Accueil > Financement et politiques publiques > Pierre Desmarais : L’Europe veut favoriser les échanges de données de santé Pierre Desmarais : L’Europe veut favoriser les échanges de données de santé Après la publication début février d'une recommandation de la Commission européenne pour un format d'échange des dossiers de santé informatisés, l'avocat Pierre Desmarais décrypte les enjeux de ce texte. Par La rédaction. Publié le 01 mars 2019 à 16h47 - Mis à jour le 21 juillet 2022 à 11h04 Ressources La Commission européenne a publié, le 6 février dernier, une nouvelle recommandation pour un format européen d’échange des dossiers de santé informatisés (recommandation C(2019) 800 final), faisant suite à la recommandation C(2008) 3282). L’utilisation de cet instrument permet d’orienter l’action des États membres et du législateur. En 2008, la Commission avait ainsi encouragé les premiers à développer la télémédecine (communication COM/2008/0689 final), ce qui avait donné lieu au décret Télémédecine (décret n° 2010-1229 du 19 octobre 2010). Le document permet donc d’anticiper les évolutions à venir en matière aussi bien d’accès que de partage transfrontalier des données de santé. La Commission constate aujourd’hui encore l’existence d’un grand nombre des formats et des normes utilisés pour la tenue des dossiers patients et leur incompatibilité d’un État membre à l’autre. Cette situation induit une fragmentation du marché et une diminution de la qualité des soins transfrontaliers. Assurer l’interopérabilité permettrait donc de contribuer à l’effectivité de la liberté de circulation et du marché unique du numérique, ce qui justifie cette intervention. Sécurité et interopérabilité parmi les enjeux La Commission identifie en outre deux enjeux auxquels une approche paneuropéenne pourrait répondre. Le premier devrait réjouir la France, préoccupée par la sécurité de données de santé, puisque des solutions numériques européennes et des approches communes sont considérées comme les fondements de la protection des données et de la sécurité. L’argument semble toutefois d’opportunité puisque la centralisation va mécaniquement augmenter le risque, en accroissant l’intérêt d’un piratage. Le second enjeu devrait, au contraire, déplaire aux autorités françaises de protection des données de santé. L’interopérabilité est en effet perçue comme un vecteur d’appui à la recherche scientifique, par l’analyse de « mégadonnées » et l’intelligence artificielle. L’enjeu est de taille pour la France qui tente de limiter la réutilisation des données par la recherche industrielle. D’autant que cette interopérabilité pourrait priver de tout intérêt le Système national des données de santé (SNDS), puisqu’il serait alors possible d’accéder aux données françaises depuis un autre pays de l’Union européenne, sans passer par les fourches caudines de l’Institut national des données de santé (INDS). Ceci étant, la France a le temps de revoir sa position, avant que l’interopérabilité paneuropéenne ne menace le SNDS. La feuille de route de la Commission démontre en effet le retard de notre pays. French bashing ? Jugez par vous-même. La Commission se réjouit de voir des États membres pouvoir échanger des « ordonnances électroniques » dans un contexte transfrontalier par l’intermédiaire de l’infrastructure de services numériques européenne. Or pour mémoire, dans notre pays, le décret relatif à la dématérialisation de l’ordonnance est attendu depuis… 1997. Plutôt que de continuer à réfléchir de façon isolée, peut-être serait-il plus simple de directement intégrer cette infrastructure ? Le retard français n’est pas le seul challenge à relever. Outre les problématiques sémantiques, bien identifiées, il faudrait au préalable traiter les problématiques de « normes médicales ». L’expression de la tension artérielle d’un patient varie en effet entre un médecin français et un allemand. Outre l’interopérabilité et la sémantique, il faudra donc prendre des décisions quant aux échelles appliquées. Enfin, pour assurer la sécurité des données, les autorités devront travailler sur la grille d’habilitation. La tâche fut déjà fastidieuse en France, pour l’accès au DMP. Elle le sera plus encore au niveau transfrontalier puisque si les diplômes sont reconnus entre Etats membres, les référentiels de compétence des professionnels de santé n’ont en revanche jamais été harmonisés. Souhaitons donc bon courage aux personnes en charge du dossier et espérons que la France saisisse cette occasion pour rattraper son retard. PIERRE DESMARAIS 2016 : Obtient la certification ISO27005 Analyste de Risque SI 2012 : Création du cabinet Desmarais Avocats, spécialisé en droit numérique, des données et de l’innovation 2012 : Devient Correspondant Informatique et Libertés (CIL) 2009 : Avocat au Barreau de Paris, spécialisé en droit numérique et de la santé 2012 : Création du cabinet Desmarais Avocats, spécialisé en droit numérique, des données et de l’innovation 2012 : Devient Correspondant Informatique et Libertés (CIL) La rédaction Commission EuropéenneInteropérabilitéRèglementaireTélémédecine Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind