Accueil > Services bancaires > Paiements > Faysal Oudmine : “Fintecture a remporté 27 appels d’offres auprès de grands commerçants” Faysal Oudmine : “Fintecture a remporté 27 appels d’offres auprès de grands commerçants” Avec sa solution de virement instantané pour les e-commerçants, Fintecture a séduit le groupe Société Générale, entré à son capital début 2021. Depuis, la société a fait évoluer son positionnement et son mode de facturation et a lancé de nouveaux produits, parmi lesquels un outil de délai de paiement porté par Allianz Trade. Son CEO Faysal Oudmine détaille sa stratégie à mind Fintech. Par Aude Fredouelle. Publié le 28 septembre 2022 à 18h30 - Mis à jour le 28 septembre 2022 à 18h30 Ressources Vous vous êtes lancés en proposant une solution de paiement pour les marchands via un virement instantané (instant payment ou IP) déclenché en open banking, et en vous définissant comme une solution de paiement alternative à la carte bancaire et moins chère. Aujourd’hui, vous assurez que ce mode de paiement n’est chez vous qu’un outil parmi d’autres et vous ne vous présentez plus en concurrent de la carte. Pourquoi votre positionnement a-t-il évolué ? Nous nous sommes rendus compte qu’en BtoC, le virement instantané par open banking est une solution de paiement alternative complémentaire pour le marchand et le client, qui ne représente qu’une petite part de marché. Tous les PSP et les marchands veulent le proposer, mais les volumes seront relativement faibles car les bénéfices ne sont pas décisifs pour le consommateur. En outre, le coût de la carte pour les transactions BtoC n’est pas un frein et les plafonds carte sont suffisamment élevés pour la majorité des paiements BtoC. Penser que l’IP serait utilisé pour de petites transactions alors qu’il n’offre pas les mêmes protections que la carte, c’est un pari compliqué. Ce n’est donc pas notre focus. Pour nous, l’open banking n’est qu’un outil parmi d’autres, que nous appliquons avant tout au BtoB. Et Fintecture n’est pas une énième alternative de paiement mais une plateforme de digitalisation des flux BtoB, qui ne le sont pas aujourd’hui. On dénombre 130 trillions de dollars de volumes BtoB au niveau mondial et on anticipe 200 trillions d’ici 2028. Aux États-Unis, 60 % de ces volumes sont réalisés via des chèques papier, selon une étude de Goldman Sachs [la proportion tombe à 1% en Europe, Ndlr]. Ensuite, il s’agit souvent de virements manuels, réconciliés à la main [33% des volumes aux États-Unis, 97% en Europe, Ndlr]. La carte ne représente qu’1 à 5 % des volumes au niveau mondial. L’open banking n’est donc qu’un outil qui permet de casser le monopole de la banque sur les opérations réalisées sur un compte de paiement et de créer de nouvelles manières de payer. Notre objectif est d’apporter trois avantages à nos clients : “save time”, à la fois en termes de temps des collaborateurs et de DSO [day Sales Outstanding, délai moyen de paiement entre l’émission de la facture et l’encaissement, Ndlr]. Ensuite, “save cost”, ce qui est important car le niveau de marge est faible en BtoB. Et enfin, vendre plus. Nos clients voient leur panier moyen augmenter de 20 à 30 % en nous utilisant. Outre le virement instantané via open banking, quels autres moyens de paiement proposez-vous ? Nous proposons désormais trois modes de paiement. D’abord, notre solution historique : le virement immédiat, basé sur l’open banking et la “smart acceptance”, un algorithme destiné à contourner la difficulté des banques qui n’acceptent pas le virement instantané en effectuant plutôt un virement SEPA. Nous avons aussi développé le virement réconcilié, qui ne passe pas par l’IP. Cette solution utilise la technologie d’IBANs virtuels et un algorithme de réconciliation propriétaire pour une automatisation complète du traitement des virements bancaires. Le payeur règle sur un IBAN, par virement SEPA. Cela permet d’économiser du temps de traitement et de gagner en visibilité avec un système de tracking. Request to Pay : quels cas d’usage et business model ? Enfin, nous avons récemment lancé un troisième produit : les délais de paiement garantis. Pour cela, nous avons étendu notre agrément d’établissement de paiement [voir le détail de l’agrément de Fintecture, Ndlr]. Nous ne faisons pas de BNPL [Buy Now Pay Later, paiement différé, Ndlr] classique en BtoB car cela coûte trop cher pour les entreprises, mais nous sommes en concurrence avec ces acteurs. Nous préférons proposer des délais de paiement garantis par l’assureur crédit Allianz Trade [L’ancienne CDO d’Allianz Trade Sophie Marot-Rémy a d’ailleurs annoncé en mai 2022 son arrivée chez Fintecture en tant que vice-présidente, responsable des partenariats et du marketing produit, Ndlr]. Nous voulions contourner plusieurs contraintes. D’abord, le montant des paniers, contraignant pour le plafond carte. Ensuite, la lutte contre la fraude. Enfin, le problème de coût : en BtoB les volumes sont énormes mais les marges plus faibles qu’en BtoC en termes de pourcentage, donc un produit de BNPL à 3 ou 4 % comme en BtoC ne peut être rentable pour la plupart des marchands BtoB. Nous voulions aussi répondre au besoin de réconciliation en réintégrant de la donnée aux flux de paiement et nous proposons des workflows collaboratifs car en BtoB souvent l’acheteur n’est pas le payeur. Avec ce produit, nous gérons la sécurisation, la lutte anti fraude, la garantie et nous proposons des délais de paiement sans risque 3 à 4 fois moins cher que le BNPL. Concrètement, nous permettons de régler ses achats à 30 jours, avec un délai de paiement garanti par Allianz. En cas d’impayé de son client, le marchand est indemnisé par l’assureur-crédit. L’offre est en phase d’expérimentations. Quelle est la part du virement instantané dans vos volumes ? Aujourd’hui, notre solution historique de virement immédiat (qui combine à la fois le virement instantané SCT Inst et le virement SCT classique) est encore dominante, mais d’ici 4 à 5 mois cela devrait représenter moins de 50 % de nos volumes, aux côtés des délais de paiement et du virement réconcilié SEPA. Par ailleurs, selon le profil du client final, nous proposons le mode de paiement le plus pertinent. Dans les faits, l’open banking ne peut être utilisé que par de petits acteurs. Si le client final est une grosse entreprise, l’acheteur n’est souvent pas le payeur et il n’a pas la capacité de se connecter à l’espace bancaire pour déclencher le virement Donc, pour les gros clients finaux, nous proposons à la fois l’IP et le virement réconcilié via lequel on rentre l’IBAN. L’objectif à terme est de se servir de notre connaissance des clients finaux pour proposer la solution la plus pertinente. Quels types de clients ciblez-vous ? En termes de distribution, nous avons trois cibles. D’abord, les e-commerçants BtoB. Nous proposons des plug-in et SDK et nous nous intégrons en direct avec nos partenaires. Ensuite, les magasins, à qui nous proposons des solutions de paiement sans TPE, sur tablette ou smartphone. Enfin, avec notre produit “Get Paid”, nous permettons à des clients de synchroniser leurs factures et devis générés dans leurs ERP ou CRM et de se faire payer. Par exemple, ceux qui font de la vente à distance peuvent générer un lien de paiement suite à un devis, ou bien des comptables en entreprises ont la possibilité de créer des liens de paiement associés à des factures avec un workflow de relances. Je peux aussi mentionner un autre produit sur la partie “payout”, pour la gestion des remboursements ou encore le paiement des vendeurs sur des marketplaces. Nous ciblons des acteurs qui gèrent plusieurs centaines de remboursements par mois. En moyenne nous divisons leurs coûts par 10. Nous gérons le KYC, le scoring AML, la récupération du compte bancaire et le virement instantané sur le compte bénéficiaire, avec des workflows d’acceptation et de validation. Nous sommes par exemple déployés chez Auchan pour gérer leurs remboursements. Cela prenait avant 15 jours en traitement manuel et coûtait 15 à 20 euros par paiement. Désormais, en 5 minutes les fonds sont déposés sur le compte bancaire, avec un coût divisé par 25. Combien de clients revendiquez-vous ? Nous avons gagné 100 % des appels d’offres passés avec des “category leaders”, c’est-à-dire des commerçants leaders de leur segment ou bien enregistrant plus d’un milliard d’euros de volume d’affaires par an. Nous en avons signé plus de 27 en un an et demi. Il s’agit de très grands noms comme Edenred, Auchan, Up, de gros acteurs de la téléphonie, du transport maritime, une compagnie aérienne… Parmi les 25 clients, la moitié sont déjà en production. Ensuite, nous ciblons des PME. 10 000 entreprises collectent des paiements avec Fintecture dont plus de 1000 en direct. Les autres passent par des partenaires comme des fintech BtoB utilisant l’infrastructure Fintecture : Pennylane, Libeo, Regate… Face à qui vous retrouvez-vous lors des appels d’offres ? Des plateformes d’open banking ? Nous nous sommes parfois retrouvés face à des infrastructures open banking comme des plateformes d’open banking ou des PSP qui les utilisent. Nous avons toujours remporté l’appel d’offres grâce à notre offre produit, et non à la proposition financière, même si nous facturons en pourcentage alors que eux facturent souvent à la transaction. Le virement immédiat et l’open banking ne peuvent pas suffire, et nous avons développé tout un produit autour de cette brique. Fin 2021, vous indiquiez à mind Fintech vous rémunérer via une commission sur chaque paiement, allant de 0,2% à 0,99% selon les volumes. Est-ce toujours le cas ? Le pourcentage est souvent plus proche de 0,3 % ou 0,4 % en moyenne pour nos gros clients. Nous avons aussi ajouté une partie SaaS car nous avons beaucoup développé le logiciel. Nous facturons entre 200 à 2000 euros par mois pour les PME, et cela dépend de l’offre pour les grands comptes. Le SaaS représente plus de 50% des revenus de Fintecture aujourd’hui. Et notre churn est quasi-inexistant, même si nous sommes passés en SaaS. Sur les gros clients, il oscille entre 0,2 et 0,4 %. Vous avez noué un partenariat avec Société Générale, l’un de vos investisseurs, pour proposer Fintecture aux clients de la banque. Quel est le résultat ? Aujourd’hui, la moitié des ventes de Fintecture provient d’une centaine de partenaires, dont Société Générale, qui représente environ 10 à 15 % des nouveaux clients signés via partenaires, plutôt de gros e-commerçants. Quels volumes gérez-vous ? Nous ne communiquons pas sur les volumes, mais je peux vous dire que l’année dernière nous avons enregistré une croissance de 40 % chaque mois. Cette année, nous sommes au-delà des 20 % par mois. L’objectif est de s’approcher des 40 % de croissance mensuelle et de conserver ce rythme. Sur quels cas d’usage vous développez-vous le plus ? En général, pour les “category leaders”, nous avons des points d’entrée différents : soit l’e-commerce, soit les commerces physiques ou bien la facturation. Pour aller vite et être flexible, nous répondons au besoin le plus urgent avant d‘étendre sur d’autres cas d’usage. Nous misons sur une intégration simple et rapide, de moins d’un mois et parfois avec du no code. Par contre, sur la distribution mid market, nous proposons une solution SaaS packagée avec tous les produits. Le but est de gérer le plus de paiements possibles chez nos clients, en étant présents sur de plus en plus de briques. Nous élargissons notre plateforme à davantage de modes de paiements, de segments (en ligne, en magasin), de géographies… Notre produit est disponible avec les agréments associés dans une dizaines de pays en Europe et nous le serons dans une vingtaine d’ici la fin de l’année. Commercialement, nous sommes principalement présents en France, mais aussi en Espagne depuis fin 2021, et nous nous lancerons en Allemagne et en Italie dans les mois à venir. Nous avons aussi créé une succursale au Royaume-Uni et nous sommes en train de finaliser l’obtention d’un agrément auprès de la FCA en vue d’un développement commercial dans le pays. Quels sont vos effectifs ? Fintecture emploie 80 personnes, dont un tiers à Paris, un tiers en province et un tiers à l’étranger, en Allemagne et en Espagne. 40 à 50 % des effectifs sont dédiés à la tech et au produit, et 10 personnes constituent l’équipe commerciale. 40 postes sont ouverts. Nous avons de gros enjeux de recrutement. Aude Fredouelle financement des entreprisesgestion de trésorerieinstant paymentopen bankingpaiement en ligne Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Open banking : les plateformes cherchent la croissance dans l’initiation de paiement