Abivax : la success story d’une biotech tricolore

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Semaine historique pour la biotech française Abivax. Après avoir publié les résultats positifs de son étude de phase III pour son futur traitement de la rectocolite hémorragique, l’entreprise a gagné le 23 juillet plus de 500 % à la bourse de Wall Street et celle de Paris. Son avenir semble désormais assuré, après des années d’incertitude.
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L’étude clinique

Il a soufflé un vent d’espoir, aux allures de tempête, lorsque le 22 juillet au soir, la biotech française Abivax annonçait des résultats positifs de phase 3 pour les deux essais ABTECT, évaluant obefazimod, traitement de la rectocolite hémorragique. Ces résultats d’induction (après 8 semaines de traitement) ont montré une rémission clinique statistiquement significative, supérieure à celle des médicaments existants, avec surtout une excellente tolérance. “Ces données étaient même supérieures aux attentes”, témoigne Kinam Hong, associé chez Sofinnova Partners, qui accompagne le développement d’Abivax depuis 2019. “Obefazimod, explique-t-il, est un traitement vraiment innovant, aussi bien en termes de sécurité, d’efficacité que de mécanisme d’action. Tous les médicaments présents sur le marché sont des inhibiteurs de JAK, qui consistent à supprimer un signal, alors que le traitement développé par Abivax exploite les mécanismes de régulation naturels de l’organisme pour stabiliser la réponse immunitaire”. 

Les deux essais – baptisés Abtect-1 et Atbect-2 – ont été menés sur 1 275 patients dans 600 centres d’essais cliniques répartis dans 36 pays. Ce qui en fait, selon Abivax, “l’un des plus grands essais de phase 3 jamais menés dans la rectocolite hémorragique”. Pour rappel, cette maladie inflammatoire chronique intestinale (MICI) touche, selon l’Assurance maladie, près d’une personne sur 1 000 en France et n’a pour l’heure aucun traitement.

Une ruée des investisseurs

Kinam Hong, associé chez Sofinnova Partners, accompagne le développement d’Abivax depuis 2019 / Photo Delporte

Mercredi 23 juillet 2025 : en quelques heures, le cours de l’action Abivax explose littéralement, aux Etats-Unis comme à Paris. La biotech, qui a lancé une offre au public d’American Depositary Shares (ADS) a vu son titre grimper de +560% peu après l’ouverture du Nasdaq et de +520 % la même journée sur Euronext Paris. Cette performance historique correspond à une levée de fonds d’environ 650 millions de dollars (554 millions d’euros). Mercredi soir, Abivax était valorisée à 3,6 milliards d’euros à la clôture de la Bourse, soit près de dix fois plus que la veille. Et l’augmentation de capital sursouscrite a continué à grimper les jours suivants. Elle a atteint 750 millions de dollars vendredi 25 juillet. 

Jamais une biotech française n’avait connu un tel succès, au point de surprendre Kinam Hong. “Je ne me rappelle pas de la dernière fois où nous avons réalisé un tel financement”, reconnaît-il, mais cette performance ne tient pas, selon lui, du miracle. « Les biotech françaises n’ont pas toujours une bonne réputation auprès des investisseurs, en partie car elles comptent encore peu de success story d’envergure sur lesquelles s’appuyer. Mais la data, dans le cas d’Abivax, était si probante et d’une telle qualité que les investisseurs ont réalisé l’importance de la validation scientifique des deux études de phase III ».

Des débuts pourtant difficiles

Fondée en 2013 par Philippe Pouletty, directeur général de Truffle Capital, Abivax a connu des débuts difficiles. Des études cliniques peu concluantes (avec, en 2015, l’échec de son premier candidat-médicament) et un manque de ressources ont même fait craindre pour son avenir. En 2019, pourtant, un financement de Sofinnova Partners de 12 millions d’euros parvient à lui remettre le pied à l’étrier. En octobre 2023, autre tournant, Abivax, déjà cotée à Paris depuis 2015, fait une entrée fracassante au Nasdaq (c’est la plus grande IPO d’une biotech européenne sur ce marché) et parvient à lever 235,8 M$ (soit 220 M€). Au même moment, Sofinnova revoit profondément la gouvernance de la biotech, mettant à sa tête Marc de Garidel, alors président et CEO du laboratoire Ipsen (qu’il préside encore aujourd’hui) et ancien CEO de CinCor Pharma, que Sofinnova vient de vendre au laboratoire britannique AstraZeneca, pour près d’1,8 milliard de dollars. L’homme a également à son actif le succès de Corvidia Therapeutics, rachetée en 2020 par le danois Novo Nordisk pour 2,1 Mds $.

Un avenir prometteur

Mieux tolérée dans les essais par les patients que les molécules actuellement sur le marché, obefazimod pourrait, veut croire Kinam Hong, devenir un futur blockbuster (un médicament dont le chiffre d’affaires annuel dépasse 1 milliard de dollars). “Le médicament, explique-t-il, cible à la fois les populations naïves (qui n’ont jamais reçu de thérapie avancée) et réfractaires (celles qui ne répondent pas aux traitements actuels). Le potentiel de marché de ce médicament est donc énorme, d’autant plus qu’il sera vraisemblablement possible de garder sous traitement les patients pendant 5 ou 6 ans, voire plus”. 

C’est ce que doit confirmer l’essai de maintenance de phase 3 ABTECT, actuellement en cours. Il vise à évaluer l’efficacité et la sécurité d’obefazimod pendant 44 semaines, en tant que traitement chronique, et dévoilera ses résultats au second trimestre 2026. Ces derniers viendront soutenir la demande d’autorisation de mise sur le marché auprès de la FDA américaine et de l’EMA européenne, prévue pour le second semestre 2026. Les délais d’instruction des deux autorités régulatrices du médicament oscillant entre six et douze mois, l’approbation définitive d’obefazimod devrait donc survenir dans le courant de l’année 2027. 

“Aussi, ajoute Kinam Hong, Abivax travaille non seulement sur la rectocolite hémorragique mais également sur la maladie de Crohn (la biotech a débuté un essai de phase IIb l’an dernier pour cette indication, NDLR). Le marché sur ces deux pathologies est estimé à 30 Mds $ d’ici 2030”. Pour l’heure, l’associé de Sofinnova Partners, qui est également l’une des chevilles ouvrières de sa renaissance, savoure “un grand succès français qui rehausse l’attractivité de l’ensemble des biotech tricolores. Un tel succès, conclut-il, peut véritablement tirer d’autres biotech vers le haut, dans la mesure où cela modifie la perception des investisseurs. Tout l’écosystème français pourrait en bénéficier”.

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