Accueil > Médias & Audiovisuel > Audiovisuel & vidéo > Audiovisuel : comment les prestataires s’adaptent aux nouvelles exigences des chaînes TV Audiovisuel : comment les prestataires s’adaptent aux nouvelles exigences des chaînes TV Les groupes audiovisuels rationalisent de plus en plus leurs investissements dans la distribution de leurs contenus hors TV linéaire (applications mobiles, téléviseurs connectés, consoles de jeux, HBBTV....) pour se concentrer sur les bassins d’audience les plus stratégiques. Conséquence : les prestataires audiovisuels, qui se sont construits dans les années 2010 pour répondre à la multiplication des plateformes et à la volonté d’hyperdistribution des chaînes, doivent s’adapter à ce nouveau contexte et pivoter leurs activités. Pour comprendre ce mouvement des chaînes TV et de leurs prestataires, mind a interrogé M6, France Télévisions, Wiztivi, Dotscreen et Hubee. Par . Publié le 10 juin 2016 à 11h10 - Mis à jour le 10 juin 2016 à 11h10 Ressources L ’ère de l’hyperdistribution des contenus par les acteurs audiovisuels est-elle terminée ? Les signaux sont contradictoires, mais plusieurs indices laissent présager un resserrement du marché : après avoir effectué beaucoup de tests ces cinq dernières années, les groupes TV rationalisent davantage leurs investissements et internalisent de plus en plus le développement des applications et plateformes pour distribuer leurs contenus hors TV linéaire. Les prestataires audiovisuels, tels que Wiztivi, Hubee et Dotscreen en France, voient leurs briefs sensiblement évoluer. Une tension sur leurs activités est même évoquée. Premier signe visible de cette “rationalisation” : la mise en retrait de la smart TV, ou télévision connectée. Au début des années 2010, elle avait été l’objet de curiosités de la part des groupes audiovisuels, qui sont plusieurs à avoir investi dans des applications dédiées. “La stratégie consistait alors à dire : je serai partout où il y a un téléspectateur”, explique Frédéric Bonnard, directeur de France Télévisions Editions Numériques. Le développement de ces applications a été en outre encouragé par les constructeurs de téléviseurs, qui finançaient les chaînes pour attirer des contenus sur leur univers. Depuis, “toutes les forces d’acquisition de contenus chez les constructeurs ont été ralenties”, observe Frédéric Pie, président du prestataire audiovisuel Hubee. Le partenariat entre M6 et Sony, né en 2010, a ainsi été arrêté au bout de deux ans. France Télévisions, l’acteur qui a le plus investi sur ces supports, vient pour sa part d’annoncer l’arrêt de la smart TV et de l’HBBTV. “Cela représente une économie substantielle car ces applications ont un coût d’exploitation important. Cela nous permet aussi de nous focaliser sur les offres qui comptent vraiment, où l’audience est déjà au rendez-vous”, détaille Frédéric Bonnard. Selon nos informations, France 24 se désengagerait elle aussi progressivement de la TV connectée. Cette tendance n’est toutefois pas la norme chez tous les acteurs : TF1 vient d’annoncer le lancement d’applications LCI pour Apple TV et Android TV. BFMTV a lancé son offre sur Android TV il y a huit mois. Et chez M6, “nous regardons de près le marché de l’OTT (“over-thetop”, contenus audiovisuels sans intermédiaire d’un FAI, ndlr) et avons des contacts réguliers avec Chromecast et Roku (des clés à brancher sur un téléviseur pour le connecter, ndlr). C’est un territoire qui se développe, mais nous n’y serons pas présents tant que nous n’aurons pas trouvé la bonne offre”, explique Thomas Follin, directeur général adjoint de M6 Web, qui regrette que cet univers manque de normes. “””La stratégie qui consiste à dire “je serai partout où il y a un télespectateur” est terminée” Frédéric Bonnard Directeur de FTVEN” L’internalisation des compétences Autre tendance qui ne joue pas en faveur des prestataires technologiques dans l’audiovisuel : l’internalisation des compétences. Chez France Télévisions, le développement mobile est désormais entièrement internalisé. C’est aussi le cas chez TF1, où la stratégie consiste à posséder ses propres technologies, par exemple pour diffuser un flux télévisé “adswitché” en ligne. M6 pour sa part a développé sans prestataire son application pour Apple Watch. “L’application mobile devenant de plus en plus importante pour un média, il devient stratégique de la gérer en interne”, explique Frédéric Bonnard. Au total, le budget consacré aux prestataires audiovisuels s’amoindrit. “Nous estimons qu’il y a une tension de 10 à 20% par rapport à l’ère des budgets illimités, au début des années 2010, mais c’est surtout le nombre d’opportunités de distribution qui est en baisse”, observe Frédéric Pie, président de Hubee. Chez Wiztivi, on observe également que les négociations avec les chaînes de télévision intègrent beaucoup plus de paramètres : partenaires technologiques, intégration de briques de monétisation dès la conception du produit… “Les acteurs ont terminé leur phase d’apprentissage et sont de plus en plus sensibles aux technologies et aux solutions utilisées”, explique Cyrille Billon, directeur marketing et communication. Des prestataires plus flexibles Face à ces changements, les prestataires doivent s’adapter et faire preuve en premier lieu de “plus de flexibilité”, selon les mots des groupes TV interrogés. “Nous étions une société de prestation de services, désormais nous proposons aussi des produits clés en main : des applications ‘sur étagère’, modulables par les clients, que l’on propose en marque blanche. D’ici à trois ans, notre chiffre d’affaires de vente de produits ‘sur étagère’ devrait représenter en pourcentage autant que celui actuel de développements sur mesure”, explique Stanislas Leridon, président de Dotscreen. La société a généralisé un modèle de paiement par licences de fabrication, que les clients paient chaque mois, et qui permet des conditions de désengagement plus souples. Hubee aussi s’est adapté à cette demande de flexibilité : “Nous passons d’une entreprise de services purs à une société d’édition de solutions logicielles qui apporte des solutions sur l’étagère”, explique Frédéric Pie. Hubee a développé un système de logiciels en Saas, qui permet de baisser le coût de la solution et de, là aussi, lui appliquer un tarif mensuel. “Chez les groupes, le décideur n’est plus le directeur technique mais le directeur marketing qui veut innover, avoir un time-to-market rapide, et pouvoir se désengager rapidement si cela échoue”, explique Frédéric Pie. Le chiffre d’affaires de Hubee est désormais composé à 65 % d’activités de développement de plateformes et 35% en revenus récurrents (opérations, hébergement, maintenance…). Le revenu en licences représente à ce jour 15 % des revenus, le pivot vers l’activité d’éditeur de solutions logicielles n’ayant commencé qu’en 2015. “L’objectif est que plus de 70 % du chiffre d’affaires 2018 soit constitué de revenus basés sur nos licences logicielles et 30 % sur des développements spécifiques”, indique Frédéric Pie. Autre pivot des prestataires : l’évolution vers le métier de conseil. C’est le cas chez Dotscreen, même si cela n’est pas formalisé : “Nous avons de plus en plus un rôle de veille et de mise en relation avec des start-up spécialisées”, indique Stanislas Leridon. Hubee a pour sa part changé son organisation pour créer des équipes centrées sur chaque client. “””Nous passons d’une entreprise de services purs à une société d’édition de solutions logicielles qui apporte des solutions sur l’étagère.” Frédéric Pie, président de Hubee” Spécialisation et diversification Désormais, les acteurs cherchent également à se spécialiser, les demandes des groupes étant de plus en plus spécifiques. “Nous recherchons chez nos prestataires une différenciation technologique qui permet de développer un produit très vite sur différentes plateformes”, explique Thomas Follin (M6). Chez France Télévisions, “nous essayons de tout faire en interne sauf lorsqu’il s’agit de développements très spécifiques, comme le développement du 360° pour Roland Garros, pour lequel nous avons fait appel à FireKast”, explique Frédéric Bonnard. Hubee s’est spécialisée dans la vidéo et la fourniture d’une solution logicielle qui prend la forme d’un back-office pour gérer plusieurs plateformes à la fois : la VOD, le replay, l’OTT, les différents FAI… Et travaille ainsi avec Arte, M6, Canal + et plus récemment TF1 avec Tfou. Le rapprochement avec les FAI est aussi un axe de développement fort, ceux-ci profitant grandement du délaissement de l’OTT et de la smart TV. Dotscreen se différencie pour sa part en transférant la complète propriété du code source des applications qu’il développe à leurs clients, la stratégie inverse du logiciel en mode Saas. Plus largement, les prestataires ont intérêt à diversifier leurs clients. Dotscreen a adapté son offre en créant un produit “clé en main” de VOD en partenariat avec Arkena, grâce auquel il travaille avec Trace TV et Carrefour pour son offre Nolim. Cette diversification passe aussi par l’internationalisation. Après avoir développé ses technologies avec les acteurs français, Dotscreen réalise aujourd’hui plus de 70 % de son chiffre d’affaires à l’étranger, avec des acteurs comme ESPN, propriété de Disney aux Etats-Unis. C’est aussi l’ambition de Hubee d’ici 3 ans. “Le marché français est désormais bien équipé, en attendant des innovations, nous allons chercher la croissance à l’international, en nous appuyant sur nos belles réalisations en France”, résume Frédéric Pie (Hubee). “””Le marché français est désormais bien équipé, en attendant des innovations, nous allons chercher la croissance à l’international.” Frédéric Pie, président de Hubee” Hubee Site internet : www.hubee.tv Création : 2009 Fondateurs : Frédéric Pie, Virgile Ollivier, Carine Barbelivien, Didier Lemaire et Jean Gottar Financement : pas de levée de fonds réalisée ni prévue (en date du juin 2016) Répartition du capital : Frédéric Pie 80 % du capital, Virgile Ollivier, Carine Barbelivien, Didier Lemaire et Jean Gottar les 20 % restants CA 2015 : 4,3 millions d’euros “et rentable” Effectif : 48 personnes (dont 15 % en R&D) Principaux clients : Bouygues Telecom, Canal+, Monaco Telecom, Free, France Télévisions, M6… Dotscreen Site internet : www.dotscreen.com Création : 2011 Fondateurs : Stanislas Leridon et Pascal-Hippolyte Besson Financement : pas de levée de fonds, bénéficiaire depuis sa création Répartition du capital : 100 % aux deux cofondateurs CA 2015 : “plusieurs millions d’euros” Effectif : 35 personnes Principaux clients : TF1, BeIn sport, France TV, Orange ESPN… Wiztivi Site internet : www.wiztivi.com Création : 2007 Fondateurs : Eric Bibollet et Ari Bensimon Financement : 1,5 million d’euros levés en 2010 Répartition du capital : Le fonds d’investissement de SFR développement est majoritaire, Eric Bibollet est actionnaire CA 2015 : 6,5 millions d’euros, en progression de 30 % par rapport à 2014 Effectif : 70 personnes Principaux clients : TF1, France Télévisions, My MTV (Viacom International Media), Eutelsat… Télévision connectéeTransformation de l'audiovisuel Besoin d’informations complémentaires ? 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