[Dossier du Social Media Club] Faut-il toujours utiliser Facebook et si oui, comment ?

La population sur Facebook vieillit, c’est un fait…

Voilà plus de 15 ans que Facebook est entré dans nos vies, du moins, pour une partie de la population. Et forcément, à mesure que le réseau prend de l’âge, son audience vieillit. En 2022, 25% de l’audience de Facebook était âgée de 18 à 24 ans, 32% de 25 à 34 ans, 26% de 35 à 54 ans. En France, 38,9 % des utilisateurs actifs de Facebook ont plus de 45 ans. 60 % d’entre eux sont âgés de plus de 35 ans. 

“Il est vrai que Facebook est en perte de vitesse ces dernières années”, constate Emmanuelle Patry, fondatrice de social media lab et formatrice pour social media managers. Et les chiffres le prouvent : en Europe, on comptait 407 millions d’utilisateurs en juillet 2022, un chiffre en baisse (ce qui n’est cependant pas le cas dans le reste du monde). Le vieillissement de la population couplé à une baisse du nombre d’utilisateurs représentent donc pour beaucoup un signal d’alarme.

… mais c’est aussi une bonne chose

Toutefois, le vieillissement de la population sur Facebook est-il nécessairement une mauvaise chose ? Tout dépend de la cible que l’on veut atteindre ! “Il est très intéressant d’observer que Facebook est le seul réseau social qui sert de trait d’union entre toutes les générations”, poursuit Emmanuelle Patry. Facile d’accès, Facebook permet aux séniors de s’engager sur les réseaux sociaux, des séniors qui représentent une cible privilégiée pour certaines marques car ils disposent d’un important pouvoir économique.

Même analyse du côté de Mélissa Lambert, social media manager chez Welcome to the Jungle.  “Pour toucher les 18-24 ans, nous sommes logiquement allés sur Tik Tok, de même que les 25-34 ans sont très actifs sur Instagram. Mais je trouve cela très intéressant de pouvoir cibler des personnes qui ont une longue carrière derrière elles et sont proches de la retraite”, affirme-t-elle, avant d’ajouter qu’il lui semblerait très hasardeux de se couper totalement d’une partie de la population en abandonnant Facebook.

Et puis, notons que Facebook reste tout de même le 4e réseau social préféré des 15-24 ans selon Médiamétrie! En outre, les jeunes ne l’utilisent pas uniquement pour communiquer avec leurs grands-parents, mais aussi parce qu’ils y apprécient les groupes d’entraide. “Les jeunes ne vont pas y aller tous les jours, mais Facebook demeure en quelque sorte un incontournable. Les groupes privés y sont extrêmement puissants”, relève Charlotte Murat, journaliste en charge des réseaux sociaux pour 20 Minutes. D’ailleurs, le média a lui-même lancé des groupes fermés. L’un d’eux est par exemple dédié à la lecture et animé par un journaliste culture.

Une force de frappe inégalée ?

Incontournable, Facebook l’est indéniablement pour 20 Minutes, qui compte près de 3 millions d’abonnés sur sa page. Charlotte Murat le décrit comme le “navire amiral” du média. A ce jour, Facebook draine 80% du trafic issu du social media. “Si on l’abandonnait, ce serait 15% de trafic en moins au global pour le média”, confie notre interlocutrice. En comparaison, même si la page Twitter de 20 Minutes rassemble 2 millions d’abonnés, l’impact sur le trafic est bien moindre.

Chez Welcome to the Jungle, le constat est identique : 80% du trafic vers les contenus du média provient de Facebook alors que la page ne compte que 350 000 abonnés contre 650 000 pour la page LinkedIn qui ne draine que 15% du trafic social media. Pour Mélissa Lambert, cela tient à l’algorithme de Facebook : “quand les utilisateurs s’engagent auprès du contenu en likant et commentant, un contenu peut devenir un véritable hit. Il n’y a que sur Facebook que l’on arrive à dépasser les 1 million de vues pour un seul contenu, le tout, en organique”, affirme-t-elle.

Si l’on se met maintenant du point de vue d’une marque, instaurer une présence, même proche du minimum syndical, semble être le B.A. BA. Par exemple, un restaurant peut difficilement se priver d’une page Facebook qui est devenue l’équivalent des pages jaunes. Et puis, Facebook c’est le groupe Meta avec Instagram, WhatsApp, et un investissement fort dans le métaverse qu’il faudra suivre de près dans les prochaines années.

Un algorithme difficile à percer pour les jeunes entrants

Toutefois, il est vrai que Facebook a tendance à donner l’avantage aux contenus qui performent, laissant peu de chances à ceux qui ne suscitent pas suffisamment d’engagement dès le démarrage. C’est d’ailleurs pourquoi l’accroche dans les premières secondes d’une vidéo est si importante.  “Et puis, c’est beaucoup plus facile de percer à partir zéro en tant que créateur de contenu sur TikTok que sur Facebook”, remarque Mélissa Lambert qui constate toutefois que Facebook a évolué. Facebook Watch a notamment permis aux créateurs de vidéos d’atteindre des cibles nouvelles : par exemple, les vidéos produites par WTTJ touchent 80 à 90% d’utilisateurs qui ne suivent pas la page Facebook de Welcome. Il est aussi intéressant d’observer que les vidéos sur Facebook ont une durée de vie plus longue que sur les autres plateformes.

Ceci étant dit, Charlotte et Mélissa concèdent que l’algorithme est plus favorable aux médias qu’aux marques. Pour Emmanuelle Patry, il est clair que “sans publicité, sans vidéo et sans stratégie dédiée, il devient quasiment impossible pour une marque qui vend des produits de percer. Ce n’est plus le boulevard qu’ont connu les marques au lancement”. De plus, les entreprises avec une cible B2B auront encore plus de difficultés sur Facebook, où pour qu’un contenu fonctionne, il faut qu’il procure de l’émotion, et généreront certainement plus de leads via une stratégie sur LinkedIn.

Des campagnes d’ads avec un excellent ROI

Un autre point important à étudier concerne les publicités. “Le rapport qualité/prix sur les campagnes de pub est excellent sur Facebook”, constate Emmanuelle Patry, tout comme Mélissa Lambert qui, se basant sur son ancienne expérience en agence, estime que Facebook propose le système d’ads le moins coûteux et le plus intéressant du marché. 

Toutefois, toutes deux s’accordent à dire que les marques vont devoir mener une réflexion importante sur l’aspect créatif de leurs campagnes publicitaires. Facebook présente l’avantage de proposer une variété de formats sur le fond comme sur la forme  (vertical, 16-9) qui supprime certaines barrières à l’entrée contrairement à un Tik Tok dont il faut parfaitement maîtriser les codes. “De plus, le ciblage et notamment le retargeting (affiliation d’un fichier client avec la base d’utilisateurs Facebook) sont ultra-puissants sur Facebook ”, renchérit Mélissa Lambert.

La seule difficulté réside cependant dans la restriction du tracking des données des utilisateurs, rendant plus difficile d’évaluer l’efficacité d’une campagne à moins de mettre en place une API de conversion.

Abandonner Facebook : plus de risques que de bénéfices ?

Pour conclure, nos trois interlocutrices s’accordent à dire que non, à ce jour, il n’est pas pertinent d’abandonner Facebook. “Pour moi, il y a plus de risques à ne pas y être, notamment car on se coupe d’une partie de la population”, relève Mélissa Lambert qui croit qu’avec une bonne stratégie dédiée, il est encore possible d’y faire des choses intéressantes.

Constat partagé par Emmanuelle Patry pour qui Facebook reste un levier très important : “il y a encore beaucoup de choses à explorer en termes de créa, et de plus, si on ne cible pas les moins de 35 ans, c’est là qu’il faut aller”. 

Quant à Charlotte Murat, elle juge impensable pour un média comme 20 Minutes de quitter Facebook. “Sans oublier que les capacités de développement de Facebook sont telles que la plateforme pourrait présenter des nouveautés qui feront la différence dans les prochaines années”, conclut-elle.

Paulina Jonquères d’Oriola