Accueil > Industrie > Agnès De Leersnyder (Future4care) : “Notre enjeu est que les entrepreneurs français trouvent leur place sur le marché de la santé numérique” Agnès De Leersnyder (Future4care) : “Notre enjeu est que les entrepreneurs français trouvent leur place sur le marché de la santé numérique” Ancienne directrice de la stratégie du groupe Orange, Agnès De Leersnyder est aujourd’hui la dirigeante de l’accélérateur Future4care, co-créé par Capgemini, Generali, Orange et Sanofi. Pour mind Health, elle détaille les ambitions de l’accélérateur, qui a ouvert ses portes aux premières start-up début février 2022 et devrait être officiellement inauguré au printemps. Par Sandrine Cochard. Publié le 15 février 2022 à 21h30 - Mis à jour le 13 octobre 2022 à 15h12 Ressources Future4care vient d’ouvrir un accélérateur dédié à la santé numérique dans le 13e arrondissement de Paris. Quel est son but ? Ce lieu de plus de 6000 m2 vise à accueillir tout un écosystème tourné vers l’innovation en santé : des start-up, des grands groupes, des professionnels de santé, des académiciens, des universitaires… Notre objectif est que les différents acteurs de ce monde multidisciplinaire qu’est la santé numérique puissent se rencontrer, discuter et faire ainsi progresser leurs idées. Ce lieu a été pensé pour être un espace avec le plus d’échanges possibles, avec des salles ouvertes ou fermées, des espaces communs de travail ou de détente. Le secteur de la santé numérique est en pleine ébullition, avec de nombreuses initiatives, mais c’est un secteur encore jeune qui doit se structurer pour que ces initiatives gagnent en puissance. Notre rôle consiste à ce que ces initiatives prennent corps et soient relayées par des acteurs puissants, aussi bien nos 4 membres fondateurs que de futurs partenaires industriels. Quelle est la vocation de Future4care ? Ce projet a mobilisé plus de 60 collaborateurs salariés des membres fondateurs pendant un an. Future4care est un écosystème conçu autour de deux grands piliers : un accélérateur de start-up et un institut. Dans l’accélérateur, nous proposons un programme d’accompagnement pour permettre aux start-up de gagner en temps et en expertise. Ce programme d’accompagnement s’articule autour de différents labs pensés pour couvrir chaque besoin : le creative lab, le medical lab, le regulatory lab (réglementaire et conformité), le living lab (accès aux patients), le data lab (données) et le communication lab (un espace avec du matériel de pointe qui permettra de tourner des vidéos et d’enregistrer des pitchs afin de promouvoir au mieux leur idée). La force de Future4care est d’être adossé à de grands industriels. Comment vous-positionnez-vous face à PariSanté Campus, un autre lieu dédié à la santé numérique qui vient lui aussi d’ouvrir ses portes ? Nous avons une volonté commune qui est de donner les ressources nécessaires aux entrepreneurs français pour qu’ils se développent en France et ne partent pas ailleurs. Nous sommes complémentaires. La force de PariSanté Campus est plutôt la recherche scientifique tandis que la force de Future4care est d’être adossé à de grands industriels. C’est notre point de différenciation et ce que l’on veut offrir aux start-up que nous accueillerons : leur donner l’accès à l’expertise des salariés des 4 fondateurs et de leurs partenaires. Ces salariés pourront être des experts intervenant ponctuellement ou des mentors qui pourront ouvrir leur carnet d’adresse. Avec ces 4 grands groupes, on parle de centaines de milliers de personnes et on sait qu’il existe des expertises très pointues chez chacun de ces acteurs. Nous disposons également d’un panel d’experts extérieurs à ces 4 groupes sur des sujets très précis comme la data, la réglementation, des sujets RH (pour aider les start-up à comprendre de quels profils elles ont besoin et aller les chercher avec les bonnes fiches de poste) ou encore des experts en cybersécurité, des avocats, des experts en droit de la propriété intellectuelle etc. Comment avez-vous sélectionné les start-up qui vont vous rejoindre ? Nous avons lancé en septembre dernier un appel à candidature sur deux thématiques : l’accès des soins à distance et le numérique au service de la médecine personnalisée. Sur la centaine de candidatures reçues, nous en avons sélectionné 40 qui sont passées à l’oral devant un jury international et multidisciplinaire. Finalement, nous en avons retenu 20 (lire encadré). Nous cherchons des start-up sur des marchés identifiés et assez matures. Nous cherchons des start-up sur des marchés identifiés et assez matures. Quelle limite vous fixez-vous ? Il faut qu’elles aient passé le MVP. Elles sont en général juste avant ou juste après une série A et abordent la problématique de mise sur le marché. Soit elles sont en train d’envisager la mise sur le marché de leurs produits ou services, soit elles ont un peu de chiffre d’affaires. En santé numérique, le temps est très long au niveau réglementaire, surtout pour les start-up qui ont besoin d’obtenir un marquage CE. Si elles proposent des dispositifs médicaux, en général elles ont déjà un prototype. L’idée est de les accompagner au moment où elles ont besoin d’être au contact des industriels. Or, si elles y vont trop tôt, cela ne peut pas aboutir. L’équipe doit-elle déjà être en place ? Non pas nécessairement. Souvent, une start-up est la rencontre d’un scientifique et d’un médecin. Les fonctions de management sont plus difficiles à aller chercher. Notre accompagnement prévoit ces enjeux liés à la constitution de l’équipe, pour aider à définir avec la start-up des ressources dont elle a besoin. Nous souhaitons également proposer une bourse à l’emploi, en permettant des mises en relation entre des candidats et les start-up. Quel est le tarif pour les start-up qui s’installent ici ? Elles payent un droit d’accès de 1500 euros par mois. Cela leur donne accès au programme d’accompagnement et à 2 badges pour accéder au bâtiment et à la plateforme virtuelle. Ensuite, toute personne supplémentaire paye 350 euros pour un badge. À partir de 5 badges achetés, les start-up disposent d’un petit bureau fermé. L’accès seul à la plateforme digitale est de 100 euros par personne supplémentaire. Cela permet d’intégrer aussi les start-up qui ne sont pas à Paris ou en France. L’idée est de penser Europe. L’une des premières start-up accompagnées est la plateforme de télémédecine portugaise KNOK par exemple. Combien de start-up prévoyez-vous d’accueillir ? Nous pensons organiser deux appels à candidatures par an et sélectionner 20 à 30 start-up pour chacune des promotions. Selon la vitesse à laquelle elles se développeront, entre 50 et 80 start-up seront dans ce lieu, en simultané, d’ici 2-3 ans. Nous lancerons d’ailleurs le prochain appel à candidatures à la fin du premier trimestre pour une sélection finale d’une vingtaine de start-up annoncée fin-juin début-juillet. Cet appel portera encore sur l’accès des soins à distance et le numérique au service de la médecine personnalisée, mais il est possible que l’on précise un peu ces thématiques, par exemple la médecine personnalisée pour l’accompagnement des maladies rares. Comment définir un programme commun quand on a 4 fondateurs aux activités très différentes ? Nous avons justement choisi des premières thématiques assez larges pour être consensuelles, afin que les 4 groupes s’y retrouvent. Mais je pense qu’elles vont se sous-segmenter en fonction de sujets que l’un ou l’autre des industriels va vouloir creuser. Après, il y a un grand sujet fédérateur qui est celui de la data : comment traiter et sécuriser la donnée ? Quelle valeur lui donner ? Faut-il la monétiser ? Cela n’a pas encore orienté les choix, mais il est possible que nos futurs appels à projet comportent des sous-questions pour affiner les thématiques. Nous visons 60 start-up accompagnées dans les 2 à 3 prochaines années Sur quels indicateurs allez-vous évaluer la réussite de ce lieu et de ce projet ? Parmi nos indicateurs de succès, nous suivrons le nombre de start-up accompagnées. Nous en visons 60 dans les 2 à 3 prochaines années. Nous serons également attentifs à ce qu’elles ne partent trop tôt. Nous souhaitons qu’elles restent 2-3 ans. Les choses ne peuvent pas arriver en un coup, si on veut créer ces échanges et cet écosystème, il est nécessaire que les gens se croisent plusieurs fois. Cet écosystème va se construire dans le temps. À plus long terme, notre objectif est que les solutions développées ici arrivent ensuite dans les mains de tous les patients. Donc faire passer les solutions à l’échelle. Que les start-up deviennent des licornes n’est pas un enjeu, nos fondateurs et partenaires ne prennent pas de parts dans les start-up accompagnées. Notre enjeu est que les entrepreneurs français trouvent leur place sur le marché de la santé numérique. Quels seront vos grands jalons pour l’année 2022 ? Nous avons lancé en janvier l’accélérateur avec la première promotion de start-up qui nous rejoignent progressivement. Nous lancerons en mars l’Institut Future4care, dirigé par le Pr Olivier Guérin, chef du pôle de gériatrie du CHU de Nice. Cette structure proposera trois services : un cercle dans lequel des personnalités de très haut niveau de la santé numérique viendront débattre avec des cadres exécutifs de nos partenaires, à huis clos, un think tank avec des groupes de travail réunissant professeurs d’université, étudiants et cadres des entreprises. L’objectif sera de publier des papiers de recherche fouillés, des tribunes ou des livres blancs etc. une académie avec tout un cycle de formation pour les cadres de ces entreprises. L’un des points de départ de Future4care est le constat que les gens de la santé numérique ne sont pas bilingues santé et numérique, mais viennent souvent de l’un des deux champs. Or, pour faire dialoguer ces deux cultures et faire en sorte que les gens se comprennent, nous allons mettre en place ces cycles de formation. Une personne issue de la tech aura accès à des formations en santé, et inversement. Le Pr Olivier Guérin monte actuellement autour de lui un comité éthique et scientifique multidisciplinaire qui comptera des médecins, des anthropologues, des philosophes, des économistes de la santé… Nous prévoyons une journée de conférences axée sur l’éthique et la santé numérique en mars. Nous travaillons également à la création d’un festival sur deux jours, avec beaucoup de conférences et de tables-rondes, avant l’été, où nous ferons venir tout notre écosystème autour de nos deux thématiques : la médecine personnalisée et la médecine à distance. Enfin, nous souhaitons également construire un écosystème européen et nous sommes actuellement en discussion avec des partenaires industriels en France et à l’étranger, notamment en Allemagne, en Suisse et en Belgique. Future4care, les chiffres-clés 4 membres fondateurs : Capgemini, Generali, Orange et Sanofi Deux activités : un accélérateur et un institut+6000 m2 dans le biopark (Paris 13) 20 start-up ont intégré l’accélérateur. Elles ont en moyenne 4 ans d’existence, 2,5 millions de chiffres d’affaires, et 20 salariés. Elles ont levé un total de plus de 130 millions d’euros et opèrent sur l’intégralité de la chaîne de valeur de la santé numérique : EdTech, aide au diagnostic et essai clinique, management de la douleur, téléconsultation, téléexpertise, monitoring et suivi du patient à distance, parcours de soin et prévention. Agnès De Leersnyder Depuis juin 2021 : PDG de Future4care Depuis janvier 2019 : Directrice de la Stratégie du groupe Orange Depuis 2015 : Vice-présidente Plan stratégique et Valorisation (groupe Orange) 2012 – 2015 : Vice-présidente Stratégie et Développement Business (Orange France) 2010 – 2012 : Vice-présidente Développement Business et Innovation (groupe Vivendi) Sandrine Cochard AccélérateurIndustrieInnovationPatientstart-uptélésuivi Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind