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Accueil > Industrie > Anatomopathologie et IA : la filière en quête d’un modèle économique

Anatomopathologie et IA : la filière en quête d’un modèle économique

Si aujourd’hui 95% des diagnostics de cancer sont faits par un pathologiste, cette discipline est encore méconnue. L’étude des lésions des tissus a pourtant connu ces cinq dernières années une épiphanie, grâce à la numérisation des lames et à l’utilisation de l’intelligence artificielle qu’elle permet. Le modèle économique derrière ces évolutions majeures reste cependant difficile à trouver. Quel est le présent et l’avenir de l'IA en anatomo-pathologie ? 

Par Romain Bonfillon. Publié le 28 février 2023 à 22h30 - Mis à jour le 23 mars 2023 à 14h53
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Les points clés

Le coût de la numérisation des lames histologiques et du stockage des données qui en sont issues est, pour beaucoup de structures, prohibitif.


Aucun modèle économique n’existe aujourd’hui pour financer la numérisation et l’IA dans les laboratoires privés d’anapath ; les structures publiques bénéficient, quant à elles, d’aides. Mais largement insuffisantes pour transformer la filière.


La création et le remboursement de nouveaux actes semble être une solution à cette impasse. La valorisation des données peut aussi permettre d’asseoir un modèle économique, mais ce dernier reste conditionné à la numérisation massive de la filière.

Si la majeure partie des pathologistes continue à utiliser exclusivement le microscope pour étudier les lames issues des biopsies, une minorité – comme l’hôpital Bicêtre, le CHU de Rennes, celui de Strasbourg, l’Institut Curie est passée à un usage 100% numérique. “Une autre bonne partie des acteurs de la filière d’anapath, précise le Dr Nicolas Weinbreck, médecin pathologiste, vice-président du groupe Medipath et secrétaire général du Syndicat des Médecins Pathologistes Français (SMPF), est en train de passer progressivement au numérique, et l’utilise ponctuellement.”

Le 26 janvier dernier, à l’occasion de son événement annuel D4Evolution, l’éditeur Dedalus présentait sa nouvelle solution de gestion des laboratoires d’anatomopathologie. Interrogé sur l’avenir de ces données, Frédéric Vaillant, directeur général délégué de l’éditeur en France, affirmait alors que la numérisation des lames histologiques était “une révolution semblable à celle de la numérisation de la radiologie il y a une vingtaine d’années”. 

Pour les acteurs de la filière anapath, les réalités économiques qui se cachent derrière cette révolution en cours sont pourtant bien différentes.  “Avant de pouvoir utiliser les logiciels d’IA qui nous permettent de nous aider pour nos diagnostics, nous devons passer par une étape supplémentaire, explique le Dr Pomone Richard, médecin pathologiste chez Medipath. La lame de verre passe dans un scanner haute résolution, qui va la transformer en une image numérique. C’est une étape supplémentaire dans notre workflow, à la différence des radiologues qui ont directement une image numérisée”. 

Dr Nicolas Weinbreck, Sécrétaire général du Syndicat des médecins pathologistes de France (SMPF)

Selon le Dr Nicolas Weinbreck, “cette étape, aujourd’hui facultative, prend du temps, nécessite de revoir son organisation logistique, coûte de l’argent et consomme énormément de données informatiques. Nous sommes sur des images en couleur (la radiologie travaille en nuances de gris, ndlr), d’une définition bien supérieure à celles de la radiologie (cf. notre encadré sur les freins techniques). La question d’intégrer cette numérisation se pose donc vraiment pour les structures”. Ainsi, le Dr Anne Vincent-Salomon, cheffe du service de pathologie et du pôle de médecine diagnostique et théranostique de l’Institut Curie, dit consacrer chaque année entre 800 k€ et 1,2 M€ dans les équipements de son pôle. “Nous estimons avoir de la chance, reconnaît elle, et la plupart des hôpitaux publics ne bénéficient pas de telles sommes”.

Les enjeux de la génération de données en anatomopathologie

L’enjeu de la numérisation

À l’Institut Curie, le passage à une utilisation du numérique en routine aura mis deux ans et, eu égard au coût de ces techniques, les capacités de numérisation restent encore limitées. “Toutes les lames ne sont pas numérisées, nous en gardons une par patient, explique le Dr Amaury Martin, directeur adjoint de l’Institut Curie. Cette numérisation pose selon lui “un défi de changement d’échelle semblable à celui que peut connaître la bioproduction de vaccins. Produire un vaccin pour quelques personnes et en fabriquer pour des millions, exige des moyens différents. De la même manière, scanner 30 ou 40 lames ou en scanner des milliers demande des moyens techniques et humains très différents”. 

Medipath a également opté pour “une utilisation raisonnable de la numérisation et du stockage”, confie le Dr Pomone Richard.  Une nécessité économique puisque, à titre indicatif, le seul scanner permettant de numériser les lames histologiques coûte entre 150 k€ et 450 k€ euros. L’aspect “stockage” a également un coût élevé, vraisemblablement prohibitif pour la plupart des structures. “La grande question qui se trouve derrière est celle-ci, explique le Dr Nicolas Weinbreck : vais-je conserver mes données sans limite de temps ? Si l’on fait ce choix, on se retrouve très vite avec des volumes de stockage considérables. La plupart des structures qui fonctionnent sur du numérique en routine vont être amenées à ne conserver leurs images que sur un certain laps de temps “usuel” au terme duquel plus de 95% des dossiers seront définitivement clos. Si j’ai besoin de revenir sur ces dossiers, je renumériserai les lames. Il est plus économique de procéder ainsi que de tout garder, ne serait-ce que pendant un an”.

Etape 2 : l’IA, mais pour encore combien de temps ? 

Dr Pomone Richard, médecin pathologiste chez Medipath

L’intelligence artificielle a fait son arrivée dans les services d’anatomopathologie il y a environ 3 ans. Medipath est l’une des premières structures à avoir utilisé ces logiciels en routine, d’abord sur le cancer de la prostate en deuxième puis en première lecture. “Nous allons également déployer cette année un outil d’IA pour le cancer du sein et, pour le cancer de l’estomac, l’an prochain”, confie le Dr Pomone Richard.

L’Institut Curie s’y est également mis récemment et a pu, avec la société Ibex Medical Analytics, démontrer la performance, la fiabilité et la mise en application clinique d’un algorithme d’IA pour le diagnostic des biopsies mammaires. Le logiciel est utilisé en routine par l’équipe israélienne qui a codéveloppée cette IA avec Curie, mais pas encore en France. “Nous ne l’utilisons pas encore au quotidien pour le soin puisqu’il faut que ces outils aient une cotation CCAM (Classification Commune des Actes Médicaux, qui permet d’établir un honoraire sur un acte technique spécifique, ndlr), explique le Dr Anne Vincent-Salomon. À terme, elle imagine cependant très bien l’usage qui pourrait en être fait : “nous pouvons imaginer que les lames soient screenées la nuit par l’algorithme, et ensuite triées par ordre de priorité : les cancers infiltrants chez les femmes jeunes, les cancers infiltrants nécessitant des examens complémentaires, puis les lésions bénignes.”

Dr Anne Vincent-Salomon, cheffe du service de pathologie et du pôle de médecine diagnostique et théranostique de l’Institut Curie

La filière anapath achoppe cependant sur la question des coûts engendrés par ces nouvelles techniques. Une circulaire de la DGOS datant d’avril 2022, et saluée par le SMPF, a permis de libérer une enveloppe de 20 M€ pour financer la numérisation des services d’anatomie pathologique des centres hospitaliers publics. Le syndicat des pathologistes a émis des réserves concernant ce montant, jugé largement insuffisant. “Au regard du coût pour un CHU comme Strasbourg (1M€ au total pour passer au tout numérique, sur un volume de 30 000 examens/an, ndlr), nous sommes très en dessous du minimum nécessaire pour financer la numérisation de la filière, ne serait-ce que pour les structures publiques”.

Pour les structures privées, qui représentent 75% de l’activité de l’anatomopathologique française, le problème est tout aussi criant puisque c’est sur leurs fonds propres qu’elles financent la numérisation de leurs services et l’utilisation de l’IA. “Cette contrainte financière repose sur un pari, poursuit le Dr Nicolas Weinbreck. La société Medipath a fait le choix d’investir dans le développement de ces nouvelles technologies, en se disant que c’est un tel plus pour les patients que les pouvoirs publics financeront ces prestations de soins. Très clairement, nous n’allons pas pouvoir continuer à financer ces technologies sur fonds propres. Si dans les mois qui viennent, nous ne trouvons pas de modèle économique, nous allons devoir arrêter. Nous en sommes là”, regrette le Dr Nicolas Weinbreck. Ce dernier, en tant que président du SMPF (qui représente aussi bien les médecins pathologistes du privé que du public, ndlr), s’est tourné vers les financeurs publics pour demander que l’acte de numérisation et celui du stockage, voire celui de l’utilisation de l’IA, puissent être financés. “La Sécurité sociale, a encore du mal à appréhender ces outils et ce qu’ils apportent, poursuit-il, car ils sont encore très récents et évoluent très vite. Des pistes de réflexion sont amorcées, mais aucun engagement n’a encore été pris. Nous nous sommes également tournés vers les mutuelles, ajoute-t-il. Cela les a intéressées, mais elles n’ont pas réussi à sortir un modèle économique cohérent”.

À date, seul l’acte de diagnostic d’anapath ouvre droit pour les praticiens à un remboursement par la Sécurité sociale. “Sur la base du tarif opposable, personne n’est aujourd’hui capable de financer de façon pérenne, ni la numérisation, ni l’intelligence artificielle…et encore moins les deux”, conclut Nicolas Weinbreck.

La numérisation et l’IA peuvent-elles créer de la valeur ?

L’un des premiers axes de création de valeur repose sur des économies de moyens -matériels et humains – que pourraient à terme permettre la numérisation et l’IA en anapath. “Aujourd’hui, analyse le Dr Nicolas Weinbreck, les structures qui ont ce recul, comme Medipath, observent que le gain de temps est inconstant, il peut être positif, négatif ou neutre selon l’application. Le modèle qui consiste à dire que cette numérisation sera financée sur le futur temps médecin gagné, ne fonctionne donc pas encore.”

Trois autres modèles économiques peuvent permettre de créer de la valeur grâce à l’intelligence artificielle : le brevet (accords de licence et/ou créer une spin-off dans le cas des structures publiques), la collaboration, la fourniture d’images. “Concernant l’anatomopathologie, la valorisation peut se faire au travers de collaborations, nous le faisons déjà, et de fourniture d’images, estime Amaury Martin, qui est également directeur de la valorisation et des partenariats industriels de l’Institut Curie. Mais le manque de moyens alloués à la numérisation de la filière est pour lui un élément bloquant. “Pour conduire le changement, il y a d’abord une nécessité d’investir massivement”, résume-t-il.

L’IA en santé peut-elle créer de la valeur ?

Valoriser la donnée

Alexandre Blanchot, Business Development Manager chez Medexprim

La donnée d’anapath est particulièrement précieuse car riche d’enseignements sur une pathologie. Néanmoins, rappelle le Dr Nicolas Winbreck, “en tant que structure médicale, Medipath n’a pas le droit de tirer des profits de la vente de ces données. Elles sont donc cédées au coût réel” (coût du logiciel, du personnel mobilisé et du stockage, ndlr). Des intermédiaires entre les fournisseurs de données, privés ou publics, et les grandes industries pharmaceutiques peuvent néanmoins permettre de dégager de la valeur, de manière légale et sécurisée. PathAI aux États-Unis ou Medexprim en France en ont fait leur spécialité. Cœur de métier de cette dernière : la donnée multiomique (c’est-à-dire provenant de multiples sources) et multicentrique. “Nous sommes un opérateur logiciel qui permet d’agréger et de structurer une donnée autour d’une question clinique, rappelle Alexandre Blanchot, Business Development Manager chez Medexprim. Nous avons commencé avec l’imagerie classique. L’histopathologie, depuis qu’elle se numérise, vient enrichir nos jeux de données”. Concrètement, ces dataset sont ensuite vendus à l’industrie pharma pour lui permettre de faire des études rétrospectives, de l’inclusion dans les essais cliniques ou pour développer des algorithmes d’IA lui permettant de trouver des corrélations génétiques basées sur les lames d’histologie. Pour ce faire, la donnée d’anapath doit “dialoguer” avec d’autres types de données. “La donnée d’anatomo-pathologie a un intérêt décuplé lorsqu’elle est enrichie d’autres données, comme celles issues de la génomique, confirme le Dr Amaury Martin. Ensemble, elles permettent de dresser un profil détaillé du patient et d’aller très loin dans la médecine de précision”.

Dr Amaury Martin, directeur adjoint de l’Institut Curie, est en charge de la valorisation et des partenariats industriels

Économiquement, la donnée brute n’a que peu de valeur. C’est le fait de la structurer, de l’enrichir et d’établir des corrélations entre plusieurs sources de données qui constitue le véritable gisement de valeur. “Le prix d’un dataset, confie Alexandre Blanchot, varie énormément, de quelques centaines d’euros par patient a plusieurs milliers d’euros dans le cas de jeux de données très complets et/ou de patients pouvant être extrêmement rares. Le cas d’usage et l’interlocuteur est aussi déterminant pour fixer le prix, ajoute-t-il. Si une start-up française nous demande des données de digital pathology enrichies avec des données cliniques, génomiques et d’IRM en vue d’une soumission réglementaire ou un entraînement d’algorithme, elle ne paiera pas le même prix qu’un acteur comme  Johnson & Johnson qui nous demanderait le même dataset”.

Medexprim fait parler les données

Une nécessité de structurer la filière

Confrontés peu ou prou aux même difficultés, les acteurs publics et privés ont, de leur propre aveu, des intérêts communs et la nécessité de se structurer. “La collaboration public/privé est certes compliquée, c’est ce que nous avons pu constater historiquement, note le Dr Nicolas Weinbreck, mais elle est indispensable. Au vu des enjeux de la numérisation de l’anatomopathologie, et notamment de l’apport de l’IA en aval, un pays comme la France a une opportunité de se positionner à très haut niveau, mais on ne pourra pas le faire sans le volume de données généré par les structures libérales, et pas non plus sans l’expertise et l’habitude de la recherche des CHU et des CLCC”. Derrière l’enjeu de compétitivité pour la France, se trouve également celui de la qualité des soins pour les patients. En l’absence de modèle économique, certaines structures d’anapath réfléchissent à faire payer au patient, sous la forme de dépassements d’honoraires, l’usage de l’IA, confie le président du SMPF, qui condamne le risque d’une médecine à deux vitesses.

Promouvoir une filière moderne et innovante, porter ensemble auprès des pouvoirs publics les besoins des structures, mettre la pression sur les fournisseurs de solutions logicielles pour uniformiser rapidement les technologies et les process…ce ne sont là que quelques-uns des enjeux que pourront porter bientôt les membres d’une taskforce dédiée à l’anatomopathologie et initiée par France Biotech. Elle doit voir le jour en mars 2023.

Des freins techniques au développement de la filière

Pour être valorisée, la donnée doit être interopérable. Or, l’anatomo-pathologie française souffre de plusieurs handicaps. Le système de codage des lésions utilisé en France – ADICAP – est spécifique à notre pays. Un vrai problème pour envisager une valorisation des données à l’international. D’autre part, la France utilise des lames dites safranées (coloration jaune) alors que les autres pays utilisent majoritairement le bleu. Des systèmes de retraitement de l’image, plus ou moins efficaces, existent mais d’importants biais sont induits par l’hétérogénéité des colorations. Aussi, et quel que soit le pays, les images numérisées de lames histologiques sont jusqu’à 1000 fois plus lourdes que celles de radiologie. Leur stockage est donc très coûteux et l’exploitation de ces fichiers exige des systèmes informatiques particulièrement performants. 

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Les développeurs d’IA cherchent eux aussi leur modèle

“Construire un algorithme d’aide au diagnostic ou pronostic est long, compliqué et demande beaucoup d’étapes de validation entre informaticiens et médecins”, rappelle le Dr Pomone Richard, médecin pathologiste chez Medipath, qui a contribué au développement de la solution d’Ibex (Galen Prostate) adaptée au cancer de la prostate. Si la logique voudrait que les co-développeurs d’une solution (comme l’est également l’Institut Curie) aient des avantages tarifaires, le Dr Nicolas Weinbreck dit ne connaître personnellement “aucune structure qui puisse bénéficier d’une utilisation gracieuse”. Les développeurs d’IA ont un investissement en R&D colossal, compliqué à amortir. “Tant pour Ibex que pour des sociétés françaises, qui sont un peu moins en avance, mais qui ont un énorme potentiel (citons par exemple la start-up Primaa, la licorne Owkin et Tribun Health) il va falloir trouver un modèle économique pérenne”, conclut Nicolas Weinbreck.

Romain Bonfillon
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