Accueil > Médias & Audiovisuel > Abonnements en ligne > Lorenzo Benedetti (Paradiso) : “Il faut varier les modèles de monétisation des podcasts natifs” Lorenzo Benedetti (Paradiso) : “Il faut varier les modèles de monétisation des podcasts natifs” Plusieurs pure-players du podcast natif ont créé leur structure de production pour proposer leurs propres programmes ou en produire pour des tiers. Paradiso, cofondé et présidé par Lorenzo Benedetti, cofondateur et ancien dirigeant de Studio Bagel, est l'un d'eux. Il détaille à mind Media son positionnement dans le podcast, son modèle économique et sa stratégie à l'international. Par . Publié le 18 février 2020 à 15h05 - Mis à jour le 18 février 2020 à 15h05 Ressources Ces dernières années, plusieurs acteurs spécialisés dans le podcast natif se sont lancés sur le marché français. En quoi le positionnement de Paradiso se différencie-t-il ? La société Paradiso a été officiellement créée en septembre 2019 et emploie désormais une vingtaine de personnes dont 15 en France. Une levée de fonds d’amorçage (d’un montant non communiqué, ndlr) a été réalisée en juillet 2019 auprès d’investisseurs issus des médias tels que Rodolphe Belmer (ancien directeur général de Canal+), le groupe audiovisuel Mediawan et la société de production Iconoclast. D’autres levées de fonds sont prévues pour accélérer le développement de l’entreprise. Paradiso a deux singularités, dont celle de ne pas être un studio de podcasts franco-français. Cette volonté d’internationalisation est une réalité depuis le mois dernier avec l’ouverture d’un bureau à Los Angeles, chargé d’adapter en langue anglaise le catalogue de Paradiso et de créer de nouveaux concepts pour ce marché. Nous avons également choisi de produire des podcasts narratifs, en particulier des fictions, des documentaires et des programmes jeunesse, en opposition aux podcasts de conversation et d’interview sur lesquels beaucoup d’acteurs se sont concentrés en France. En tant qu’acteur français, comment travaillez-vous sur l’internationalisation de vos programmes ? Le bureau américain a été ouvert en janvier par Emi Norris, notamment ancienne consultant pour Vice Media et vice-présidente des partenariats et de la distribution des contenus originaux chez Refinery29, qui a depuis constitué une équipe de cinq personnes. Pour leur permettre d’adapter nos podcasts, nous pensons en amont ces derniers de façon “glocale” : il y a une forme d’universalité dans le podcast natif avec des thématiques qui parlent à toutes les audiences quel que soit le pays, comme le documentaire criminel et les programmes jeunesse, et dans le même temps la culture française peut favoriser l’internationalisation des programmes avec des sujets comme la gastronomie. La principale différence entre les marchés français et américain réside dans les montants investis dans le podcast : les acteurs aux États-Unis y dédient des montants qui sont trois à quatre fois plus importants que dans l’Hexagone. En parallèle, nous espérons lancer un podcast en langue anglaise d’ici le printemps 2020. Les acteurs français peinent à trouver un modèle économique viable pour le podcast natif. Quel est pour vous le meilleur levier de monétisation de ce format ? Nous déployons un modèle de monétisation hybride, qui mêle la co-production et/ou la distribution exclusive sur des plateformes comme Sybel – qui diffusera prochainement (son lancement a été retardé en raison de l’annulation de l’édition physique du festival Séries Mania durant la crise sanitaire, ndlr) la fiction “CHŌSEN” sur l’enquête d’une adolescente sur le décès d’un de ses camarades de classe. De façon plus occasionnelle (20 % de notre offre au total), nous investissons dans des contenus dont nous parions sur l’audience future pour constituer un public et l’amener ensuite vers nos autres podcasts ; c’est le cas du documentaire sur l’autisme “En tongs au pied de l’Himalaya” sorti début avril. Il est important de varier ces deux modèles pour ne pas être trop dépendant de l’un ou l’autre. Nous étudions également d’autres sources de revenus, comme l’adaptation de certains de nos podcasts en livre ou en programme audiovisuel. Concernant la publicité autour des podcasts natifs, le marché publicitaire français n’est pas encore à mon sens assez structuré pour se reposer sur cette seule source de revenu. Et la crise sanitaire a souligné ses limites, avec un recul voire un arrêt des investissements publicitaires de la part des annonceurs, malgré une audience en hausse de la consommation de certains podcasts. À l’été 2019, le marché français a vivement débattu de la question de la légalité de l’agrégation des podcasts par des plateformes tierces. Quelle est votre position sur le sujet ? En ce qui concerne nos podcasts qui ne sont pas conçus dans le cadre de co-productions, la logique est à la multidistribution car l’objectif est que nos programmes soient écoutés par le plus grand nombre. Nous n’avons donc rien contre ce type d’acteur. En revanche, dès lors qu’il commence à collecter des revenus sur nos contenus, il faut exiger une rémunération proportionnelle. C’est d’ailleurs l’un chantiers du syndicat Producteurs Indépendants Audio (PIA), lancé en octobre dernier et dont j’ai été élu vice-président en janvier : tisser des relations fluides et équitables avec les plateformes pour établir des conditions de marché profitables pour le podcast natif et ses producteurs. Quels sont les autres chantiers prioritaires du PIA ? L’une des principales priorités du PIA est de mettre en place des aides à la création dans le podcast, pour qu’il ne soit pas la seule filière créative à ne pas en bénéficier. Malheureusement, actuellement, rien dans la projet de réforme de l’audiovisuel, ni dans les mesures d’urgence en soutien au secteur de la culture déployée durant la pandémie, ne répondent à cette attente. C’est en partie notre faute, car le PIA s’est structuré tardivement, alors que la réforme était déjà bien entamée. Nous attendons aussi beaucoup de la mission de réflexion sur l’accompagnement de la création sonore confiée à François Hurard, inspecteur général des affaires culturelles, en octobre dernier et annonée lors de la dernière édition du Paris Podcast Festival. Nous préparons donc des actions post-confinements pour sensibiliser tous les interlocuteurs de la Culture, les discussions ayant été suspendues durant la crise sanitaire. Le PIA travaille en effet sur la problématique de la mesure d’audience des podcasts natifs. Il est primordial de parvenir à un standard qui rende compte fidèlement de la consommation du podcast, qui soit admis par tous, afin de mieux le monétiser ; mais le marché ne l’a pas encore trouvé. Des podcasts narratifs Depuis sa création en septembre 2019, sept productions sont sorties des studios de Paradiso : les podcasts d’information de Brut sur Spotify – “qui ont prouvé que le format d’information court était possible en France”, commente Lorenzo Benedetti -, le documentaire criminel “Le Grêlé” pour Sybel, la comédie audio “Allô Promo” diffusée aussi sur Spotify, le documentaire “En tongs au pied de l’Himalaya”, les histoires audio pour enfants de “L’école des loisirs à écouter”, les séries pour enfants “La station imaginaire” pour Audible, ainsi que la série fiction sur l’univers des start-up “Conf call” pour Deezer. D’autres programmes sont attendus pour la fin de l’année, dont “Chosen” déjà évoqué et le podcast narratif “Mes 14 ans”. Paradiso a également lancé fin janvier un concours d’écriture d’une série audio de science-fiction internationale pour Audible, la filiale livre audio d’Amazon. Les 10 finalistes retenus ont bénéficié d’une formation dispensée avec le Conservatoire Européen d’Ecriture Audiovisuelle de mi-mai à début juin, “afin de former une nouvelle génération d’auteurs de podcasts car aucune structure ne prépare à ce format actuellement”, précise Lorenzo Benedetti. Une série de science-fiction audio, baptisée “Chroniques sauvages”, sera disponible sur Audible en 2021. LORENZO BENEDETTI 2019. Cofondateur et président, Paradiso Media 2016. Directeur de la création originale numérique, Canal+ 2014. Cofondateur et PDG, Studio Bagel NB : CETTE INTERVIEW A ÉTÉ RÉALISÉE EN FÉVRIER 2020 et mise à jour en juin 2020 Abonnements numériquesAudio digitalFinancementPodcastsPublicité audio Besoin d’informations complémentaires ? 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