Accueil > Parcours de soins > Open innovation > Hackathon : Amgen témoigne de la complexité de transformer l’essai Hackathon : Amgen témoigne de la complexité de transformer l’essai 48 heures pour développer une solution permettant d’améliorer la relation médecin-patient en cas de cancer. Le hackathon qu’a organisé Amgen en 2017 a réuni 80 participants avec, à la clé, deux mois d’incubation. Mais le projet lauréat, Medical Assist, n’a jamais vu le jour. L’industriel, son prestataire, le gagnant et une patiente experte participante reviennent pour mind Health sur l’organisation de l’événement. Par . Publié le 15 avril 2019 à 10h54 - Mis à jour le 15 avril 2019 à 10h54 Ressources Après un essoufflement, les hackathons refleurissent : Strasbourg accueillait fin mars son Hacking Health Camp annuel, Janssen vient de boucler son premier datathon et l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (Asip santé) organisait idu 8 au 12 avril deux “projectathons”. L’occasion de dresser le bilan du hackathon qu’Amgen a lancé en septembre 2017, un an après en avoir organisé un premier. Charlotte Warembourg, responsable du département Communication et relations associations de patients du laboratoire pharmaceutique, explique la motivation de l’industriel : “le premier hackathon était purement interne, organisé à l’échelle européenne. Plusieurs collègues français, dont je fais partie, y ont participé. Si l’échange interentreprises s’est avéré intéressant, nous avions envie de tester l’exercice avec des parties prenantes externes cette fois et de capitaliser sur ce type d’événement”. Un besoin était identifié : mettre en place des solutions pour améliorer la relation médecin-patient dans le cadre de la prise en charge du cancer, l’oncologie faisant partie des cinq aires thérapeutiques du laboratoire de biotechnologies. Un premier hackathon public qu’Amgen France a baptisé “Hack’tion contre le cancer”. BeMyApp a été choisie pour organiser l’événement, “une agence qui a pour cœur de métier d’organiser des hackathons, explique Charlotte Warembourg. Elle nous a accompagnés tout au long de la démarche”. Depuis la réflexion du projet et la définition de son format jusqu’à l’incubation du lauréat, en passant par l’organisation logistique de l’événement, son animation et le recrutement des start-up participantes, BeMyApp fournit en effet un service tout en un. Créée il y a neuf ans, elle a organisé depuis plus de 800 hackathons pour quelque 200 clients (dont une vingtaine dans l’industrie pharmaceutique) et emploie 80 personnes dans le monde (dont la moitié en France). Des collaborateurs qui ont à leur actif entre 30 et 40 hackathons, souligne John Karp, directeur des opérations Europe de BeMyApp. “On ne s’improvise pas organisateur de hackathon : le bon format doit être trouvé entre les attentes d’un grand groupe et celles des start-up. En outre, les développeurs et start-upers sont assez sollicités. Par l’intermédiaire de nos newsletters et de notre communauté, nous recrutons les profils adéquats. Sans accompagnement, le risque est élevé de se retrouver avec des profils peu qualitatifs.” Participation de “mentors” Le projet s’est monté en “un peu moins d’un an”, indique Charlotte Warembourg. Au sein d’Amgen, une équipe transversale s’y est consacrée, intégrant, autour d’un chef de projet, les services réglementaires, juridiques, compliance et communication. “Nous avons surtout contribué à l’organisation d’un point de vue contenu : définir le sujet, la façon dont nous souhaitions le traiter et les participants que nous voulions.” Au final, le hackathon a regroupé environ 80 participants, soit une dizaine d’équipes. Amgen a également fait venir des “mentors”, dont deux professionnels de santé – Mario Di Palma, oncologue et à l’époque chef du service ambulatoire de l’Institut Gustave Roussy (Villejuif), et Dominique Yerle, infirmière coordinatrice des parcours de soins complexes en oncologie et médecine interne à l’Institut universitaire du cancer de Toulouse Oncopole – et deux patientes expertes diplômées – Anne Schweighofer et Michelle Laurent. Formée à l’Université des patients, au sein de l’Université Pierre et Marie Curie, Anne Schweighofer avait pour rôle de guider les participants et de valider l’intérêt des solutions proposées pour le patient. “Je passais à chaque table, dans chaque pièce, demander aux équipes ‘que proposez-vous ? qu’avez-vous développé ?’. J’avais en face de moi des développeurs, des codeurs, des industriels, des entrepreneurs… me vantant l’intérêt de ‘tout avoir sur mon téléphone’. Oui mais cela n’a d’intérêt que si la solution apporte une plus-value au patient, si elle s’inscrit dans un quotidien. Je leur demandais alors s’ils avaient pensé à tel aspect, à intégrer telle donnée, etc.” Une expérience non rémunérée mais qui lui a permis de démarrer son activité en tant que patiente experte. Depuis, elle a créé sa société, Patient Conseil, et renouvelé l’expérience avec Janssen, au mois d’avril. Une double technologie d’IA et de chatbot élue Le hackathon a duré 48 h, pendant lesquelles “les participants ont travaillé d’arrache-pied, raconte Charlotte Warembourg. Un jury s’est réuni le dimanche soir, à l’issue du week-end, avec d’autres experts que les mentors : nous ne voulions pas qu’il y ait de favoritisme. Il a donc découvert les projets. Une tendance se dégageait : la conception de chatbot. Trois projets se sont retrouvés en short list, avant qu’un lauréat ne soit nommé : Medical Assist, un projet d’assistant personnel médical utilisant la voix du patient, pensé pour les assistants de domotique comme Google Home”. Deux frères à la manoeuvre, Pravin Boolaky et Ravi Boolaky, qui “ont monté en deux jours une intelligence artificielle qui demandait évidemment à être travaillée, poursuit Charlotte Warembourg. Le projet a paru pertinent pour les patients en perte d’autonomie et peut-être moins enclins aux technologies type smartphone”. Pravin Boolaky détaille sa solution : “nous proposions une double technologie : Avex, que nous avons créée et qui permet de connecter un écran à un assistant vocal type Google home et de retranscrire sur cet écran (PC, smart TV…) l’échange oral, et une technologie de marketing basée sur l’intelligence artificielle que nous avons remaniée. Le but était de fluidifier et d’automatiser le process de la prise de rendez-vous de chimiothérapie. L’équipe soignante, dans un back-office, pouvait pousser les informations (date du rendez-vous, validation de la prise de sang…), le patient une fois chez lui pouvait interroger Google Home et obtenir une réponse plus humaine qu’un e-mail, par la voix et l’écran, enfin les professionnels de santé pouvaient être aiguillés sur la décision à prendre, grâce à des analyses et statistiques”. Le hackathon d’Amgen était pour eux une première incursion dans le domaine médical. “Nous avions travaillé sur d’autres projets dans d’autres domaines, le e-commerce surtout, précise Pravin Boolaky. Le challenge était aussi pour nous de réussir à adapter notre technologie à un autre secteur.” Un temps d’incubation de deux mois était prévu pour le lauréat, à raison d’une réunion par semaine, principalement chez BeMyApp. “Une série de réunions a également été mise en place au sein d’Amgen, ajoute Charlotte Warembourg, pour que les lauréats bénéficient de toutes les compétences de l’entreprise : compétences réglementaires, questions de confidentialité des données, d’éducation de l’intelligence artificielle, de responsabilité en cas d’erreur de cette dernière, etc. Il s’agit d’un mécénat de compétences”. Les freins à la concrétisation du projet Mais la solution n’a jamais vu le jour. Charlotte Warembourg pense que “les porteurs de projets avaient beaucoup d’espoir mais ils ne se sont pas rendus compte de toutes les contraintes idoines, notamment juridiques”. Elle admet toutefois “n’avoir pas pu obtenir de retour de la maison-mère d’Amgen sur le projet. Nous sommes la filiale d’un laboratoire américain et ce type de décision sur un partenariat pérenne doit être visé par la maison-mère. Peut-être n’en avions-nous pas assez discuté en amont. C’était aussi une première fois en externe pour Amgen France. Les lauréats attendaient peut-être plus de nous”. Si Pravin Boolaky reconnaît l’investissement total d’Amgen en matière d’accompagnement – “nous avons pu poser toutes nos questions, ce projet nous a beaucoup appris” -, il reconnaît également le poids de la réglementation en santé – “nous le savions mais nous ne pensions pas que c’était aussi complexe et sécurisé” – et regrette la décision d’Amgen de ne pas aller plus loin que du prototypage. “Le laboratoire avait envie de créer quelque chose mais, dans l’exécution, ça s’est essoufflé.” Manquait aussi selon lui un “price pool”. D’autres laboratoires pharmaceutiques ont par la suite été sollicités, en vain. “Medical Assist a été stoppé mais nous avons toujours la technologie.” Pour John Karp, “deux mois d’incubation pour avoir une chance de succès, c’est très court mais cela fait partie de notre méthodologie. Nous estimons qu’entre deux et trois mois suffisent pour faire ses preuves : plutôt que de perdre du temps à développer un projet sur plusieurs années, nous essayons déjà de valider son intérêt. C’est une étape qui fonctionne”. Il assure que la quasi-totalité des programmes débouchent sur une commercialisation ou un développement de produit, qui peut être aussi internalisé, pour les propres besoins de l’industriel. “Au-delà, il y a un aspect communication important dans un hackathon, qui donne une très grande visibilité à l’organisateur et lui permet de rencontrer beaucoup de partenaires de l’écosystème.” En effet, si Amgen n’a pas prévu à court terme d’organiser un nouvel hackathon, le dernier en date a créé une émulation et ouvert l’entreprise aux start-up, qui a entamé une démarche beaucoup plus large de collaboration avec ces jeunes pousses et fait en sorte d’acculturer ses équipes internes aux sujets de transformation digitale. Le projet en chiffres – Un an de préparation – Une équipe cross-fonctionnelle – Environ 50 000 € de budget – 48 h de hackathon – 80 participants – 3 projets en short-list – 1 lauréat – 2 mois d’incubation, à raison d’1 réunion par semaine chatbotIndustrieIntelligence Artificielleoncologiestart-up Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Hackathons santé : quelles attentes pour les organisateurs ?