Accueil > Médias & Audiovisuel > Abonnements en ligne > Les détails sur le fonds de dotation qui sera créé par Mediapart Les détails sur le fonds de dotation qui sera créé par Mediapart Appliqué pour la première fois en France, ce montage prévoit de transférer et d'immobiliser le capital du site d'information au sein d'un fonds de dotation à but non lucratif. L'objectif : assurer la pérennité et l'indépendance de Mediapart au-delà de la présence de ses fondateurs. Explications. Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 02 juillet 2019 à 14h09 - Mis à jour le 02 juillet 2019 à 14h09 Ressources Après plus de 18 mois de réflexion et de travail, Edwy Plenel et le reste de l’équipe dirigeante du site d’information ont trouvé le montage capitalistique à même d’“assurer l’indépendance et la pérennité de Mediapart”, ont-ils annoncé mardi 2 juillet. Si des montages alternatifs ont été étudiés – l’actionnariat salarié, et la société coopérative de type SCOP ou SCIC – les exemples mis en oeuvre par d’autres médias n’ont pas été jugés satisfaisants car générant trop d’incertitudes en cas de difficultés financières et/ou des querelles de pouvoir. C’est donc le modèle du fonds de dotation, à mi-chemin entre le statut de fondation et celui de l’association, et introduit en France par une évolution législative de 2008, qui a été retenu en s’appuyant sur l’exemple du trust mis en place par le Guardian au Royaume-Uni. Alors que le capital est actuellement détenu par les fondateurs, des individuels et des investisseurs (notre visuel ci-dessous), il sera dans quelques mois indirectement détenu à 100% par un fonds de dotation à but non lucratif. Actionnariat de la société Mediapart en juillet 2019. Source : Mediapart Concrètement, la société de Mediapart, à but lucratif, va être détenue par une société pour la protection de l’indépendance de Mediapart (SPIM), à but non lucratif, elle-même détenue par un fonds de dotation, baptisé ici Fonds pour une presse libre (FPL), elle aussi à but non lucratif (notre visuel ci-dessous). Nouveau modèle capitalistique de Mediapart prévu à l’automne 2019. Source : Mediapart Le Fonds pour une presse libre assurera une mission d’intérêt général, dont le but sera de “promouvoir, aider et défendre la liberté de la presse”, ainsi, subsidiairement, de sanctuariser le capital de Mediapart. “Cette structure empêche tout rachat ou prise de contrôle par des intérêts économiques privés”, a souligné Edwy Plenel, président et cofondateur de la société. Le Fisc a donné un avis positif au montage fiscal La société Mediapart, qui restera indépendante et où les salariés seront majoritaires au sein de son conseil d’administration, continuera de payer des impôts, pas les structures de contrôle au-dessus. Ce montage a été créé par les fondateurs, discuté en interne et soutenu par les investisseurs, selon l’équipe dirigeante. Les salariés l’ont ensuite approuvé à 93 % lors d’un référendum. L’évolution de la structure du capital “a été formellement acceptée par l’administration fiscale”, a indiqué Marie-Hélène Smiejan, directrice générale et cofondatrice de Mediapart. Un premier point sensible lié à ce nouveau montage capitalistique porte sur la valorisation actuelle de la société. Deux experts ont été consultés à partir des comptes 2018 et sont parvenus quasiment au même montant : le capital de Mediapart a été valorisé 16,3 millions d’euros. Les parts seront donc acquises sur cette base auprès des fondateurs, des fonds d’investissement et des actionnaires individuels. 100 % des parts seront achetées en même temps et aux mêmes conditions. Les actionnaires de Mediapart voient la valorisation de leur investissement initial multiplié de deux à cinq, selon leurs conditions et date d’entrée au capital. Dans la répartition actuelle du capital, les cofondateurs (François Bonnet, Laurent Mauduit, Edwy Plenel et Marie-Hélène Smiejan) détiennent 42,08 % ; leurs parts sont donc valorisées 6,86 millions, dont 2,9 millions d’euros chacun pour Edwy Plenel et Marie-Hélène Smiejan, qui avaient investi individuellement 550 000 euros (soit cinq fois leur investissement). Le fonds d’investissement Doxa (31,81 %) percevra, lui, 5,2 millions d’euros, tandis que le deuxième fonds encore présent au capital, Ecofinance (6,32 %) percevra 1 million d’euros (qui les redonnera au FLP). Les actionnaires membres de la Société des salariés, qui détiennent 1,46 %, vont se partager 238 000 euros, et François Vitrani et Laurent Chemla (1,54 %) 251 000 euros. Enfin les membres de la Société des Amis, qui détient 16,79 % des parts, se partageront 2,72 millions d’euros. Il s’agit ici d’investisseurs individuels – parfois des personnalités médiatiques – comme Maurice Lévy et Xavier Niel. Ce dernier, qui a investi deux fois 100 000 euros et détient 2,95 % du capital, voit ses parts valorisées 552 500 euros. 11 millions d’euros à trouver Avec quel financement ? 4,4 millions d’euros proviendront de la trésorerie de la société, 1 million d’euros sera issu d’un don fait par un investisseur historique de la société, Ecofinance, qui avait investi 500 000 euros au lancement du site. Il reste donc 11 millions d’euros à obtenir, par emprunt bancaire ou crédit vendeur. Edwy Plenel a souligné que l’équipe dirigeante ne souhaite pas que l’opération de rachat pèse trop sur les comptes de Mediapart et grève son avenir. Il a également incité certains investisseurs présents au capital (Xavier Niel…) a réinjecté le fruit à venir de leur investissement initial au sein du fonds de dotation via un don. Un deuxième point sensible du montage porte sur l’équilibre des pouvoirs et la composition des organes dirigeants des deux structures de contrôle au-dessus de la société Mediapart, FPL et SPIM. “Il y aura une séparation totale entre le fonds de dotation pour une presse libre (FPL) et la société Mediapart. Aucun don reçu par le fonds de dotation ne pourra être redistribué à Mediapart, et aucun dirigeant de Mediapart ne peut siéger dans le FPL ou la SPIM”, ont indiqué Edwy Plenel et Marie-Hélène Smiejan. Mise en place à l’automne En parallèle, une Association pour le droit de savoir (ADS) va être créée : composée des salariés, fondateurs, ou anciens salariés de Mediapart, elle agira comme “garant du respect des valeurs de Mediapart” et disposera d’un droit de veto sur les modifications de statut du FPLM et de la SPIM. D’anciens dirigeants et d’anciens salariés de Mediapart pourront en effet siéger dans les autres organes. L’équilibre des pouvoirs et contre-pouvoirs entre les structures, de même que la composition des organes de contrôle et leurs statuts sociaux et chartes éthiques seront clés pour assurer la cohérence de l’ensemble et la mission que se donnent les fondateurs. Ces points doivent être fixés en juillet et août avant la finalisation de la cession de 100% du capital de la société en septembre, puis la désignation des conseils d’administration du FPL, de la SPIM et de Mediapart en octobre. 2 millions d’euros de résultat net en 2018 Lors d’une conférence de presse mardi 12 mars 2019, la direction de Mediapart avait annoncé avoir réalisé un chiffre d’affaires de 13,8 millions d’euros en 2018, en hausse d’environ 100 000 euros, soit un tassement par rapport aux années précédentes : ses revenus annuels avaient tendance à progresser plus sensiblement, entre 800 000 et 2 millions d’euros (en 2017). Son résultat courant était de l’ordre de 2,5 millions d’euros en 2018 (stable sur 2017) et son résultat net s’élèvait à 2 millions d’euros, en très léger retrait. Des résultats très positifs, donc, mais avec des taux de croissance moins élevés que les années précédentes, ce qui peut donner à penser que le modèle du site s’essouffle. Ce que ses fondateurs contestent, évoquant une activité cyclique et un résultat d’exploitation toujours supérieur à 18 %. “Nous n’avons pas d’inquiétudes pour la suite. Les résultats restent très bons et la hausse des abonnements se poursuit. Il y a d’ailleurs une accélération du nombre d’abonnés au premier trimestre 2019”, avait souligné son président Edwy Plenel. Le site continue de développer la souscription d’abonnements : 150 000 abonnés individuels et collectifs payants en 2018, contre 140 000 en 2017 et 132 000 en 2016, “avec un panier moyen proche de 9 euros”, selon Edwy Plenel. Au 31 décembre, Mediapart rassemblait 87 salariés (+ 4 postes en un an) dont 47 journalistes titulaires (+ 2 postes). La participation accordée est passée de 85 000 euros en 2017 à 142 000 en 2018. La société investit toujours 1 million d’euros par an dans la création de postes et/ou de nouveaux projets. L’un d’eux porte en 2019 sur le lancement d’une série de podcasts natifs sur la vie judiciaire. Jean-Michel De Marchi Abonnements numériquesModèles économiques Besoin d’informations complémentaires ? 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