Accueil > Industrie > Christian Fillatreau : “Le business des industries de la e-santé ne porte pas sur le numérique mais sur la santé” Christian Fillatreau : “Le business des industries de la e-santé ne porte pas sur le numérique mais sur la santé” Après avoir présidé pendant près de dix ans TIC Santé Nouvelle-Aquitaine, Christian Fillatreau a rejoint l’Alliance innovation santé Nouvelle-Aquitaine (ALLIS-NA) au mois d’avril, une association de quatre clusters régionaux spécialisés en santé où le numérique sera couvert de façon “transversale”. Le nouveau président d’ALLIS-NA explique à mind Health ce choix et cette nouvelle organisation territoriale. Par . Publié le 19 juin 2020 à 17h00 - Mis à jour le 08 janvier 2021 à 18h49 Ressources Les statuts de l’Alliance innovation santé Nouvelle-Aquitaine (ALLIS-NA) ont été validés le 27 avril et vous avez été nommé président de cette association. Quelle en est la genèse ? Ce n’est pas un hasard. L’idée a vu le jour concomitamment à la réforme des grandes régions, la Nouvelle-Aquitaine fédérant depuis trois régions : Aquitaine, Poitou-Charentes et Limousin. Sur le plan de son organisation sanitaire, la Nouvelle-Aquitaine se caractérise par une faible densité de population avec une une concentration très forte sur la métropole de Bordeaux ; il est donc évident que l’accessibilité aux soins y constitue une problématique forte. D’autant que nous sommes confrontés à deux phénomènes convergents que sont une population particulièrement vieillissante – le Limousin est la région la plus âgée de France – et une désertification des territoires reculés du littoral, ce que les démographes appellent l’héliotropisme. Une des premières utilités sociales d’ALLIS-NA est justement sa mission de think tank sur une réflexion régionalisée de l’organisation sanitaire. Elle est aussi le fruit d’un constat : la région ne se limitait pas du point de vue de l’innovation en santé, comme il est coutume de le dire, au potentiel médico-scientifique et industriel de la métropole de Bordeaux. Elle est dotée de clusters vivants, qui ont l’avantage d’une implantation territoriale justement. Ainsi Invivolim, très investi sur les biotechnologies et enraciné à Limoges, est membre fondateur d’ALLIS-NA. La Technopole Grand Poitiers propose un accompagnement de type incubateur de tous les industriels en santé de Poitou-Charentes. À ces deux clusters aux implantations territoriales sur les anciennes régions fédérées, sont venus naturellement s’ajouter ceux à l’implantation plus métropolitaine, à Bordeaux – nous quittons la logique de la couverture territoriale pour aborder la question de la couverture thématique – : le GIPSO, plus orienté sur les molécules et l’innovation dans le domaine pharmaceutique, et le Réseau du dispositif médical en Nouvelle-Aquitaine (RDM-NA) qui couvre donc les DM, implantés ou non (exosquelette ou canne intelligente par exemple), jusqu’au concept de l’homme réparé ou connecté. (Ces trois autres clusters sont également membre fondateurs, ndlr.) Que devient TIC Santé Nouvelle-Aquitaine, qui se consacre au numérique en santé, et la structure Digital Aquitaine à la création de laquelle il a participé ? La e-santé constituait naturellement une cinquième colonne. Mais avec TIC Santé NA, nous avons été confrontés à une difficulté d’ordre juridique puisque, a contrario des autres entités évoquées, TIC Santé NA n’est pas un cluster mais un domaine d’excellence de Digital Aquitaine et n’a plus de personnalité morale. Ce choix a été opéré il y a cinq-six ans, et il avait sa pertinence, au moment de réunir au sein de Digital Aquitaine toutes les forces vives de l’économie numérique et de créer une mégastructure. Nous n’étions pas alors dans une logique de convention, de collaboration : il s’agissait d’une structure inclusive. Vous avez donc démissionné de la présidence de TIC Santé Nouvelle-Aquitaine et de la vice-présidence de Digital Aquitaine. Quand ALLIS-NA a été décidée, j’ai en effet été confronté à cette difficulté. Je ne pouvais pas dire à l’instant T “mes chers adhérents je vous emmène ailleurs” et Digital Aquitaine a souhaité conserver un domaine TIC Santé. Il a donc fallu que je choisisse. Et si j’ai choisi, c’est sur la base de ce que j’ai considéré comme étant ma cohérence et ma pertinence : le business des industries de la e-santé ne porte pas sur le numérique mais sur la santé. La société est devenue numérique et le numérique n’est plus une finalité en soi. Ne confondons pas la fin et les moyens. La dynamique se situe entre les acteurs du monde de la santé et pas dans une transversalité, une synergie de ceux qui ont des problématiques numériques. J’ai donc démissionné, dans un souci de clarté, et l’assemblée générale constitutive d’ALLIS-NA a souhaité me confier la présidence. Deux structures d’accompagnement des acteurs de la e-santé vont donc cohabiter en Nouvelle-Aquitaine ? Digital Aquitaine regroupait plutôt l’écosystème numérique. Nous avons changé de prisme et avons préféré regrouper toutes les forces vives de l’écosystème en santé dans un seul pôle de compétences. C’est un choix stratégique régional. Nous couvrons bien sûr la e-santé de manière transversale, que ce soit dans les biotechnologies, dans l’homme réparé, autour des biomatériaux, des DM connectés, du suivi du parcours de soins, de la télémédecine, de l’analyse des données, de l’intelligence artificielle ou encore sur les aspects organisationnels du système de santé adossés à des pratiques numériques. Ce serait absurde qu’ALLIS-NA n’embrasse pas les problématiques de e-santé. Comment un acteur sur le marché de la e-santé peut-il, lui, choisir entre ces deux structures ? Il faudra faire preuve de pédagogie. Certains pourraient avoir intérêt à adhérer à ALLIS-NA d’une part et à Digital Aquitaine d’autre part. Il me paraissait légitime de laisser les adhérents choisir. Voilà pourquoi le paysage s’est quelque peu complexifié mais, me semble-t-il, il devrait s’assainir au moment où ALLIS-NA lancera l’appel à adhésion, soit début 2021. Nous sommes encore aujourd’hui dans une phase préfigurative. Début 2021, les acteurs se détermineront, évalueront l’intérêt à rejoindre l’une, l’autre structure ou les deux. Je m’interdis toute manipulation en la matière. Il y aura à un moment une sorte de carrefour décisionnel pour ces acteurs. N’est-il pas possible d’imaginer un jour ALLIS-NA travailler avec Digital Aquitaine ? Je ne vois pas pourquoi nous n’établirions pas de convention de partenariat. Nous avons évidemment des choses à faire ensemble et je suis intimement convaincu que le partenariat est pertinent. De quels financements a bénéficié ALLIS-NA ? Évidemment, le premier socle de financement et de recettes s’inscrit dans une subvention de la Région Nouvelle-Aquitaine. Je ne peux en communiquer le montant : le dossier de subvention a été déposé à la région mais la commission permanente ne s’est pas déterminée sur son montant. Ce sera fait mi-juillet et elle nous sera versée dans la première quinzaine de septembre. Mais il faut savoir que les clusters fondateurs disposent aujourd’hui d’une subvention de la région. Il s’agit donc aussi d’un regroupement des subventions pré-existantes, pas d’une nouvelle subvention ex nihilo. Nous allons faire en sorte que ces financements se trouvent rassemblés sous la bannière ALLIS-NA. Les adhésions constituent un autre socle bien sûr. Quel en sera le montant ? Et quel volume d’adhérents visez-vous ? Je n’en communiquerai pas le montant mais, en termes de cible, nous pouvons identifier 250 entreprises dans l’écosystème santé en Nouvelle-Aquitaine. Non seulement c’est une cible mais ce serait le Graal. Des universités, des grandes écoles d’ingénieurs et des instituts de recherche pourraient aussi nous rejoindre (Inria, Estia, universités de Bordeaux, de Poitiers, de Limoges…). Ce chiffre de 250 inclut les adhérents actuels des quatre clusters fondateurs, soit entre 100 et 150, qui adhéreront à ALLIS-NA en janvier 2021 et ne pourront plus adhérer à leur cluster actuel. Nous pouvons imaginer qu’une grande majorité suivra. En termes de budget, nous serons également amenés à développer probablement des activités de prestations qui feront entrer des recettes que je qualifierais d’accessoires mais nous pourrons aussi émarger très logiquement à des appels à projets européens thématiques sur lesquels nous serons en bonne situation de coordination. Où seront situés les locaux d’ALLIS-NA ? Des recrutements sont-ils prévus ? ALLIS-NA occupera trois sites dès 2021, à savoir les sites des clusters fondateurs : Bordeaux, Limoges et Poitiers. Le siège social se situe aujourd’hui à Bordeaux : nous sommes hébergés momentanément par ADI (Agence de développement et d’innovation de la Nouvelle-Aquitaine, ndlr). Nous avons quelques pistes pour nous installer ailleurs : nous cherchons un site près du campus universitaire de Bordeaux, un lieu qui nous permette de rester justement en connection avec le monde de la recherche et de la formation. L’objectif est ensuite d’ouvrir des bureaux rapidement sur Bayonne et La Rochelle. Nos salariés aujourd’hui sont ceux des clusters, soit une task force de 5 à 6 équivalents temps plein. Nous travaillons de manière fédérée. Des recrutements sont à venir bien sûr. Quand sera connue la feuille de route 2021-2022 d’ALLIS-NA ? C’est notre cahier des charges pour l’année 2020. Le second semestre sera aussi consacré à structurer l’organisation de la gouvernance et son staff. Je souhaite pouvoir co-construire cette feuille de route avec d’ores et déjà des adhérents actifs. CHRISTIAN FILLATREAU Depuis avril 2020 : président d’Alliance innovation santé Nouvelle-Aquitaine (ALLIS-NA) 2011-2020 : président du cluster TIC Santé Nouvelle-Aquitaine 2005-2018 : directeur général adjoint de l’Institut Bergonié 2005-2011 : professeur associé à Sciences Po Bordeaux 1997-2005 : directeur des affaires médicales et de la recherche clinique du CHU de Bordeaux 1988-1997 : directeur des ressources humaines du CHU de Tours IndustrieIntelligence Artificiellepôle de compétitivitéRecherchestart-upTélémédecine Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind