Le dialogue social international de plus en plus structurant pour les grandes entreprises

Alors que l’année 2023 avait été marquée au niveau européen par l’échec de la négociation d’un accord cadre sur le télétravail, c’est le renforcement de la directive sur les comités d’entreprise européens qui a fait l’actualité en 2024. Les grands groupes se sont aussi engagés sur des sujets encore nouveaux à l’échelle du dialogue social international, à l’exemple de l’encadrement de la sous-traitance. 

Dès janvier 2024, l’Union européenne a voulu relancer le dialogue social européen alors que l’année précédente s’était conclue sur une mauvaise note avec l’arrêt des négociations en vue d’un accord européen sur le télétravail en novembre. Suivant cette démarche, les partenaires sociaux continentaux ont signé une déclaration commune qui prévoit de renforcer le dialogue social à tous les niveaux et de désigner un émissaire européen qui sera leur interlocuteur en cas de non-respect de son principe. Ursula von der Leyen s’est également engagée dès le début de son nouveau mandat, à l’été 2024, à faire aboutir un Pacte pour le dialogue social début 2025. Les partenaires sociaux européens sectoriels sont eux parvenus par exemple à se mettre d’accord sur la violence au travail dans plusieurs branches, sur les pénuries de compétences dans le secteur de l’hôtellerie et sur les droits des travailleurs des pays tiers dans le secteur routier.

Renforcement des comités d’entreprise européens

Au niveau des entreprises, la Commission a présenté une proposition de révision de la directive de 2009 sur les comités d’entreprise européens. Partant du constat de failles dans l’application du droit à l’information et la consultation des représentants des travailleurs, le texte présenté en janvier propose plusieurs dispositions destinées à le renforcer. Elles incluent un durcissement des sanctions des entreprises en cas de manquement, la clarification du champ géographique des sujets relevant de l’instance, la garantie de moyens, le temps de consultation accordé et la levée des exemptions. Le Conseil a adopté sa position en juin et le Parlement son rapport en décembre, ouvrant la voie à des négociations de trilogue dès le début 2025. Dans l’année, un CE européen a par ailleurs été institué chez Stellantis.

Les accords internationaux comme outils de progrès

L’année 2024 a par ailleurs été marquée par la signature de nombreux accords mondiaux. Au-delà des dispositions classiques sur la santé et la sécurité des salariés, la liberté d’association, les compétences ou les droits humains, les signataires s’engagent sur de nouveaux sujets de RSE, dans un contexte politique pourtant moins porteur. Ainsi, la filiale du groupe français La Poste, Geopost, a formalisé dans un accord mondial avec la fédération UNI Global Union sa volonté d’atteindre la neutralité carbone en 2040. Le groupe espagnol des casinos Cirsa promet de lutter contre les violences sexuelles et de promouvoir la diversité tandis que le groupe de l’habillement Inditex va consulter les salariés sur les questions liées à l’usage des outils numériques. 

Mais c’est le sujet de la sous-traitance qui a émergé comme point commun de beaucoup de ces accords mondiaux. Geopost s’engage ainsi à limiter la sous-traitance au rang 1 “sous réserve des spécificités locales”, afin de mieux contrôler le respect des droits sociaux le long de sa chaîne de valeur. L’entreprise française veut également inclure la notion de salaire décent dans son dialogue avec ses partenaires commerciaux. La multinationale suédoise du prêt-à-porter H&M promet de son côté de se conformer à un devoir de vigilance auprès de ses fournisseurs dans un accord avec IndustriAll Global Union. Enfin, le groupe bancaire BNP Paribas a fait d’UNI Global Union son “interlocuteur contractuel” dans le cadre de la rédaction annuelle de son plan de vigilance sur le plan social, démarche qui inclut les sous-traitants. Les rapports de durabilité des entreprises imposés par la CSRD, qui doivent être construits en consultant les partenaires sociaux, devront être composés dès 2025 d’indicateurs sur les sous-traitants.