Trois clichés sur le paiement cross-canal

Image à la une de l'article Trois clichés sur le paiement cross-canal
Le commerce comme le paiement doit être cross-canal, mais il n’est pas si facilement "sans couture", générateur d’insights et financièrement performant. Par Vincent Lenglet, product marketing manager chez Monext.
Cet article vous est proposé gratuitement par la rédaction.
Lancez votre essai gratuit de 15 jours pour découvrir l’ensemble de nos contenus

Profond bouleversement, le paiement comme le commerce, passe d’un point unique du processus d’achat (le magasin) à plusieurs canaux de vente, physiques et virtuels. Mais pour être présent sur un maximum de canaux, il est indispensable d’être pertinent sur chacun d’entre eux, et gommer toute rupture de processus lors du passage d’un canal à l’autre par le consommateur, tant émotionnellement que d’un point de vue cognitif. Le commerçant doit donc revoir tous ses processus, du pré-achat (recherche d’informations, comparatifs) au post-achat (remboursements, suivi). Mais on entend, ça et là, que le paiement cross-canal c’est facile à mettre en œuvre. Et ce n’est malheureusement pas le cas, voici pourquoi :

« Si je concentre et réconcilie les paiements de tous les canaux, je fais du cross-canal ! »

Malheureusement non. Concentrer et réconcilier les paiements au sein d’un même back-office est sans nul doute nécessaire, mais loin d’être suffisant. Rappelons en effet que le cross-canal est avant tout un ensemble de processus métier, dont seul le commerçant est maître et qui convoque une bonne partie de son système d’information : système d’encaissement, workflow de commandes, gestion du stock en temps réel, CRM, etc. La monétique est clairement subordonnée au reste du système d’information, et ne peut prétendre au pilotage des processus cross-canal.

La concentration des transactions au sein d’un back-office unique n’apporte au commerçant de la valeur que si elle est au service de fonctions essentielles au cross-canal (pilotage financier, rapprochements et régularisations comptables, intégration harmonisée des retours bancaires), fonctions dont on occulte souvent l’importance, surtout lorsque sont concernées des organisations complexes : modèles mixtes intégré + franchisé, parcours multi-enseignes, etc.

« Si je collecte et analyse les données tokenisées de paiement je vais bien connaître mes clients »

C’est très souvent faux. Si la tokenisation est le moyen le plus efficace de pseudonymiser les données sensibles (comme celles liées au paiement) pour élaborer des statistiques et segmentations dans le respect de la réglementation, c’est loin d’être la panacée pour mieux connaître ses clients. Plusieurs raisons à cela.

La donnée de paiement n’est pas conçue pour véhiculer des informations métier qui faciliteraient le profilage client. Il manque le contenu du panier, les données relatives à tout ce qui a pu se passer en amont du paiement, données précieuses d’un point de vue comportemental, et les éléments de temporalité ou les stimuli qui ont motivé l’achat. Utiliser les données de paiement pour mieux segmenter sa clientèle, voire adresser des offres personnalisées en one-to-one relève du mythe : le paiement ne conclut pas l’acte d’achat.

Le véritable consentement de l’achat intervient en amont, lorsque le consommateur pose ses articles sur le tapis roulant, ou clique sur le bouton « check-out ». Au moment de payer, l’acte d’achat est donc déjà intégré dans le cerveau du consommateur et les insights qui l’ont provoqué interviennent en amont. On imagine donc mal en quoi utiliser uniquement les informations de paiement, aidera à comprendre les comportements d’achat, ou segmenter efficacement sa clientèle, au-delà du premier niveau de statistiques de base : fréquence, panier moyen, etc.

Ensuite, la tokenisation des données de paiement montre clairement ses limites dans bon nombre de parcours cross-canal. Si le commerçant tokenise mon numéro de carte, ces données n’auront de sens que si j’utilise la même carte pour toutes mes commandes et tous les canaux offerts. Est-ce réaliste ? Non. Car j’ai certainement dans mon portefeuille plusieurs cartes bancaires, et il m’arrive de payer en ligne avec Paypal, par exemple. Tracer à chaque paiement que je suis la même personne nécessiterait de me forcer à utiliser tout le temps la même carte, ou exiger mon enrôlement préalable à tout démarrage de parcours. Est-ce compatible avec la promesse du « sans couture », dont la grande force est de laisser le consommateur libre de l’utilisation des canaux ? Non.

En substance, il est présomptueux de penser que les données de paiement seront fiables pour un profilage et une relation one-to-one, sauf à n’offrir que des parcours limitants à sa clientèle.

«Je choisis le même prestataire de paiement pour tous mes canaux, pour un cross-canal performant»

Là aussi, c’est faux. Il est parfaitement possible d’opérer un bon cross-canal en ayant choisi un prestataire de paiement pour le e-commerce différent de son fournisseur de système d’acceptation de proximité. D’autant plus, que ce sont d’ailleurs généralement ces derniers, qui poussent le commerçant à une stratégie mono-fournisseur, prétextant une meilleure harmonisation omni-canal, alors qu’il serait judicieux de s’en affranchir pour bénéficier des meilleures conditions financières des différents acquéreurs.

Il n’est en réalité à minima besoin que d’une méthode de tokenisation unique pour tous les canaux ; certains commerçants ont fait tôt le choix d’un tokenizer tiers, s’assurant ainsi de ne pas se faire enfermer dans un mono-sourcing aux dérives propriétaires. Quant à la concentration et la consolidation des flux au sein d’un même back-office, une pré-acquisition agnostique et performante saura mieux répondre aux enjeux de réconciliation, et aussi offrir plus en termes d’optimisations financières et de traitement de la donnée.

Vous avez une information à nous partager ?
Nos autres services
Research
La réalisation d'études sur-mesure : benchmark, panorama, newsletter personnalisée, contenus en marque blanche.
En savoir plus
Formations
Nos formations & masterclass : des formats courts pour le management, le coaching de dirigeants, la montée en compétence de profils junior.
En savoir plus
Events
Des conférences d'une demie journée dédiées aux problématiques du secteur et ouvertes à l'ensemble de l'écosystème.
En savoir plus
Ce que vous devez absolument lire cette semaine
Les contenus essentiels de la semaine sélectionnés par la rédaction.
Voir tout
La sinistralité des catastrophes naturelles demeure structurellement élevée
Selon le Swiss Re Institute, 2025 marque la sixième année consécutive où les pertes assurées mondiales liées aux catastrophes naturelles excèdent...
19 décembre 2025
La FCA laisse les banques choisir la limite du paiement sans contact
“Les banques et prestataires de paiement disposant de dispositifs robustes de lutte contre la fraude pourront fixer leurs propres plafonds pour les paiements sans contact, ce qui leur...
19 décembre 2025
Google lance des cartes de crédit co-brandées en Inde avec Axis Bank
Google poursuit son incursion dans les services financiers en Inde. Le 17 décembre, la Big Tech y a lancé Flex by Google Pay, une carte de crédit co-brandée, en...
18 décembre 2025
Le Crédit Agricole lance un parcours 100 % en ligne pour le crédit immobilier
Si la période de confinement liée à la crise du Covid-19 a poussé les banques à avancer rapidement sur la digitalisation des parcours bancaires, les...
18 décembre 2025
Les articles les plus consultés du mois sur mind Fintech
Ce sur quoi les lecteurs cliquent le plus le mois dernier.
Ce sur quoi les lecteurs cliquent le plus le mois dernier.
1
NouveauMises à jour quotidiennes
Le classement des néobanques et banques en ligne qui ont le plus de clients en France
BoursoBank, Revolut, Nickel, N26... plus d’une vingtaine d'acteurs courtisent désormais les consommateurs français. Combien de clients les banques en ligne et néobanques comptent-elles en France...
27 novembre 2025
2
Damien Liège (Sofinco) : “12 % de la production de Sofinco est issue d’un parcours open banking”
Il y a trois ans, Crédit Agricole Personal Finance & Mobility (CAPFM) lançait une politique volontariste de déploiement de l’open banking pour le scoring de crédit. En France, Sofinco s’est montré...
26 novembre 2025
3
Catherine Mathon (BNP Paribas) : “Face à la multiplicité des possibilités offertes par l’IA, il est facile de se disperser”
Dans un secteur où chaque acteur multiplie les POC et les expérimentations, Catherine Mathon, COO de la Banque Commerciale en France (BCEF) de BNP Paribas, défend une approche radicalement...
12 décembre 2025
4
BNP Paribas rejoint Qivalis, le consortium bancaire européen pour un stablecoin euro
Ambitions, feuille de route, gouvernance… Qivalis, le consortium de banques européennes qui œuvre à la création d’un stablecoin euro, dévoile de premières informations sur le projet et accueille...
2 décembre 2025
5
Martin Della Chiesa (Skaleet) : “Les acteurs qui veulent construire durablement font le choix de la licence”
Skaleet a opéré un pivot majeur en trois ans. L'éditeur de core banking en SaaS, qui tirait 85 % de son chiffre d'affaires du continent africain en 2021, vise désormais le leadership paneuropéen...
3 décembre 2025
6
Open banking : le projet SPAA sur les API premium est au point mort
Le projet de scheme SPAA, confié au Conseil européen des paiements pour développer des fonctionnalités open banking premium pour l’initiation de paiement, est à l’arrêt. Banques et acteurs tiers...
1 décembre 2025