Accueil > Marques & Agences > Achat média > Timothée Gazeau (Volkswagen) : “Les agences doivent progresser sur le retour sur investissement apporté au client” Timothée Gazeau (Volkswagen) : “Les agences doivent progresser sur le retour sur investissement apporté au client” Quelle place accordée au programmatique dans les stratégies médias ? Qui prend le lead des campagnes entre l’agence créative et l’agence média ? Sur quels aspects les agences doivent-elles progresser ? Un annonceur doit-il intégrer de nouvelles compétences numériques ? Alors que le groupe Omnicom a remporté la rationalisation du budget créatif et média de Volkswagen dans le monde entier à partir du 1er janvier 2017 (aux dépens de Mediacom / WPP), Timothée Gazeau, chef du service communication marketing de Volkswagen France, livre son point de vue sur ces questions pour mind. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 18 novembre 2016 à 22h14 - Mis à jour le 18 novembre 2016 à 22h14 Ressources Quelles sont vos responsabilités en tant que chef de communication marketing de Volkswagen France ? Notre mission est de définir la stratégie des moyens de communication pour générer de la préférence de marque tout au long du parcours d’achat, à court et long terme, en ciblant le plus possible les intentionnistes, en liaison avec la maison mère en Allemagne et les départements marketing avant et après-vente de Volkswagen France. J’encadre une dizaine de personnes de manière directe – 60 au total en ajoutant les collaborateurs mis à notre disposition au sein de nos agences médias et publicitaires – et je reporte au directeur marketing France, Ghislain Lafitte. Mon périmètre concerne les contenus sur tous les supports de communication, l’achat d’espace on et offline, le CRM, les réseaux sociaux, le marketing digital, la communication des réseaux concessionnaires, et le sponsoring. Comment votre service est-il organisé ? Notre marque est en pleine transformation, ce qui a des effets sur notre organisation. Le service est en passe d’être réorganisé en trois grands pôles : les contenus cross-canaux (pour mettre fin aux silos traditionnels entre CRM, social media, digital, etc.), les chefs de canaux (gestion et ROI des canaux relationnels et médias) et l’expérience de marque (les événements, les salons, l’expérience client, etc.). Un quatrième service va être créé pour s’occuper de la data en transversal : il sera constitué d’une personne – en cours de recrutement – qui va gérer toute notre activité data. Cette nouvelle organisation a deux objectifs : mieux coller au parcours client et arrêter le travail en silo sur les différents canaux d’une part, et d’autre part conserver des expertises tout en les diffusant au sein des équipes. Pourquoi créer un poste de responsable data et quelles seront ses missions ? La data offre de très grandes possibilités au secteur automobile. Un exemple : aujourd’hui, nous n’exploitons pas les données de configuration des voitures qui sont choisies par les internautes sur notre site web, alors que ce sont des informations essentielles dans nos réflexions stratégiques. Nous avons identifié deux grands besoins auxquels cette création de poste doit répondre : l’assistance à maîtrise d’ouvrage, pour l’implémentation à venir d’outils – notamment une DMP – et la segmentation de données et d’audiences issues des points de contacts à notre marque : portail, relation client, points de vente physiques, produits connectés, réseaux sociaux…. Deuxième axe de travail autour de ce nouveau poste : au-delà du volet marketing, il faudra travailler avec les autres départements du groupe, notamment l’IT ainsi que les ventes et prévisions des ventes pour améliorer la connaissance client et optimiser l’efficacité et la mesure de nos actions marketing. Nous avons déjà des données, il faut maintenant en collecter davantage et surtout leur donner du sens en cassant les silos. Sur le volet data clients, nous avons près de cinq millions de clients et prospects “chauds” en base avec des données sur les nom, prénom, adresse postale, email, véhicule possédé, âge, etc. Vous allez donc créer votre propre DMP ? Effectivement, nous prévoyons un déploiement au deuxième trimestre 2017, avec un lancement opérationnel prévu à l’été. Nous finalisons en ce moment deux appels d’offres pour remplacer une partie de nos outils actuels. L’un permettra d’attribuer le développement de la DMP à une société spécialisée, l’autre sera un cabinet de consulting spécialisé en data et ROI : son rôle ne sera pas seulement de quantifier et mesurer a posteriori l’efficacité de la DMP, mais aussi et surtout de nous aider en amont à concevoir la réflexion stratégique et la mise en place de l’outil. Quelle est la part de vos investissements médias dédiée au numérique ? En 2016, le digital représente environ 30 % de notre budget paid media. Ce sera 35 % en 2017 et sans doute 40 % en 2018. Sur ces 30 % d’investissements pour notre communication en ligne, 30 % sont déjà dédiés au programmatique tous canaux confondus, entre 10 % et 15 % en search et autant au social media. Le reste est investi en display traditionnel. Outre l’achat média, il y aura en 2017 des investissements pour la DMP, l’automatisation du e-CRM, etc. Quelles sont vos principales préoccupations en matière de communication et de marketing et les difficultés à surmonter ? Le ciblage. On estime à 3 % la proportion d’acheteurs de véhicules neufs chaque année parmi la population. C’est peu, mais ce sont ces personnes-là que les constructeurs automobiles veulent toucher et convertir. Le ciblage est donc essentiel et le digital nous offre de nouvelles possibilités. Aujourd’hui, on peut considérer que les canaux offline sont utilisés pour la communication et le marketing à long terme, autrement dit pour travailler la préférence de marque et la notoriété. Le digital est utilisé plus tard dans le parcours d’achat et le plus près possible de la transaction. Quelle est votre position sur l’achat programmatique ? 30 % de notre achat média est réalisé en programmatique ; c’est une partie de la solution pour cibler correctement les bonnes audiences, mais aujourd’hui, sans DMP, cela se fait uniquement sur des sites tiers et de façon parcellaire avec d’autres types de données que les nôtres. Il faut les croiser avec nos données propriétaires pour avoir une vision plus fine et “convertissante”. Le coût par acquisition est complexe à déterminer, car il est très difficile d’identifier et de suivre un internaute, prospect ou même intentionniste sur l’ensemble du parcours d’achat. L’un des principaux enjeux du secteur est donc d’être en mesure de “désanonymiser” le client qui arrive en concession et le rattacher à des comportements digitaux. Avec quelles agences travaillez-vous et quel regard avez-vous sur leur travail ? Nous avons rationalisé nos relations. Depuis 60 ans, notre agence créative en France et dans le monde est DDB (Omnicom Group). Mediacom (GroupM / WPP) nous accompagnait jusque-là sur le conseil et l’achat média (depuis un peu moins de 20 ans, ndlr), mais à compter du 1er janvier 2017, ce sera l’agence PHD (Omnicom Media Group) qui gérera l’ensemble du budget du groupe (Volkswagen, Audi, Porsche, Seat, Skoda, Bentley…) dans le monde. En France, c’est son agence Re-Mind PHD qui sera notre agence référante (selon Advertising Age, le groupe Volkswagen a dépensé environ 3 milliards de dollars d’investissements publicitaires en 2014 dans le monde, ndlr). Par ailleurs, Fauve, une petite agence indépendante basée à Poitiers, est notre agence digitale et CRM en France : nous avons confiance en ses dirigeants et elle est très agile. De manière générale, l’agence média regagne progressivement ses lettres de noblesse. Jusqu’à présent, c’était plutôt l’agence publicitaire qui avait le lead des campagnes. Avec le numérique, nous avons plutôt tendance à le confier aux agences médias, car le conseil, la stratégie et la data – nos principaux enjeux désormais – relèvent a priori de leurs compétences. Mais les cabinets de consulting sont de plus en plus importants et viennent les concurrencer. Il nous apportent de la rationalisation dans nos investissements et prouvent que les investissements en communication et marketing sont utiles. Sur quoi les agences doivent-elles progresser ? Dans le retour sur investissement apporté au client. Pas forcément dans sa dimension financière, mais aussi et surtout dans la démonstration de l’efficacité des campagnes et dans l’analyse des résultats : qu’est-ce qui a ou n’a pas fonctionné ? Quels enseignements en tirer ? Comment faire mieux la prochaine fois ? L’analyse fournie à l’annonceur est primordiale. Elle intervient progressivement et c’est une bonne nouvelle, mais c’est encore lent et beaucoup reste à faire. Les annonceurs sont de plus en plus ROIstes et les agences doivent accompagner ce mouvement. A contrario, on en a la preuve régulièrement, des campagnes auxquelles nous croyions peu au départ, s’avèrent en fait des succès : il y a une part d’impondérables dans la publicité qu’il est difficile de quantifier et d’anticiper, et qu’il faut accepter en tant qu’annonceur. Sans avoir toutes les réponses, il faut nous éclairer. La rémunération des agences est parfois source de tensions ou de polémiques. Quels mécanismes pratiquez-vous ? Je pars du principe qu’il faut encadrer le travail de nos partenaires et j’utilise ce mot à dessein : ce sont des partenaires, pas des prestataires. On peut avoir des désaccords, mais nous sommes dans le même bateau et il faut se comprendre et travailler ensemble, avec les mêmes objectifs et les mêmes intérêts. Le retour sur investissement est important. Les agences ont du mal à accompagner ce mouvement, je le disais, d’où l’émergence de cabinets de consulting qui connaissent mieux les attentes d’un client et qui ont un savoir-faire sur ce type de problématique. Mais il faut le reconnaître, le métier d’agence se paupérise à mesure que l’efficacité publicitaire devient l’élément unique de la plus-value apportée. Il y a un équilibre à trouver. Pour la rémunération, nous posons un cadre chaque année : un staff est déterminé en jours / hommes et il ne peut pas y avoir de mauvaise surprise. Nous réfléchissons ensemble à une grille de notation en cohérence avec chaque campagne et chaque objectif. Des indicateurs qualitatifs et quantitatifs sont définis avec les agences de manière à les aligner sur nos intérêts. Ils déterminent le bonus et malus accordés sur la rémunération fixe, de l’ordre de 3 à 5 % des honoraires. Vous sentez-vous suffisamment éclairé sur la visibilité et la fraude publicitaires ? C’est un souci croissant pour le marché et nous tentons d’apprendre sur le tas. Je m’appuie sur des lectures à la fois personnelles et professionnelles, ainsi que sur des conférences auxquelles j’assiste. Mais il faut rester humble sur ces sujets, cela fait partie des aspects sur lesquels nous devons progresser. De meilleures pratiques sur le marché passent aussi par les guidelines et recommandations à faire par l’interprofession. Etes-vous tenté de travailler en direct avec les régies ? Par principe, je n’exclus personne. Un marketeur doit parler avec tout le monde et nous organisons régulièrement des rencontres avec les régies. Nous venons d’ailleurs de réunir plusieurs structures pour les briefer sur un nouveau modèle de la Golf. C’est intéressant d’avoir leurs points de vue et de mieux connaître ce qu’ils mettent en place pour leur innovation, leur travail marketing et la data. De plus en plus de grands groupes mettent en place ou réfléchissent à l’internalisation de compétences d’achat média. Pourriez-vous le faire également ? Ça va en partie dans le sens de l’histoire : le digital rend possible voire nécessaire la maîtrise des outils ou des process par l’annonceur. On y réfléchit et on va d’ailleurs un peu y toucher avec notre projet de DMP, puisque cela doit occasionner des process d’automatisation d’achat média. Intellectuellement, je n’ai pas de souci avec le principe. Il faut simplement que cela crée réellement de la valeur pour l’entreprise. C’est clairement le cas par exemple pour certaines expertises créatives où la tâche est relativement aisée, comme changer un prix dans un CMS. La mise en place de formats publicitaires dynamiques, par exemple pour adresser des publicités segmentées en temps réel, doit pouvoir être mise en place par mes équipes. Timothée Gazeau – Bio Express 2015 Chef de service communication marketing de Volkswagen France 2012 Directeur marketing digital Europe de Nissan Europe 2011 Responsable Publicité Europe à Nissan Europe 2008 Responsable média et publicité France et Benelux à Nissan West Europe 2006 Directeur conseil à OMD (Omnicom) pour la marque Citroën 2001 Directeur de clientèle France à Mediacom (WPP) pour Volkswagen & Volkswagen Utilitaires Jean-Michel De Marchi Achat médiaAchat programmatiqueAgencesAgences créativesAutomobileBudgetsCompétitions d'agencesCRMDMPDonnées personnellesRelations agences-annonceursStratégies annonceursTransparence Besoin d’informations complémentaires ? 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