Jérémie Clévy (Europe1.fr) : « Nous allons monétiser le Lab, notre pure player sur l’actualité politique »

Vous avez rejoint Europe 1 en juin dernier comme directeur des activités numériques, après deux ans comme directeur du digital à Mondadori France. Pourquoi ce choix ?

Europe 1 est une marque média que j’adore depuis tout petit, quand j’écoutais Stéphane Paoli, Alain Maneval, Jacky, Jean-Marc Delarue, Les Inconnus… J’y ai même fait un stage lorsque j’ai commencé ma carrière de journaliste. Et puis l’information générale me manquait au sein de Mondadori. J’avais une petite frustration sur cet aspect.

Il y a une légère redéfinition du périmètre d’activité par rapport à votre prédécesseur, Gilles Nay, qui était responsable du numérique pour l’ensemble du pôle news. Pourquoi cette nouvelle organisation ?

En effet, le bouquet numérique news de Lagardère Active (Europe1.fr, Le Lab, ParisMatch.com, leJDD.fr) a été organisé différemment : je suis directeur des activités numériques et éditeur du site Europe 1, ainsi que du Lab, le pure player sur la politique qui lui est rattaché. Je travaille en lien avec Jean-Philippe Balasse, qui est directeur adjoint de la rédaction d’Europe 1. Les activités numériques de Paris Match et du JDD sont gérées par Edouard Minc, qui est éditeur des deux titres. Le bouquet news numérique avait un sens, mais c’est compliqué de tout gérer en même temps, à la fois pour le management et le travail opérationne : c’est compliqué de gérer des rédactions séparées géographiquement les unes des autres.

Quelles sont les différences avec vos précédentes missions à Mondadori ?

A Europe 1, je m’occupe d’une marque – deux avec Le Lab -, qui possède une identité forte. A Mondadori, je gérais une trentaine de marques différentes et les rédactions web ne m’étaient pas rattachées. Dans cette configuration, donner des conseils sur le SEO, la titraille, les formats etc., n’est pas souvent suivi d’effets. Il a par exemple fallu plusieurs mois pour convaincre les équipes de faire des push sur nos applications mobiles… Etre directeur du numérique sans être responsable des rédactions, ce n’était pas évident. C’est totalement différent à Europe 1.

Comment est organisée la rédaction web d’Europe 1 ?

Elle comprend un peu moins de 30 personnes, avec une organisation par spécialités : médias, culture, sport, politique…. C’est très important en termes de suivi des sujets sur la durée et de qualité éditoriale, en sachant que chacun peut travailler sur des sujets très chauds ou de long terme, des dossiers. Ophélie Wallaert occupe le rôle de rédactrice en chef. Les sites de presse écrite semblent avoir plusieurs années d’avance en termes de stratégie, d’audiences, de contenus…

Quels sont les enjeux numériques pour un site de radio aujourd’hui ?

Ce sont des éléments valables pour l’ensemble des sites des groupes audiovisuels : nous ne nous sommes par emparés du numérique suffisamment bien et vite, et il nous manque la culture de l’écrit, qui caractérise très bien les sites de presse écrite. Un autre élément est directement lié et joue aussi en notre défaveur : pour son référencement, Google comprend et classe mieux les contenus écrits que les contenus son et vidéo. Il faut nous appuyer sur nos forces que sont l’audio et la vidéo. Nous produisons déjà 14 heures de vidéo en direct par jour et mettons en ligne 150 contenus vidéo par semaine. Ce sont des formats que nous allons encore développer. Mais plus généralement, nos audiences sont bonnes : le bouquet news de Lagardère se situe en onzième position des sites d’actualité. Europe 1 et le Lab totalisent 2,4 millions de VU mensuels (Médiamétrie//NetRatings, septembre), et le JDD.fr rassemble 3,7 millions de VU.

Le Lab est parfois critiqué pour traiter surtout des anecdotes et des petites phrases de la politique. Le concept va-t-il perdurer en l’état ?

Il faut rappeler ce qu’est le Lab : un site qui raconte l’actualité politique à partir des réseaux sociaux. On ne se contente pas de reprendre les petites phrases, on les enrichit et on les recontextualise. Certains critiquent le concept, mais il fait l’actualité politique et est souvent cité en exemple pour les informations que le site est le seul à mettre en évidence. Christophe Barbier, le directeur de la rédaction de L’Express, en disait le plus grand bien il y a quelques semaines, et nous sommes copiés par d’autres, puisque Le Figaro a annoncé le lancement d’un site similaire (il devrait être lancé fin 2013 ou début 2014, ndlr).

Allez-vous mettre en place la monétisation du Lab ?

Oui. Le site a trouvé son public, avec environ 450 000 VU en septembre dernier, selon Médiamétrie//NetRatings. La prochaine refonte du lab, prévue ces tout prochains mois, nous permettra de créer des espaces publicitaires.

Quels sont les projets désormais ?

Nous ne sommes pas encore satisfaits des applications mobiles et tablettes, même si elles rassemblent des audiences satisfaisantes, avec notamment 220 000 VU mensuels sur le mobile (Médiamétrie//NetRatings), mais il faut les adapter davantage aux nouveaux usages, notamment à la vidéo. L’adaptation de l’information au mobile et l’importance de plus en plus grande des réseaux sociaux sont également des pistes de réflexion intéressantes.

Avez-vous déposé une demande de subvention d’un projet devant le Fond numérique pour l’innovation de la presse ?

Pas encore, mais nous étudions effectivement la question pour les prochains mois.