Accueil > Industrie > Accès au marché > Comment Sivan a franchi l’étape de la commercialisation Comment Sivan a franchi l’étape de la commercialisation Développée à partir de recherches françaises, la solution Moovcare de la société israélienne est commercialisée dans l’Hexagone depuis l’été 2020. Pour sa thérapie numérique, Sivan Innovation a obtenu un remboursement sur le marché français. mind Health revient sur son parcours et ses perspectives. Par Aurélie Dureuil. Publié le 21 juin 2021 à 15h04 - Mis à jour le 28 juin 2021 à 10h04 Ressources La genèse “Tout a commencé en 2012 on découvre qu’il était possible de suivre des patients atteints de cancer du poumon avec une application. Cela permettait d’optimiser le suivi, détecter les rechutes et anomalies pendant le parcours de soins”, confie Ayala Bliah, CEO de Sivan Innovation. Après de premiers travaux, la société a officiellement vu le jour en 2014 en Israël. Les fondateurs, les dirigeants et les effectifs La société a été créée par Daniel Israel. Actuel président, il a débuté sa carrière en 1992 en tant qu’agent de la Caisse nationale d’Assurance maladie (CNAMTS), avant de devenir responsable projet Equipement des professionnels de santé au GIE SESAM Vitale de 1993 à 1999. Date à laquelle il a fondé Sephira, spécialisée dans la télétransmission et l’informatique médicale. Sivan Innovation est dirigée depuis fin 2017 par Ayala Bliah. Diplômée de HEC, elle a commencé sa carrière dans le domaine de la finance chez BNP Paribas en 2005 avant de rejoindre en 2013 la société agrochimique ADAMA Agricultural Solutions où elle était en charge de l’excellence opérationnelle. Avec des équipes en Israël et en France, Sivan Innovation compte une vingtaine de collaborateurs. “Jusqu’en 2020, nous avions essentiellement une équipe de développement. Nous sommes maintenant passés du développement clinique à la commercialisation. Nous avons des développeurs de niveaux très élevés pour avoir une application correspondant aux exigences du marché. Pour obtenir le remboursement de Moovcare (premier produit de Sivan, ndlr) nous avons constitué une équipe assez solide avec un département réglementaire et qualité très fort”, souligne Ayala Bliah. Avant d’ajouter : “Une des grandes forces de Sivan est d’être accompagnée depuis le début par des experts et des consultants. Par exemple, nous travaillons avec NextStep sur l’accès au marché”. Et pour la commercialisation, Sivan Innovation a recruté des commerciaux mais aussi une infirmière, “et nous allons avoir d’autres recrutements, pour avoir un véritable accompagnement des médecins, c’est un travail qui dépasse celui d’un vendeur”, signale la dirigeante. La technologie Le premier produit de Sivan Innovation est une thérapie numérique pour le suivi des patients atteints de cancer du poumon. Nommé Moovcare, il se présente sous forme d’application mobile, dispositif médical de classe I. Le patient ou un aidant remplit un questionnaire hebdomadaire. Un algorithme analyse les symptômes et s’il détecte une anomalie, il alerte les équipes médicales. “Dans le cadre du suivi en oncologie, le patient vient chez son médecin tous les trois ou six mois et souvent pour des consultations brèves. Entre ces visites, il est seul face à sa maladie. Comme la rechute n’arrive pas le jour de la visite médicale, très souvent le patient reste avec ses symptômes jusqu’à la prochaine visite. Quand l’équipe médicale identifie la rechute, il est souvent trop tard”, constate Ayala Bliah. Sivan Innovation a montré que la thérapie numérique Moovcare permet “une amélioration de survie de 7,6 mois et de la qualité de vie”. Sivan Innovation a également développé Smokecheck, une application mobile dispositif médical de type I pour aider à dépister les maladies liées à la consommation de tabac. Les étapes de son développement Pour Sivan Innovation, le parcours clinique a débuté avant la création de la société en 2014. Après les premiers travaux du Dr Fabrice Denis de l’Institut inter-régional de cancérologie Jean Bernard au Mans, une étude de faisabilité a démarré en 2012. En 2014 la société finance une étude clinique de phase III multicentrique et randomisée, “comme on l’aurait fait pour un médicament”, signale Ayala Bliah. Avant d’ajouter : “en 2016, nous avons présenté des résultats intermédiaires à l’Asco (congrès annuel de l’American Society of Clinical Oncology, ndlr) montrant une amélioration de la survie de près de six mois. Le comité d’éthique nous a alors demandé de basculer tous les patients sur le bras expérimental. En 2018, nous avons publié les résultats à nouveau à l’Asco. Nous avons montré 7,6 mois de survie et l’amélioration de la qualité de vie”. En 2018 toujours, Sivan Innovation a entamé les démarches pour obtenir le remboursement de Moovcare sur le territoire français. “Le dispositif est issu de la recherche française, nous voulions que les patients français soient les premiers à en bénéficier”, indique la dirigeante. En 2019, Sivan Innovation a reçu un avis favorable de la Haute Autorité de santé (HAS) avec une ASA III (amélioration du service attendu modéré, ndlr). Les discussions ont alors débuté avec le CEPS (Comité économique des produits de santé, ndlr) et ont duré jusqu’en juillet 2020. “Nous avons pu démarrer la commercialisation en septembre”, indique Ayala Bliah. Elle ajoute : “Il s’agit de la première fois en France qu’une thérapie numérique est approuvée pour le remboursement. Moovcare est également la toute première thérapie numérique ayant prouvé une prolongation de la durée de vie du patient”. La tarification de la solution Moovcare est fixée à 500 € TTC par trimestre. La prise en charge est accordée jusqu’au 15 août 2023. Toujours en France, “un acte médical pour accompagner et rémunérer les médecins a été validé par la HAS. Nous sommes en discussion avec l’Assurance maladie car si nous ne finançons pas l’impact sur l’organisation, il est difficile de demander aux médecins de changer leur manière de travailler”. L’entreprise prépare également la commercialisation sur d’autres marchés. Un dossier devait ainsi être déposé auprès du BFam en Allemagne au 1er trimestre 2021. “Dans les autres pays, nous avons démarré des études. Par exemple, aux États-Unis, nous avons commencé une étude médico-économique et de faisabilité. Nous pensons pouvoir demander un remboursement d’ici un an. Nous lançons également une étude de faisabilité en Espagne”, confie la CEO. Sivan Innovation s’est notamment doté d’un bureau aux États-Unis. Enfin, Sivan Innovation travaille actuellement sur l’extension de Moovcare à d’autres indications en oncologie. Des travaux sont notamment menés avec l’Institut Curie et l’équipe du Pr Alain Livartowski sur le cancer du sein, indique la dirigeante. Le business model Alors que plusieurs modèles économiques coexistent sur le marché des thérapies numériques (lire le dossier Thérapies numériques : quels business models pour les acteurs du marché français ?), Sivan Innovation a fait le choix de s’inscrire dans les thérapies remboursées. Ayala Bliah détaille : “Le modèle du remboursement me semble le plus juste et légitime. Le fait d’avoir une amélioration de la survie avec une DTx fait qu’elle doit être mise à disposition de tous les patients et pas seulement des patients d’une thérapie médicamenteuse”. Avec le début de la commercialisation en septembre 2020, Sivan Innovation affiche un déploiement dans 50 centres de santé et une utilisation par 92 professionnels de santé en mai 2021. Pour la commercialisation, Ayala Bliah identifie la difficulté liée à la nouveauté des thérapies numériques pour les professionnels de santé : “Nous vendons une nouvelle manière de travailler. Pour les médecins qui ne sont pas habitués au numérique ni à suivre des patients avec des DTx, il faut une formation thérapeutique pour les aider. Une fois qu’ils utilisent Moovcare, ils en voient l’intérêt pour le patient et pour leur relation avec lui. Cela permet d’améliorer le diagnostic et de passer plus de temps sur la thérapeutique pendant la consultation”, constate la dirigeante. Les financements Depuis sa création, Sivan a été financé par son fondateur Daniel Israel. “Ce dernier a investi 11 millions d’euros, incluant les financements relatifs au développement de l’application et aux études cliniques”, indique Ayala Bliah. Elle confie qu’aujourd’hui, la société commence à lever des fonds “afin d’étendre les études cliniques à toutes les autres indications, ainsi que pour amorcer une pénétration du marché en Europe et aux États-Unis”. L’objectif serait de réaliser un tour de table de 15 M€. La dirigeante cite également “un contrat exclusif” signé avec le Dr Ethan Basch (Université de Chapel Hill) “pour développer des algorithmes tous cancer et afin de lancer une étude multicentrique qui permettra d’étendre Moovcare à toutes les autres indications et de pouvoir gérer la toxicité de tous les médicaments anticancéreux”. Les partenaires Sivan Innovation s’est entouré de plusieurs partenaires. Pour la partie recherche clinique, l’entreprise a noué des partenariats avec l’Institut Curie, le CHU de Lille, le CHR d’Orléans, les Hôpitaux universitaires Paris Centre Cochin, le Centre Catalan d’oncologie et le Lineberger Comprehensive Cancer Center. En 2018, Sivan Innovation également débuté un partenariat avec le groupe d’hospitalisation privée Elsan pour déployer Moovcare dans quatre établissements. “C’était un pilot qui nous a permis de mieux connaître l’application et de constater que nous avions plus d’ouverture de comptes et de médecins dans les petits et grands centres publics qu’avec les médecins libéraux”, confie Ayala Bliah. En mars 2020, Sivan Innovation a par ailleurs conclu un partenariat avec Bristol-Myers Squibb (BMS). “Il s’agit d’un accord de co-promotion. Leurs délégués médicaux présentent leurs produits mais également Moovcare. Ce qui nous permet d’améliorer la prise de conscience des médecins de l’existence de Moovcare”, se félicite Ayala Bliah. Le marché Sivan Innovation s’inscrit sur le marché des thérapies numériques. Selon les études, ce marché pourrait atteindre plusieurs milliards de dollars dans les prochaines années. Ainsi, un rapport de PitchBook publié en septembre 2020 indique qu’il pourrait frôler les 7 milliards de dollars à l’horizon 2025. FICHE D’IDENTITÉ Création : 2014 Dirigeants : Ayala Bliah (CEO) et Daniel Israel (fondateur et président) Levées de fonds : 11 M€ de financement en fonds propres du fondateur et une levée de fonds en cours avec un objectif de 15 M€ Effectifs : environ 20 personnes Produits : Moovcare et Smokecheck Chiffre d’affaires : Confidentiel Localisation : Jérusalem (Israël) et Paris (France) Aurélie Dureuil Application mobileoncologieTélésurveillanceThérapie digitale Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind