Accueil > Marques & Agences > Achat média > Deals ID : l’arme des éditeurs premium pour recréer de la valeur en programmatique Deals ID : l’arme des éditeurs premium pour recréer de la valeur en programmatique En leur permettant de mieux encadrer les mécanismes du programmatique, les deals ID, ces mécanismes de commercialisation permettant d’enrichir les informations contenues dans une enchère, qui se développent depuis 2014 en France, ont permis aux éditeurs dits premium de mieux valoriser leurs inventaires premium et de les réconcilier avec le RTB, environnement où ils n’ont pas toujours été à leur avantage. Car les annonceurs qui, dans une logique de branding, recherchent une bonne couverture sur cible, sont prêts à investir de manière plus importante sur ces CPM. Attention toutefois à ne pas abuser de ces prix garantis, parfois ennemis d'une bonne optimisation, et à ne pas ajouter trop de complexité dans un univers qui vise à l’automatisation. Quelle valeur les deals ID recréent-ils réellement pour les éditeurs ? Quels inventaires sont concernés ? Quels sont les avantages pour les annonceurs ? Satellinet a interrogé NextRégie, Amaury Médias, Audience Square, La Place Média, Yahoo!, Rubicon Project, Havas Media, Tradelab et FullSIX Media pour mieux comprendre les avantages et les inconvénients de ces nouveaux mécanismes de commercialisation. Par Aymeric Marolleau. Publié le 28 août 2015 à 15h47 - Mis à jour le 28 août 2015 à 15h47 Ressources Lorsqu’ils ont été lancés sur le marché français par le SSP américain Rubicon Project en 2012, les deals ID ont constitué une petite révolution dans le monde du RTB. « A l’époque, les éditeurs, qui n’arrivaient pas à vendre l’ensemble de leurs inventaires en gré à gré, ont constitué leurs Adexchanges, comme La Place Média et Audience Square, pour vendre en « blind » de façon à ne pas entrer en concurrence avec leurs régies », rappelle Arthur Millet, président du Syndicat des régies Internet (SRI) et directeur digital d’Amaury Médias, sur le départ. Mais les enchères en temps réel ont fait perdre de la valeur aux éditeurs, « car il y avait plus d’inventaires programmatiques offerts que d’acheteurs. Les CPM étaient relativement bas », admet Yohann Dupasquier, cofondateur de Tradelab. Recréer de la valeur Les deals ID ont permis aux éditeurs d’enrichir les inventaires vendus en RTB en les segmentant, en y ajoutant des data et en leur donnant la possibilité de travailler avec les acheteurs de leur choix. Une aubaine, tant l’achat en programmatique gagne en importance : selon le dernier baromètre de l’ePub du SRI il a représenté près du quart – 24 % – du total display, avec 195 millions d’euros investis en 2014, soit une hausse de 66 % par rapport à 2013. Le SRI définit aujourd’hui les deal ID comme un « paramètre d’enrichissement de la requête et de la réponse permettant d’y attacher des informations additionnelles de ciblage, et permettant à la réponse de bénéficier de conditions différentes d’une enchère (effectuée) sans deal ID ». « Les deals ID ont permis de pallier le manque d’informations délivrées dans les requêtes standardisées, en enrichissant considérablement l’élément publicitaire », affirme Fabien Magalon, directeur général de La Place Média, sur le départ. Par exemple, chez Orange Advertising, la catégorie culture est accessible en enchère ouverte, tandis que pour accéder à la thématique Film/Loisir/Cinéma, il faudra passer par un deal ID. Il devient possible de créer des offres ad hoc avec une combinaison de critères : formats, emplacements, site, data, visibilité… Surtout, l’adoption de cette technologie a permis aux éditeurs de « protéger les CPM en captant les achats médias, souligne Antoine de Lasteyrie, président de FullSIX Media. C’est une façon pour eux de valoriser leur marque et de faire valoir l’importance de l’emplacement ». Pegah Mofidi, directrice commerciale digital de NextRégie, la régie publicitaire du groupe NextRadioTV (BFMTV, RMC, 01net, etc.) confirme : « Pour une régie premium comme la nôtre, les deals ID sont une vraie opportunité. Ils tirent les CPM à la hausse, car nous pouvons faire des propositions très précises selon les types d’acheteurs, avec des durées limitées par exemple ». De fait, Julien Gardès, directeur général Europe du Sud de Rubicon Project, estime que « dès lors que la transaction pour un inventaire donné est enrichie par un deal ID, son CPM est au minimum multiplié par deux ». Les prix peuvent parfois monter encore davantage : chez Audience Square, le CPM s’accroît encore de 60 % en moyenne lorsqu’un éditeur rend visible sa marque dans le deal. « Cela prouve la valeur des marques media en programmatique » souligne le directeur général d’Audience Square, Erwan Le Page. Pour les inventaires premium Sébastien Noël, directeur du programmatique de Yahoo en France, justifie les prix plancher plus élevés pratiqués en programmatique : « En bénéficiant des data de l’éditeur – Yahoo dans notre cas, – dans le deal, les annonceurs n’ont pas besoin d’en acheter auprès de tiers pour qualifier l’audience ; et en achetant une visibilité garantie, ils économisent le travail de filtration et de tri », souligne-t-il. Car ces deals se prêtent particulièrement bien aux inventaires premium. La vidéo, par exemple, qui représente 13 % des achats programmatiques avec 26 millions d’euros investis en 2014, fait souvent partie de ceux que les éditeurs traitent de façon particulière, puisque leurs pré-rolls sont très lucratifs. Ainsi, Pegah Mofidi souligne que « NextRégie a commencé à faire des deals ID sur la vidéo il y a un an, lorsque nous avons lancé notre SSP vidéo. » Sur le display, la régie de NextRadioTV réserve également ses offres de « first impact » – le premier contact avec l’internaute, qui offre donc un meilleur taux de mémorisation d’une marque ou d’un produit – aux deals ID. Chez Yahoo!, « les deals ID sont utilisés pour permettre aux annonceurs d’avoir les impressions les plus qualifiées » explique Sébastien Noël. Cela concerne par exemple la mise à disposition de la data Yahoo! pour pré-qualifier les impressions, ou pour obtenir des garanties de visibilité au-delà de 75 %. En tout, l’antenne française du géant américain dispose d’une liste d’une trentaine de deals ID classiques, et peut créer du sur-mesure selon les demandes des acheteurs. Néanmoins, alors que le programmatique visait à automatiser les tâches et simplifier la gestion des inventaires, les deals ID se montrent plus chronophages pour les équipes commerciales. « Accompagner les négociations avec l’annonceur et se mettre d’accord sur la campagne demande beaucoup de temps et de contact relationnel. Il faut toujours être attentif à ce que les budgets soient à la hauteur de l’investissement consenti en temps » reconnaît Pegah Mofidi. Créer un deal et le mettre à disposition sur la plateforme prend 24 à 48 heures. Sébastien Noël met aussi en garde contre la tentation de certains éditeurs à associer des prix fixes à leurs deals ID : « Cela casse la logique du RTB et le yield ». Auprès des annonceurs « branding » Quels annonceurs sont les plus intéressés par les deals ID ? Les acteurs du marché s’accordent sur ce point : ceux qui, dans une logique de branding, veulent développer leur notoriété et leur image auprès des consommateurs. « Les deals ID sont intéressants pour les marques qui font attention à l’environnement où elles sont exposées, puisque cela leur permet de les choisir en amont », explique Antoine de Lasteyrie (FullSIX Media). En effet, la logique du programmatique, qui consiste à acheter un profil plutôt qu’un emplacement publicitaire, peut faire craindre à certaines marques d’être exposées sur un site ou à côté d’un contenu qui nuise à leur image. C’est l’enjeu de la fameuse « brand safety ». Au contraire, les annonceurs qui recherchent plutôt de la performance (ventes immédiates, visites en points de vente…) « font abstraction du support », ajoute le président de FullSIX Media. Les deals ID sont d’ailleurs parfois questionnés sur le volet performance. Ainsi, pour Raphaël De Andrèis, directeur général d’Havas Media Group France, « bien que plus sécurisants pour la marque, ils se montrent parfois moins rentables que le RTB traditionnel, qui permet de toucher des éditeurs de niche ». Au vu de ces atouts, les deals ID sont présentés par ses partisans comme une façon de réconcilier le meilleur des enchères en temps réel et le meilleur de l’achat direct, ou encore une manière de faire quitter aux inventaires premium le giron de l’achat direct pour le programmatique, avec ses avantages en termes d’automatisation. Mais certains acteurs se montrent plus critiques. Ainsi, selon Antoine de Lasteyrie, « cela revient aussi à recréer des processus et de la rigidité dans le programmatique, qui avait plutôt vocation à automatiser et simplifier les choses ». Yohann Dupasquier, de Tradelab – qui réalise 20 à 25 % de son volume d’achat en deal ID – abonde dans son sens : « Ce n’est pas une manière satisfaisante de travailler, car on revient au media planning : la proximité commerciale prime sur l’aspect scientifique dans le choix des inventaires. On réintroduit un biais par la relation humaine à l’avantage des gros éditeurs, qui ont une puissance commerciale, au détriment des petits éditeurs, qui peuvent moins facilement valoriser leurs contenus, en dépit de leur qualité ». La bataille des anciens contre les modernes se rejouerait-elle autour des deals ID ? Les deals ID montent en puissance Quelle importance les deals ID ont-ils pris dans le paysage du programmatique en France ? Aux dires des acteurs, ils représenteraient déjà 15 à 20 % des achats en programmatique. « Les deals ID sont beaucoup plus utilisés en France qu’en Angleterre et en Europe du Nord, car la dimension branding et l’intérêt porté aux formats y est plus importante » remarque Julien Gardès. De fait, le directeur général pour l’Europe du Sud de Rubicon Project rapporte que chez les éditeurs qui disposent d’une équipe dédiée au programmatique, les deals ID représentent 20 à 50 % du chiffre d’affaires réalisé dans ce domaine. Une proportion qui se vérifie chez La Place Média, qui commercialise les inventaires de nombreux sites médias premium (dont Amaury Médias, FigaroMédias et TF1 publicité), où les deals ID peuvent représenter de 20 % à près de 50 % du chiffre d’affaires mensuel programmatique. Depuis la création de cet d’adexchange privé, environ 4 000 deals ID y ont été créés. Pour Audience Square, l’adexchange fondé par une dizaine de groupes médias – dont Les Echos, le Groupe M6, Le Monde…-, les deals ID représentent 15 % du chiffre d’affaires. « Si on y ajoute les deals programmatiques portés par les régies de nos éditeurs, on peut même atteindre 25 % à 30 % du CA programmatique » ajoute Erwan Le Page, son directeur général. Dans les prochains mois, les deals ID continueront de gagner en importance dans le paysage français du programmatique. « A mesure que les éditeurs deviendront plus matures sur le programmatique, leur connaissance technique des deals ID s’améliorera. Si bien qu’à terme, tous les éditeurs premiums du marché l’adopteront à grande échelle », selon Julien Gardès. Compte tenu de leur croissance actuelle, les deals ID pourraient donc atteindre 20 à 25 % du programmatique total dans un an. Pour autant, ils ne cannibaliseront pas le RTB classique : « Ils pourront représenter plus de 30 % de notre chiffre d’affaires dans un an, mais ce ne sera pas l’essentiel de notre activité car ils répondent à des besoins spécifiques » considère Erwan Le Page (Audience Square). « Les deux offres coexisteront en parallèle : l’une pour le branding, l’autre pour les formats plus standards et les campagnes où l’on recherche de la performance » conclut Julien Gardès. Aymeric Marolleau Achat programmatiqueDeals ID Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Adexchanges : quelles sont les places de marché privées mises en place par les éditeurs de presse à l’étranger ? 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