Accueil > Industrie > Adlin Science : structurer les données pour valoriser la recherche Adlin Science : structurer les données pour valoriser la recherche La start-up fondée en 2020 veut transformer le fonctionnement du monde de la recherche et de la santé. L’entreprise accompagne les chercheurs pour structurer leurs données et se veut le tiers de confiance facilitant le lien entre acteurs publics et privés pour les valoriser. Lauréate i-Lab, i-Nov et i-Démo, Adlin Science a lancé en mars dernier une levée de fonds de 4 M€. Paul Rinaudo, son fondateur et CEO, dévoile à mind Health sa vision et ses perspectives pour l’avenir. Par Coralie Baumard. Publié le 02 avril 2024 à 23h00 - Mis à jour le 08 août 2024 à 18h12 Ressources La genèse Après une carrière de banquier d’affaires chez Morgan Stanley à Londre et BNP Paribas en Argentine, Paul Rinaudo a dirigé en France une entreprise concevant et fabriquant des salles blanches. L’occasion pour lui de côtoyer des clients comme le CNRS, le CEA, AstraZeneca ou encore Sanofi. “En m’intéressant à leur problématique, je me suis rendu compte de l’aberration de l’écosystème santé aujourd’hui. D’un côté, il y a la recherche qui génère une valeur phénoménale et qui a besoin de financement. De l’autre, les acteurs privés avec des moyens financiers conséquents qui ont besoin d’avoir accès à cette valeur. Pourtant cet écosystème n’arrive pas à se parler ce qui ralentit la recherche”, constate Paul Rinaudo. Ce constat le pousse à reprendre ses études en intégrant l’Executive Master de Polytechnique. Durant cette formation, il développe un projet autour de l’épigénétique (l’étude des changements dans l’activité des gènes qui lui permet de rencontrer des centaines de chercheurs et de recueillir leurs besoins. Ce projet académique pose les fondations d’Adlin Science. Quatorze mois plus tard, en novembre 2020, la start-up est créée et Paul Rinaudo en devient le CEO. Précédement incubée au Genopole et à Agoranov, Adlin a désormais rejoint l’accélérateur PariSanté Campus et l’incubateur BioLabs. Les effectifs Adlin est aujourd’hui constituée d’une équipe de trentes personnes. Elle est composée pour moitié de développeurs, le reste des effectifs est constitué de docteurs en biologie moléculaire, en bio-informatique et en data science. “Nous avons internalisé les compétences afin de nous assurer que nous développons un outil scientifique fait pour des scientifiques”, souligne Paul Rinaudo. La vision Adlin Science ambitionne de devenir un tiers de confiance afin de faire le lien entre les instituts de recherche et les biotech, les Techbio (les sociétés de plateforme s’appuyant sur l’intelligence artificielle et les datas pour produire de nouveaux médicaments, ndlr), les fournisseurs d’intelligence artificielle, les laboratoires pharmaceutiques. Son objectif est de décloisonner les données de santé présentes dans le monde académique pour faciliter leur utilisation par les acteurs privés. Paul Rinaudo, fondateur et CEO d’Adlin Science “Notre mission est d’apporter aux chercheurs et aux cliniciens une solution pour structurer leurs données dès le moment où elles sont générées. Notre plateforme permet aux chercheurs de garder le contrôle de leurs données. Nous pratiquons le data visiting, c’est-à-dire que nous envoyons les algorithmes, les analyses, les requêtes et nous obtenons les résultats sans avoir accès aux données. Nous prônons une décentralisation qui est complémentaire aux démarches des entrepôts de données de santé et du Health Data Hub. Pour nous, il est essentiel que les données, surtout lorsqu’il est question de données de biologie cellulaire ou de biologie moléculaire (données génomiques, transcriptomiques, de single cell, etc.), restent dans leur contexte scientifique afin qu’elles soient exploitables et ne génèrent pas de biais”, détaille Paul Rinaudo. La start-up fait partie de la task force dédiée à l’usage de la donnée de santé de France Biotech. Une plateforme collaborative pour structurer les données Adlin Science a développé une plateforme digitale collaborative et multidisciplinaire dédiée à la biologie moléculaire pour accompagner les équipes de recherche publiques comme privées et faciliter la structuration de leurs protocoles et de leurs données. “Il existe des référentiels comme OSIRIS pour le cancer ou FHIR OMOP pour les données de vie réelle. Nous accompagnons les institutions pour qu’elles structurent leurs données via ces référentiels, afin d’aboutir à un cadre d’interopérabilité prédéfini. Les chercheurs ne sont aujourd’hui pas aidés pour le faire donc ces référentiels ne sont pas utilisés. Il faut qu’un chercheur ait le sentiment que sa capacité à exploiter scientifiquement les données soit plus importante pour qu’il ait un intérêt à les structurer. Nous sommes là pour accompagner la valorisation du travail de la recherche, mais c’est d’abord une valorisation scientifique qui amènera potentiellement une valorisation économique”, précise le CEO d’Adlin Science. La start-up positionne également sa plateforme comme un outil pour mieux gérer la structuration des données dans le cadre d’appels à projets publics. “Aujourd’hui, la majorité des projets sont multi-institutionnels et la collaboration entre ces instituts est aujourd’hui infernale. Nous sommes un acteur qui va faciliter la gestion de ces problématiques”, assure Paul Rinaudo. Concrètement, la plateforme permet donc de transformer des données brutes en une base de données exploitables après une phase d’audit et de nettoyage. Elle intègre également des outils d’analyse des données adaptés aux bio-informaticiens et data scientists, comme R Studio ou Jupyter Lab, et des outils de visualisation. Adlin assiste également les chercheurs dans la phase d’entraînement des modèles de machine ou de deep learning afin d’obtenir des prédictions. Pour faciliter le lien entre les instituts de recherche et les acteurs privés, l’entreprise développe également une marketplace. L’institut de recherche inscrit sur la plateforme garde la main sur le type de données qu’il souhaite rendre visibles. Adlin identifie ensuite pour ses clients biotech ou start-up où sont présentes les typologies de données intéressantes en fonction de la question scientifique qu’ils souhaitent explorer. Elle permet ensuite la mise en contact entre l’institut ayant généré les données et l’industriel. Pour développer cette offre, Adlin a acquis en août 2023 Linkinnov, la marketplace dédiée à l’intermédiation accélérée des chercheurs du public vers l’industrie pour des missions d’expertise. Le modèle économique Le modèle économique repose sur le paiement d’une licence annuelle pour bénéficier de la plateforme. La plateforme est payante pour les industriels mais les instituts de recherche publics peuvent y accèder gratuitement. De plus, la start-up se rémunère en prélevant un pourcentage sur les flux qu’elle va générer entre les acteurs. Mais l’essor de l’intelligence artificielle lui apporte également de nouvelles perspectives. “Nous nous situons sur la même chaîne de valeur que des Owkin, Aqemia ou Qubits, nous apportons les données de qualité pour nourrir les modèles et répondre aux problématiques des pharmas. Nous ne nous voyons pas seulement comme un fournisseur de données au cas par cas mais comme un vrai partenaire capable de constituer des partenariats stratégiques avec ces Techbio et ces fournisseurs d’IA pour répondre aux problématiques de la pharma ou des biotech. La boucle itérative entre le développement de l’algorithme et l’exploitation des données n’est pas linéaire. Il y a un vrai intérêt à faire des collaborations stratégiques plutôt que juste de l’intermédiation. Sur le long terme, ces partenariats avec les laboratoires pharmaceutiques devraient driver notre croissance. Mais il va falloir du temps pour construire des actifs et être capable de faire ces partenariats. Sur le court terme, nous dérisquons notre business model grâce à la vente de licences et aux commissions”, détaille le fondateur d’Adlin. Le CEO d’Adlin prévoit un chiffre d’affaires de 1 million d’euros en 2024 et de 5 millions en 2025. Le financement La start-up est lauréate de plusieurs concours nationaux et appels projets qui lui ont permis d’obtenir des financements : i-Lab (projet de blockchain) et i-Nov (projet IntegratiOMICS pour développer des modèles de deep learning en biologie moléculaire et médecine de précision) en 2022 et récemment i-Démo conjointement avec WhiteLab Genomics et l’Institut de la vision. La start-up a également débuté une levée de fonds en mars. “Nous cherchons à lever 4 millions d’euros d’ici la fin du premier semestre 2024, nous avons déjà sécurisé 1,2 million d’euros”, révèle le CEO d’Adlin. Les partenaires La start-up travaille avec différents instituts de recherche, elle a notamment accompagné l’Institut Imagine dans la valorisation des données de son laboratoire de recherche et de développements technologiques, le LabTech Single-Cell@Imagine. Elle collabore également le réseau React-4Kids, en particulier sur le projet Share4Kid porté par le docteur Marie Castets. Dans le cadre de ce dernier, la plateforme d’Adlin est déployée au sein du Centre Léon Bérard afin de permettre aux chercheurs d’exploiter leurs données avec des pipelines bio-informatiques adaptés aux cancers pédiatriques. Adlin est également partenariat du Registre National des Cancers de l’Enfant (RNCE), qui possède des données d’enfants et d’adolescents atteints de cancer sur une durée de plus de trente ans. La plateforme d’Adlin est actuellement testée par une centaine de chercheurs de l’Inserm. Cette phase de test s’étend sur tout le premier semestre 2024, à son issue, la start-up saura si elle est retenue pour être déployé à l’ensemble des collaborateurs de l’institut. La start-up compte parmi ses clients des biotech comme Abcell-bio, Enterome, Phagos, Pepkon ou des Techbio comme Orakl Oncology mais pas encore de laboratoires pharmaceutiques. “Des acteurs de la pharma nous contactent pour notre réseau en cancérologie pédiatrique. Les laboratoires pharmaceutiques s’intéressent de plus en plus à ce sujet. Nous sommes contactés pour avoir accès à des données rétrospectives de patients ou à des données de single cell pour faire de la R&D”, annonce le CEO d’Adlin. Les perspectives La spécialisation d’Adlin en cancérologie pédiatrique lui ouvre également des perspectives sur d’autres indications. “Nous pouvons élargir à d’autres types de cancer. La cancérologie pédiatrique étant considérée comme les maladies rares, au vu du nombre de patients, cela nous permet aussi de comprendre comment peut fonctionner demain le marché des maladies rares”, estime Paul Rinaudo. Le marché de taille critique d’Adlin est le marché européen et la start-up compte bien tirer parti des possibilités que lui offre le RGPD pour transposer son business model à l’échelle européenne. Les chiffres clés d’Adlin Science Fondée en 2020 30 salariés Une ambition de réaliser 1 M€ de chiffre d’affaires en 2024 et 5 M€ en 2025 Une levée de 4 M€ prévue pour le premier semestre 2024 Coralie Baumard Données de santéIntelligence ArtificiellePartenariatPlateformesRecherchestart-up Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind