La Poste Santé & Autonomie, CPage et les HCL s’unissent pour créer l’Alliance SIH

Au cœur de la collecte des données et du parcours de soins, les systèmes d’information hospitaliers (SIH) souffrent en France d’un manque d’efficience. “Le bilan à date de la politique de ces 20 dernières années autour du numérique en santé hospitalier est que nous avons entre 200 et 400 logiciels par hôpital, avec chacun leur base de données, leur périmètre restreint et globalement des données qui ne sont pas assez structurées”, résume Dominique Pon, directeur général de La Poste Santé & Autonomie, rappelant qu’environ 80% des données de santé hospitalières en France ne sont pas structurées. 

Les acteurs de l’écosystème des éditeurs hospitaliers ont cru pouvoir résoudre ces problèmes liés à l’hétérogénéité des solutions grâce à l’interopérabilité, mais celle-ci n’est pas simple à mettre en œuvre. “Nous nous retrouvons aujourd’hui avec des systèmes propriétaires et cloisonnés, des interopérabilités imparfaites et donc des ruptures dans les parcours de soins”, poursuit Dominique Pon, qui relève avec inquiétude que nos SIH ne sont pas armés pour l’arrivée de l’intelligence artificielle. 

Une vision commune de l’avenir du SIH

Face à l’accélération de l’innovation en santé suscitée par l’IA, La Poste Santé & Autonomie, CPage et les Hospices Civils de Lyon (HCL) associés au GIE HOPSIS (qui diffuse les solutions logicielles éditées par les HCL, comme le DPI Easily) ont débuté il y a un an environ un travail de rapprochement, en vue de la création de l’Alliance SIH. De ces travaux est d’ailleurs né un livre blanc, qui s’appuie sur ce qui se fait de mieux chez nos voisins européens (en Angleterre et en Espagne notamment) en matière de gestion des données hospitalières. 

L’ambition de l’Alliance SIH est triple : proposer le système d’information hospitalier de demain, porté par des valeurs d’intérêt général et de maîtrise souveraine des données de santé. Une mini révolution dans un écosystème extrêmement concurrentiel. 

À cette triple ambition répondent trois critères techniques intangibles, sur lesquels devra s’appuyer ce SIH du futur : 

• Une architecture des systèmes d’information hospitaliers orientée data. En France, ces SIH sont plutôt orientés application. “Chacune de ces applications a sa propre base de données. Or, on remarque que tous les systèmes qui ont réussi ont fait le choix de centraliser les bases de données”, relève Dominique Pon. 

• L’adoption des standards internationaux pour ces SIH (et donc des trois grands standards sont FHIR, OMOP et openEHR).
• La data stockée doit être ouverte, ce qui n’est pas le cas en France. Aujourd’hui, un hôpital doit passer par plusieurs éditeurs s’il veut accéder à ses propres données. 

“La notion de base de données centralisée, normée et ouverte est ce qui permet de redonner la main aux professionnels de santé pour créer rapidement des cas d’usage”, résume le directeur général de La Poste Santé & Autonomie. 

Une alliance d’acteurs concurrents

Interrogée par mind Health sur les éventuelles difficultés liées à la présence d’acteurs concurrents (Maincare et Easily sur le DPI) au sein de l’Alliance, Virginie Valentin, administratrice du GIE HOPSIS répond : “nous avons la conviction que tous ensemble, nous serons plus en capacité de réfléchir aux évolutions technologiques à apporter à nos solutions et à mettre en commun nos ressources pour repenser l’architecture de nos solutions et qu’elles tendent vers un système basé sur la donnée. Nous avons plus à gagner à travailler tous ensemble plutôt qu’à cheminer chacun dans son coin, avec des solutions qui pourraient, si on les porte tous les 3 ensemble et avec d’autres acteurs qui nous rejoindront éventuellement, avoir un effet transformant sur la vision du SIH à l’échelle nationale. Nous voulons ouvrir la voie pour d’autres éditeurs”

Ainsi, entre le modèle à l’américaine avec une seule société (Epic en l’occurrence) qui écrase le marché et une offre qui reste diverse, l’Alliance SIH a choisi la deuxième option, consistant à se mettre d’accord pour adopter une même vision du SIH de demain, centré sur la data, ouvert et normé. 

Une mise en œuvre progressive 

Cette vision portée par l’Alliance SIH a vocation à servir de modèle puisqu’elle sera très prochainement présentée à l’ANS et à la DNS. Une feuille de route sera présentée dans le courant du second semestre et les premiers cas d’usage devraient être mis en œuvre dès la fin 2025. Derrière la volonté commune de porter un nouveau modèle de SIH, plane cependant l’hypothèse d’un rapprochement plus intime entre les trois membres fondateurs de l’Alliance. Si pour l’heure, ils se sont engagés à partager leur roadmap, ils seraient aussi en mesure, à terme, de proposer une offre commune. Opportunément, Dominique Pon a souligné en conclusion de la conférence de presse que l’alliance des trois éditeurs “compte 600 à 1000 développeurs”. Une force de frappe encore inédite en France, qui pourrait donner naissance à un acteur capable de rivaliser avec la concurrence internationale.