Accueil > Médias & Audiovisuel > Les éditeurs en ligne doivent-ils encore proposer des forums de discussion ? Les éditeurs en ligne doivent-ils encore proposer des forums de discussion ? Longtemps des éléments importants pour la génération de trafic, l’engagement et la fidélisation de leurs lecteurs, les forums n'ont pas perdu de leur intérêt pour certains éditeurs malgré l'explosion des réseaux sociaux. Des transformations ont cependant été nécessaires ces dernières années dans les offres proposées. mind Media présente le rôle aujourd'hui des forums dans les stratégies de ces éditeurs et leur monétisation, à travers l'exemple traditionnel de Doctissimo, l'évolution du concept apportée par Le Monde et le point de vue des marques avec l’agence média digitale Agence79 (Havas). Par Luciana Uchôa Lefebvre. Publié le 20 juin 2018 à 10h01 - Mis à jour le 11 février 2021 à 17h13 Ressources Plus de 15 ans après leur développement, les espaces de discussion en ligne, très souvent sous la forme de forums, restent des vecteurs significatifs de référencement, de création et de fidélisation d’audiences et de monétisation pour les éditeurs, à en juger par les témoignages accordés à mind Media par Doctissimo (Lagardère Active) et Le Monde, bien que leurs approches pour créer de l’engagement soient très différentes. Un enjeu : adapter les forums au mobile Malgré les nouveaux usages autour des messageries et des réseaux sociaux, les forums gardent leur pertinence. Du côté de Doctissimo, le “Forum Santé”, forum de lecteurs avec quinze thématiques différentes, reste ainsi la rubrique la plus lue et la plus visitée du site. Mais le nombre de visites et de pages vues évolue peu. “On observe une certaine érosion de l’engagement depuis la montée du mobile”, explique Christophe Clément, directeur général adjoint de Doctissimo. Ainsi, pour certains sujets comme “grossesse-bébé”, 75 % des consultations se font sur le mobile, et le forum qui pouvait générer jusqu’à 150 000 messages par jour il y a plus de dix ans, en produit aujourd’hui 500 000 par mois. “Il y a certes moins de messages, mais toujours autant d’audiences”, ajoute Christophe Clément, qui ne remet pas en question le forum mais son inadéquation actuelle au mobile pour expliquer cette chute de l’engagement : “Les forums ont un rôle très important à jouer. C’est une démarche complémentaire à celle des réseaux sociaux car elle autorise l’anonymat, ce qui est central pour permettre aux individus de l’aborder sereinement.” C’est d’autant plus vrai quand le sujet traité est la santé. Doctissimo s’est engagé il y a près d’un an dans une refonte importante de son espace de discussion pour l’adapter à la consultation mobile, un processus qui devrait être terminée à la fin de l’année 2018. Cela concerne également d’autres éditeurs comme Caradisiac, Psychologies ou Parents, tous trois équipés par sa solution propriétaire. L’enjeu est de taille : c’est aussi grâce à son forum de lecteurs que Doctissimo a conquis organiquement des millions de visiteurs et les toutes premières places en audience dans sa thématique. L’impact sur les résultats des recherches était tel qu’il a propulsé la croissance de la marque dans son ensemble. “Le forum correspond à notre ADN, celui d’un site de services et de contenus qui met le patient au centre des soins, en lui apportant de l’information mais aussi des systèmes de communication transverses avec d’autres patients, leur permettant de partager information, conseil, entraide et soutien.” Le référencement naturel reste ici une pièce essentielle. “Nous n’avons jamais fait de search payant et cela reste vrai aujourd’hui : un message posté sur Doctissimo apparaît sur les moteurs entre 12 et 15 fois en moyenne sur deux ans.” Annonceurs : l’insertion dans les conversations plutôt que les bannières Si les parts d’audience sont comparables entre le forum et les pages éditoriales du site Doctissimo, l’impact sur les recettes n’est pas le même. Financé à 90 % par ses recettes publicitaires, l’éditeur capte majoritairement ces revenus à partir d’opérations spéciales avec du brand content, de l’habillage et aussi du display. Les campagnes sont placées pour la plupart en dehors des forums : les annonceurs privilégient toujours la prudence en ne s’affichant pas sur des espaces dont ils ne peuvent maîtriser les contenus. Un constat partagé par Benjamin Poly, directeur général d’Agence79 (Havas) à Paris, qui le nuance cependant en rappelant que certains forums très spécialisés de type BtoB ou issus de publications de niche, plus qualitatifs, peuvent s’avérer très intéressants pour certaines marques. “S’ils sont bien maîtrisés, les environnements plus spécialisés permettent à l’annonceur de toucher des populations intentionnistes, ce qui peut s’avérer très positif pour lui”, estime-t-il. Lorsqu’elle décide d’intervenir dans ces environnements, la marque doit cependant privilégier l’interaction conversationnelle avec ses cibles plutôt que les bannières classiques. “Les forums sont des environnements qui appartiennent aux internautes, ils sont donc moins réceptifs à la publicité”, conseille Benjamin Poly. Et quand bien même la forme serait plus adéquate – comme le brand content ou le message d’influenceur – il faut toujours veiller au respect du contrat de lecture, en évitant des approches trop frontales ou intrusives. La force de ces forums serait également dans la data, d’après Benjamin Poly : grâce à l’analyse sémantique des mots employés, les éditeurs peuvent constituer des segments de lecteurs par affinité ou intention d’achat. Une mine d’or pour les annonceurs qui à leur tour pourraient cibler ces audiences ailleurs que dans les forums, dans des environnements éditoriaux de leur choix. “On préfère bénéficier de ces données pour toucher ces audiences sur des environnements plus premium.” Pas sûr cependant que tous les éditeurs adoptent cette pratique : Doctissimo et Le Monde déclarent ne pas fournir de segments de données de leurs lecteurs impliqués dans les forums, dans les commentaires d’articles ou du Live. Le live comme alternative ? Tandis que le forum dans sa forme classique, avec sa communauté d’utilisateurs et ses différents fils de discussion, demeure au cœur de la proposition de valeur de Doctissimo, Le Monde, qui avait il y a quatre ans encore le même type d’offre, a souhaité, depuis, faire évoluer ce concept vers un système beaucoup plus ancré sur l’actualité éditoriale. Modérés par les journalistes, les commentaires des lecteurs sont attachés à un contenu éditorial précis : “Pour nous, l’objectif n’est pas que les gens échangent entre eux mais qu’ils puissent discuter avec nos journalistes”, explique Diane Lemoine, directrice de marketing numérique au Monde. Le dispositif phare du Monde en matière de forum est le “Live”, appliqué à des sujets à fort impact et ouvert à tous les lecteurs. Durant le Live, la rédaction traite en direct les commentaires et les questions formulés par les lecteurs. “C’est l’un de nos plus forts outils d’engagement et de fidélisation et une énorme source de trafic de qualité”, indique Diane Lemoine, qui souligne que son succès est tel que le dispositif, relancé en sa version actuelle au compte-gouttes il y a environ trois ans, se généralise. L’autre approche adoptée par Le Monde est de valoriser les abonnements, en offrant aux lecteurs abonnés la possibilité exclusive de commenter les articles et de participer à des appels à témoins dans le cadre de reportages ou de séries en cours. “Nos abonnés nous montrent qu’ils sont très attachés à l’idée de débattre sur l’actualité, c’est un levier de fidélisation stratégique pour nous”, complète-t-elle. La troisième source d’engagement des lecteurs étant la page Facebook du quotidien. Au delà des journalistes de la rédaction, Le Monde s’appuie sur Netino, entreprise spécialisée dans la modération des espaces participatifs. Ce qui nécessite du temps et de l’humain, en plus des algorithmes. Qu’il s’agisse de la mise en place technique de ces dispositifs ou des moyens humains et technologiques pour les animer et les maintenir, les investissements sont qualifiés de “lourds” par la directrice de marketing numérique du Monde, selon qui c’est efficace : leurs différents outils ont fait leurs preuves pour fidéliser les abonnés et augmenter le trafic qualifié, ce qui a un impact sur la valeur de la monétisation publicitaire dans les pages ouvertes à la publicité, comme c’est le cas du Live. “Nous nous y retrouvons tout à fait financièrement, mais également vis-à-vis de notre ligne éditoriale et pour la valeur que nous souhaitons apporter à nos lecteurs”, affirme Diane Lemoine. Luciana Uchôa Lefebvre Achat médiaCommentaires en ligneFormats publicitairesMobileSanté Besoin d’informations complémentaires ? 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