Accueil > Médias & Audiovisuel > L'après-cookies > RGPD : quelles données les acteurs français de la publicité en ligne recueillent-ils ? RGPD : quelles données les acteurs français de la publicité en ligne recueillent-ils ? Un des bénéfices du "transparency & consent framework", proposé par l'IAB pour répondre aux exigences de recueil du consentement et de traçabilité du RGPD, est de permettre d'identifier le type de données utilisées par les prestataires de la chaîne de valeur de l'achat programmatique. mind Media s'est plongé dans la "Global Vendor List", la liste des prestataires membres du framework, pour en tirer les principaux enseignements. Premier constat : la plupart tentent de récupérer l'éventail le plus large possible de données et invoquent le plus fréquemment possible l'intérêt légitime comme base légale. Par Aymeric Marolleau. Publié le 12 juin 2018 à 16h34 - Mis à jour le 12 juin 2018 à 16h34 Ressources La publicité en ligne est régulièrement critiquée, notamment par les annonceurs, pour son manque de transparence. Plusieurs initiatives récentes montrent pourtant que l’industrie est prête à quelques efforts. Deux d’entre elles émanent de l’IAB Tech Lab, le pôle technologique de l’IAB. Il y a un an, il créait ads.txt, un outil pour lutter contre la fraude dans la publicité en ligne, qui a eu pour conséquence inattendue de faire la lumière sur la manière dont les éditeurs vendent leurs inventaires publicitaires, via des SSP et des sous-régies. Il y a quelques mois, il a mis en place le transparency & consent framework, dont le bénéfice inattendu est cette fois de montrer le type de données (géolocalisation, cross-device, matching de données offline, mesure…) pour lesquelles les prestataires (SSP, DSP, DMP, outils d’advertification…) se positionnent. L’un points essentiels du RGPD porte sur l’obligation d’obtenir l’accord des internautes pour collecter et traiter leurs données. Le marché de la publicité en ligne semble vouloir y répondre par la création, via l’IAB Tech Lab, du transparency & consent framework : un système qui permet aux éditeurs de sites web de transmettre à leurs partenaires (SSP, DSP, DMP, outils d’adverification…) le consentement utilisateur au traitement des données personnelles, via une Consent Management Platform (CMP) (lire sur notre site). Dans ce cadre, l’IAB a mis en place une liste de prestataires pour lesquels les éditeurs peuvent recueillir le consentement des internautes. Cette liste, baptisée “Global Vendor List”, dont la dernière version est disponible à cette adresse, contient de nombreuses informations. Premièrement, les prestataires indiquent les finalités pour lesquelles ils ont besoin de ce consentement, parmi cinq possibles : information de stockage et d’accès ; personnalisation ; sélection, livraison et reporting publicitaire ; sélection, livraison et reporting de contenu ; mesure (lire encadré). Pour chacune des finalités sur lesquelles ils se positionnent, ils précisent aussi la base légale qu’ils ont retenu – consentement de l’internaute ou intérêt légitime permettant de s’en dispenser (lire le dossier que nous avons consacré à cette question la semaine dernière). Quelles sont les 5 finalités prévues par le Framework ? Finalité 1 : Information de stockage et d’accès. Description : Stocker une information, ou accéder à une information qui est déjà stockée sur votre terminal, comme un identifiant publicitaire, un identifiant de terminal, des cookies et des technologies similaires. Finalité 2 : Personnalisation Description : La collecte et le traitement d’une information sur votre usage de ce service de façon à personnaliser en conséquence la publicité et/ou le contenu qui vous sera proposé dans d’autres contextes, par exemple sur d’autres sites ou applications, dans le temps. Par exemple, le contenu du site ou de l’application est utilisé pour faire des déductions sur vos centres d’intérêts, afin de mieux adapter les futures sélections de publicité et/ou de contenu. Finalité 3 : Sélection, livraison et reporting publicitaire Description : La collecte d’information et sa combinaison avec des informations collectées précédemment pour sélectionner et livrer des publicités qui vous sont adaptées, puis mesurer la livraison et l’efficacité de telles publicités. Cela inclut l’utilisation d’informations collectées précédemment sur vos centres d’intérêt afin de sélectionner les publicités, traiter la donné sur les publicités qui vous ont été présentées, la fréquence, quand et où elles vous ont été présentées, et si vous avez eu une action avec cette publicité, par exemple en cliquant dessus ou en faisant un achat. Cela n’inclut pas la personnalisation, qui consiste en la collecte et le traitement d’une information sur votre usage de ce service de façon à personnaliser la publicité et/ou le contenu dans d’autres contextes, comme un site ou une application, dans le temps. Finalité 4 : Sélection, livraison et reporting de contenu Description : La collecte d’information, et sa combinaison avec des informations collectées précédemment, pour sélectionner et livrer des contenus rien que pour vous, et pour mesurer la livraison et l’efficacité de ces contenus. Cela inclut l’utilisation d’informations collectées précédemment sur vos centres d’intérêt afin de sélectionner les contenus, traiter la donné sur les contenus qui vous ont été présentées, la fréquence, quand et où ils vous ont été présentés, et si vous avez eu une action avec ces contenus, par exemple en cliquant dessus. Cela n’inclut pas la personnalisation, qui consiste en la collecte et le traitement d’une information sur votre usage de ce service de façon à personnaliser le contenus et/ou la publicité dans d’autres contextes, comme un site ou une application, dans le temps. Finalité 5 : Mesure Description : La collecte de l’information sur la manière dont vous utilisez le contenu, et la combinaison avec des informations collectées précédemment, utilisées pour mesurer, comprendre et faire le rapport de votre usage du service. Cela n’inclut pas la personnalisation, la collecte d’information sur votre usage de ce service de façon à personnaliser le contenus et/ou la publicité dans d’autres contextes, comme un site ou une application, dans le temps. Deuxièmement, les prestataires indiquent leurs fonctionnalités, parmi trois possibles : matching de données à des sources offline, par exemple pour le CRM onboarding ; lier des terminaux, par exemple pour du tracking cross-device ; données précises de géolocalisation (lire encadré). Quelles sont les trois fonctionnalités prévues par le Framework ? Fonctionnalité 1 : Matching de données à des sources offline Description : Combiner la donnée de sources offline qui ont été initiallement collectées dans d’autres contextes. Fonctionnalité 2 : Lier des terminaux (cross-device) Description : Autoriser le traitement d’une donnée utilisateur pour le connecter à travers plusieurs terminaux. Fonctionnalité 3 : Données précises de géolocalisation Description : Autoriser le traitement de la donnée de géolocalisation précise d’un utilisateur pour une finalité pour laquelle cet acteur tiers a le consentement. Au 10 juin, 322 acteurs figuraient dans la Global Vendor List. Criteo, AppNexus, Rubicon Project, LiveRamp, The Trade Desk ou encore RhythmOne en font par exemple partie. Une trentaine de ces 322 acteurs sont français (voir tableau des acteurs français). L’analyse de ces informations donne des indications précieuses sur la manière dont les acteurs de la publicité en ligne abordent le RGPD. Elles nous aident notamment à mieux comprendre le positionnement de chacun, et à connaître le type de données qu’ils prélèvent sur le site des éditeurs avec lesquels ils travaillent. Quels acteurs se positionnent sur l’ensemble des finalités prévues par le framework, du stockage de cookies au reporting publicitaire en passant par la personnalisation ? Quels acteurs se positionnent sur l’ensemble des fonctionnalités, du matching de données offline à la géolocalisation en passant par le cross-device ? mind Media a analysé la liste des prestataires publiée par l’IAB le 10 juin pour en tirer le maximum d’informations. Les choix des prestataires ont pu évoluer entre cette date et celle de la publication de ce dossier. Peu d’acteurs ont accepté de commenter leurs choix, tant en terme de positionnement que de bases légales. Contactez-nous mind Media est à l’écoute de ses lecteurs. N’hésitez pas à nous contacter pour réagir à ces données ou pour nous aider à les interpréter. Nous pouvons aussi vous donner accès, sur demande, à la base de données sur laquelle nous nous appuyons, pour vous permettre de connaître le positionnement de vos concurrents ou de vos prestataires : redaction@mindnews.fr Finalités “Nous avons choisi cinq finalités qui reflètent l’essence de ce qu’est notre industrie, et fournissent suffisamment de granularité. Le dispositif est aussi assez flexible pour que nous puissions ajouter de nouvelles finalités dans le futur et mettre à jour la description de chacune”, explique Matthias Matthiesen, directeur confidentialité et politique publique de l’IAB Europe. Les acteurs de la publicité en ligne ont une vision large de leur rôle, puisqu’il ont tendance à se positionner sur de nombreuses finalités. Ils en invoquent 3,9 en moyenne sur 5. Et 51 % d’entre eux (164 prestataires) demandent même le consentement pour les cinq finalités. C’est par exemple le cas de MediaMath, LiveRamp, IPONWEB, Gamned, ADUX et PulsePoint. Seul 24 acteurs ne revendiquent qu’une seule finalité, généralement l’information de stockage et d’accès ou la mesure. C’est notamment le cas d’Index Exchange, ID5 et SpotX. Fonctionnalités Matthias Matthiesen, de l’IAB Europe, explique les raisons pour lesquelles le Tech Lab a introduit la notion de fonctionnalités, en complément des cinq finalités : “Il est apparu pendant la préparation du framework que les finalités n’étaient pas suffisantes pour informer les utilisateurs, il fallait préciser certains types de data qui y étaient associées. Par exemple, la géolocalisation n’est pas une finalité, mais un type de donnée. Mais il ne fallait pas non plus créer une finalité par type de data, car le process aurait été trop complexe. Nous avons donc isolé trois types de data, ou fonctionnalités (cross-device, matching de données offline et géolocalisation), à côté des cinq finalités. Ainsi, un prestataire peut par exemple préciser de cette manière qu’il appliquera la finalité “personnalisation” à la donnée “géolocalisation”. Là encore, le système est flexible et nous pourrions ajouter de nouvelles fonctionnalités à l’avenir”. 6 prestataires sur 10 demandent l’accès aux données pour au moins une fonctionnalité. Et ils sont 20,5 % (66 prestataires) à demander l’accès pour les trois. C’est notamment le cas de Oath, Conversant, Tradelab et Zebestof. Finalités et fonctionnalités Certains acteurs se montrent particulièrement gourmands en data. Ils sont en effet 46 (14,3 %) à se positionner sur les 5 finalités et les 3 fonctionnalités. On trouve dans cette catégorie aussi bien des SSP que des DSP. C’est par exemple le cas de MediaMath, RhythmOne, PulsePoint, Amobee, Rakuten Marketing et IPONWEB. Ainsi que quatre acteurs français : Weborama, Mediarithmics, Vectaury et 1000mercis. “On sent une tendance chez certains acteurs à vouloir revendiquer beaucoup pour collecter le maximum de données et se couvrir du mieux possible”, observe le directeur numérique de Reworld Media Jérémy Parola. Après la première publication de cette enquête, le chief revenue officer de la DMP Mediarithmics Grégoire Fremiot a justifié ce choix : “Il faut distinguer les acteurs qui ont un rôle d’opérateurs de traitement de ceux qui collectent les données pour eux-mêmes. Mediarithmics se positionne sur les cinq finalités et les trois fonctionnalités car nous travaillons pour des acteurs qui récoltent le consentement et définissent leurs propres finalités. Nous sommes juste une technologie que les annonceurs et éditeurs utilisent dans leur relation avec leurs prospects et clients, avec leur consentement”. Divergences sectorielles L’analyse de la vendor list permet aussi de mettre en évidence que les acteurs d’un même secteur n’ont pas tous fait les mêmes choix. Par exemple, les SSP ne se sont pas tous positionnés sur les mêmes finalités, et n’ont pas choisi les mêmes bases légales. Il en va de même pour les acteurs de la recommandation de contenus, mais les différences sont moins flagrantes pour ceux de l’adverification (voir tableaux). au 10 juin 2018 au 10 juin 2018 au 10 juin 2018 Pourquoi ces positionnements ? mind Media a interrogé plusieurs acteurs français sur leurs choix en matière de finalités et de fonctionnalités, détaillées dans le tableau qui leur est consacré. Quelques-uns ont joué la transparence et accepté de répondre à nos questions : Vincent Mady, directeur technique du trading desk Tradelab : “Comme beaucoup d’acteurs de l’écosystème, nous-nous sommes positionnés sur les trois finalités car elles sont essentielles à notre activité. La géolocalisation est devenue centrale dans les campagnes mobiles, le CRM onboarding est une demande forte des annonceurs, et sans solution cross-device nous perdrions beaucoup d’inventaire, et achèterions le reste plus cher”. Nicolas Rieul, chief strategy & marketing officer de la DSP mobile S4M : “Nous nous sommes positionnés sur les trois premières finalités car la diffusion de publicité, le reporting et la détection de fraude constituent l’ensemble des finalités des services opérés par S4M. La fonctionnalité 1 (matching de données offline) peut être utilisée dans le cadre de notre offre drive-to-store physique. Ces données proviennent de partenaires tiers qualifiés dont nous avons encadré les relations par contrats afin de s’assurer que la donnée communiquée soit valablement consentie pour ce traitement. Ensuite, nous pouvons exercer notre activité et notamment gérer la fraude via l’intérêt légitime. La fonctionnalité 3 (géolocalisation) peut être utilisée dans le cadre de la personnalisation de la publicité”. Mathieur Roche, fondateur d’ID5, spécialisé dans la synchronisation des cookies : “Au sens du RGPD, ID5 est un “sous-traitant”, ce qui signifie que nous agissons pour le compte de nos clients qui sont “responsables de traitement” et qui définissent donc la finalité du traitement et son fondement juridique. La finalité de “stockage et d’accès à l’information” est relative à la future réglementation ePrivacy qui risque de nous obliger à avoir un consentement explicite de l’internaute pour poser et lire un cookie. C’est en préparation de ce futur que nous nous sommes déclarés sur cette finalité. C’est aussi en raison de la façon dont l’industrie se structure autour du Framework de l’IAB : certaines plateformes risquent de bloquer les appels tiers pour les vendors qui ne sont pas déclarés (et/ou n’ont pas reçu de consentement) dans la Global Vendor List, donc nous nous devions d’y figurer.” au 10 juin 2018 Méthodologie : étude réalisée à partir de la version 57 de la vendor list du consent & transparency framework de l’IAB Tech Lab, des 10-11 juin 2018, qui comprenait les informations déclarées par 322 prestataires. Lire aussi : La semaine dernière, mind Media a analysé les choix de bases légales (consentement ou intérêt légitime) des acteurs de la vendor list. Lire notre dossier. Aymeric Marolleau Data leakageDonnées personnellesRGPD Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Hors-séries Hors-série RGPD : comprendre, s’adapter, agir Dossiers RGPD : les prestataires bloqueront-ils l'inventaire des éditeurs récalcitrants au framework de l'IAB ? Dossiers RGPD : l'intérêt légitime invoqué par des acteurs publicitaires pour se passer du consentement des internautes essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 Intégrer la transition écologique dans les performances des médias et de la publicité Les enjeux réglementaires de la publicité en ligne en 2023 2023 : la transformation du marché publicitaire analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction ENQUÊTE - La régie publicitaire du Monde a réduit ses effectifs de 8 % INFO MIND MEDIA - Le CESP va lancer sa certification Retail Data Trust Agence79 officialise la consolidation du budget média numérique de Carrefour Publicis et Omnicom, champions de la croissance au premier semestre 2024 INFO MIND MEDIA - Une levée de fonds d’environ 750 000 euros en vue pour le nouveau média The Big Whale Google reconnu coupable de monopole dans la recherche en ligne : ce qu'il faut retenir 24 lobbys enjoignent Bruxelles d’harmoniser le RGPD Outbrain acquiert Teads sur une valorisation d’1 milliard de dollars : les détails de l’opération Fin des cookies tiers : derrière l’annonce de Google, la méfiance du marché INFO MIND MEDIA - Marketing des abonnements : TBS Group rachète OwnPage data Les baromètres, panoramas et chiffres sur l'évolution du marché IA générative : quels éditeurs français bloquent les robots d’OpenAI et Google, lesquels ont adopté le protocole TDMRep ? Le panorama des sociétés spécialisées dans les technologies de l’e-retail media La liste des outils utilisés par les équipes éditoriales, marketing et techniques des éditeurs français Digital Ad Trust : quels sites ont été labellisés, pour quelles vagues et sur quel périmètre ? Panorama des offres AVOD alternatives Le détail des aides à la presse, année par année Ads.txt : la liste des relations établies entre les éditeurs français et les vendeurs et revendeurs programmatiques Les indicateurs financiers des grands groupes de communication Les levées de fonds des start-up des médias, du marketing et de la culture en France Les principales solutions de paywall dynamique