Accueil > Parcours de soins > Comment le CHU de Lille s’est appuyé sur Docaposte pour dématérialiser le recueil et la gestion du consentement patient Comment le CHU de Lille s’est appuyé sur Docaposte pour dématérialiser le recueil et la gestion du consentement patient Depuis deux ans, le CHU de Lille travaille avec Docaposte, filiale numérique du Groupe La Poste, pour co-créer une solution de e-consentement. Objectif : répondre aux obligations légales (RGPD) tout en impliquant le patient dans son parcours de soins. Un projet démarré en 2019 et qui s’accélère cet automne, avec l’ambition d’étendre son déploiement à de nouveaux services et aux consentements médicaux. Explications avec Thomas Cybertowicz, chef de projet GHT LMFI, Guillaume Deraedt, Data Protection Officer (DPO), coordinateur conformité numérique du GHT LMFI et Louise Eggrickx, Product Manager Santé chez Docaposte. Par Sandrine Cochard. Publié le 29 septembre 2021 à 3h00 - Mis à jour le 29 septembre 2021 à 16h55 Ressources En 2019, le CHU de Lille souhaite optimiser le recueil et la gestion du consentement patient en se dotant d’une plateforme capable de dématérialiser ces démarches, tout en garantissant un haut niveau de sécurité et de protection des données. “Notre politique est d’impliquer le patient dans sa prise en charge en étant le plus respectueux possible des réglementations, notamment du Règlement général de la protection des données (RGPD)”, explique Guillaume Deraedt, DPO et coordinateur conformité numérique du GHT LMFI (Lille Métropole Flandre Intérieure). Les grandes dates du projetAvril 2019 : publication du projet de dialogue compétitif au Journal OfficielSeptembre 2019 : la CNIL valide la conformité de l’entrepôt de données de santé du CHU de Lille au nouveau Règlement Général sur la Protection des DonnéesSeptembre 2019 : attribution du marché à DocapostePrintemps 2021 : expérimentation de la solution dans le centre de prélèvement du CHUSeptembre 2021 : déploiement de la solution au service d’imagerie médicale du CHU Le point de départ : une mise en conformité vis-à-vis du RGPD Outre la philosophie qui anime le CHU, le cadre réglementaire qui corsète l’usage des données personnelles impose aux établissements de santé la prudence. Depuis 2019, il est nécessaire d’obtenir l’autorisation de la CNIL pour constituer un entrepôt de données de santé. Et pour pouvoir y héberger les données de leurs patients, les établissements de santé doivent recueillir leur autorisation, ou du moins, leur non-opposition. Cette mise en conformité est le point de départ du projet du CHU, qui s’est doté d’un entrepôt de données dès 2018, baptisé Include. Avec une ambition plus large d’être le terrain d’une expérimentation qui bénéficiera, à terme, aux établissements de santé de toute la région dans le cadre de la plateforme de coordination régionale PREDICE. Après une procédure de marché qui s’achève à la rentrée 2019, le CHU choisit Docaposte et sa solution de e-consentement. “On voulait une collecte du consentement patient pour le RGPD qui nous permette également d’anticiper les usages futurs des professionnels et la problématique, majeure, du consentement médical qui nécessite une signature à valeur probante, explique Guillaume Deraedt. On a décidé de prendre une solution “all inclusive” qui savait adresser à la fois un besoin immédiat (RGPD) et futur (la dématérialisation de la collecte du consentement médical).” Le CHU fait porter le projet par la centrale d’achat de l’informatique hospitalière, qui cumule un peu plus de 200 millions d’euros d’achat annuels et compte 1900 adhérents, en partenariat avec GCS Ameitic. Quatre raisons motivent le choix de Docaposte :– la simplicité d’usage, essentielle pour adresser les enjeux de conformité– la flexibilité de la solution,– la robustesse de ses briques technologiques,– le coût“On est dans un projet de modernisation de l’hôpital réalisé par un groupe qui s’est lui-même modernisé !” se réjouit Guillaume Deraedt. Thomas Cybertowicz, chef de projet GHT LMFI (g), Guillaume Deraedt, DPO et coordinateur conformité numérique du GHT LMFI (c), et Anthony Bouzidi (d), Adjoint au DPO Des briques technologiques validées déjà éprouvées dans le secteur bancaire La solution repose sur deux briques essentielles : la signature électronique Docaposte et l’hébergement HDS. La signature électronique Docaposte, qui existe depuis 12 ans, a déjà fait ses preuves dans le secteur bancaire. Aujourd’hui, Docaposte revendique 500 clients BtoB et 30 millions de transactions signées électroniquement par an. Avec 45 millions de dossiers patients, Docaposte se pose aussi en premier hébergeur et opérateur de données de santé en France. “Nous hébergeons notamment les dossiers pharmaceutiques des Français pour le compte du CNOP (Ordre des pharmaciens)”, précise Louise Eggrickx, Product Manager Santé chez Docaposte. De quoi rassurer le CHU de Lille qui y a vu le gage d’une technologie sûre. Louise Eggrickx, Product Manager Santé chez Docaposte Si la technologie est 100% Docaposte, l’ergonomie de l’interface, elle, est une co-construction entre la société et le CHU de Lille, qui abrite un laboratoire d’excellence dans ce domaine. Avec une méthodologie alliant dialogue, avec des réunions hebdomadaires entre l’équipe Docaposte et l’équipe du CHU (lire encadré), et immersion de l’équipe Docaposte au sein du CHU, pour réajuster si besoin. “Nous avons d’abord mené des ateliers pour définir les interfaces et les workflows les plus pertinents pour les besoins des utilisateurs de l’établissement de Lille. Ensuite, on a orchestré ces briques et conçu des interfaces les plus fluides, en intégrant les retours des ergonomes du CHU. Ce travail sur le terrain a été essentiel pour coller au plus près des besoins. Par exemple, on s’est rendu compte que les agents du CHU n’avaient pas envie de donner leur numéro de téléphone personnel pour s’authentifier sur la solution. Du coup, nous avons mis en place une solution de double authentification avec l’adresse mail des agents”, se félicite Louise Eggrickx. Autre difficulté du projet : l’enjeu d’interopérabilité. Un défi récurrent en milieu hospitalier. “Les informations de consentement étaient déjà présentes dans certains de nos logiciels, notamment Sillage RDV. On a mis les différents éditeurs autour de la table pour leur faire comprendre et accepter que dorénavant, Docaposte serait le moyen de recueil et la source de vérité vis-à-vis du consentement patient. Il a fallu fournir un gros travail de dialogue pour développer les API permettant de dialoguer d’un logiciel à l’autre”, se souvient Thomas Cybertowicz, chef de projet GHT LMFI. Un chantier toujours en cours qui devrait se poursuivre jusqu’en 2022. Équipes impliquées et organisation Côté Docaposte, 9 personnes travaillent sur le produit, dont certaines à temps plein : 1 Product Manager, 1 Expert fonctionnel, 1 Product Owner qui fait le lien entre l’équipe produit et l’équipe développement, 2 développeurs (1 back-end et 1 front-end), 2 UX/UI designers et 2 personnes qui testent la solution pour repérer d’éventuels bugs. Côté CHU, 3 instances principales sont impliquées dans ce projet coordonné par Thomas Cybertowicz, chef de projet du GHT LMFI, et piloté par Nathalie Samadi, Directrice Performance des Organisations du CHU de Lille :● les comités de pilotage, avec une quinzaine de personnes de tous profils (médecins référents, direction de la recherche, les DPO pilotés par la direction de la performance), qui se réunissent tous les deux mois● le comité de projet, composé d’une dizaine de personnes, avec des membres récurrents (DPOs, chefferie de projet) et d’autres chefs de projets qui participent ponctuellement, sur des points précis (intégration, dématérialisation). Cette task force travaille sur les aspects techniques.● l’équipe terrain, composée d’Anthony Bouzidi, Adjoint au DPO du CHU de Lille et plus largement du GHT LMFI, qui s’occupe des retours patients; l’ergonome qui forme les agents et le chef de projet. Au-delà du CHU Lille, d’autres groupes de travail participent à ce projet régional qui inclut également les centres hospitaliers de Roubaix, de Tourcoing et d’Armentières, mais également des acteurs comme la CAIH, GCS Ameitic, les équipes de la plateforme de coordination régionales Predice PREDICE et l’ensemble des autres établissements parties prenantes (le GHT Côte d’Opale, le Centre Hospitalier Universitaire d’Amiens…) 4 questions posées aux patients Le RGPD encadre ce qui relève du traitement des données. Dans ce contexte, le CHU a identifié 4 actions pour lesquelles il a besoin de recueillir le consentement des patients : le partage de données entre les établissements de santé (via la plateforme de coordination régionale PREDICE), qui dépend du RGPD et du Code de la santé publique. la recherche (via l’entrepôt des données de santé, qui a été accepté par la CNIL en septembre 2019 sous réserve du consentement des patients). la dématérialisation complète de tous les échanges avec les patients (et pas juste des mails de rappel de rendez-vous). l’enquête de satisfaction. Une attention particulière a été portée à la formulation des quatre questions posées aux patients. Objectif : obtenir un consentement du patient clair et légitime. “Il y a eu un gros travail pour définir et formuler ces questions avec nos experts DPO et la commission des usagers, pour arriver à des questions claires et juridiquement correctes”, explique Thomas Cybertowicz. Une fois les questions définies et la plateforme conçue, ce projet s’articule en deux temps : répondre à l’impératif de conformité de son entrepôt de données tout d’abord, puis intégrer dans le workflow des agents d’accueil les 4 questions RGPD à soumettre à chaque patient. “La première action, lancée en début d’année 2021, a été de mener une campagne de non-opposition auprès de 190 000 patients concernant le transfert de leurs données dans notre entrepôt de données. On ne leur demandait pas une réponse, mais une opposition s’ils n’étaient pas d’accord. Nous avons eu un taux de 40% d’ouverture de mail et un taux de 0,3% d’opposition”, détaille Thomas Cybertowicz. Les données de ces patients ont donc été désactivées. Le numérique pour apporter la preuve du consentement La deuxième action démarre au mois de mai 2021, avec le lancement du recueil du consentement RGPD à proprement dit. La solution conçue par Docaposte prévoit deux cas de figure : le recueil autonome du consentement (le patient remplit lui-même le questionnaire directement sur l’interface) ou assisté, auprès des agents d’accueil de l’hôpital. “Le recueil des consentements RGPD est réalisé à l’accueil d’une consultation ou avant une hospitalisation. Cette fois-ci, on pose les 4 questions RGPD aux patients, en vis-à-vis donc ils sont devant l’agent au bureau des entrées. On a démarré avec notre centre de prélèvement, en pleine période Covid. Le challenge était de réussir à poser les 4 questions RGPD aux patients, en vis-à-vis, en gérant la file d’attente”, rappelle Thomas Cybertowicz. Soit environ 30 personnes par jour et 500 personnes par mois. “On a voulu commencer par des petites volumes pour ne pas qu’il y ait trop d’impact organisationnel et pour se donner un temps de préparation suffisant”, poursuit le chef de projet. La solution conçue avec Docaposte permet à l’hôpital d’industrialiser le recueil du consentement et d’en assurer une traçabilité. “Il est mieux de pouvoir apporter la preuve qu’on a bien demandé son consentement au patient, avec une solution fiable et si possible l’utilisation de processus telle que la signature dématérialisée simple”, fait valoir Guillaume Deraedt. Une montée en charge jusqu’à la fin de l’année À date, le projet portant sur le consentement RGPD est bien avancé. L’interface est conçue, les questions sont définies et de nouveaux services du CHU adoptent progressivement la solution. Mi-septembre, elle était en cours de déploiement dans le service imagerie du CHU de Lille. “Le centre de prélèvement était notre service pilote. Avec l’imagerie, on part sur des volumes 10 fois plus importants, avec une vraie montée en charge, explique Thomas Cybertowicz. L’objectif d’ici à la fin de l’année est de recueillir les consentements patients le plus largement possible, de façon à automatiser le processus de traitement et d’envoi de documents.” En clair, faire en sorte qu’une fois qu’un patient donne son consentement, cela autorise automatiquement le dépôt de ses documents. Mais l’hôpital reste “lucide” sur ses objectifs. “17% des Français souffrent d’illectronisme. On sait très bien qu’on ne pourra pas toucher 100% du public, prévient le chef de projet. Or, ces patients doivent être en capacité de dire non et que l’on tienne compte de cette opposition, même si cela signifie de produire du courrier et du papier. Tous les patients doivent pouvoir bénéficier de leurs soins et recevoir les documents nécessaires à leur suivi, afin qu’ils ne soient pas déconnectés du soin.” D’autant que la patientèle du CHU de Lille a plus de 70 ans en moyenne, une tranche d’âge particulièrement concernée par l’illectronisme. Un bilan positif Aujourd’hui, le CHU tire un bilan positif du projet, qui a permis de “rappeler les droits nouveaux à l’ensemble des professionnels de santé et de faire de la pédagogie sur la nécessité de bien gérer la confidentialité des données patients et de les familiariser avec la notion de sécurisation des systèmes d’information”, se félicite Guillaume Deraedt. “C’est un bénéfice pour la cellule conformité numérique.” À l’échelle de l’établissement, le CHU de Lille réaffirme également sa volonté d’impliquer le patient dans son parcours de soins et de le mettre au centre des décisions. “On est dans une dentelle juridique telle que de toute façon, si on ne pose pas la question, on se met en danger, pointe Guillaume Deraedt. Mais ce qui a motivé l’établissement, c’est surtout que ce projet était en adéquation avec une philosophie, une déontologie sur l’usage avec l’accord des patients.” Le consentement dématérialisé permet également une plus grande flexibilité et agilité “pour rapidement mettre en place de nouveaux questionnaires par nos professionnels”, note encore Guillaume Deraedt. Enfin, cet outil facilite également le travail de recherche, en ciblant ses cohortes (selon le consentement exprimé par les patients) et en permettant aux médecins et aux étudiants travaillant sur une thèse ou une étude de simplifier le recueil des réponses des patients à une question donnée. “Globalement, on améliore la vie au quotidien des soignants biomédicaux quant à la prise en charge des données des patients pour leurs études.” Prochaines étapes : la généralisation à l’échelle de la région… Docaposte planche également sur une évolution de sa solution. “Actuellement, nous sommes en train de construire une interface d’administration des consentements, c’est-à-dire une interface qui va permettre aux établissements de tout paramétrer eux-mêmes : la finalité, la note d’information et le mail envoyé au patient, avec un titre, un nom d’expéditeur et un texte entièrement personnalisable, explique Louise Eggrickx. Chaque établissement pourra mettre son logo, indiquer s’il est membre de la plateforme régionale PREDICE etc. On complète le produit de manière à rendre les établissements les plus autonomes possibles.” Objectif: dégager un gain de temps et de flexibilité pour les agents. “Avec la solution Docaposte, le recueil d’un consentement RGPD en routine par un agent prend moins d’une minute. Cela a bien rassuré les équipes et a démontré que l’on était capable de le faire. Maintenant, il faut roder ce nouveau processus sur des gros volumes, souligne Thomas Cybertowicz. C’est ce que l’on fait actuellement en imagerie, où le service accueille entre 200 et 300 patients/jour en consultation. Donc on va voir si ça tient le choc.” Avec un enjeu : terminer le déploiement massif de la solution en interne et passer de quelques dizaines à quelques centaines d’utilisateurs. “En filigrane, le challenge est aussi d’accompagner la mise en conformité du projet PREDICE, en généralisant cette solution au niveau du GHT, avec tous les établissements de la région qui seront connectés”, renchérit Guillaume Deraedt. En tout, le budget de fonctionnement du projet est de 100 000 € par an pour les 10 établissements du GHT (abonnement au service Docaposte + prestations, hors coûts d’interfaces des autres éditeurs). …et le consentement médical dématérialisé L’étape suivante porte sur le consentement médical, indispensable aux médecins pour exercer sur un patient. Le CHU envisage sa dématérialisation, sur le modèle de ce qu’il réalise depuis un an avec le consentement RGPD. “Sur ce type de projet extrêmement complexe, on est sur des rythmes longs. On a réellement démarré la mise en œuvre opérationnelle début 2021. Maintenant, Thomas gère toute la phase de déploiement avec l’équipe de Docaposte, dans un contexte particulièrement difficile, plaide Guillaume Deraedt. On avance, mais à un rythme maîtrisé. Et c’est la maîtrise de ce rythme qui nous permet d’intégrer, au-delà du consentement RGPD, le consentement médical.” Côté Docaposte, l’enjeu porte désormais sur une généralisation de la solution aux établissements de santé. “Les besoins sont globalement transposables d’un établissement à l’autre. Donc même si nous avons co-construit cette solution avec le CHU de Lille, nous pensons qu’elle a vocation à être déployée sur un maximum d’établissements en France, affirme Louise Eggrickx. Et si des besoins plus spécifiques émergent, nous pourrons toujours en faire une nouvelle fonctionnalité.” Le CHU de Lille en chiffres (sur l’année 2019) Un budget global de 1,390 milliard € 15 577 professionnels en exercice ou en formation, exerçant près de 220 métiers 229 022 prises en charge en hospitalisation 762 417 consultations médicales 910 979 admissions en soins externes Le GHT en chiffres (sur l’année 2019) 10 établissements totalisant un budget de fonctionnement de près de 2 milliards € 231 communes 1,5 million d’habitants Plus de 8 000 lits et places d’hospitalisation 192 000 patients (Médecine-Chirurgie-Obstétrique) pris en charge 2 400 professionnels médicaux séniors 20 000 professionnels non médicaux Docaposte en chiffres + de 6 400 collaborateurs dont 1 800 ingénieurs IT, 1 000 développeurs tous langages confondus, 400 experts métier, 120 experts IA, 70 experts UX/UI 700 millions € de chiffre d’affaires en 2019 + de 70 sites partout en Franceprésent dans 12 pays sur 3 continents 4 data centers répartis sur toute la France (opérés à 100% en propre) Sandrine Cochard Données cliniquesDonnées de santéHôpitalRechercheRGPD Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Dossier [Étude exclusive mind Health] Comment les technologies numériques ont révolutionné les essais cliniques depuis 20 ans Dossier Comment les hôpitaux partagent leurs données de santé ? analyses PLFSS 2022 : quelles pistes pour la généralisation de la télésurveillance médicale ? Trophées de la e-santé : l'innovation, le modèle économique et l'humain raflent les honneurs