Comment les agences médias collaborent avec les start-up

Pour accélérer la transformation de leurs modèles et organisations, les agences médias regardent de près le monde de l’innovation. Les groupes Havas, Publicis, Cospirit, ainsi qu’une responsable du programme start-up Project de l’AACC, Cap Digital et l’Udecam, expliquent à mind Media leurs démarches de collaboration avec les start-up.

Face à la transformation numérique que vivent leurs clients et aux nouveaux usages médias des consommateurs, les agences médias doivent opérer leur mutation. Elles tentent pour cela de se tourner vers les start-up.

L’enjeu et double. Romain Reveillere, Havas accelerator and start-up parterships manager, explique ainsi que le groupe Havas a inauguré en septembre 2017 un programme d’accélération sur le campus de Station F pour “élargir la gamme de technologies et services publicitaires disponibles au sein du groupe”, et pour “réfléchir aux nouvelles tendances de consommation”.

En particulier pour les contenus. La proximité avec les start-up “permet d’accéder en amont aux innovations en matière de formats : assistants vocaux, réalité virtuelle, applications de messagerie, etc., pour ensuite les transformer en canaux publicitaires pour les marques”, souligne Natalie Rastoin, présidente d’Ogilvy France, par ailleurs responsable du Start-Up Project, programme d’accélération créé en 2011 par l’AACC, Cap Digital et l’Udecam.

Se confronter au monde de l’innovation est également l’occasion pour des structures plus ou moins lourdes de renouveler leurs méthodes de travail. C’est l’avis de Florian Grill, PDG et cofondateur de Cospirit Mediatrack, qui mise sur “la stimulation tirée de la proximité entre les agences du groupe et les start-up pour favoriser la créativité de mes collaborateurs”. L’agence indépendance a donc installé une pépinière d’entreprises dans ses locaux parisiens dès 2001 : elle offre un espace de travail à 25 jeunes sociétés issues de différents secteurs.

Positionnement stratégique ou sujet de communication ?

Plus ambitieux sur le papier, en mars 2017, le groupe Publicis a annoncé la mise en place en France d’une agence média positionnée sur l’innovation, l’entrepreneuriat et les start-up : Spark Foundry a été crée sur les bases d’une partie des équipes et de l’activité de Starcom.

Concrètement, le positionnement global de Spark Foundry est de proposer à ses clients annonceurs des projets “plus agiles”, avec des équipes plus réduites que dans les autres entités de Publicis Media, mais constituées de profils “plus senior”, afin de favoriser des circuits plus courts dans les cycles de décision et les réponses médias apportées aux problématiques de marques.

Pour autant, les clients de Spark Foundry sont plutôt des grands comptes internationaux, comme BEL – budget fondateur de l’activité en France – que des start-up. “C’est l’un des points que l’on souhaite développer”, indique Laurent Capion, directeur de la stratégie de Starcom et Spark Foundry.

En parallèle, les deux agences médias sont membres du programme d’accélération Start-Up Project, initié par l’AACC, Cap Digital pour favoriser la collaboration et la co-création entre le monde de la communication et les jeunes sociétés. Dans le cadre de ce programme, elles ont mentoré Digifood, qui participait à ce projet et dont l’application mobile permet de commander des repas lors d’événements.

“C’est un partenariat qui fait sens pour notre activité car il nous permet d’imaginer de nouveaux services, tels qu’une application en marque blanche pour nos annonceurs de l’univers alimentaire”, affirme Laurent Capion. Mais dénicher les bons projets et parvenir à un résultat reste complexe.

L’accélération externe

Avant de pouvoir collaborer sur des problématiques concrètes, les agences médias coachent des start-up qui sont déjà à un stade avancé de développement d’un projet innovation, mais qui ne sont pas toujours rompues aux codes commerciaux et de la communication. Station F est l’un de ces centres sur lesquels médias et agences tentent ces derniers mois de s’appuyer. C’est le cas d’Havas. Une quarantaine de jeunes sociétés bénéficient durant neuf mois, en plus d’un espace sur le campus, d’ateliers et de conférences organisés par le groupe Havas, ainsi que de sessions de conseil individuelles avec une cinquantaine d’experts volontaires de l’agence pour perfectionner leur produit et ainsi mieux le vendre.

S’il est encore trop tôt pour observer les premiers résultats de cette initiative, globalement peu de collaborations entre agences médias et start-up semblent avoir dépassé le simple effet de mode en ayant donné lieu à de vraies co-créations d’offres, voire à une prise de participation financière, signe d’un engagement fort sur le long terme.

Florian Grill – dont le groupe Cospirit Mediatrack est entré au capital de quelques sociétés, dont AR Connect, une plateforme de gestion des campagnes locales, devenue une offre intégrée de l’agence – reconnaît une faible représentation du secteur de l’adtech dans les collaborations. “Les agences médias ont tout intérêt à rester agnostiques vis-à-vis des technologies publicitaires pour éviter toute suspicion de conflit d’intérêt de la part de leurs clients”, estime-t-il.