Accueil > Industrie > Hubert Béchart (Pierre Fabre) : “Nous alimentons nos décisions par des faits et non plus des intuitions” Hubert Béchart (Pierre Fabre) : “Nous alimentons nos décisions par des faits et non plus des intuitions” Hubert Béchart, head of data science pour le groupe Pierre Fabre, était en décembre dernier l’invité d’un Club mind Health consacré aux données de santé. Il évoquait alors le tout jeune "centre d’excellence de la donnée" sur lequel la direction de l’entreprise s’appuie pour mener à bien sa transformation numérique. Mais ses travaux, au service d’une efficacité éclairée, influencent l’activité de tous les collaborateurs du groupe. Par Romain Bonfillon. Publié le 06 septembre 2021 à 9h38 - Mis à jour le 21 septembre 2021 à 17h02 Ressources Pouvez-vous nous rappeler en quoi consiste votre “centre d’excellence de la data” et quelle en est la genèse ? Le centre d’excellence de la data est né en 2020. Il est rattaché directement à la direction générale de Pierre Fabre qui a fait le constat que la donnée était présente dans absolument tous les secteurs de l’entreprise mais encore insuffisamment exploitée. Elle a voulu en faire l’un des piliers de la transformation du groupe et de l’organisation de ses différentes activités. L’une des missions du centre d’excellence est donc d’organiser la data au sein du groupe. Par ailleurs, notre centre nourrit les réflexions de la direction grâce aux analyses qu’il est amené à produire. Nous alimentons en quelque sorte les décisions de l’entreprise par des faits et non plus des intuitions. Le groupe Pierre Fabre est né en 1962 et fait figure de “vieille entreprise” au regard des digital natives. En créant votre centre d’excellence, s’agissait-il pour vous de résister à cette concurrence et d’agir face à l’essor du e-commerce ? Nous avons en effet fait ce constat, mais il était antérieur à la création de notre centre d’excellence de la data. Pierre Fabre s’est engagé depuis déjà longtemps dans le digital, et plus récemment le e-retail. Le digital n’est cependant pas la data, nous ne sommes pas tout à fait sur les mêmes problématiques. Le digital vise la modernisation d’un écosystème, qui intègre le e-retail mais aussi les réseaux sociaux, les sites institutionnels et les sites de marques. Avec la data, nous sommes beaucoup plus transverses et focalisés sur la maîtrise de la donnée et sa manipulation au sein du groupe. Notre objectif : fournir la bonne information, au bon moment, à la bonne personne Quelles sont concrètement les priorités de votre centre d’excellence de la data ? Nous avons trois missions essentielles. La première concerne la gouvernance de la donnée. Notre patrimoine data est, comme dans beaucoup d’entreprises, précieux mais souvent fragmenté. Cela nuit à sa qualité et au degré de maîtrise que nous avons sur elle. A charge donc pour nous de l’organiser pour générer des jeux de données cohérents, puis d’attribuer des rôles et responsabilités aux intervenants qui la manipulent. Nous sommes pour que tous nos collaborateurs aient un accès aisé aux différents gisements de données de l’entreprise. Pour y parvenir, encore faut-il qu’il y ait une acculturation à la donnée, et c’est précisément notre deuxième mission : démontrer son importance, tout ce que l’on peut faire avec, au travers de techniques avancées ou classiques. En développant cette culture de la data, qui suppose de mettre en place des actions de formation, nous faisons le pari que chacun pourra être force de proposition pour améliorer les process et le quotidien de l’entreprise grâce à la donnée. Souvent en effet, les meilleurs cas d’usage sont ceux qui proviennent du terrain puisqu’ils mettent en lumière des problématiques très concrètes. Enfin, notre dernière mission concerne ces cas d’usage. Il s’agit d’extraire de la valeur à partir de notre patrimoine de données ou de données externes. Une fois collectée, cette donnée est synthétisée et valorisée par des actions de data analyse. Les visualisations que nous produisons aideront la direction générale à prendre des décisions de manière plus éclairée ou viendront en support aux activités opérationnelles. Notre objectif : fournir la bonne information, au bon moment, à la bonne personne dans l’entreprise. Vous avez travaillé notamment avec l’entreprise Artefact, spécialisée dans le conseil en data transformation, quels sont les principaux partenaires de votre centre d’excellence ? Nous n’avons pas de partenariat privilégié. Nous collaborons avec certaines entreprises en fonction de nos besoins. On a travaillé avec Artefact et beaucoup d’autres entreprises, que nous sélectionnons en fonction de l’expertise que nous cherchons. Au-delà des tâches de data analyse, auriez-vous des exemples concrets de travaux menés par votre centre d’excellence de la data ? Nous faisons également de la data ingénierie pour gagner en efficacité et en qualité de la donnée. Cela consiste concrètement à automatiser des opérations qui sont fastidieuses parce qu’elles reposent sur un jeu de données important ou parce qu’elles comportent un fort risque d’erreurs lorsqu’elles sont saisies à la main. Lorsqu’ils en ont besoin, nous aidons donc de nombreux collaborateurs à remplacer de longues manipulations sur Excel par des traitements automatiques. Une troisième activité consiste à faire de la data science, qui va plus loin encore en termes de valeur extraite de la donnée. C’est là qu’interviennent les techniques avancées comme l’intelligence artificielle. Cela nous permet de faire de la prédiction. Un chercheur va par exemple développer une formule (cosmétique ou pharmaceutique) et veut savoir comment pourraient se comporter ses essais avant de les lancer. Nous développons donc des modèles pour le prédire. La data science nous ouvre aussi la voie à l’exploitation de données non structurées, comme les images ou le texte libre, qui ne s’analysent pas aussi bien que des simples colonnes de chiffres. On voit sur internet que Pierre Fabre recrute des data analystes ou data ingénieurs. Où en êtes-vous de votre processus de recrutement et combien de personnes à ce jour travaillent pour votre centre d’excellence ? Notre politique de recrutement est liée à des besoins pérennes dans l’entreprise, et pas seulement au centre d’excellence de la data qui est déjà constitué d’une dizaine de personnes. Le centre n’a pas vocation à traiter en direct l’ensemble des problématiques data du groupe. Nous pouvons en revanche intervenir en support du recrutement car parfois le besoin n’est pas facile à cerner pour les opérationnels qui peuvent penser avoir besoin d’un data scientist alors qu’il leur faudrait plutôt un data engineer ou un data analyst. Au sein du groupe, nous avons un fonctionnement extrêmement transverse. Sur quels projets précis travaillez-vous en ce moment ? Un projet nous occupe beaucoup actuellement : nous mettons en place avec la direction des systèmes d’information une infrastructure technique qui comprendra une partie plateforme de données pour stocker, organiser et traiter le patrimoine data de l’entreprise, de manière maîtrisée et centralisée. Une seconde partie sera un portail destiné à offrir un service aux utilisateurs. Mais cela ira au-delà d’une simple réponse ponctuelle aux besoins. Par le biais d’un moteur de recherche, nous voulons permettre à nos collaborateurs de trouver de manière autonome la donnée dont ils ont besoin. Ce projet a été lancé au début de cette année et devrait nous occuper jusqu’à la fin de l’année 2022. Hubert Béchart Depuis avril 2018 : “Head of Data Science” pour le groupe Pierre Fabre 2015-2018 : Responsable de la transformation numérique et du développement de la Big data pour le groupe Renault-Nissan-Mitsubishi 2011-2015 : Référent inter-entreprises (Renault et Nissan) dans le domaine de l’’ingénierie Romain Bonfillon Algorithmesbig dataDonnées de santéIndustrieIntelligence ArtificielleMarketing DigitalPlateformesStratégie Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Pierre Fabre choisit le cloud d’Atos