Accueil > Industrie > Les DTx, un marché encore fragile aux États-Unis Les DTx, un marché encore fragile aux États-Unis À l’occasion de DTx France, qui s’est tenu le 2 juillet dernier, Murray Aitken, directeur exécutif d’IQVIA Institute, a fait le point sur la place des thérapies numériques (DTx) aux États-Unis, qui ont longtemps fait bande à part dans le système de santé. L’intégration des biomarqueurs digitaux dans les essais cliniques pourrait bien contribuer à redorer l’image de ces applications. Par Clarisse Treilles. Publié le 08 juillet 2024 à 17h21 - Mis à jour le 07 janvier 2025 à 15h43 Ressources Les États-Unis sont souvent considérés comme un “eldorado” pour les développeurs d’applications avec ses quelque 335 millions d’habitants. Pourtant, le pays demeure “très fragmenté, avec plusieurs voies de remboursement possibles” a souligné Murray Aitken, directeur exécutif d’QVIA Institute, lors de l’événement DTx France. Ces dernières années, le marché américain a ainsi été plus lent à décoller que l’Allemagne, pionnier du remboursement des DTx en Europe avec 56 solutions à son actif. Lors de son intervention à DTx France, qui s’est tenu le 2 juillet dernier à Paris, Murray Aitken a dressé un bilan mitigé de l’intégration des DTx aux États-Unis, freinés par des investissements en berne et des attentes trop élevées des régulateurs et des utilisateurs. “Les DTx ont longtemps été classées à part dans le secteur de la santé, qui a connu des hauts et des bas au niveau des financements, particulièrement depuis deux à trois ans. Toutefois, des progrès commencent à arriver” observe l’expert américain. Beaucoup d’entreprises américaines ont été heurtées par la période de l’après-pandémie marquée par une mise en retrait des investisseurs en e-santé. Certaines entreprises ont fait faillite, comme Pear Therapeutics, quand d’autres ont été contraintes de couper dans leurs effectifs pour rester à flot, à l’image de Biofourmis qui avait pourtant levé 300 M$ en 2022. En France aussi, le chemin des DTx a été semé d’embûches l’an passé. Au terme d’une procédure de redressement judiciaire, la société Lucine a par exemple revendu sa solution Endocare à Butterfly Therapeutics fin 2023. Si le projet de Lucine n’a pas pu être mené à son terme, sa fondatrice et ex-CEO, Maryne Cotty-Eslous, a expliqué que “même sans le succès commercial, Endocare reste un succès scientifique”. Le dispositif médical numérique de classe I, qui a obtenu le marquage CE, était même “prêt à la commercialisation sous quelques mois”, avait-t-elle déclaré à mind Health au moment du rachat. Pour Murray Aitken, l’échec de ces sociétés ne veut pas dire en effet que “la santé numérique ne fonctionne pas, mais plutôt que ce modèle commercial, y compris la manière dont les régulateurs et les agences de remboursement envisagent la santé numérique, n’est pas encore pleinement en place”. Plusieurs pathways possibles Pourtant, aux États-Unis, plusieurs “pathways” (voies d’accès) existent, offrant aux entreprises du numérique le choix de leurs modes de remboursement et de financement. “Il y a le parcours direct vers le consommateur, le système de remboursement via les négociations avec les employeurs pour fournir des outils à leurs salariés sur la base d’un contrat passé directement entre l’entreprise et l’acteur de santé numérique, mais encore le business des assurances” énumère Murray Aitken à mind Health. Deux autres options sont aussi sur la table : le programme gouvernemental d’assurance maladie Medicare, qui permet le remboursement de certains outils numériques comme la télésurveillance, ainsi que les systèmes intégrés de prestation de soins de santé implantés sur les territoires, qui achètent des solutions sur étagère pour fluidifier les parcours de soin et répondre à des enjeux d’efficacité. Rien qu’au sein de Kaiser Permanente, par exemple, “plus de 150 000 patients sont inscrits dans des programmes de télésurveillance pour le diabète ou encore l’hypertension, en complément des soins primaires” selon le Dr Dennis Truong, directeur régional de télémédecine/mobilité à Kaiser Permanente, interrogé par le média américain MobiHealthNews. Les solutions achetées sur l’étagère sont testées et évaluées par les centres eux-mêmes, ce qui leur permettent de gagner en reconnaissance et de se faire connaître. “Beaucoup de ces grands centres évaluent les outils numériques et remboursent ceux qui apporteront, à leurs yeux, de l’efficacité au système (plus de temps pour les médecins, moins de déplacement pour les patients, gain thérapeutique, etc.)”, explique Murray Aitken à mind Health. Les DTx américaines n’hésitent pas à user de plusieurs “pathways” simultanément pour augmenter les opportunités commerciales qui s’offrent à elles, notamment dans le champ de la télésurveillance, assure Murray Aitken. On notera que ces modèles “mixtes” sont aussi l’une des voies privilégiées en France, comme avec la start-up Luna, qui déploie sa solution de diagnostic et d’accompagnement à la fois auprès des entreprises et du grand public. La société Poppins, qui propose des DTx pour les enfants atteints de troubles dys, contractualise elle aussi avec des sociétés d’assurance et avec les particuliers. La société devrait se lancer prochainement dans l’aventure PECAN, pour commencer à anticiper un remboursement pérenne. Les DTx nourrissent les essais cliniques À côté de l’usage des outils numériques pour les soins, la recherche clinique n’est pas en reste. Les outils numériques et biomarqueurs digitaux trouvent progressivement leur chemin dans les essais cliniques. Cette validation clinique a des effets bénéfiques sur la manière dont ces nouveaux dispositifs et applications sont perçus par les cliniciens et les régulateurs. “Il y a dix ans, les DTx étaient principalement conçus et utilisés par des publics relativement jeunes. Désormais, les preuves comptent. Nous avons vu beaucoup de progrès en oncologie, dans le domaine de la sclérose en plaques, dans le diabète, dans l’autisme et la dépression notamment” souligne Murray Aitken. Clarisse Treilles Dispositif médicalLaboratoiresPlateformesstart-upTélémédecineTélésurveillanceThérapie digitale Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind