Accueil > Industrie > “Concevoir une molécule en 3 ans plutôt que 10” (Pistoia Alliance) “Concevoir une molécule en 3 ans plutôt que 10” (Pistoia Alliance) Pistoia Alliance, une association internationale à but non lucratif œuvrant dans le domaine de la R&D en sciences de la vie, a organisé un webinaire le 23 février 2022 ayant pour thème “Combiner robotique et machine learning pour accélérer la recherche et le développement médicamenteux”. Martin-Immanuel Bittner, fondateur et P-DG d’Arctoris, son animateur, a montré comment la combinaison de ces deux technologies pouvait réduire la durée de développement d’un médicament de dix à trois ans, notamment en analysant les données dès qu’elles sont générées, en temps réel, grâce à l’automatisation permise par l’IA et la robotique tout au long du processus de R&D. Par Camille Boivigny. Publié le 01 mars 2022 à 11h29 - Mis à jour le 04 mars 2022 à 10h31 Ressources “Au sein de l’écosystème du drug discovery, tout le processus est lent et cher, que ce soit en termes financiers ou de ressources humaines. Pour développer ne serait-ce qu’un seul médicament, les chances de succès sont très faibles”, souligne d’emblée Martin-Immanuel Bittner. Mais le modèle opérationnel standard est selon lui en train de changer, au niveau de la régulation, de l’agence américaine du médicament (FDA) ou de l’approche patient. L’enjeu est de se démarquer dans l’écosystème de l’industrie pharma et de la biotechnologie en utilisant au maximum de leurs capacités les technologies d’automatisation et d’exploration / exploitation des données basées sur l’IA et le machine learning. À tous les stades du drug discovery possibles. Pistoia Alliance – Arctoris – Martin-Immanuel Bittner Ces dix dernières années, des entreprises “AI and data driven” ont émergé, comme Insilico Medicine, BenevolentAI ou encore Atomwise. Selon Martin-Immanuel Bittner, il en existe désormais plus de 200 qui tirent parti d’une forme d’IA pour accélérer la R&D. Certaines d’entre elles, dont Arctoris ou insitro, rassemblent plusieurs tendances (approche cloud, biologie synthétique etc.) appelées “data-powered discovery”. Leur idée est de combiner machine learning et automatisation [via la robotique] pour générer de grandes quantités de sets de données de haute qualité, très structurées, robustes et reproductibles prêtes à nourrir leurs logiciels basés sur l’apprentissage automatique. Ces ensembles de données constituent un matériau ingénieux pour les approches axées sur l’IA et le machine learning, comme le ciblage de nouvelles molécules. Pistoia Alliance – Arctoris – Martin-Immanuel Bittner “L’IA transforme la recherche et le drug discovery à un rythme sans précédent, note le CEO d’Arctoris. Cela nécessite des données annotées, comparables et surtout reproductibles pour la conception et la validation de modèles”. Ceci est illustré par l’augmentation massive du nombre d’entreprises fondées dans le domaine du drug discovery basé sur l’IA, “en particulier au cours des 5 à 8 dernières années”, commente Martin-Immanuel Bittner. “89 % des données ne sont pas fiables en recherche biomédicale”, rappelle le CEO. Or, chaque décision lors de chaque étape de la R&D est fondée sur ces données. “La ‘profondeur’ des données et leur collecte ‘complète’ sont critiques”. Actuellement, les ensembles de données sont isolés, non liés, les méthodes et les protocoles sont ambigus, les formats non standardisés et les systèmes de stockage, fragmentés. Alors que le drug discovery requiert des données de qualité, dont la collecte est totalement numérisée, transparente, auditable et interopérable au sein de base de données. Martin-Immanuel Bittner propose de passer d’un modèle de collecte humain à un modèle de collecte robotisée, automatisée et plus fiable grâce à l’IA. Cela permet d’obtenir des métadonnées dont la valeur ajoutée est accrue. “La R&D entre dans une nouvelle ère : les données nourrissant le modèle et permettant de le valider sont générées -ainsi que leurs insights- et analysées en temps réel”. En effet les données collectées par les humains ne peuvent pas être traitées par machine learning car cette méthode requiert des données d’entrée très spécifiques standardisées pour être exploitables. Quelles technologies pour aider à la mise au point des candidats médicaments Automatiser de bout-en-bout La vision à long terme de Martin-Immanuel Bittner consiste à rendre le drug discovery plus prédictif pour une R&D plus évolutive, sans être limité par le volume de données ou le potentiel humain pour les interpréter. Selon lui, combiner l’IA et la robotique permet de générer beaucoup plus de données, d’explorer de plus vastes espaces chimiques et d’identifier et sélectionner des molécules plus prometteuses plus rapidement. Il a mis au point des programmes de découverte de médicaments automatisés de bout en bout, depuis la cible, jusqu’au candidat-médicament. Les données générées sont riches et robustes tout au long de la chaîne et leur collecte est cent fois supérieure (en volume) par rapport aux normes de l’industrie. Les durées de cycles passent de plusieurs semaines à plusieurs jours et les décisions basées sur des données plus denses sont plus fiables. Aller au-delà des données : l’importance des métadonnées Il s’agit de structurer l’information expérimentale pour la rendre accessible aux programmes informatiques permettant l’exploration des données. Les métadonnées fournissent plus de données d’entrées et d’informations statistiques supplémentaires. Ce qui s’avère précieux pour comparer les résultats et rassembler les données de différentes expériences [à un niveau d’information différent]. Grâce à un format expérimental précis, les sources de données sont décrites et les métadonnées structurées. Ces dernières mettent en évidence le lien entre les assets (données d’entrée et de sortie). “Notre plateforme et outil informatique nous permet de suivre l’avancement des expérimentations dans le temps. Nos données peuvent être réutilisées par n’importe qui avec un degré de fiabilité élevé, de bout en bout. La densité de la donnée est améliorée”, explique le CEO. Pistoia Alliance – Arctoris – Martin-Immanuel Bittner Méthode conventionnelle versus méthode robotique automatisée La méthode conventionnelle repose sur une exploration itérative et selon Martin-Immanuel Bittner “inefficace”, de l’espace chimique multidimensionnel : le développement simultané de plusieurs propriétés médicamenteuses est réalisé par le processus DMTA (design, make, test, analyze) conduit par l’homme. “C’est séquentiel et chronophage. Notre approche est ‘machine driven’ et utilise l’automatisation pour générer des données et l’apprentissage automatique génératif pour concevoir des molécules. Le cycle de développement s’avère réduit : nous l’avons quantifié et validé au sein de la sphère pharmaceutique, notamment à travers un partenariat avec Insilico Medicine. C’est transformateur en termes de délai, de nombre de molécules d’intérêt générées et développement de données”. D’après le CEO, son approche permet de redéfinir tout le modèle de drug discovery, du début à la fin de la chaîne. Les protocoles sont rédigés et designés pour être traités par des programmes automatiques, les bases de données, déjà structurées. “On obtient moins de faux négatifs et on réduit considérablement le temps de développement: on obtient une molécule efficace en 3 ans plutôt qu’en 10 ans actuellement”, conclut Martin-Immanuel Bittner. Quelles entreprises ont été autorisées par la FDA à commercialiser des dispositifs médicaux intégrant de l’IA? LA MÉTHODE ULYSSES Cette méthode repose sur une exploration plus créative et plus efficace de l’espace chimique pour étudier le paysage multidimensionnel des relations structure-propriété des molécules. “Avec de meilleures données, on prend de meilleures décisions à chaque étape du développement et on obtient de meilleurs médicaments”, souligne le CEO. Concrètement, il s’agit d’une plateforme de découverte de médicaments de nouvelle génération, basée sur la technologie, qui automatise le processus DMTA (design, make, test, analyse), une combinaison synergique de robotique et d’IA. L’apprentissage automatique (et en profondeur : deep learning) permet une optimisation multi-objectifs et la modélisation générative permet de suggérer de nouvelles conceptions médicamenteuses. “Les modèles d’IA sont aussi bons que les données qui les nourrissent. Cela permet de réduire considérablement le nombre et les délais des cycles DMTA”, résume Martin-Immanuel Bittner. Comment Invenis et Servier rendent la R&D “data driven” Pistoia Alliance – Arctoris – Martin-Immanuel Bittner Le jumeau numérique, prochaine révolution de la R&D ? Investissements massifs dans le drug discovery basé sur l’IA 55 % financent l’IA dans la conception de médicaments (drug design) 34 % financent l’IA en termes de moteurs d’insights 11 % financent l’IA dans les essais cliniques Composition de l’industrie selon la valeur totale de l’investissement 3 Mds $ investis en 2020 9,6 Mds $ investis (cumulés depuis la création de l’industrie) Drug discovery : insitro signe avec BMS Philippe Genne (Oncodesign) : “Nous sommes des “drug hunters”, des données de qualité nous sont indispensables” [Étude exclusive mind Health] Quels acteurs français ont le plus adopté le numérique dans leurs essais cliniques ? Camille Boivigny Algorithmesbase de donnéesDonnées cliniquesIntelligence ArtificielleLaboratoiresMédicamentRechercheRobotique Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Aqemia applique son IA au protéome à l’aide de modèle cloud IA & Drug discovery : une université, un industriel et une SATT développent un laboratoire commun Deep Pharma Intelligence cartographie les biotechs appliquant l'IA en R&D Alphabet lance sa propre société de drug discovery à partir de l'IA L’Institut Pasteur signe un accord sur l’IA en R&D avec son homologue coréen