Sandrine Préfaut, Locala : “Un quart des retailers ont entamé une “discountisation” de leur offre”

En exclusivité pour mind Retail, Locala,spécialiste des solutions multilocales allant du « drive to store » aux enjeux de visibilité, présente les trois enseignements phares de son baromètre annuel, réalisé auprès de 3000 consommateurs de 5 pays (France, Angleterre, Italie, Pays-Bas et Belgique). Sandrine Préfaut, Directrice générale Europe de Locala, en présente les grandes tendances.

Par Sophie Baqué. Publié le 28 juin 2023 à 11h39 - Mis à jour le 28 juin 2023 à 11h39

Pour la première fois, Locala a réalisé en 2023 son baromètre annuel « Retail Insights » à l’échelle européenne. Comment l’impact de la crise du pouvoir d’achat se traduit-il concrètement chez les consommateurs ?

Sandrine Préfaut : On est bien entrés dans une ère de la guerre des prix, qui se traduit de plusieurs manières. Concrètement, dans tous les pays, les comportements des consommateurs ont changé afin de contrer les effets de l’inflation. Par exemple, à la question, avez-vous modifié certaines de vos « habitudes plaisir » pour des raisons économiques, 70 % des Français se disent d’accord (totalement ou plutôt d’accord), comme 63 % des Italiens, 61 % des Britanniques, 57 % des Belges et 49 % des Hollandais. Une autre question en dit long. Quand on leur demande s’ils sont « dans une logique consistant à consommer moins mais mieux », 80 % des Italiens sont d’accord, 78 % des Français, 70 % des Britanniques, 65 % des Hollandais, 64 % des Belges et 63 % des Italiens. Les Européens considèrent que le fait d’acheter des produits low cost n’est plus dévalorisant. C’est très nouveau !

Face à cela, 27 % des retailers disent avoir entamé une “discountisation” de leur offre. Autre chiffre particulièrement intéressant, issu de notre cahier de tendances : pour 38% d’entre eux, s’engager sur des prix bas est l’action la plus efficace pour développer le chiffre d’affaires. Le prix est devenu le premier critère de choix pour les consommateurs, devant la qualité, le choix ou encore la rapidité de livraison.

Dans ce contexte, la RSE combine deux avantages : des tarifs plus accessibles, et des produits moins carbonés, donc plus sobres. Quels pays ont la conscience environnementale la plus avancée ?

Sandrine Préfaut : L’Europe est un continent globalement avancé sur cette tendance, nommée dans notre Baromètre Retail Insights « Réparer, Réutiliser, Revendre ». Je cite des éléments intéressants de cette édition 2023. Quand on leur demande si la seconde main ou les produits reconditionnés sont une alternative durable pour consommer mieux, dans chacun des 5 pays sondés, plus de 8 consommateurs sur 10 répondent oui. Les Italiens montent à 89 %, les Français à 87 % et les Britanniques à 85 %. Si la tendance de l’occasion et de la seconde main se voyait déjà en 2022, l’engagement des consommateurs est plus affirmé, notamment chez les jeunes. Par exemple, 76 % des Italiens disent qu’ils sont prêts à payer plus cher pour des produits qui favorisent la protection de l’environnement, ainsi que 65 % des Britanniques et 57 % des Français. La location, émergente dans quelques enseignes (Decathlon, Maje) est aussi un phénomène inédit. Elle se développe notamment dans l’électroménager et la mobilité douce.

Quelle tendance nouvelle vous a le plus surpris ?

Sandrine Préfaut : C’est celle de l’écoute clients. On voit que 2023 est l’année de l’empathie, de l’hyper personnalisation, qui est devenue un enjeu clé pour la conversion. Les consommateurs attendent désormais des liens plus humains avec les enseignes, ils veulent être vraiment écoutés, mais ils veulent aussi avoir la certitude qu’ils seront assistés en cas de problèmes. 70 % des consommateurs estiment comme hautement probable le fait d’effectuer leurs achats exclusivement auprès de marques qui les comprennent. Ils demandent une connexion plus humaine et authentique ! Un chiffre le montre, et redonne au magasin toutes ses lettres de noblesse. En termes de service client en magasin, les clients apprécient 5 à 6 fois plus la serviabilité des employés et l’empathie, qu’un temps d’attente court en caisse. Et 36% des Français se diraient prêts à délaisser une marque s’ils trouvent que le service client manque d’empathie. Du côté des enseignes, cela se traduit par la nécessité de comprendre les besoins des clients, en traitant ses data dans la durée, en communiquant avec lui sur le bon canal (réseaux sociaux, Whatsapp, e-mail…) pour un dialogue constructif et une expérience client fluide et personnalisée. Mais pour cela, il faut aussi avoir établi au préalable une bonne empathie auprès de ses vendeurs, comme le dit clairement Leroy Merlin.