Accueil > Médias & Audiovisuel > Guillaume Lacroix (Brut) : “Nous voulons nous développer aux Etats-Unis avant fin mai” Guillaume Lacroix (Brut) : “Nous voulons nous développer aux Etats-Unis avant fin mai” Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 06 mai 2017 à 14h52 - Mis à jour le 14 octobre 2021 à 12h25 Ressources Guillaume Lacroix, cofondateur de Studio Bagel (aujourd’hui détenue majoritairement par Canal+) est aussi cofondateur de Together Studio. La société de production a lancé en novembre 2016 Brut, média d’information présent uniquement sous la forme de vidéos diffusées sur les réseaux sociaux (50 millions de vidéos vues sur Facebook en avril). Guillaume Lacroix présente le positionnement de Brut, ses projets (des déclinaisons dans le sport, le divertissement, aux Etats-Unis…) et évoque la première levée de fonds réalisée il y a quelques jours. Brut a été lancé en novembre 2016 comme un nouveau média vidéo. Racontez-nous la genèse de sa création. C’est une idée que j’ai eue au printemps 2016, lorsque que la campagne pour l’élection présidentielle débutait. C’était la première fois que les candidats s’emparaient vraiment des outils numériques et certains avaient une vraie volonté de se tourner vers les jeunes : Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron, notamment. En face, les grands médias était en retard : il n’y avait toujours pas de vraie offre digital native d’information sur le net, ni d’offre dédiée aux jeunes. Or je suis persuadé que contrairement à ce qu’on dit trop souvent, les jeunes adorent la politique et que si on leur parle avec les codes appropriés et là ont ils sont, c’est-à-dire sur les réseaux sociaux, ils consomment de l’information sérieuse. Le succès de Brut ces cinq derniers mois a validé ce constat. Quel est le concept de Brut ? Nous produisons actuellement cinq à six vidéos d’actualité par jour pour expliquer et décrypter l’actualité. Il s’agit de vidéos sous-titrées, très anglées, courtes (en général 1 min. – 1 min. 20 sec., mais beaucoup plus pour les vidéos en direct, ndlr) avec un ton propre et un story-telling très affirmé. Nos contenus sont 100 % vidéo et 100 % réseaux sociaux, avec une distribution sur Facebook, YouTube, Dailymotion, Twitter, Snapchat et Instagram. L’essentiel de nos audiences est cependant réalisée sur Facebook, c’est aujourd’hui la plateforme la plus adaptée à notre modèle. Les recrutements de l’équipe ont eu lieu pendant l’été, des tests ont été effectués entre août et octobre, puis le lancement a été réalisé en novembre. Nous avions très tôt une idée très précise de ce qu’on voulait faire : des vidéo d’information très premium, avec un ton très particulier et clair. Mais notre ligne a légèrement évolué depuis novembre : nous avons beaucoup misé sur l’humour au début, en associant pop culture et actualité, puis on s’est rendu compte qu’il ne fallait pas le systématiser. Quelle est l’équipe de production ? Notre équipe est constituée de 12 personnes, dont 8 journalistes mais aussi 4 monteurs directeurs artistiques ; ce sont des postes importants pour garantir une mise en image très qualitative. Nous associons des profils qui ont l’expérience de la télévision traditionnelle à des “digital natives”. Ils ont presque tous entre 25 et 30 ans et je fais office de directeur général. Dans l’équipe, ont peut citer notamment Laurent Lucas, l’ancien rédacteur chef adjoint du Petit Journal (l’ancienne émission de Canal+, ndlr). C’est le producteur éditorial de Brut, il dispose d’une vision très juste et d’une grande maitrise du temps court. Nous avons aussi recruter Rémi Busine, qui a développé sur le tas un savoir faire important sur les vidéos en direct et l’interactivité lors des grands événements lors de Nuit Debout qu’il diffusait sur Periscope. Quelle est la répartition du capital de Brut ? Brut est désormais une société à part entière. Elle est détenue majoritairement par Together Studio, société créée il y a un an par Renaud Le Van Kim autour de trois activités : la production de contenus TV (C Politique sur France 5, le Saturday Night Live français sur M6…), la production de films traditionnels et de séries pour mobiles (pour la plateforme Blackpills), et un studio digital pour la production de contenus numériques, dont Brut. Elle comprends une cinquantaine de personnes. Aux côtés de Renaud Le Van Kim, figurent au capital de Together Studio : Luc Besson, Roger Coste (ancien directeur général de Canal+ régie, ndlr), moi et des petits investisseurs. Quelles sont vos audiences ? Elle progressent constamment et sont au-delà de nos prévisions : 27 millions de vidéos vues en janvier dont une à 13 millions (un discours de Bernie Sanders aux Etats-Unis, ndlr), 29 millions en février, 43 millions en mars puis 50 millions en avril, avec des audiences beaucoup mieux réparties puisque chaque vidéo totalise maintenant 350 000 vues en moyenne, contre 30 000 au lancement. Sur les réseaux sociaux, il y a deux stratégies possibles : développer une audience ultra-puissante ou alors des communautés très engagées ; c’est pour cette deuxième option que nous avons opté. Brut possède aujourd’hui le plus gros taux d’engagement de Facebook en France. Au-delà de aspect quantitatif, c’est donc l’engagement qui m’importe. Dans la soirée du jeudi 20 avril, peu de temps après l’attentat contre ce policier sur les Champs-Elysées, notre Facebook Live a généré 6 millions de vues, 48 000 commentaires et 85 000 partages. Au-delà de l’aspect tragique de cet événement, cela démontre que lors des grands événements d’actualité, il y a un réflexe du public pour aller chercher des informations sur les réseaux sociaux et une envie d’interagir. Il faut avoir la capacité de répondre à ces attentes avec les bons formats. Pourquoi avoir noué un partenariat avec France Télévisions ? Nous recherchions un accord de commercialisation publicitaire et avons eu des discussions avec plusieurs médias, mais le meilleur feeling a eu lieu avec eux, notamment les équipes de la régie, qui on parfaitement compris nos attentes et nos besoins. Nous avons également noué un accord de distribution : franceinfo peut reprendre nos vidéos dans ses programmes d’information, ce qui donne un peu plus de visibilité. Enfin dernière raison, le service public trouve un écho particulier chez nous, nous avons une sensibilité éditoriale assez proche. Maintenant que nous avons des audiences suffisamment importantes, nous allons commencer à installer des publicités ces toutes prochaines semaines. Notre modèle reposera sur sur native advertising, des opérations spéciales – nous avons remportés nos premiers briefs et sur la production de contenus en BtoB pour des entreprises. Nous visons la rentabilité de l’offre en France pour fin 2017. Quels sont vos axes de développement ces 12 prochains mois ? Nous avons quatre priorités. D’abord développer l’activité en France, avec sa monétisation, comme je viens de l’expliquer, mais aussi en renforçant l’équipe pour augmenter le nombre de vidéos produites. Nous voulons passer de cinq à six vidéos par jour en moyenne à huit à dix. Ensuite les Etats-Unis : nous voulons nous développer sur ce marché avant fin mai. Il y a 27 millions d’utilisateurs de Facebook en France, mais plus de 230 millions aux Etats-Unis et au Canada : même un succès de niche agrégerait une énorme audience. On pense que notre modèle n’y a pas encore d’équivalent. L’équipe dédiée sera installée ici en France, mais on réfléchit encore à la pertinence d’un partenariat stratégique avec un nouveau média américain. Ce pourrait être Buzzfeed, NowThis ou un autre. Les premiers échanges que nous avons eu avec certains d’entre eux sont très encourageants, ils ont eu un regard extrêmement bienveillant sur notre projet d’installation. Enfin nous souhaitons aussi lancé en France deux déclinaisons de Brut, l’une autour du sport, parce que l’offre sportive sur les réseaux sociaux est aujourd’hui marginale et se limite aux détenteurs de droits, l’autre sur le divertissement : Demotivateur, Konbini, Minutebuzz font de très belles choses, mais nous allons apporter quelque chose de nouveau. Encore une fois, c’est le ton qui importe et qui fait la différence. Nous voulons ici produire des contenus adressés à des communautés précises, aux minorités, à la cause féminine, etc ? avec les formats créatifs et innovants. Comment financer ces nouveaux projets ? Jusque-là, Brut était financé sur fonds propres, mais effectivement, nous venons de clôturer une levée de fonds. Nous ne dévoilons pas l’identité de cet investisseur et le montant du financement, mais il nous permet de tripler nos ressources et de mettre en œuvre les développements stratégiques dont je viens de parler. Cela va nous permettre de développer sereinement ces projets pendant deux ans et cela s’ajoutera à la monétisation publicitaire de Brut en France qui va débuter. Nous prévoyons également de réserver une petite part de capital de l’entreprise aux salariés pour les intéresser à la réussite du projet. Ne craignez-vous pas une trop forte dépendance à Facebook ? Allez-vous sortir de la plateforme pour aller davantage vers d’autres médias comme YouTube et Snapchat ? Brut est déjà décliné sur l’ensemble des réseaux sociaux, mais ça a pris très fort sur Facebook, car c’est la plateforme idéale pour nous. Nous allons donc continuer à prioriser cette plateforme, mais on souhaite aussi développer davantage nos contenus sur Instagram et Snapchat avec des formats ambitieux, pas avec de simples transpositions. Quand au risque de dépendance, cela ne m’inquiète pas car j’ai confiance dans nos contenus et dans notre modèle. Notre positionnement sur des contenus de qualité, 100 % digital native et 100 % réseaux sociaux correspond parfaitement à ce que la plateforme souhaite mettre en avant dans les évolutions de son algorithme. Together Studio pourrait-il lancer d’autres offres à côté de Brut ? Oui, mais pas du même type. Together Studio travaille au lancement d’une nouvelle plateforme digitale sur la cible féminine, avec un grand partenaire média. Le lancement est prévu à la rentrée de septembre. C’est un projet différents de Brut et que nous pensons innovant et inédit : nous allons mettre en avant une vingtaine de femmes, de tout âge, qui se connaissent déjà et sont pour l’essentiel des “influenceuses” actives sur le numérique. Ce sera une offre différente de Brut, qui lui est un média d’information indépendant construit ex nihilo. Avec ce projet, l’idée est de s’appuyer sur ces femmes, de les fédérer sur une plateforme, de rendre plus visible et plus anglées leurs vidéos. Une marque média sera créée et une nouvelle forme de story-telling sera mise en place, en misant sur une multi-distribution, mais en mettant l’accent sur Instagram. Bio express 2015 Cofondateur de Together Studio, qui lance Brut en 2016 2010 Cofondateur de la société de production Black Dynamite, qui lancera Studio Bagel en 2013 2007 directeur adjoint de TF1 production Propos recueillis par Jean-Michel De Marchi Jean-Michel De Marchi PlateformisationRéseaux sociauxStreaming vidéoTransformation de l'audiovisuel Besoin d’informations complémentaires ? 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