Accueil > Marques & Agences > Achat média > Cécile Chambaudrie (Mondadori MediaConnect) : “Soyons plus optimistes pour le marché publicitaire” Cécile Chambaudrie (Mondadori MediaConnect) : “Soyons plus optimistes pour le marché publicitaire” A l'image de l'ensemble de la presse magazine, Mondadori France (Grazia, Closer, Auto Plus, Top Santé, Télé Star...) a été impacté par les difficultés du marché des médias en 2017. Son chiffre d'affaires a été en baisse de 7,5 % l'an passé, à 297,4 millions d'euros, impacté notamment par une baisse de 17,1 % des revenus publicitaires. Alliances avec d'autres médias, réorganisation interne, nouvelles offres publicitaires, installation d'une DMP... Cécile Chambaudrie, qui a pris mi-2017 la succession de Valérie Camy à la direction générale de la régie publicitaire de Mondadori en France, évoque la nouvelle stratégie de développement et les premiers résultats positifs en 2018. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 28 juin 2018 à 12h54 - Mis à jour le 28 juin 2018 à 12h54 Ressources 2017 a été une année compliquée pour le marché publicitaire. Quelles sont les tendances au premier semestre 2018 ? L’évolution à laquelle on assiste depuis deux ans se confirme. La publicité papier et les formats display reculent au profit des opérations sur mesure et du brand content. En parallèle, la mutation du métier se poursuit en lien avec le développement du programmatique et les attentes des marques : les régies doivent basculer sur une approche de conseil. C’est la capacité à concevoir et commercialiser des dispositifs globaux qui fera la différence. Il faut intégrer les marques le mieux possible au contenu, raconter des histoires autour de valeurs partagées, tout en respectant l’indépendance de nos rédactions et en distinguant les contenus rédactionnels et publicitaires. Cela passe par un travail en commun avec les rédactions. En externes, des alliances sont également indispensables. Quels sont les résultats de Mondadori MediaConnect dans cet environnement bousculé ? Nous sommes ainsi la première régie en France en volume d’espaces vendus en 2017, selon Kantar Media. Nous avons la capacité à attirer les grands annonceurs dans des environnements relativement captifs, notamment dans l’automobile, le luxe et la grande consommation, la Mode et la beauté. Nous constatons une progression très importante de notre chiffre d’affaires publicitaire global depuis janvier. Notre récente réorganisation doit nous permettre de faire encore mieux. Les éditeurs de la presse traditionnels fondent beaucoup d’espoirs sur le label Digital Ad Trust, attribué depuis mars. Y a-t-il déjà des effets positifs sur vos marques médias ? D’abord il faut rappeler que c’est une très belle évolution pour le marché publicitaire français qui résulte d’un consensus entre tous les acteurs. J’ai souhaité que nos cinq plus grandes marques médias (Closer, Auto Plus, Grazia, Téléstar, Top Santé) soient labellisées dès le début des certifications sur le display et la vidéo. Ces efforts représentent un engagement fort vis-à-vis des internautes et des annonceurs. Les éditeurs premium prennent leurs responsabilités en offrant des espaces plus qualitatifs, il faudra maintenant que les agences et les annonceurs jouent le jeu rapidement et tout au long de ces prochains mois et années. Mais pour vous répondre, on voit les lignes bouger : sur le secteur automobile par exemple, des évolutions positives ont lieu, avec des constructeurs qui se sont engagés à faire évoluer leurs investissements médias et à n’acheter que des espaces sur des sites labellisés, comme Citroën France. Certaines agences médias comme Havas ont également déjà mis en place des listes pour que les sites labellisés soient priorités dans les choix de mediaplanning de leurs équipes. Ce n’est que le début : pour rééquilibrer les parts de marché, il faudra que des dispositions d’envergure soient prises sur la durée. “Je demande à mes équipes de ne pas faire de sur-promesse aux clients, y compris quand c’est pour faire plaisir au client insistant : on dit ce qu’on fait et on fait ce qu’on dit” Les régies doivent également s’adapter aux besoins du marché et vous avez mis en place une nouvelle organisation interne. En quoi consiste-t-elle ? Notre volonté était de parvenir à une organisation qui favorise la proximité avec les acheteurs et leurs attentes, particulièrement en matière de dispositifs publicitaires sur mesure. Lors du second semestre 2017, la centaine de collaborateurs de la régie a été associée au projet, avec des réunions animées par des managers et d’autres sans aucun manager, pour une réflexion très libre et très transversale. Depuis janvier, le cœur de notre nouvelle organisation repose sur un “creative hub”, c’est-à-dire un service de 20 personnes dédiées à un service sur mesure pour les acheteurs. Il est dirigé par Julie Galacteros (ex-Media.Figaro) depuis avril et comprend plusieurs pôles : un studio de production, pour le graphisme et la direction artistique (5 personnes), un pôle de conception et de création, avec des responsables de projets et des rédacteurs (10 personnes), et enfin un pôle digital composé de spécialistes (5 personnes). L’objectif est que ce service représente 20 % de notre activité publicitaire en fin d’année. Comment ce “creative hub” s’articule-t-il avec le reste de la régie ? Autour de ce service qui devient central dans notre offre, il y a 15 commerciaux-conseil, dédiés à la relation avec les agences médias – ils sont chargés de mettre en avant l’intérêt et la qualité de nos environnements médias pour les annonceurs -, trois pôles annonceurs de 10 personnes chacun, ainsi qu’une nouvelle structure de trading, en charge de l’optimisation des achats de nos clients, composée de 7 personnes, un pôle marketing de 10 personnes, ainsi que 15 aux petites annonces. A cette centaine de personne s’ajoutent 30 collaborateurs transverses au groupe pour les services annexes : diffusion, administratif, etc. Cette nouvelle organisation nous permet de proposer depuis janvier une offre globale baptisée “La grande expérience”. Il s’agit d’une offre permanente ; c’est un process de réflexion sur les problématiques de nos clients et des réponses sur-mesure pour faire vivre à nos lecteurs et aux consommateurs des expériences éditoriales et publicitaires intégrées. L’objectif est de mettre à la disposition d’un annonceur toutes nos expertises pour créer et produire des plateformes de marque qui racontent des histoires, avec dispositifs variés, complémentaires et mesurables. Des supports audio – le groupe développe des podcasts – pourront s’y ajouter. Sephora a déjà utilisé cette offre. Les annonceurs se plaignent parfois de la différence de qualité entre ce qui est acheté aux régies et ce qui est délivré. A qui la faute ? Il faut s’adapter. Ces dernières années, les régies ont pris le problème à bras-le-corps ; elles développent des programmes de formation des équipes – sur le digital, en storytelling, etc. – et recrutent de nouvelles expertises pour monter en compétences. Nous travaillons de plus en plus en mode projet à la manière des start-up : je crois beaucoup à l’association et la complémentarité des profils pour favoriser l’intelligence collective. Pour éviter des malentendus, cela passe surtout par une grande transparence de part et d’autre lors du brief ou de la mise en place du dispositif avec l’acheteur. Je demande à mes équipes de ne pas faire de sur-promesse, y compris quand c’est pour faire plaisir au client insistant : on dit ce qu’on fait et on fait ce qu’on dit. Mais il n’y a pas de secret : il faut des expertises et de l’expérience pour parvenir à imaginer et mettre en place de très bons dispositifs. Et cela a un prix. Je crois que les marques en ont conscience désormais. Cécile Chambaudrie 2017 Directrice éxécutive de Mondadori MediaConnect 2016 Directrice business et développement de Mondadori Publicité 2014 Directrice de La Tribune Hub Media 2013 Fondatrice du cabinet de conseil en stratégie marketing Chambaudrie Conseil 2011 Directrice générale de Figaromedias 2008 Directrice générale adjointe de Figaromedias en charge du pôle news Vous parliez de l’importance de nouer des alliances pour les éditeurs. Quelle est la stratégie de Mondadori sur ce point ? Oui, c’est quelque chose d’indispensable aujourd’hui pour mieux servir les marques. Nous avons mis en place avec Lagardère Publicité et Prisma Media Solutions une offre publicitaire baptisée “Food Brand Trust” à destination des annonceurs de l’alimentaire. Elle propose toutes les marques des trois groupes (Biba, Cuisine Actuelle, Closer, Dr Good, Elle, Femme Actuelle, Gala, Grazia, Modes&Travaux, Paris Match, Pleine Vie, Télé 7 Jours, Télé Star, Top Santé, Version Femina, Vital, Voici …), sur tous nos canaux médias (presse, digital, social et vidéo) soit 34 marques média, pour un reach potentiel de 90 % des Français. Nous croyons que cette alliance a un très grand potentiel. Dans le cadre de cette offre, nous avons fait appel à l’institut Ipsos pour mettre en place une étude qui démontre comment les médias de presse magazine, en offrant un contexte propice aux attentes des consommateurs, permettent de renforcer la crédibilité et la confiance dans les produits des marques et l’image des annonceurs du secteur. Ce dispositif est plus qu’un couplage publicitaire figé, c’est la possibilité de mettre en place des offres sur mesure de manière répétée et pour des campagnes de longue durée, de cinq-six mois à un an. Deux annonceurs ont déjà souscrit à notre offre : Andros et Quézac. “Nous venons de signer avec mediarithmics il y a quelques semaines pour l’installation de notre DMP qui associe toutes nos données” L’alliance Gravity a également été annoncée il y a neuf mois, en septembre 2017 et son impact n’est pas encore très visible. Toutes ces alliances créent-elles vraiment de la valeur ? Oui ! Le projet Gravity est désormais opérationnel, c’est une réalisation ambitieuse qui rassemble beaucoup d’acteurs et la brique technologique est très importante. Il y a eu plusieurs campagnes en test depuis le début d’année et l’offre commerciale est activée depuis le début d’année. Mais le projet est stratégique pour Mondadori et tous les autres membres. Le choix de Food Brand Trust par Andros constitue un bon exemple de l’opportunité des alliances entre médias premium : à l’origine, la marque voulait investir l’essentiel du budget de lancement de sa nouvelle gamme de desserts en télévision. Notre dispositif global et notre discours volontariste l’a convaincu de tester une approche différente et plus large. Les premiers résultats confirment le succès de la campagne. Il faut positiver, être dans l’action et prendre des initiatives pour convaincre. Soyons plus optimistes sur le marché publicitaire ! En identifiant quels sont nos leviers de performance et en embarquant nos collaborateurs dans un projet construit avec eux, les marques médias ont des atouts à faire valoir aux annonceurs. Les alliances montrent également que la donnée devient centrale dans la commercialisation publicitaire, mais la régie n’a pour l’instant pas de DMP. Pourquoi ce choix ? Nous avons voulu attendre la maturité du marché pour faire le bon choix. Nous travaillions jusqu’ici avec nugg.ad pour du ciblage prédictif, mais intégrer Gravity et côtoyer mediarithmics (qui est l’outil DMP et DCO de l’alliance, ndlr) nous a convaincus de l’intérêt d’aller plus loin et d’avoir notre propre outil au sein de la régie. Nous venons donc de signer avec mediarithmics il y a quelques semaines pour l’installation de notre DMP, qui associe toutes nos données : bases CRM, abonnés papier et newsletters, data e-commerce, kiosques magazines, parcours de navigation. Les premiers tests ont lieu avec des annonceurs et le déploiement commercial aura lieu d’ici quelques semaines. Cet outil sera exploité par l’ensemble du groupe, tant sur les métiers éditoriaux, de diversification que publicitaire, avec de multiples objectifs : enrichissement de la connaissance client, recommandation de contenus éditoriaux, fidélisation et optimisation de ciblage publicitaire. Jean-Michel De Marchi Alliances éditeursBrand contentDigital Ad TrustDMPOrganisationRésultats économiquesTransformation marketing Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Entretiens Philipp Schmidt (Prisma Media Solutions) : "L’émotion est le levier le plus fédérateur sur les cibles femmes" Tribunes Corinne Mrejen (Team Media) : "La régie est morte, vive la régie !" L'alliance Gravity accueille notamment Mondadori, Marketshot et 3WRégie pour étoffer ses données. Mondadori MediaConnect : la régie recrute Marie-Noëlle Becue Entretiens Aurore Domont (Media.Figaro) : "Il faut remettre la stratégie marketing au coeur des enjeux des marques" essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? Le New York Times affiche toujours une croissance très robuste portée par le numérique data Les baromètres, panoramas et chiffres sur l'évolution du marché Le classement des éditeurs français qui ont le plus d'abonnés purs numériques Les données récoltées par les acteurs de la publicité en ligne La liste des sociétés présentes dans les fichiers ads.txt des éditeurs français Les gains de budget des agences médias Opt-out : quels éditeurs français interdisent les robots crawlers de l'IA générative ? Le panorama des sociétés spécialisées dans les technologies de l’e-retail media La liste des outils utilisés par les équipes éditoriales, marketing et techniques des éditeurs français Le détail des aides à la presse, année par année La liste des CMP choisies par les principaux médias en France Digital Ad Trust : quels sites ont été labellisés, pour quelles vagues et sur quel périmètre ?