[Info mind Media] IA générative : une douzaine de médias membres de l’APIG sont partenaires du projet Spinoza de RSF

L’émergence des technologies d’intelligence artificielle générative a poussé RSF a se pencher sur leur impact sur le journalisme depuis plus d’un an. “Il s’agit d’un travail de documentation et de réflexion sur les perturbations que le déploiement de ce type de dispositif peut amener, et qui a notamment débouché sur la charte éthique publiée il y a quelques semaines”, explique Vincent Berthier, responsable du desk technologie de Reporters sans frontières. Sur le plan opérationnel, les réflexions ont pris la forme du projet Spinoza, une initiative développée en partenariat avec l’APIG, qui vise à développer des outils basés sur l’IA en consortium et pour servir “un journalisme de confiance”.

En première ligne des problématiques identifiées, la souveraineté des médias face aux fournisseurs de ces nouvelles technologies, rappelle Vincent Berthier : “Le projet Spinoza vient d’une analyse industrielle : les médias, pour atteindre leur public, sont déjà dépendants des algorithmes des grandes plateformes. Avec l’arrivée de l’IA générative, RSF estime qu’il y a un risque de dépendance technologique pour la production de contenus. Le but est de tirer bénéfice d’un écosystème open source pour réunir les médias et les amener à développer des outils qui répondent à une forme de souveraineté”.

Une douzaine de médias partenaires 

Le premier outil développé dans le cadre du projet Spinoza sera un assistant requêtable en langage naturel avec une interface conversationnelle. “L’utilisateur peut adresser une demande et obtenir une synthèse détaillée et sourcée des informations trouvées par l’outil dans les différentes bases de données connectées, qu’il aura préalablement sélectionnées”, détaille Vincent Berthier, qui insiste sur un fondamental de l’outil : sourcer et rediriger vers le contenu original. Un prototype qui traitera du changement climatique sera délivré en fin d’année 2023. Il s’appuiera sur des bases de données de productions scientifiques, de textes de lois ainsi que d’articles de presse fournis par des médias volontaires, “qui choisiront quelles données et de quelle manière elles seront mises à disposition ; sans créer un flux de données non maîtrisé”, explique Vincent Berthier. 

Ces médias sont au nombre de 12 pour le moment : les éditeurs nationaux L’Équipe et Libération, trois médias de presse hebdomadaire régionale (Actu.fr, Sogemedia et PMSO) ainsi que sept médias de PQR (groupe Ebra, La Provence, Le Télégramme, L’Union, Nice Matin, Nouvelle République, Sud Ouest), tous membres de l’APIG. Par l’intermédiaire de représentants journalistes et de quelques responsables numériques, ils participent aux groupes de travail et testeront le prototype. 

Choisir un grand modèle de langage open source

Pour le développement technique de l’outil, RSF et l’APIG ont choisi la société française spécialisée dans la data science Ekimetrics, pourtant plus spécialisée dans le marketing que dans les problématiques médias. RSF justifie son choix par le fait qu’Ekimetrics a déjà développé un dispositif similaire, Climate Q&A, une IA conversationnelle open source qui permet d’obtenir des réponses synthétiques à partir d’une base de données des rapports du GIEC.

L’un des prérequis du projet est de se baser sur un LLM open source, et plusieurs, tels que Falcon et Mistral, sont expérimentés, sans qu’une décision définitive n’ait été prise sur ce point. Vincent Berthier rappelle d’ailleurs que le choix de l’open source implique des coûts d’hébergement supérieurs, le principal centre de coûts du dispositif, en plus de la prestation d’Ekimetrics. Côté financement, Spinoza a vocation à se baser sur des appels à contribution via des fonds publics. Sur ce point, plusieurs décisions sont attendues, notamment de la part du Fonds de soutien à l’émergence et à l’innovation dans la presse du ministère de la Culture.

À la suite de la livraison du prototype, le principal enjeu sera de mobiliser une base d’utilisateurs qualifiés parmi les médias volontaires pour contribuer à l’amélioration du modèle dans l’année et développer l’outil.