Accueil > Parcours de soins > Cancer du sein : une IA pour épauler les radiologues de l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne Cancer du sein : une IA pour épauler les radiologues de l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne Depuis janvier 2022, l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne utilise en routine le logiciel d’intelligence artificielle d’iCAD, société américaine spécialisée dans l’analyse d’images mammographiques. Cet outil de seconde lecture vise à favoriser la détection de cancers et de lésions précancéreuses. mind Health dresse le bilan de cette collaboration, initiée en juin 2021, avec le Dr Rafaële Vautrin, radiologue à l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne, Michele Debain, Vice-Présidente d’iCAD pour la région EMEA (Europe, Moyen-Orient et Asie) et Kévin Delvingt, responsable commercial France d’iCAD. Par Sandrine Cochard. Publié le 22 novembre 2022 à 22h28 - Mis à jour le 03 janvier 2023 à 15h01 Ressources En 2021, l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne cherche à se doter d’un outil de seconde lecture pour épauler ses radiologues dans la détection précoce des cancers lors des mammographies. “On estime que sur l’ensemble des cancers du sein détectés, 20% auraient pu être repérés avant, explique le Dr Rafaële Vautrin, sénologue (radiologue spécialisée dans l’imagerie du sein). Je vois parfois des dossiers où je me dis qu’en effet, le cancer était visible avant mais n’a pas été détecté. Comment améliorer cela ? C’est le point de départ de notre collaboration avec iCAD.” Un algorithme de deep learning de détection précoce des cancers Après un benchmark du marché, le directeur exécutif de l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne, Samir Louis, arrête son choix sur la solution d’iCAD. Celle-ci s’appuie sur un algorithme de deep learning pour proposer sur 4 services : la détection de cancer ou de lésions précancéreuses à partir de mammographie 2D, la détection de cancer ou de lésions précancéreuses à partir de Tomosynthèse (images 3D), l’évaluation de la densité des seins des patientes l’évaluation de leur risque de développer un cancer à l’avenir Le Dr Rafaële Vautrin, radiologue à l’Imapôle de Lyon-Villeurbanne “Nous savions que leur algorithme était développé et entraîné depuis plusieurs années avec la plus grande banque de données existante”, fait valoir le Dr Rafaële Vautrin. L’Imapôle mène ensuite un test de plusieurs mois pour évaluer l’efficacité de la solution d’iCAD, notamment en lui faisant analyser une dizaine de dossiers complexes où des radiologues étaient passés à côté d’un diagnostic de cancer. L’IA détecte des lésions non détectées par les médecins et confirme sa capacité à repérer des lésions à un stade très précoce. Une aide précieuse alors que la médecine se veut de plus en plus personnalisée et prédictive. “Il y a un changement de paradigme aujourd’hui. Quand j’ai commencé à exercer, on nous demandait simplement de déterminer s’il y avait un cancer visible ou non, rappelle le Dr Vautrin. Aujourd’hui, on veut détecter le pré-cancer et la lésion susceptible de dégénérer, en cherchant les lésions les plus petites possibles.” ETUDE DE CAS – Comment Medipath et Ibex Medical Analytics ont conçu une solution d’IA utilisée en routine pour le diagnostic du cancer de la prostate Une base de données de 6 millions d’images Société américaine, iCAD est un acteur historique de l’intelligence artificielle appliquée aux mammographies. Elle a ainsi lancé le premier produit marqué CE, en 1999. “Nous avons également été les premiers à développer un algorithme basé sur l’apprentissage profond (deep learning), avec un premier marquage CE en 2016”, souligne Michele Debain, Vice-Présidente d’iCAD pour la région EMEA (Europe, Moyen-Orient et Asie). La force d’iCAD réside dans sa base de données. Alimentée par 40 centres de collecte à travers le monde, celle-ci rassemble aujourd’hui plus de 6 millions d’images (en 2D et en tomosynthèse – en 3D), ce qui lui permet d’entraîner et de perfectionner son algorithme de deep learning (qui en est à sa troisième version cette année). “Nous sommes la seule société à évaluer le risque d’une patiente selon l’analyse mammographique et âge de la femme”, se félicite ainsi Michele Debain. Kévin Delvingt, responsable commercial France d’iCAD Autre particularité d’iCAD : son interopérabilité, qui lui permet de fonctionner avec les différents fournisseurs d’appareils de mammographie (GE, Siemens etc.). “Notre solution est compatible avec quasiment tous les fournisseurs et quasiment tous les modèles de mammographie, assure Kévin Delvingt, responsable commercial France d’iCAD. Nous avons des performances de sensibilité et de spécificité suffisantes pour obtenir le marquage CE pour chaque constructeur.” ETUDE DE CAS – Numérisation du service d’anatomopathologie : comment l’hôpital Bicêtre a réussi sa transition pour travailler en full digital Performances La solution d’iCAD est utilisée par les 5 radiologues de l’Imapôle en routine depuis janvier 2022. Le centre a choisi une offre combinant l’analyse d’image en 2D et la tomosynthèse, avec à l’arrivée un gain de temps médecin et une détection plus fine des lésions et des microcalcifications. “La sensibilité du logiciel est meilleure que la mienne, confirme le Dr Vautrin. A ceux qui me disent “tu te coupes l’herbe sous le pied”, je réponds que non. L’IA est un deuxième lecteur, un deuxième radiologue capable de déceler des lésions subtiles. Pour les microcalcifications notamment, je sais qu’il est là et que je ne passerai pas à côté. Il augmente la sensibilité et la spécificité du radiologue.” Michele Debain, Vice-Présidente d’iCAD pour la région EMEA Concrètement, iCAD est capable, à partir de l’image analysée, de proposer un score (compris entre 0 et 100%) pour chaque lésion détectée et pour le cas dans son ensemble, ce score indique la certitude de l’algorithme qu’une lésion ou un cas est malin. “En tomosynthèse, la solution ne rate que 4% des cas cancers, souligne Michele Debain. Et en analyse d’images 2D, elle atteint des niveaux de sensibilité de 94%, donc on ne rate que 6% des cas de cancers. Ces taux ajoutés aux compétences des radiologues qui utilisent notre système et qui ont une connaissance de l’historique et des antécédents de la patiente permettent d’augmenter les chances de diagnostic et de prise en charge des patientes. On ne veut pas remplacer les radiologues mais les aider à être meilleurs.” Cas clinique concret Dans ce cas anonymisé, une patiente est sur le point d’obtenir une greffe de rein. Du fait des immunosupresseurs qui lui seront prescrits pour éviter un rejet de la greffe, elle présente un surcroît de risque de développer un cancer en cas de lésions. Le Dr Vautrin a donc dû se prononcer sur la mammographie de la patiente. Mammographie 2D avec analyse de la solution ProFound AI® d’iCAD “C’est une mammographie difficile, avec des seins denses et hétérogènes. On voit plein de petites tâches un peu partout… D’emblée, ce cliché réalisé en tomosynthèse nécessite une lecture affûtée.” Le Dr Rafaële Vautrin s’est appuyée sur la solution ProFound AI® d’iCAD, qui affiche son analyse en un clic. “L’IA détecte bien les petites lésions que j’avais repérées, mais évalue que le risque sur ces lésions n’est pas très élevé (14 – 17%), et en écarte même d’autres.” Une mammographie en tomosynthèse (3D) En tomosynthèse en revanche (image ci-dessus), le logiciel focalise sur une petite lésion, avec un score de 29% de risques et un K score à 40% (c’est le score de risque global que la patiente ait un cancer). “Honnêtement, je ne l’avais pas vu à l’image, c’est iCAD qui me l’a remontée”, se souvient le Dr Vautrin. La lésion détectée par la solution iCAD a ensuite été bien repérée en échographie Après une échographie très localisée, la radiologue tombe sur un nodule de 5 mm (image ci-contre). La biopsie révèlera qu’il s’agissait bien d’un nodule cancéreux. “Le logiciel a permis d’identifier ce risque très en amont. C’est justement sur ces cas de femmes avec des seins très compliqués et pour lesquelles il ne faut surtout pas passer à côté que la solution nous aide franchement.” Le Dr Rafaële Vautrin salue également le temps gagné avec iCAD, qui affiche instantanément un score de risque sur l’image analysée, notamment en tomosynthèse. “C’est du temps que l’on peut passer en plus avec la patiente pour l’examiner, pour réaliser plus de mammographies alors que la demande pour cet examen est croissante, et pour faire des gestes de biopsie car nous avons de plus en plus de gestes interventionnels à faire.” Coût Sans dévoiler le montant de la transaction qui le lie à l’Imapôle, iCAD précise que l’acquisition de deux licences pour sa solution de détection (celle pour la 2D et celle pour la 3D) coûte entre 45K€ et 50K€ TTC. La version 2D uniquement coûte de 30K€ à 35K€ TTC. “C’est un investissement sur 7 ans, donc rapporté au coût annuel, ce n’est pas très cher”, plaide Michele Debain. iCAD inclut également dans son offre un service de garantie pour le serveur (sur place) et propose, en complément, la mise à jour du logiciel tous les ans. A l’arrivée, le coût moyen par mammographie oscille entre 2 et 5 euros, en fonction de la ou des solutions choisies, du nombre mammographies réalisées et d’autres critères comme le réseau ou le serveur, fait valoir iCAD. Bilan chiffré Depuis l’installation de la solution iCAD, l’Imapôle a réalisé 6 000 mammographies entre le 1 er janvier et le 30 septembre 2022, soit “une hausse de 10% par rapport à 2021 sur la même période, précise Samir Lounis, Directeur Exécutif de l’Imapôle Lyon-Villeurbanne. Nous avonsun retour très positif de notre patientèle sur l’utilisation de l’IA pour la mammographie et constatons l’arrivée de nouvelles patientes.” iCAD Date de création : 1984 Principaux marchés : Etats-Unis (leader sur le segment des mammographies), Europe dont France, 7500 installations à travers le monde Une soixantaine de sites en France (privés libéraux, hôpitaux publics, CLCC) Références : institut Gustave Roussy, centre Oscar Lambret (Lille), Imapôle de Lyon-Villeurbanne, Hospices Civiles de Lyon, groupe privé IMVOC (Imagerie médicale Val d’Ouest – Charcot). Imapôle Lyon-Villeurbanne Date de création : 2019 Nombre de radiologues : 9 dont 5 sénologues Nombre de mammographies analysées : 16 000 à ce jour Sandrine Cochard cancerHôpitalImagerie médicaleIntelligence Artificielle Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Comment l’IA est en train de transformer la filière dentaire L’IA va-t-elle vraiment révolutionner la recherche ? analyses Dossier [Etude exclusive mind Health] Quelles entreprises françaises ont lancé des essais cliniques incluant du numérique ? L’IA en santé peut-elle créer de la valeur ? Entretien Tim Brienen (Anap) : “Regarder comment l'intelligence artificielle apporte de la valeur à l'établissement” Plus précisément, plus précocement : les nouvelles façons de combattre le cancer L'IA d'Owkin comme outil pour prédire l'évolution des tumeurs