentaires pour acheter plusieurs dizaines de milliards de dollars de créances titrisées de maturité longue garanties par l’État. Des titres que l’établissement a catégorisés en “détenus jusqu’à échéance”. Cette manœuvre lui a permis de ne pas matérialiser comptablement les variations de valeur des titres, ce qui aurait alerté sur le risque encouru.

Acte 2 : un effet ciseau entre la remonté des taux et de forts retraits

Mais la forte remontée des taux directeurs américains, qui sont passés de 0,25 % à 4,375 % en 2022, a fait chuter la valeur de ces instruments financiers. À la fin de l’année 2022, SVB enregistrait plus de 17 milliards de dollars de pertes latentes sur ce portefeuille, soit davantage que les fonds propres. Dans le même temps, SVB a assisté à des retraits de dépôts croissants, alors que ses clients devaient affronter des conditions de financement nettement plus difficiles. Les retraits ont été supérieurs aux dépôts chaque trimestre depuis début 2022. Fin février 2023, les dépôts sont ainsi retombés à 169 milliards de dollars.

Acte 3 : en quête de liquidités

Pour honorer les retraits, la banque a dû se résoudre à se délester de titres, ce qui a précipité sa chute. Le 8 mars, elle a annoncé la cession de 21 milliards de dollars de titres “disponibles à la vente”. Une opération qui s’est soldée par une perte nette de 1,8 milliard de dollars. Pour se remettre sur de nouveaux rails, SVB devait lever des fonds. L’établissement a lancé une augmentation de capital de 2,25 milliards de dollars, dont 500 millions sécurisés auprès de General Atlantic. Mais cette annonce n’a fait que jeter une lumière crue sur les failles béantes dans l’édifice SVB. La levée de fonds a tourné court et plusieurs sociétés de capital-risque ont appelé leurs participations à retirer leurs fonds. 

Acte 4 : un « bank run » fatal

Un mouvement de panique bancaire a gagné le marché : sur la seule journée du 9 mars, les déposants ont essayé de retirer 42 milliards de dollars, soit le quart des dépôts totaux. Le 10 mars, les régulateurs ont ordonné la fermeture de SVB. Afin de “protéger l’économie américaine en renforçant la confiance du public dans notre système bancaire”. Ils ont par ailleurs pris une mesure exceptionnelle : les déposants peuvent tous accéder à leurs fonds, qu’ils soient garantis ou non. Par ailleurs, la Fed a annoncé une ligne de crédit de 25 milliards de dollars afin de soutenir la liquidité d’autres établissements le cas échéant et d’éviter un phénomène de contagion.

>> Pour aller plus loin, lire l’analyse d’Antoine Duroyon, rédacteur en chef de mind Fintech : La chute de Silicon Valley Bank ouvre des opportunités aux fintech.