[par Alan Walter, avocat associé – Walter billet] L’ouverture des données des greffes, ou comment casser les monopoles par l’open data

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Dans sa démarche de généralisation de l’open data, le gouvernement s’apprête à apporter une importante précision quant aux conditions, notamment financières, de réutilisation des données du secteur public. C’est l’occasion de revenir sur les impacts concrets de la généralisation de l’open data pour les acteurs du web.
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Avec la loi CADA, promulguée en 1978 puis modifiée et précisée régulièrement jusqu’au début des années 2010, la France dispose d’un arsenal juridique conséquent et efficace, soutenu par de nombreuses initiatives publiques et privées, pour développer l’open data. Toutefois, ce corpus législatif, si complet et établi soit-il, n’est pas sans poser de difficultés de mise en oeuvre, notamment en raison de son champs d’action restreint. En effet, l’obligation d’ouverture des données est limitée aux services administratifs, excluant les établissements publics à caractère industriel et commercial et, a fortiori, les acteurs privés. C’est en confrontant ce périmètre d’application à la réalité des faits que l’on comprend pourquoi nombre d’informations, qui apparaitraient comme librement distribuables par principe, ne sont en réalité pas accessibles. C’est notamment les cas des données détenues par les greffes des Tribunaux de commerce. En application de l’article L. 123-6 du code de commerce, les registres du commerce et des sociétés sont tenus par les greffiers près chaque Tribunal de commerce. Or, ces greffiers sont des officiers publics et ministériels nommés par le garde des sceaux. Ils exercent une fonction judiciaire comme membre du tribunal et une fonction extra-judiciaire dans le cadre de leur activité de tenue du registre du commerce et des sociétés. Ils opèrent dans un cadre libéral, à l’instar des médecins et des avocats. Ces greffiers, lorsqu’ils enregistrent les entreprises ou les modifications du registre du commerce et des sociétés, ne sont donc pas des agents de l’Etat et n’interviennent alors pas dans le cadre d’une mission de service public. Ils ne sont soumis à aucune obligation de mise à disposition des informations qu’ils produisent et/ou détiennent. Les données ainsi collectées par les greffiers ne peuvent donc leur être réclamées sur le fondement la Loi CADA. Profitant de cette situation privilégiée, ceux-ci ont constitué un GIE, éditeur du site www.infogreffe.fr… Impossible donc de créer un site web (ou toute autre activité) à la manière de société.com sans payer une licence à Infogreffe pour la mise à disposition et la tenue à jour des données des registres du commerce et des sociétés. Impossible jusqu’à l’entrée en vigueur de la Loi Macron.2 Afin de favoriser la création de nouveaux modèles économiques, la Loi Macron met un terme à cet oligopole en modifiant les articles L. 123-6 du code de commerce et L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, imposant désormais aux greffiers des tribunaux de commerce de transmettre toutes les données du registre du commerce et des sociétés à l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) qui tiendra son propre registre, librement et gratuitement accessible. Ces nouvelles dispositions ne privent pas Infogreffe de toute utilité pour autant. Une nouvelle lecture de l’article 10 de la Loi CADA permettra de remarquer que la présence de données à caractère personnel dans un document constitue une limite à sa diffusion. Dès lors, ne pourront être diffusées que des données qui auront été rendues anonymes au préalable. A défaut, aucune mise en ligne n’est possible. Tout utilisateur de données ainsi libérées devra se garder de diffuser l’identité ou l’adresse des dirigeants des entreprises. Par ailleurs, il convient de ne pas confondre données publiques et document administratif. Ce dernier est défini à l’article 1er de la Loi CADA : “Sont considérés comme documents administratifs, au sens des chapitres Ier, III et IV du présent titre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission”. Ainsi, même si la donnée est librement accessible, l’extrait k-bis continue de ne pouvoir être délivré que par les seuls greffiers des tribunaux de commerce, en leur qualité d’officiers publics et ministériels. En effet, le k-bis n’est valable que s’il est revêtu du sceau du greffe. Reste désormais à attendre la publication des modalités d’application de l’ouverture des données des greffes en open data (délai et modalités de transmission et de diffusion des données par voie électronique), en application des nouveaux articles L. 123-6 du code de commerce et L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, sont attendus pour la fin du mois de décembre 2015. Dans la droite ligne de la décision prise par le gouvernement à l’égard des greffes, il ne serait pas surprenant de voir se multiplier les régimes dérogatoires, complexifiant encore un schéma déjà contre-intuitif, nécessitant une analyse au cas par cas pour chacun des domaines concernés.

«  » »L’obligation d’ouverture des données est limitée aux services administratifs.” »

«  » »Tout utilisateur de données libérées devra se garder de diffuser l’identité ou l’adresse des dirigeants des entreprises.” »
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