Accueil > Adtechs & Martechs > IA générative : le secteur adtech amorce des premiers cas d’usage IA générative : le secteur adtech amorce des premiers cas d’usage Les acteurs de la publicité programmatique ayant déjà une activité dans la création publicitaire se sont très vite positionnés sur ces nouveaux outils, tandis que les sociétés adtechs traditionnelles plus ancrées dans l’optimisation de la performance programmatique commencent à explorer des cas d’usage. Par Paul Roy. Publié le 22 septembre 2023 à 18h06 - Mis à jour le 22 septembre 2023 à 18h07 Ressources Très rapidement après la mise à disposition du grand public des premières solutions, les agences, les marques, puis les médias se sont lancés dans la course à l’IA générative, enclenchant des partenariats avec des fournisseurs d’intelligence artificielle, à l’image de Dentsu et WPP chez les agences, de nombreux cabinets de conseil ou encore de marques comme Coca-Cola avec OpenAI. Google, Microsoft et Meta qui possèdent leurs propres modèles d’IA générative diffusent progressivement ces outils à l’ensemble de leurs environnements et offres. Leurs concurrents sur le marché publicitaire programmatique – qui ont depuis longtemps intégré des modèles d’analyse sémantique et d’IA décisionnelle dans leurs produits – semblent adopter une démarche plus prudente. Jeff Katzin (Bain & Company) : Intelligence artificielle générative : “Seules les applications qui permettent à l’entreprise de se différencier vaudront la peine d’être explorées” De premiers outils déjà lancés pour assister la création Taboola a été l’un des premiers acteurs à lancer un outil mis sur le marché dès juillet 2023. Le dispositif repose sur ChatGPT et Stable Diffusion et permet aux annonceurs qui utilisent la plateforme en self service – représentant un tiers des revenus générés par Taboola – de rapidement générer des suggestions de contenus (titre, description et image) en indiquant le type d’audience visée et la proposition de valeur de la société. “Nous testons actuellement un autre produit pour travailler sur ce qui est vu après le clic de l’utilisateur, à savoir la landing page’’, explique Adam Singolda, CEO de Taboola, qui développe également une suite d’outils d’assistance à la création basés sur l’IA générative pour les éditeurs. John Cosley (Microsoft Advertising) : “Nous voulons innover pour les consommateurs, les annonceurs et les éditeurs” Chez Teads, si plusieurs projets sont en cours sur la partie branding – notamment sur la facilitation de la création de formats 3D à partir d’actifs publicitaires -, Rémi Cackel, chief product officer de la société, identifie davantage d’applications pour les formats à la performance, sur lesquels les annonceurs sont bien plus flexibles. “Sur la partie textuelle du call-to-action on peut générer, combiner et tester des milliers de possibilités, en configurant ou interdisant certains mots”, illustre-t-il. Concernant la génération d’image, il insiste sur la nécessité de donner du contrôle à l’annonceur, en alimentant l’IA d’actifs créatifs existants qu’elle peut modifier, et cela pour lui fixer un “cadre” de création. Pour ce deuxième cas d’usage, la société indique avoir mené de premiers tests avec un fabricant de téléviseurs. La société se veut prudente sur l’intégration de ces fonctionnalités dans sa plateforme en libre service. “Nous allons rapidement lancer les possibilités de génération de texte en self-service. Concernant les variations d’image à partir d’actifs créatifs, nous prévoyons de les lancer sur la plateforme d’ici la fin de l’année ou le début d’année prochaine. Et pour la création d’image en partant de zéro, nous voulons le conserver en managed services pour le moment”, détaille Rémi Cackel (Teads). Pour le marché programmatique, décomplexifier et gagner en efficacité Les acteurs du marché programmatique, davantage concentrés sur l’optimisation de la performance des acheteurs et la monétisation des éditeurs, sont moins avancés. Plusieurs pistes émergent néanmoins, notamment sur la capacité à simplifier certaines tâches chronophages dans un environnement complexe, mais aussi pour améliorer l’efficacité. Interrogé en juin lors des Cannes Lions, Andrew Casale, CEO d’Index Exchange, expliquait que son entreprise travaillait sur l’amélioration du processus de catégorisation des enchères (bids) envoyées. “Aujourd’hui, chaque nouvelle création diffusée sur l’open auction est examinée par un humain et taxonomisée, ce qui est chronophage et crée un délai entre l’arrivée de l’offre et la possibilité de l’emporter. L’IA générative pourra accélérer le processus, qui sera toujours piloté par des humains”, expliquait-il. “Grâce à ces données, nous sommes en mesure de retracer les préconisations efficaces pour certains clients et en produire de nouvelles” Liva Ralaivola (Criteo) Equativ a lui aussi identifié plusieurs cas d’usages très liés à la complexité de son activité programmatique, à l’issue d’un hackathon interne mené il y a quelques semaines. D’abord, par la création d’un assistant qui permettrait d’accéder facilement et rapidement à la documentation nécessaire pour une intégration, les modes de configuration d’API, le fichier ads.txt de la société, etc. La société étudie également la manière dont l’IA pourrait transformer l’expérience utilisateur dans sa plateforme. “L’idée serait de fournir à l’IA un brief, des audiences, les objectifs à atteindre, pour qu’elle puisse à terme fournir des recommandations aux Adops”, explique Emilie Brulebeaux, head of publisher sales d’Equativ. Deux projets qui en sont encore à leurs prémices. Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Cette seconde application est également explorée par Criteo, qui a mobilisé une trentaine des 120 personnes composant son laboratoire d’IA sur l’apprentissage et les potentielles mises en production autour de l’IA générative. “Il y a une opportunité à se baser sur notre expérience des campagnes qui ont fonctionné. Grâce à ces données, nous sommes en mesure de retracer des préconisations efficaces pour certains clients et d’en produire de nouvelles. Notre principale problématique est que les données alimentant le modèle ne sont pas des textes ou des images, mais des indicateurs complexes de campagne”, constate Liva Ralaivola, VP research de Criteo, qui évoque également plusieurs pistes de recherche sur la description et les titres produits pour les publicités retail et commerce média. Criteo devrait officialiser le lancement de produits basés sur l’IA générative dans les prochains mois. Un nouveau risque de dépendance envers des acteurs concurrents ? La prudence du marché adtech pourrait s’expliquer par le besoin de prendre des précautions supplémentaires avant de se lancer dans l’adoption de modèles de fondation développés par des acteurs directement concurrents sur le marché publicitaire (Microsoft avec ChatGPT ou Google avec Bard). Un point sur lequel les acteurs se veulent rassurants, cette problématique étant prise en compte depuis un certain temps, du fait même de la structure du marché publicitaire. “Nous sommes dans un écosystème où la frontière entre partenaire et concurrent est mince”, rappelle Rémi Cackel de Teads, qui n’alimente pas les modèles avec des actifs créatifs provenant de ses annonceurs. “C’est au cœur de nos problématiques légales et l’ensemble de la chaîne publicitaire est concerné. À notre niveau, lorsque l’annonceur nous confie les actifs d’une campagne pas encore diffusée, nous approvisionnons les modèles destinés à enrichir et adapter ces créations avec des données de contexte de diffusion ou provenant du site de l’annonceur, qui sont par essence publiques”, explique-t-il. “Notre différenciation ne dépend pas du fait que nous ayons créé et développé un modèle en propre, mais de la donnée dont nous disposons pour l’alimenter” Adam Singolda (Taboola) Pour limiter ce risque, Criteo se base à la fois sur ses propres modèles, sur des modèles basés sur des dispositifs open-source, et sur les solutions de partenaires externes comme OpenAI et Google Cloud platform pour le prototypage de solutions, ce “qui réduit les coûts de maintenance, mais limite l’adaptabilité”, constate Liva Ralaivola. “En phase de prototypage, nous n’utilisons pas de données de production. Ces partenaires sont conscients qu’il y a une encapsulation de leur cloud et de leur service, et ils s’engagent aussi à fournir un environnement sécurisé auquel ils n’ont pas accès. Cela nous amène en tout cas à repenser notre gouvernance des données”, ajoute-t-il. Dans un secteur ultra-concurrentiel en dehors des quelques acteurs qui se partagent 80 % du chiffre d’affaires du secteur de la publicité en ligne, la différenciation sera clé. Mais elle sera d’autant plus difficile que ces sociétés construisent peu ou prou les mêmes infrastructures avec des solutions externes. “Pour une entreprise comme Taboola, comme c’était le cas avant pour l’IA décisionnelle, notre différenciation ne dépend pas du fait que nous ayons créé et développé un modèle en propre, mais de la donnée dont nous disposons pour l’alimenter”, résume Adam Singolda (Taboola). Plus largement, les entreprises adtech devront s’adapter à un bouleversement du marché induit par la généralisation de l’usage aux intelligence générative, notamment dans le search. “Toute l’économie du search est construite autour des mots clés et des liens sponsorisés. Avec la généralisation du LLM, la réponse sera d’une autre qualité, et l’information donnée à l’utilisateur ne passera plus uniquement par les liens”, anticipe Liva Ralaivola (Criteo). Quels risques à la généralisation de l’usage de l’IA générative dans l’adtech ? Nous avons identifié quatre risques éthiques, juridiques, légaux et économiques à la suite de nos échanges avec les acteurs du marché adtech : Le contenu inapproprié ou illégal : ces technologies ont besoin d’être encadrées pour créer un contenu respectueux de la marque, de l’utilisateur, du site de l’éditeur et du cadre réglementaire. La protection de la propriété intellectuelle : qu’il s’agisse de données ou d’actifs créatifs fournis par l’annonceur, de l’historique de campagnes d’une adtech, ou du contenu d’un éditeur, elle doit être encadrée dès le lancement d’un projet. L’empreinte environnementale : pour un marché adtech qui tente depuis plusieurs mois d’entrer dans la transition écologique, la consommation d’énergie engendrée par ces modèles est à prendre en compte. La distinction entre les contenus produits par les humains et par l’IA : la prolifération de sites MFA (made for advertising) devrait encore s’accentuer, et il sera essentiel de les distinguer. En ce sens, l’une des propositions d’Andrew Casale (Index Exchange) est qu’une norme RTB puisse permettre d’indiquer à l’acheteur si un contenu a été créé par un humain ou une IA. Paul Roy AdtechDSPIntelligence artificielleSSP Besoin d’informations complémentaires ? 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