Johanna Michielin (BioLabs): “Construire des communautés d’innovation autour de nos start-up”

BioLabs ouvre en janvier un site dédié à l’accueil de start-up dans les locaux de l’Hôtel-Dieu. Pourquoi avoir choisi cette implantation ?

Avoir cette implantation au cœur de l’hôpital est important pour nous. Les sites BioLabs visent deux objectifs : fournir les équipements nécessaires aux start-up accueillies (bureaux ou équipements de laboratoire) et les intégrer dans l’écosystème de santé. Nous implantons tous nos sites dans des environnements favorables au développement de ces relations, soit au cœur de campus universitaire avec une très forte composante R&D en biotech, soit en milieu hospitalo-universitaire, comme c’est le cas à l’Hôtel-Dieu, soit en milieu industriel. Cela permet à nos résidents de se confronter aux besoins utilisateurs. Être à l’Hôtel-Dieu permet ces interactions précieuses avec des professionnels de santé.

Deuxièmement, toutes ces start-up doivent passer par une phase d’essai clinique. Or, l’AP-HP est le premier promoteur d’essais cliniques en Europe. C’est donc un cadre favorable pour aborder cette phase cruciale dans leur développement. Enfin, être à l’Hôtel-Dieu nous permet de monter un partenariat autour du monde hospitalo-universitaire. Nos start-up profiteront de cette proximité avec l’AP-HP et nos partenaires industriels. Le site se compose de deux espaces : un espace bureaux à l’Hôtel-Dieu et un espace labos, avec 80 paillasses, sur le campus Broussais (14e).

Comment ce nouveau site s’articule-t-il avec l’écosystème déjà en place et le BioLabs de Saclay (Spartners by Servier & BioLabs), qui ouvrira en avril 2023 ?

Le BioLabs de l’Hôtel-Dieu est une composante de l’initiative @HotelDieu et s’insère dans le projet mené par Nicolas Castoldi de développer l’innovation à l’hôpital et les liens avec les start-up, au service du soin. Cette démarche est complémentaire de lieux comme PariSanté Campus, tourné vers la recherche, et Future4Care qui accompagne les start-up plus matures. 

Concernant Spartners by Servier & BioLabs, le projet est très différent de celui de l’Hôtel-Dieu. Monté en partenariat avec Servier, le site sera au cœur du centre de R&D de Servier, dans un environnement industriel, sur le plateau de Saclay qui a ses propres atouts, notamment en termes de centre de recherche. En outre, Servier mettra à disposition des start-up ses infrastructures d’animalerie et potentiellement, pour certaines d’entre elles, l’accès à ses plateformes industrielles. 

Outre l’AP-HP, quels sont vos autres partenaires ?

Essentiellement des industriels. Ils représentent une composante essentielle dans le développement des start-up dès que l’on aborde les problématiques d’industrialisation et d’accès au marché. Autour du projet Hôtel-Dieu, nos deux partenaires fondateurs sont Sanofi et Ipsen, rejoints depuis par Novo Nordisk. Nous intégrerons d’autres partenaires progressivement. Nos partenaires s’engagent à collaborer avec nos résidents et à mettre leur expertise à disposition. Dans le cadre de notre programme de Golden tickets, chaque partenaire peut choisir une ou plusieurs start-up qu’ils jugent prometteuse. Ils financent alors leur première année de résidence chez BioLabs (Novo Nordisk a par exemple sélectionné les start-up MaBSilico et VitroPEP, NDLR). Nous intégrerons d’autres partenaires progressivement.

Quelles start-up seront accueillies au BioLabs Hôtel-Dieu en janvier ?

A date, 8 start-up ont été sélectionnées par notre comité de sélection et trois start-up sont lauréates des Golden Tickets de nos partenaires. À l’ouverture de BioLabs Hôtel-Dieu, nous accueillerons donc plus d’une dizaine de start-up. Sanofi lancera une nouvelle campagne de Golden Ticket en 2023, après celle lancée en janvier 2022 où Combined Therapeutics avait été lauréate, et Ipsen également. 

Quels sont vos critères de sélection ?

Les start-up sont d’abord sélectionnées sur leur qualité scientifique et de leur projet, de l’innovation sous-jacente, ainsi que sur la qualité de l’équipe qui porte le projet. Au-delà de ces critères, nous sommes attentifs à l’adéquation du projet porté par les start-up et la philosophie du projet Hôtel-Dieu, tourné autour de l’innovation au service du soin. Les innovations thérapeutiques en font donc partie, mais également tous les outils permettant aux soignants de faciliter la prise en charge des patients. En revanche, nous n’avons pas de critères de maturité. Notre projet peut également inclure des sociétés installées à l’étranger et qui, à l’occasion d’une première implantation en France, utilisent BioLabs comme point d’atterrissage pour se lancer dans ces partenariats.

Les start-up accueillies à l’HD auront-elles accès à des jeux de données de l’AP-HP dans le cadre de votre partenariat ?

Notre objectif est de faciliter les collaborations entre l’AP-HP et nos résidents. Un membre de la direction de la recherche clinique et de l’innovation de l’AP-HP aura un bureau dans nos locaux et son rôle consistera à faciliter ces échanges. Toutefois, l’accès aux données n’est ni automatique, ni garanti. Il se fera dans le cadre d’une collaboration entre la ou les start-up et l’AP-HP.

Quels indicateurs de succès suivez-vous sur le projet BioLabs Hôtel-Dieu ?

A court terme, les KPIs pour BioLabs sont le nombre de start-up accueillies, avec un taux d’occupation suffisamment important en fin d’année. Nous ambitionnons pour chacun de nos sites d’arriver à 75% de taux d’occupation au bout de deux ans. Autre indicateur : le nombre de partenaires prêts à nous suivre. Nous avons de nombreux partenariats en cours de conclusion, avec des partenaires pharmaceutiques mais également des équipementiers qui sponsorisent nos sites, en mettant à disposition des start-up des équipements de pointe. A plus long terme, nous mesurerons le succès des start-up accueillies. Aux USA, 25% des fonds levés en life science le sont par des résidents de BioLabs. On suit aussi les partenariats conclus entre nos start-up et nos partenaires industriels (accords de licence, rachat, co-développement…) ou encore le nombre de patients traités avec des technologies qui ont vu le jour dans un BioLabs.

Le site qui ouvre en janvier est un site temporaire, préalable à la rénovation globale de l’Hôtel-Dieu qui démarrera en 2026. À quoi ressemblera le site définitif de BioLabs Hôtel-Dieu ?

Une proposition a été faite dans le cadre de l’appel à projet lancé par l’AP-HP par Novaxia et BioLabs. Le lieu final aura une surface de 10 000m2. La partie BioLabs doit encore être travaillée avec l’ensemble des membres de l’écosystème pour être certain qu’il réponde aux besoins de la communauté et qu’il vienne en complémentarité avec les initiatives déjà existantes.

Quels liens auront les sites BioLabs français avec leurs homologues internationaux ?

Nous travaillons déjà en synergie entre les équipes de Saclay et celles du BioLabs Heildelberg, en Allemagne, dont le site disposera d’une surface de 2000 m2 à terme. On espère créer des ponts au cours d’événements rassemblant l’ensemble de nos résidents européens comme les Biolabs Investor days. BioLabs est un réseau qui permet aussi d’attaquer le marché US. Toute start-up en santé a vocation à cibler le marché US. Notre rôle est de permettre le développement de nos résidents à l’international, en facilitant la mise en relation avec des acteurs américains.