Accueil > Médias & Audiovisuel > Transformation & Innovations > Publicité en ligne : les spécificités du marché chinois Publicité en ligne : les spécificités du marché chinois Par . Publié le 04 septembre 2015 à 18h37 - Mis à jour le 04 septembre 2015 à 18h37 Ressources Malgré l’audience considérable de l’internet chinois, avec 649 millions d’internautes selon le China International Network Information Center (CNNIC) en particulier sur les smartphones, l’industrie de la publicité en ligne peine à s’affirmer sur ce continent. Les raisons de ce paradoxe sont nombreuses : les coûts élevés des campagnes sur les plateformes les plus utilisées (WeChat, Baidu, Sina Weibo, YY), les difficultés rencontrées par les annonceurs pour en mesurer l’efficacité, et la multiplicité des formats. Par conséquent, les marques n’hésitent pas à contourner les intermédiaires – comme les régies – par des jeux-concours offline et des partenariats avec les influenceurs. Pour compenser ce manque à gagner publicitaire, les éditeurs imaginent de nouveaux business models en ligne. Quelles sont les principales plateformes pour la publicité en ligne en Chine ? Quelle maturité du marché publicitaire ? Quel sort pour les éditeurs étrangers ? Quel accueil des consommateurs pour la publicité ? Satellinet évoque les expériences de ZenithOptimedia, Ogilvy, Cirteo, et a interrogé des observateurs spécialisés (China Connect, Gentlemen Marketing Agency et SJ Conseil) pour mieux comprendre les spécificités du marché publicitaire chinois. La Chine, avec ses 1,3 milliard d’habitants et une classe moyenne estimée à 400 millions de personnes, est-elle le nouvel eldorado de la publicité en ligne ? Elle en a le potentiel, car l’Empire du Milieu comptait 649 millions d’internautes en décembre 2014, selon le China International Network Information Center (CNNIC). « Le succès du net en Chine s’explique en partie par la perte de crédibilité des médias traditionnels, considérés comme la voix de l’Etat, et parce qu’il offre un certain anonymat aux utilisateurs », explique Laure de Carayon, organisatrice de la conférence China Connect. L’industrie publicitaire en retard Avec 51,19 milliards de yuans (6,25 milliards d’euros), contre 45,36 milliards de yuans pour la presse écrite, le chiffre d’affaires de la publicité sur internet en Chine a dépassé celui des journaux dès 2011, selon une étude du cabinet IResearch citée par le quotidien Global Times. A titre d’exemple, la bascule approche mais ne s’est pas encore produite en France. La croissance du marché ne s’est pas essoufflée depuis, puisque selon l’institut d’études Go-Globe, les dépenses de publicité en ligne ont atteint 23,7 milliards de dollars en Chine en 2014. Mais, compte tenu du nombre d’internautes, la taille du marché publicitaire paraît décevante. Dans une récente étude, le cabinet McKinsey pointait ainsi que l’industrie publicitaire chinoise ne représente que le quart de celle des Etats-Unis. Il faut dire que ce marché, peu structuré, souffre de nombreuses faiblesses. Les campagnes mobiles trop chères D’abord, le mode de connexion à la toile, qui est largement dominé par le mobile : 85,8 % (557 millions) des internautes sont en fait des mobinautes. Problème, même si le marché de la publicité mobile connaît une forte croissance (7,5 milliards de dollars en 2014, après 920 millions de dollars en 2013, selon eMarketer en Chine), « les smartphones et tablettes sont des environnements difficiles pour faire de la publicité », selon Olivier Verot, fondateur de l’agence Gentlemen Marketing Agency, qui pilote des campagnes en Chine pour le compte de sociétés étrangères (Guerlain, Lancôme, Rhodia-Solvay). Les espaces publicitaires étant limités, les coûts peuvent atteindre des niveaux importants. L’application de messagerie instantanée WeChat (tencent) – 600 millions d’utilisateurs revendiqués -, par exemple, a longtemps réservé ses emplacements publicitaires aux très grandes marques, avec des campagnes dont les budgets démarraient à 1 ou 2 millions de yuans (150 000 à 300 000 euros). « Même si le ticket d’entrée a récemment été abaissé, le coût par clic reste élevé, de l’ordre de 5 à 10 yuans (70 cents à 1,4 euros) », explique Olivier Verot. D’autant plus que les annonceurs traditionnels sont en concurrence pour acheter les inventaires avec de nombreuses applications qui ont levé beaucoup d’argent et dépensent sans compter pour booster leurs téléchargements. Sina Weibo, le site de miccrobbloging qui ressemble à la fois à Facebook et Twitter, serait « un peu plus ouvert que WeChat, avec un coût par clic un peu plus faible, une part d’utilisateurs PC plus importante et d’avantage d’inventaire », selon Olivier Verot. Sur le moteur de recherche Baidu (60 % à 80 % de parts de marché estimées en Chine), qui prend le virage du mobile – 42 % de ses revenus réalisés sur ce support fin 2014, en hausse de 36 % par rapport au trimestre précédent, selon ses documents officiels – les choses ne sont pas plus simples pour les annonceurs et leurs agences. « Cet été, Baidu a augmenté ses tarifs de façon arbitraire. Les prix des inventaires ne sont pas fixés officiellement, ils dépendent des clients et des secteurs d’activité », regrette-t-on chez ZenithOptimedia (Publicis). Pour autant, le moteur de recherche reste incontournable pour les grandes marques, qui continuent d’investir, notamment pour acheter, très cher, leurs « brand-zone » : dans ces grands encarts carrés, qui apparaissent au sommet de la page de résultat, elles peuvent afficher leurs contenus (présentation, vidéos, produits…) pour faire de l’ombre aux résultats sponsorisés qui occupent toute la partie droite de la page, et proposent parfois aux internautes… des contrefaçons. Peu de mesures fiables Deuxième faiblesse : l’absence de mesures fiables affecte la confiance des annonceurs dans la publicité en ligne. La Chine ne dispose pas d’institut officiel, comme comScore aux Etats-Unis ou Médiamétrie en France, si bien qu’il est difficile de donner du crédit à l’audience revendiquée par les sites, de vérifier la performance des campagnes et, in fine, la rentabilité des investissements. « Le média planning se fait beaucoup à l’aveugle », confie Florent Courau, consultant spécialiste du marché chinois chez SJ Conseil et ex-directeur des opérations de Sephora à Shanghai. « La majorité des sites mentent sur leur audience, les annonceurs et leurs agences doivent faire attention à ne pas se laisser duper par de faux chiffres », abonde Olivier Verot (Gentlemen Marketing Agency). Le peu de maturité du marché rend aussi son abord délicat pour les sociétés technologiques. Lorsqu’ils ont mis le pied à Pékin en 2014, les ingénieurs de Criteo ont dû faire face à quelques complications. « Comme il n’y a pas de normes sur les formats publicitaires, il en existe 170 000 différents », explique Grégory Gazagne, vice-Président exécutif de Criteo pour la région EMEA. Face à ce casse-tête, le spécialiste du retargeting a dû élaborer une technologie « liquide », permettant à une annonce de trouver sa place dans n’importe quel emplacement en quelques millisecondes. Du coup, la société française ne presse pas son développement. « Le marché est complexe et il faut beaucoup de temps pour construire des relations professionnelles de confiance et durables, que ce soit avec des annonceurs ou des éditeurs » explique-t-on en interne. Les alternatives à la publicité en ligne Pour toutes ces raisons, nombre d’annonceurs préfèrent délaisser la publicité en ligne au profit de stratégies de « contournement ». « Les marques organisent des jeux dans la vie réelle pour inciter les consommateurs à les suivre sur les réseaux sociaux et les applications de messagerie instantanée, et ainsi faire grossir leurs communautés, pour pouvoir ensuite communiquer directement avec elles », observe Andrea Colaianni, directeur du conseil social Media d’Ogilvy & Mathers, présent en Chine depuis 1991 et qui y compte 4 000 employés. Ainsi, British Airways a profité du Nouvel an Chinois 2014 pour lancer une campagne inspirée de Charlie et la Chocolaterie : les 2014 premiers abonnés au compte WeChat de la compagnie aérienne ont reçu une enveloppe rouge traditionnelle, dotées d’un bon d’achat de 50 dollars. Mais trois enveloppes renfermaient un ticket d’or donnant droit à un séjour à Londres. Résultat : 10 000 followers gagnés dès les 10 premiers jours de la campagne. Pour communiquer en ligne sans acheter d’inventaire, les marques s’associent également volontiers aux influenceurs (ou « KOL », pour Key Opinion Leaders), très nombreux sur les réseaux sociaux et les chat chinois. « Les célébrités y sont très proches de leurs communautés. Et compte tenu du nombre d’internautes, des influenceurs pourtant spécialisés dans des niches peuvent avoir autant de followers que des stars de la mode ou du cinéma en Europe et aux Etats-Unis », remarque Andrea Colaianni (Ogilvy). Ainsi, l’entrepreneur Kaifu Lee compte 33 millions de fans et l’actrice Hye Jeong, 29 millions. De nouvelles sources de monétisation pour les éditeurs La relative faiblesse des investissements publicitaires en ligne, au regard des audiences, rend parfois laborieuse la monétisation des plateformes par leurs éditeurs. Selon McKinsey, « alors que dans la plupart des pays du monde, les sociétés internet tirent 60 à 90 % de leurs ressources de la publicité, elle ne représente pas, en Chine, une telle proportion des revenus ». Les mésaventures de Viadeo sont à ce titre exemplaires. La société française s’est installée dans le pays dès 2005 en rachetant son homologue, Tianji, devenu depuis le premier réseau social professionnel, avec 25 millions d’inscrits. Jackpot pour sa maison mère ? Pas vraiment : lorsqu’il s’est introduit en bourse en juillet 2014, Viadeo espérait lever 35 millions d’euros. Las, il n’en a recueilli que 22. Parmi les raisons avancées, des analystes avaient indiqué ne pas valoriser les activités de Tianji ou très peu, par manque de visibilité sur ses capacités de monétisation… Pour compenser la faiblesse des investissements publicitaires, les éditeurs chinois ont fait preuve d’inventivité, en créant de nouveaux business models. McKinsey rapporte ainsi que 90 % des revenus de Tencent, qui possède WeChat, proviennent des jeux en ligne, de la vente de biens virtuels et du e-commerce, si bien que son revenu moyen par utilisateur s’est élevé en 2014 à 16 $, contre 6 $ pour Facebook. Quant à la plateforme vidéo YY.com, elle a créé diverses sources de revenus, dont une monnaie virtuelle. En 2014, 57 % de ses revenus issus de la musique et du divertissement ont été réalisés grâce à la vente de biens virtuels, comme des roses que les internautes offrent à leurs artistes favoris, qui les convertissent en yuans. ChineMessagerie instantanée Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire KLM Royal Dutch Airline traite désormais les demandes clients via la messagerie WeChat Dossiers Marketing et communication en ligne : le Brésil, nouvel eldorado ? 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