Accueil > Médias & Audiovisuel > Transformation & Innovations > Marketing et personnalisation : comment les médias améliorent leurs newsletters Marketing et personnalisation : comment les médias améliorent leurs newsletters Pour générer plus de trafic vers leurs sites et fidéliser les lecteurs, les éditeurs médias redécouvrent les vertus des newsletters. Depuis un an, ils empruntent les techniques du e-commerce, avec un marketing plus agressif et l’utilisation de technologies de personnalisation. mind présente les résultats obtenus par les groupes Altice Media, NextRadioTV, Les Echos et France Télévisions. Par Aymeric Marolleau. Publié le 13 mai 2016 à 11h07 - Mis à jour le 13 mai 2016 à 11h07 Ressources Les newsletters, ces sélections de contenus ou de liens envoyées par e-mail à un moment déterminé, sont de nouveau une préoccupation des éditeurs. “Elles présentent deux grands avantages : fidéliser nos lecteurs en établissant une relation quotidienne et générer du trafic vers nos sites”, rappelle Christine Le Touche, directrice marketing de Next Interactive Media, la filiale digitale du groupe NextRadioTV (BFMTV, RMC, RMC Sport, 01Net, BFM Business), qui revendique un taux d’ouverture moyen de ses newsletters de 30 %, pour 100 000 abonnés au total. “On annonce souvent le déclin de l’e-mail, mais ce n’est pas du tout ce que l’on constate. Nous sommes convaincus que la newsletter est un produit éditorial qui a encore de la valeur et est qui est attendu par l’audience”, analyse Pierre-Nicolas Dessus, directeur marketing digital de France Télévisions. Pour preuve, les deux newsletters de Francetvinfo.fr, auxquelles s’ajoutent ponctuellement des alertes, représentent 10 % du trafic total du site (7 millions de visiteurs uniques mensuels en moyenne en 2015 selon Médiamétrie). Celles du Groupe Altice Media apportent 7 % du trafic de ses sites (L’Express.fr et Cotemaison.fr), pour trois millions d’inscrits uniques – 3,5 millions de mails envoyés par jour – et un taux d’ouverture moyen de 28 %. Certains y trouvent même une source de revenus publicitaires. “Pour les annonceurs, les newsletters offrent un contexte d’attention très fort, exclusif, et une bonne brand safety”, explique Christelle Macé, directrice de l’audience digitale pour le Groupe Altice Media. L’éditeur de L’Express et de Côté Maison a vu son chiffre d’affaires publicitaire sur ses newsletters augmenter progressivement depuis leur passage, il y a un an, au responsive design, pour suivre le déplacement de l’usage vers le mobile. Car plus de 50 % des ouvertures s’y font désormais, contre 35 % il y a un an. Les éditeurs ont ainsi eu tendance à les multiplier : Le Monde en compte sept, L’Express 27 dans six verticales (actu, lifestyle, culture, économie, finance perso), Le Figaro en propose une trentaine gratuitement et en réserve cinq à ses abonnés. Chez France Télévisions, c’est une quinzaine, sans compter les 24 déclinaisons régionales de la newsletter de France 3 et les neuf que compte “Première”, dédiées à l’actualité des départements d’’Outre-Mer. “Nous sommes convaincus que la newsletter est un produit éditorial qui a encore de la valeur et qui est attendu par l’audience.” Pierre-Nicolas Dessus, France Télévisions” Les Echos a doublé le nombre d’abonnés en trois ans Pour en renforcer l’efficacité, certains empruntent au e-commerce ses techniques marketing. C’est ainsi que Les Echos a plus que doublé le nombre de ses abonnés en trois ans, avec 400 000 contacts dédupliqués (chacun est généralement inscrit à deux ou trois newsletters) contre 150 000 auparavant. “Nous avons travaillé comme un site de e-commerce : en lançant des opérations marketing pour collecter de nouveaux contacts, explique Cesri Chui, chargé d’acquisition web aux Echos. Nous avons par exemple lancé des jeux concours et travaillé avec les autres services du groupe, comme celui pour l’organisation des salons, pour y récupérer des adresses mails.” Le groupe d’informations et services économiques et financiers a aussi opté pour une approche thématique, en multipliant les verticales. “Chaque marque a désormais sa newsletter, et si certaines rubriques rencontrent beaucoup de succès, nous en faisons des lettres spécifiques, pour créer de nouveaux rendez-vous avec l’audience”, précise Cesri Chui. Si bien que Les Echos en compte désormais 21, hors alertes et format PDF du journal : le site en a trois, dont La Matinale (300 000 inscrits) et La 18 H, qui comptent le plus grand nombre de fidèles et Investir quatre pour suivre la séance boursière (Morning, Mi-séance, Clôture, La semaine en Bourse). Les Echos Start et Week- End ont leur lettre hebdomadaire. S’y ajoutent Patrimoine (hebdomadaire), Capital Finance (quotidienne), huit newsletters métier (directions financières, RH, juridiques, marketing…) et trois sectorielles (Industrie et Services, Tech/Médias, Finance/Marché). Pour en améliorer la performance, les contenus sont progressivement optimisés par des changements de maquette notamment. “Nous essayons de réduire la taille des contenus pour inciter les internautes à cliquer sur les liens et consulter l’article directement sur le site”, où l’audience est alors monétisée par la publicité et incitée à s’abonner par le paywall, explique Cesri Chui. La méthode semble porter ses fruits, puisque la contribution des newsletters à l’audience globale du groupe est passée de 2 % début 2014 à 5 % aujourd’hui. Pour maintenir ses taux d’ouverture – 30 % en moyenne – France Télévisions mène une politique d’exclusion des abonnés qui ne consultent pas ses contenus : il leur propose de se désabonner s’ils n’ont pas ouvert le mail pendant 90 jours, et les désabonne lui-même s’ils ne répondent pas à cette sollicitation. “Nous préférons avoir une base saine et active, car si les taux d’ouverture déclinent, on risque de se retrouver dans les spams des boîtes mails”, explique Pierre-Nicolas Dessus. Mais pour maintenir constant le nombre de ses abonnés à 1,2 million, le groupe public a mis en place deux stratégies : après deux ou trois pages vues, une fenêtre apparaît sur l’écran de l’internaute pour lui proposer de recevoir sa newsletter ; du “cross-selling”, pour suggérer une autre newsletter du groupe à un abonné. Il y a notamment recours pour promouvoir ses lettres liées à des événements, comme Roland Garros ou le Tour de France. Quels sont le meilleur jour de la semaine et le meilleur horaire pour programmer ses envois ? “Il n’y a pas vraiment de recette magique, nous testons ces paramètres en permanence”, répond Christelle Macé (Groupe Altice Media). Les généralistes d’information sont matinales : La Quotidienne de L’Express est ainsi envoyée chaque matin à 8 heures, celle de Francetvinfo à 7 heures 30. “C’est l’heure où les Parisiens, qui constituent le plus gros bassin d’audience, se mettent en mouvement pour rejoindre leur lieu de travail”, décrypte Christelle Macé. Les lettres lifestyle sont plutôt du soir et de week-end. Mais l’envoi de newsletters est un exercice subtil : “Il faut savoir augmenter son audience sans submerger ses lecteurs d’informations non pertinentes, car cela dégrade l’image de la marque”, prévient Christine Le Touche (Next Interactive Media). “Nous essayons de réduire la taille des contenus pour inciter les internautes à cliquer sur les liens et consulter l’article directement sur le site.” Cesri Chui, Les Echos” Les prestataires de la personnalisation des newsletters Plusieurs start-up françaises se sont positionnées sur le marché de la recommandation et la personnalisation de contenus. Quelques-unes appliquent ces technologies aux newsletters. Ownpage, créée en 2013 par Stéphane Cambon, a développé une technologie de recommandation qui analyse le parcours de lecture individuel sur les sites médias pour leur proposer deux solutions : des newsletters personnalisées et une API de personnalisation (alerte mobile, page d’accueil, etc.). La start-up de huit salariés réalise des newsletters personnalisées pour Les Echos, L’Express, L’Equipe et Le Parisien, et quelques titres professionnels. Elle a été accompagnée par Amaury Lab, l’incubateur du groupe Amaury. Créée en 2010 par Alban Peltier et Rodolphe Mirilovic, AntVoice a opté pour la technologie du graphe de recommandation multi-objet. Elle compte une douzaine de salariés, et prévoit d’en recruter autant d’ici fin 2016, grâce à une levée de fonds d’1,3 million d’euros en avril 2016 auprès d’Alven Capital, Nestadio Capital, CapHorn Invest et Adeo. Elle compte plusieurs éditeurs médias parmi ses clients, dont Le Figaro, Mondadori et Télérama, qui cherchent souvent à pousser leurs offres marchandes (billets de spectacles, croisières…). La rémunération d’AntVoice est un mix de CPM (nombre de newsletters personnalisées envoyées) et de CPC (nombre de liens personnalisés cliqués). La personnalisation pour améliorer les performances Pour améliorer la performance de leurs newsletters sans lasser leurs lecteurs, certains éditeurs ont adopté des technologies de personnalisation, développées en France par Ownpage et AntVoice notamment. Alban Peltier, fondateur d’AntVoice, affirme que la personnalisation des contenus “permet de diviser par deux en moyenne le taux de désabonnement” aux newsletters. Les Echos travaille avec Ownpage depuis le début de l’année 2015. Les liens de la newsletter qu’ils produisent ensemble, envoyée à près de 200 000 personnes deux fois par semaine, sont adaptés à leur navigation sur le site des Echos. “Nous suivons leur parcours de lecture grâce à leur identifiant ou un cookie, puis on analyse les contenus disponibles dans toutes les rubriques, l’algorithme construit ensuite un classement des articles pour chaque lecteur, afin de présenter les 12 contenus les plus pertinents pour lui sur les trois derniers jours”, explique Stéphane Cambon, le fondateur d’Ownpage. Avec un taux d’ouverture d’environ 30 % et un taux de clic de 9 %, “c’est l’une des newsletters du groupe qui présentent les meilleures performances”, note Cesri Chui, aux Echos. De fait, le taux d’ouverture global de ses newsletters est de 26 %, et le taux de clic de 6 %. Ownpage réalise par ailleurs les newsletters personnalisées du Parisien, L’Express et L’Equipe, et celles de titres de presse professionnelle. Les technologies de personnalisation permettent aussi d’identifier les sujets ou catégories qui intéressent les abonnés et inscrits d’un site, afin de n’envoyer qu’à eux seuls les alertes qui le concernent, et ainsi éviter de “spamer” tous ses lecteurs. Certains éditeurs ont développé leur propre algorithme de personnalisation en interne, comme Le Figaro avec ses newsletters boursières, ou France Télévisions. C’est l’équipe data du groupe public, qui compte une dizaine de personnes (chefs de projet, développeurs, CRM), qui a piloté le projet. En pratique, les contenus mis en avant dans les lettres dépendent de la navigation des abonnés, dont les informations sont recueillies par la DMP mise en place avec Krux il y a quelques mois. “Les taux de clic, de 4 % en moyenne d’ordinaire, sont multipliés par trois ou quatre par rapport aux newsletters standards”, explique Pierre-Nicolas Dessus. Testée depuis quelque mois sur les lettres Culture Box et France TV Sport, la personnalisation pourrait être généralisée à tous les produits à la rentrée. “La personnalisation des contenus permet de diviser par deux en moyenne le taux de désabonnement aux newsletters.” Alban Peltier, AntVoice” Les pure players des newsletters Plusieurs nouveaux médias ont opté ces dernières années pour un modèle simple et minimaliste, en publiant leurs contenus via des newsletters BtoC. C’est par exemple le cas de Brief.me, créée par Laurent Mauriac et lancée en janvier 2015, qui repose sur un modèle payant (5,9 euros par mois). Il revendiquait un millier d’abonnés fin 2015 (les détails sur mindnews.fr). Time To Sign Off (TTSO) a fait le choix inverse, celui d’un mailing gratuit et monétisé par la publicité. Lancé par Romain Dessal en 2010, le média serait rentable et revendiquait 40 000 abonnés début 2015 (les détails sur mindnews.fr). Le marché semble balbutiant, mais il accueillera pourtant fin mai un nouveau venu, Flint, une newsletter grand public, gratuite et personnalisée, lancée par Benoît Raphaël. “Nous suivons leur parcours de lecture grâce à leur identifiant ou un cookie, puis on analyse les contenus disponibles dans toutes les rubriques.” Stéphane Cambon, Ownpage” Les newsletters : un investissement certain Mais ces efforts ne sont pas anodins, et les newsletters présentent désormais un coût non négligeable. “C’est un outil qui existe depuis les débuts du web, mais elles se sont beaucoup perfectionnées. Elles nécessitent un budget important, avec routage, graphisme, outil CRM, voire parfois un prestataire de personnalisation. La DMP intervient aussi pour pousser la bonne newsletter à la bonne personne, avec le bon contenu”, explique Christine Le Touche (Next Interactive Media). Elles nécessitent aussi des ressources humaines importantes pour suivre et optimiser les indicateurs de performance – les taux d’ouverture et de clic – et améliorer l’édition du contenu. Cette responsabilité est souvent dévolue aux équipes CRM, comme chez L’Equipe, où trois personnes gèrent la newsletter quotidienne gratuite – 300 000 adresses mails – et celle réservée aux 50 000 abonnés premium. Chez France Télévisions, cette équipe de trois personnes est rattachée à l’équipe Data. Trois personnes aussi chez Groupe Altice Media, au sein de l’équipe Audience & CRM, qui compte elle-même 12 personnes. Au sein de l’équipe Marketing Audience (référencement naturel, mobile, réseaux sociaux) des Echos, deux personnes sont en charge des newsletters, épaulées par deux autres personnes pour l’aspect technique. Découvrez notre nouvelle offre de business intelligence mind Research : envoyer un email à info@mindnews.fr Aymeric Marolleau NewslettersPersonnalisation Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Confidentiels Prisma Media a choisi son prestataire pour personnaliser ses contenus numériques Confidentiels Trendsboard pivote vers le BtoC et lance une newsletter média Comment personnaliser sa newsletter de marque ? Le groupe Amaury dévoile la deuxième promotion de son incubateur essentiels Nos synthèses et chiffres sur les principales thématiques du marché Les mutations du search à l'ère de l'IA générative L'application inaboutie de la loi sur les droits voisins Google vs DOJ : tout ce qu'il faut savoir sur le procès qui pourrait redéfinir l'adtech L’essentiel sur les identifiants publicitaires La transformation du marché publicitaire en 2024 2023 : le marché publicitaire doit se préparer à la fin du tracking utilisateur Comment l’intelligence artificielle générative bouleverse les médias Les enjeux réglementaires des médias en 2023 analyses Les articles d'approfondissement réalisés par la rédaction Adtech : pourquoi la Commission européenne sanctionne Google de près de 3 milliards d’euros Retail media : une consolidation indispensable des régies pour répondre aux attentes des acheteurs publicitaires IA et monétisation des contenus : comment l’IAB Tech Lab veut contrôler les robots crawlers Droits voisins : l’Apig veut introduire une plainte contre Meta devant l'Autorité de la concurrence Paul Boulangé (Starcom France) : "Nous sommes en train de déployer Captiv8 en France, notre solution d'automatisation du marketing d'influence" Claire Léost devient DG de CMA Média, WPP Media promeut Stéphanie Robelus… Comment les SSP généralistes investissent le secteur du retail media Bénédicte Wautelet (Le Figaro) : “Toute solution qui utilise de l’IA en rapport avec nos contenus doit y être autorisée et nous rémunérer” Aides à la presse : combien les éditeurs ont-ils perçu en 2024 ? Le New York Times affiche toujours une croissance très robuste portée par le numérique data Les baromètres, panoramas et chiffres sur l'évolution du marché Le classement des éditeurs français qui ont le plus d'abonnés purs numériques Les données récoltées par les acteurs de la publicité en ligne La liste des sociétés présentes dans les fichiers ads.txt des éditeurs français Les gains de budget des agences médias Opt-out : quels éditeurs français interdisent les robots crawlers de l'IA générative ? Le panorama des sociétés spécialisées dans les technologies de l’e-retail media La liste des outils utilisés par les équipes éditoriales, marketing et techniques des éditeurs français Le détail des aides à la presse, année par année La liste des CMP choisies par les principaux médias en France Digital Ad Trust : quels sites ont été labellisés, pour quelles vagues et sur quel périmètre ?