Accueil > Industrie > François Nicolas (Guerbet): “Nous sommes désormais autonomes sur le développement d’un logiciel d’IA” François Nicolas (Guerbet): “Nous sommes désormais autonomes sur le développement d’un logiciel d’IA” La crise sanitaire a accéléré la transformation numérique de nombreux laboratoires pharmaceutiques. François Nicolas, vice-président en charge de la R&D et Chief Digital Officer chez Guerbet, détaille pour mind Health les premiers résultats issus de la mise en place d'un nouveau business en IA appliquée à l'imagerie diagnostique, s'appuyant sur les partenariats noués avec IBM Watson Health et InterSystems. Par Camille Boivigny. Publié le 01 juin 2021 à 17h07 - Mis à jour le 21 septembre 2021 à 17h05 Ressources La crise sanitaire a-t-elle impacté la stratégie globale de Guerbet, en R&D ou sur votre projet IA ? François Nicolas : Un certain nombre d’examens non prioritaires ont été repoussés, les radiologues ont cessé une partie de leur activité, surtout durant le premier confinement. A contrario, compte-tenu du besoin en imagerie en termes de scanners avec produit de contraste pour observer les complications possibles chez les patients atteints de COVID-19, nous avons été très sollicités, en urgence, pour un volume significatif de produits de contraste Rayons X. Quant à l’intelligence artificielle, la crise a renforcé l’idée qu’elle était fondamentale pour améliorer la productivité des radiologues et la gestion des pics d’activité, en s’intégrant facilement dans de nouvelles méthodes de travail. Que prévoyez-vous à horizon 2022 en termes d’IA et de numérique ? FN : Notre stratégie digitale est duale. Premièrement en termes de core business, l’imagerie diagnostic, nous pensons que le digital constitue un moyen de différencier Guerbet par rapport à ses concurrents. La solution Contrast&Care par exemple, logiciel connecté aux injecteurs apporte une traçabilité en temps réel quant à la dose reçue par un patient. Les niveaux de conformité et de productivité au sein de l’hôpital s’en trouvent accrus. Nous bâtissons le second élément stratégique avec un nouveau business en IA permettant d’apporter une valeur propre à nos solutions dans ce domaine, en améliorant la qualité diagnostique par exemple, et non plus une valeur combinée avec notre cœur de métier. Cela vous permet-il de collecter voire de générer vos propres données ? FN : C’est le cas sur le core business. Nous disposons de données d’injection qui permettent, après analyse, d’accroître la visibilité pour nos clients afin qu’ils puissent piloter leur activité. Ces derniers restent propriétaires de ces données. Concernant l’IA, nous nous en sommes procurés pour développer nos algorithmes, à travers de nombreuses collaborations internationales avec des partenaires cliniques. Qu’en est-il des partenariats avec IBM Watson ? FN : Ils sont toujours d’actualité. La solution logicielle portant sur le cancer du foie est actuellement en validation clinique avec pour objectif l’obtention de l’approbation par la FDA d’ici la fin de l’année. En Europe, la nouvelle réglementation ralentit légèrement l’obtention du marquage CE. En 2019, vous ambitionnez de “prendre le lead en interne sur le co-développement de solutions d’IA“, développez-vous désormais vos propres algorithmes ? FN : Totalement. L’équipe composée d’une dizaine de personnes travaille notamment sur le développement en interne d’une solution de détection automatique des métastases osseuses, ainsi que sur la détection précoce du cancer du pancréas qui est un cas d’usage très intéressant pour l’IA. Cela s’inscrit dans le cadre de notre souhait de diversification au-delà des deux organes sur lesquels nous travaillons déjà, le foie et la prostate. Sur le pancréas, l’impact peut s’avérer considérable, compte-tenu de son agressivité, même si cela concerne peu de patients. Pour les métastases osseuses, la volumétrie est plus importante puisqu’il s’agit de tous les patients suivis en oncologie. Nous réfléchissons également au développement de marqueurs innovants, en amont pour les facteurs de risque ou en aval pour les traitements. L’oncologie abdominale demeure notre thème principal. Vous considérez-vous autonomes sur l’activité IA ? FN : Sur nos solutions propres nous le sommes sur la partie algorithmique et nous sommes en train de le devenir sur la partie des développements applicatifs, en utilisant des composants préexistants. Disposant désormais de toutes les compétences en interne pour développer un logiciel d’IA de A à Z, notre ambition en 2022-2023 est d’être capable de parvenir seuls à l’aboutissement d’un des projets développés en interne. Y intégrez-vous les notions d’explicabilité et de confiance ? FN : Intégralement. Nos data sets sont conformes, bien que nous travaillions sur des données générées par différents pays (États-Unis, Europe, Brésil, Corée, Japon). Concernant la validation clinique des algorithmes, nous tentons d’éviter l’écueil consistant à se satisfaire de la mise sur la marché d’un produit et de son marquage. Nous pensons que les études cliniques doivent le plus possible s’approcher de la vie réelle pour comprendre la valeur clinique des algorithmes. Une étude est d’ailleurs en cours en Corée sur les résultats préliminaires de la première version de l’algorithme du foie présenté à l’ECR. Nous cherchons de manière assez forte à comprendre les limitations de l’IA, pour bien délimiter ce qu’elle est capable de faire et de ne pas faire. Cette étude n’est pas prospective mais comprend plus de mille cas et vise à comparer la lecture d’images par des radiologues versus celle d’un algorithme. Les sites étudiés n’ont pas été utilisés lors de l’entraînement de l’algorithme, ce qui se rapproche considérablement de la vie réelle puisque le test est réalisé sur des données complètement différentes de celles d’entraînement. Votre solution permet-elle une annotation automatique des images ? FN : Il s’agit d’éviter les biais. On ne peut pas établir une annotation automatique dès le départ, sinon le biais de l’algorithme d’annotation se propagerait. Nous progressons étape par étape. La première est une annotation totalement manuelle, dévoreuse en temps. Les métastases osseuses peuvent s’avérer très nombreuses par exemple. La seconde consiste à proposer des annotations afin que les radiologues les valident ou les invalident. Quid des nouveaux produits ou business lancés depuis 2019 ? FN : Nous distribuons deux produits. La nouveauté pour la solution IcoBrain de la start-up Icométrix est que nous la proposons désormais au Royaume Uni, en plus de la France, l’Italie et le Brésil. C’est une manière pour Guerbet d’accélérer la transformation commerciale, pour pouvoir vendre des solutions digitales très différentes des produits de contraste. Plutôt que d’attendre la mise sur le marché des produits que l’on développe ou co développe, nous avons souhaité commencer en avance de phase avec de la distribution. Nous réfléchissons par ailleurs à la prise de participation dans de nouvelles start-up. Qu’en est-il de votre développement en Asie ? FN : Compte-tenu de l’extension territoriale dont Guerbet dispose, nous nous appuyons sur nos filiales et privilégions les ressources locales, dont nous disposons au Japon, en Chine et en Corée. Au Japon, nous sommes en train de monter une étude clinique qui sera active très prochainement, de même qu’en Chine, un partenariat est en train de se contractualiser avec un très gros hôpital chinois. En tant que groupe étranger, en partenariat avec l’entreprise commerciale qu’est IBM, cela peut s’avérer compliqué. En revanche, la perception, dont j’ignore l’origine, selon laquelle la Chine ne serait pas extrêmement rigoureuse quant à ses data est totalement fausse. La notion de data privacy y est très importante. Qu’en est-il du partenariat noué avec InterSystems ? FN : Nous avons récemment lancé une nouvelle version de la plateforme sous-jacente utilisée pour la solution Contrast&Care. Nous visons à ce qu’une cinquantaine d’hôpitaux soient équipés d’injecteurs connectés dans l’année. Nous sommes en phase d’accélération de démarrage, de manière assez large au niveau international, avec des installations en Thaïlande, au Brésil, en Allemagne, Belgique, et en discussion au Mexique. François Nicolas Senior Vice-président R&D, R&I et Chief Digital Officerchez Guerbet depuis septembre 2017 Chief Operating Officer chez Impeto Medical (mars 2017 – juillet 2017 Vice-président, diabetes integrated care chez Sanofi (mars 2014 – mars 2017) Chiffres-clés pour l’année 2020 Création en 1926 Capitalisation boursière de 393 M€ 57,7 M€ d’investissements nets 712,30 M€ de chiffre d’affaires Plus de + de 60, 000 clients dans le monde 8 sites de production spécialisés 2635 employés dans le monde dont 200 en R&D Camille Boivigny base de donnéesbig dataDispositif médicalDonnées de santéEssais cliniquesHôpitalImagerie médicaleIntelligence ArtificielleLogicielPartenariatPatient Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Interopérabilité : Guerbet signe avec InterSystems François Nicolas (Guerbet) : “Le partenariat avec IBM Watson est une manière d’aller relativement vite sur le marché” Guerbet signe avec IBM Watson Health Confidentiels Guerbet prépare sa mue vers le digital