Accueil > Médias & Audiovisuel > Abonnements en ligne > Les stratégies des éditeurs d’information pour fidéliser leurs abonnés en ligne Les stratégies des éditeurs d’information pour fidéliser leurs abonnés en ligne Avec le développement des stratégies tournées vers l’acquisition de nouveaux abonnés, la fidélisation devient une question centrale pour les éditeurs qui ont poussé des offres payantes en ligne. mind Media a interrogé Courrier International, Les Echos-Le Parisien et Infopro Digital sur les stratégies mises en place et leurs résultats. Par Paul Roy. Publié le 03 juillet 2019 à 19h04 - Mis à jour le 03 juillet 2019 à 19h04 Ressources Ces dernières années, les éditeurs, pour trouver des sources de revenus complémentaires, ont largement développé les modèles par abonnement. Ainsi, selon notre étude sur les offres payantes des médias en ligne publiée en février, le nombre d’abonnés de la vingtaine d’éditeurs français étudiés est passé de 617 000 à 880 000, soit un gain de 263 000 abonnés (+ 42 %). Mais depuis peu, les éditeurs matures sur le sujet, une fois leurs objectifs d’acquisition abonnés atteints, se concentrent sur une nouvelle problématique : la fidélisation des abonnés. Cette année, trois projets “larges” (entre 300 000 euros et 1 million d’euros) ont reçu un accord de subvention par le fonds Google DNI (retrouvez notre tableau comparatif des projets financés par le Google DNI depuis 2016) pour répondre à des problématiques de fidélisation. La diminution du churn, souvent beaucoup plus élevé que pour les abonnements papier, devient en effet un enjeu important pour les éditeurs qui ont mis en place une offre payante. Ce levier est d’ailleurs beaucoup moins coûteux et plus efficace que l’acquisition. “Il est 5 à 7 fois moins cher de retenir un abonné que de l’acquérir, (publicité sponsorisée, mailing papier, prospection commerciale, etc.)”, souligne Violette Chomier, directrice data du groupe les Echos le Parisien. Nous sommes directement en concurrence avec des services qui ont plus de moyens et ont imposé les nouveaux standards de l’expérience utilisateur Violette Chomier Directrice data Groupe Les Echos-Le Parisien Les raisons pour expliquer le fort taux d’attrition sur les abonnements numériques sont diverses. Selon Arnaud Aubron, président de Courrier International, ce phénomène est tant lié au support numérique et à son immatérialité qu’au manque de lisibilité de l’offre proposée pour les lecteurs. “À l’inverse d’un magazine papier, il n’y a pas de valeur perçue pour un abonné numérique, qui n’a souvent pas conscience des services auxquels il a accès”, observe-t-il. Une enquête auprès des abonnés de Courrier International avait en effet montré que ceux qui utilisent seulement deux services sont 41 % à vouloir renouveler leur abonnement, quand ce taux monte à 67 % pour ceux qui utilisent quatre. Par ailleurs, la “subscription fatigue” soulignée par une étude de Deloitte sur les médias numériques, est une autre raison avancée par les dirigeants de médias : “Bien avant les éditeurs, beaucoup d’acteurs en ligne se sont positionnés sur un modèle d’abonnement, nous sommes donc directement en concurrence avec des services qui ont plus de moyens et de données et ont imposé les nouveaux standards de l’expérience utilisateur”, souligne Violette Chomier. Une récente étude de Reuters indique ainsi que la proportion d’internautes disposés à payer pour s’informer en ligne stagne à 11 % depuis six ans. De l’étude du comportement utilisateur à l’activation de la donnée Pour tous les éditeurs, l’étude du comportement utilisateur est la première étape pour activer des leviers d’acquisition. Le Wall Street Journal a ainsi construit sa stratégie de fidélisation en identifiant de nouveaux facteurs clés comme la fidélité à un journaliste, à une section, ou à un contenu récurrent et les fonctionnalités interactives. Nous nous appuyons sur l’analyse de nos data et notamment notre DMP, pour nous assurer que notre offre est adressée aux bonnes personnes mais aussi que les abonnés ont connaissance de l’ensemble des services auxquels ils ont accès. Isabelle André directrice générale déléguée, Infopro Digital D’autres, comme le groupe les Echos-Le Parisien, font le choix d’aller plus loin dans la démarche, en affectant des moyens humains et techniques pour l’automatisation de l’activation des leviers éditoriaux et marketing de fidélisation des abonnés. Le projet, financé par Google DNI, transversal à l’ensemble du groupe et porté par les directions marketing et numérique, vise d’abord à collecter et analyser les données utilisateurs CRM (âge, sexe, localité), le temps passé, le nombre de visites, le nombre d’appareils, leurs interactions avec les newsletters. Cette première étape passée, l’idée est d’établir des modèles prédictifs sur le comportement des abonnés via ces données en mobilisant directement des compétences data scientists en interne. Une fois les profils types identifiés, l’éditeur pourra alors activer différents leviers à la fois marketing et éditoriaux. “Cela nous permettra de tester différentes combinaisons de contenus, promotions tarifaires et fonctionnalités selon le comportement de nos abonnés”, explique Violette Chomier (Les Echos-Le Parisien). Si le projet est toujours en cours d’élaboratotion, le groupe a pour objectif que les abonnements représentent 50 % du chiffre d’affaires des marques médias. Le groupe d’information professionnelle Infopro Digital, dont les abonnements représentent 50 % du revenu des marques médias (30 % à 70 % selon les marques), axe aussi sa stratégie de fidélisation sur la data, en la couplant avec des études qualitatives sur ses abonnés : “Nous nous appuyons sur l’analyse de nos data et notamment notre DMP, pour nous assurer que notre offre est adressée aux bonnes personnes mais aussi que les abonnés ont connaissance de l’ensemble des services auxquels ils ont accès.”, souligne Isabelle André, directrice générale déléguée d’Infopro Digital. L’éditeur revendique ainsi des taux de réabonnement entre 80 % et 100 % selon les titres. Un bon chiffre propre à la presse BtoB. Mettre l’ensemble des compétences au coeur de la stratégie Ces dispositifs impliquent des compétences variées, qu’il est parfois difficile de faire collaborer ensemble. Infopro Digital, dont les compétences techniques sont toutes intégrées – 400 développeurs et ingénieurs data – a aussi une équipe dédiée aux abonnements qui travaille sur l’ensemble des marques média pour la France, tant pour le recrutement d’abonnés que pour leur fidélisation. “Actuellement, l’équipe marketing abonnement travaille notamment sur la personnalisation, et les politiques d’onboarding. Elle les conçoit, les implémente les fait évoluer en travaillant avec les équipes numériques” explique Isabelle André. Le groupe les Echos-le Parisien s’appuie pour sa part sur une équipe data de douze personnes, créée initialement pour optimiser l’activité de la régie, mais qui s’est peu à peu saisie de sujets côté éditeurs. “Une partie de l’équipe travaille sur la web analyse, l’autre sur le CRM qui gère la base de données clients et une pôle de datascientists dont deux travaillent sur les problématiques de rétention”, détaille Violette Chomier. Personnalisation, interaction et expérience utilisateur La personnalisation et l’enrichissement du contenu pour les abonnés est une autre brique de la stratégie de fidélisation des abonnés, à l’image de ce que peuvent proposer les plateformes SVOD. A titre d’illustration, comme le rapportait récemment Business Insider, le New York Times, le titre qui compte le plus d’abonnés en ligne, a créé un onglet de personnalisation du contenu sur son application, qui sert à la fois des objectifs d’acquisition et de fidélisation des lecteurs. L’éditeur avait également travaillé sur l’implémentation de fonctionnalités interactives dans ce sens. Bien que la plupart des éditeurs semblent vouloir mieux personnaliser leur contenu, Arnaud Aubron (Courrier International) reste plus mesuré et rappelle ce qu’il estime être le rôle de son titre : “Le but est avant tout de renforcer notre rôle de curateur de contenus. Nous ne croyons pas en une personnalisation massive du site ; cependant des recommandations basées sur du déclaratif ou du comportement sont pertinentes”. Dans son étude, le WSJ soulignait l’importance de l’interaction et des fonctionnalités annexes pour fidéliser ses abonnés. Pour un groupe d’information professionnelle et d’aide à la décision, la création de nouveaux contenus, outils, indicateurs, est souvent l’axe privilégié. Infopro Digital dispose de bases de données sur l’ensemble des secteurs que le groupe traite (assurances, politiques locales, santé, innovation dans l’industrie) qu’elle utilise pour offrir de nouveaux services à ses abonnés. “Nous enrichissons en permanence nos offres destinées à nos abonnés. Par exemple, les élus et directions générales des collectivités locales ont désormais accès à des indicateurs démographiques sur la Gazettedescommunes.com, les décideurs de la construction à une information locale, accessible directement depuis la page d’accueil du Moniteur”, explique Isabelle André. Les abonnés aux titres d’Infopro Digital ont également accès à des plateformes servicielles par secteur leur offrant l’accès à des appels d’offres, des modules sur des sujets juridiques, etc. Une adaptation de l’accès aux offres Enfin, la plupart des éditeurs soulignent une nécessaire adaptation des offres tarifaires aux abonnés. C’est le choix qu’a fait le Monde, dont l’ambition est de renforcer la relation client avec les abonnés numériques en agissant sur deux leviers. D’abord éditorial, avec un enrichissement de l’offre via le développement de nouvelles thématiques médias et de services (par exemple des verticales médias très ciblées, des jeux, du coaching, la gestion de patrimoine…), et ensuite marketing et commercial, via une refonte des offres tarifaires : Le Monde veut être beaucoup plus granulaire dans ses offres. Alors que ses offres numériques sont actuellement à 8,50 euros par mois pour les étudiants et à 17,90 euros pour les autres, le journal travaille sur la mise en place d’abonnements intermédiaires. Plus récemment, Le Figaro a annoncé l’enrichissement des contenus proposés dans ses abonnements en ligne et leur segmentation tarifaire. Le titre passe d’un prix unique de 9,90 euros par mois à trois formules : l’offre Access demeure à 9,90 euros avec ’accès aux contenus payants et aux six newsletters pour un internaute. Une nouvelle offre Premium est créée (14,90 euros) pour trois internautes, dans laquelle sont inclus le PDF du journal et ses magazines, ainsi qu’une nouvelle application Figaro Jeux (mots croisés) – également souscriptible séparément (4,99 euros). Une troisième offre est créée, Premium+ (19,90 euros), pour cinq internautes et comprend les hors-séries. Paul Roy Abonnements numériquesModèles économiquesPresse magazine Besoin d’informations complémentaires ? 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