Daniel Marhely : “blackpills ne sera pas rentable avant plusieurs années”

blackpills est une offre de SVOD aujourd’hui gratuite… sur quel modèle économique repose-t-elle ?

blackpills est un média davantage qu’une plateforme SVOD. Notre offre repose sur le constat qu’il y a une place à prendre entre les grandes séries très produites et les vidéos de Youtube. Aujourd’hui nous diffusons majoritairement des séries de 10 épisodes de 10 minutes, mais nous voulons nous développer vers le documentaire, l’animation, les news, le sport… Nous avions envisagé au départ de nous lancer directement en payant mais, finalement, si une offre comme Deezer repose sur le freemium, pourquoi ne pas l’appliquer chez blackpills ? Nous avons donc lancé en mai une offre gratuite. Un format publicitaire est inséré au milieu de chaque épisode mais la pression publicitaire est très légère : nous limitons à 15 secondes le temps de publicité dans chaque épisode, soit deux spots maximum.

Le CPM de ces inventaires est au niveau d’un inventaire de catch-up (soit entre 10 et 20 euros, ndlr). Ces espaces sont monétisés par une régie publicitaire extérieure (non communiquée, ndlr). Nous avons par ailleurs un partenariat avec Vice couvrant vingt pays dont la France. Il prévoit la création d’une chaîne blackpills au sein de l’univers Vice, qui est elle aussi monétisée. Dans un second temps, nous proposerons aux mobinautes une offre d’abonnement à quelques euros par mois, qui permettra d’accéder aux contenus sans publicité, avec une meilleure qualité d’image et des exclusivités.

Pour quand visez-vous la rentabilité ?

Pas avant plusieurs années. Nous faisons le choix d’investir dans un premier temps massivement dans les contenus grâce aux financements que nous avons reçus (Selon Vanity Fair, Xavier Niel, notamment, a investi près de 5 millions d’euros dans la plateforme, ndlr) pour d’abord créer un usage. Nous produisons 50 séries par an disponibles en trois langues (anglais, français, espagnol) et avec sept sous-titres, afin de se créer notre propre catalogue. Chaque série coûte en moyenne un million d’euros les 100 minutes, grâce à un workflow de production totalement revu pour maximiser les synergies et minimiser le temps de tournage. Nous allons continuer à proposer aux mobinautes ce modèle gratuit avec très peu de publicités, jusqu’à atteindre 20 à 30 millions d’utilisateurs dans le monde.

Existe-t-il un modèle économique pour la fiction digitale ?

A l’échelle franco-française, la fiction digitale est difficilement viable. Mais nous avons fait le choix de tourner en anglais et de nous implanter aux Etats-Unis dès la première année en ouvrant un bureau de 15 personnes à Los Angeles pour atteindre rapidement une échelle internationale. Il nous reste à tester beaucoup de choses : nous pourrions revendre les séries que nous produisons après leur diffusion. Il y aussi un volet distribution à explorer : Vice est un premier partenaire, mais nous avons parlé avec des opérateurs téléphoniques… toutefois nous ne précipitons pas vers ces accords, j’ai appris grâce à Deezer qu’il y a un risque de cannibalisation par les opérateurs. Enfin, nous n’excluons pas de produire des contenus pour les plateformes, notamment Snapchat et Youtube Red.