Accueil > Médias & Audiovisuel > Transformation & Innovations > Vidéo en direct : comment les médias utilisent Periscope et Facebook Live Vidéo en direct : comment les médias utilisent Periscope et Facebook Live Les médias en ligne s’intéressent de près à Periscope et Facebook Live pour diffuser des contenus vidéos en direct. L’intérêt est de s’adresser facilement à des millions d’internautes potentiels. Une stratégie payante en terme d’audience, mais quid de la monétisation ? Retour d’expérience et témoignages du Parisien, de L’Obs, du Figaro, d’Europe 1 et de BFMTV. Par . Publié le 28 avril 2016 à 19h43 - Mis à jour le 28 avril 2016 à 19h43 Ressources L es grandes plateformes misent de plus en plus sur la diffusion en direct de vidéos réalisées par leurs utilisateurs. Twitter a par exemple acquis la start-up Periscope en mars 2015 et Facebook a beaucoup investi dans son outil Facebook Live, qu’il a ouvert à tous ses utilisateurs début avril. Selon Re/code, le groupe américain a même payé plusieurs grands éditeurs (dont BuzzFeed, le New York Times, Vox) pour qu’ils y diffusent leurs contenus. Alphabet n’est pas en reste puisque YouTube a annoncé mi-avril lancer la vidéo live à 360 degrés. De quoi s’immerger totalement dans un événement sans sortir de chez soi. Pour séduire sur les réseaux sociaux Les éditeurs doivent-ils utiliser ces nouveaux outils vidéos proposés par Twitter et Facebook ? La tentation est grande tant ces formats plaisent aux internautes et le public touché potentiellement important. Ainsi, un internaute indiquait au début du mois avoir cumulé 385 000 spectateurs pour cinq heures de live place de la République, pour couvrir le mouvement Nuit Debout, avec une pointe à 81 000 connectés. Un reportage du Figaro sur cette même place, début avril, a obtenu 100 000 vues sur Facebook Live, et son émission Gaming House, filmée en direct, réunit chaque semaine plus de 150 000 personnes sur le réseau social. Audrey Herblin, directrice des relations institutionnelles de Twitter France, assurait même le 6 avril, à l’occasion de l’événement Women Digital Leaders, que la couverture d’événements sur Periscope pourrait bientôt faire autant d’audience qu’une chaîne d’information en continu. “Toutes les conditions sont réunies pour une démocratisation du direct en 2016, juge Aurélien Viers, responsable du pôle visuel de L’Obs, interrogé par mind. Les performances atteintes par les smartphones et la 4G permettent de diffuser des vidéos d’excellente facture, sans camion satellite, ni lourde caméra, et les applications de créer une réelle interactivité avec la communauté. Cela permet à un journal papier comme le nôtre de changer son image en un média réactif, en prise avec l’actualité.” Ainsi, lorsque L’Obs a couvert sur Facebook Live, le 7 avril, l’occupation d’une agence de la Société Générale par l’association Attac, il a touché 150 000 personnes sur le réseau social, obtenu 600 commentaires et un millier de likes. Ce format présente aussi l’avantage d’améliorer la présence de l’éditeur sur Facebook, c’est-à-dire sa capacité à apparaître dans le fil d’actualité des utilisateurs. “Plus on fait de lives, plus notre référencement via l’EdgeRank de Facebook augmente”, remarque Aurélien Viers. Etendre sa communauté sur les réseaux sociaux était aussi l’une des motivations du Parisien, qui a ouvert un compte sur Periscope en avril 2015. Il y compte désormais 36 000 abonnés, pour une centaine de directs réalisés. Initialement, il s’agissait surtout de diffuser les concerts organisés depuis quelques années par le service Culture & Loisirs au sein de la rédaction. Jusqu’ici réservées aux journalistes, les prestations de Louane, Kendji, Nekfeu, ou encore Coeur de pirate ont ainsi été partagées avec les lecteurs du Parisien. “Cela nous permet de toucher de nouvelles communautés sur les réseaux sociaux, car les artistes relaient l’événement sur leur propre compte Twitter”, explique Vincent Pastorelli, le community manager du Parisien. D’autres formats ont été portés sur Periscope, comme des interviews d’artistes d’une dizaine de minutes, et même, en septembre 2015, une journée de reportages tournés en directs à l’occasion de la journée sans voiture, avec interview de la maire de Paris, Anne Hidalgo, de maires d’arrondissements et de riverains. Le dispositif a réuni 3 000 spectateurs au total. Certains moments forts, comme l’illumination de la Tour Eiffel aux couleurs du drapeau belge après les attentats de Bruxelles (3 000 à 4 000 personnes connectées) sont aussi captés sur l’application de Twitter. “””Toutes les conditions sont réunies pour une démocratisation du direct en 2016.” Aurélien Viers, L’Obs” Les premiers succès d’audience sur Facebook Live aux Etats-Unis Les premières expériences des éditeurs américains sur Facebook Live sont encourageantes. Le 9 avril, BuzzFeed a par exemple attiré 800 000 personnes devant l’explosion d’une pastèque, et 315 000 commentaires. Le site de divertissement TMZ, qui compte 6,1 millions de fans sur le réseau social, dénombre 75 000 à 100 000 spectateurs en moyenne sur ses lives, et 7 000 à 25 000 commentaires, selon Digiday. En France aussi, certains éditeurs ont su tirer leur épingle du jeu. Un million d’internautes ont par exemple suivi un concert de cinq heures diffusé par la radio RFM le 12 avril. Les équipes digitales et sociales à la manœuvre Au Parisien, c’est la cellule Digital TV, créée il y a bientôt deux ans et dotée de sept personnes (monteurs, journalistes, cadreurs…), qui prend en charge le compte Periscope, avec le community manager. “Notre rôle est de tester les outils, d’en comprendre le fonctionnement, pour diffuser l’usage dans la rédaction”, explique Anne de Kinkelin, sa responsable. La cellule réfléchit à de nouveaux dispositifs pour couvrir l’Euro de Football, les élections américaines et les primaires des Républicains. Chez Europe 1, la “Social Room” et les comptes Periscope et Facebook Live sont gérés par l’équipe social media, et “beaucoup de journalistes”, selon la radio, ont été formés à la prise en main des outils. Ses directs sur Periscope, où la station a ouvert un compte en septembre 2015, obtiennent 10 000 vues en moyenne, pour 24 500 abonnés ; ceux sur Facebook Live, où elle est présente depuis février, 50 000. Si Facebook est plus puissant que Periscope pour générer de l’audience, les éditeurs confessent manquer de recul pour distinguer les deux applications et choisissent encore indifféremment l’une ou l’autre, ou bien diffusent sur les deux en même temps. “Nous cherchons encore quels formats fonctionnent le mieux sur chaque plateforme, et la bonne durée d’un live”, admet ainsi Thomas Doduik, directeur des activités numériques d’Europe 1. “””Notre rôle est de tester les outils, d’en comprendre le fonctionnement, pour diffuser l’usage dans la rédaction.” Anne de Kinkelin, Le Parisien TV” Et le sport en direct ? Les grandes plateformes s’immiscent toujours plus sur le terrain des chaînes de télévision. Elles misent notamment sur les compétitions sportives, à l’instar de Yahoo qui a déboursé 17 millions de dollars pour retransmettre en octobre 2015 dans le monde entier un match de NFL, la ligue nationale de football américain. Résultat : 15,2 millions d’utilisateurs uniques dans plus de 180 pays. Début avril, Twitter a remporté un lot sur les droits internet de dix matchs de NFL diffusés le jeudi soir. Le réseau social était en compétition avec Yahoo, AOL et Amazon. “””Nous cherchons encore quels formats fonctionnent le mieux sur chaque plateforme, et la bonne durée d’un live.” Thomas Doduik, directeur des activités numériques d’Europe 1” Modération et monétisation restent complexes Mais l’usage du service de Twitter présente quelques risques, le plus problématique étant de ne pas maîtriser la modération des commentaires qui s’affichent directement sur l’écran. Une option permet de désactiver les commentaires, mais elle prive alors l’éditeur de l’interactivité avec ses lecteurs. Les remarques hors de propos, les trolls, voir les insultes “font partie du jeu, c’est aussi ce qui fait la force de ces nouveaux supports”, relativise Vincent Pastorelli (Le Parisien). Sur Facebook, les commentaires s’affichent à côté de la vidéo, ce qui réduit légèrement le stress des community managers. “Cela évite les captures d’écran malheureuses”, note ainsi Thomas Doduik (Europe 1). Mais pour ne pas dépendre entièrement des réseaux sociaux pour leurs directs, les éditeurs cherchent à développer des solutions propriétaires. C’est notamment le cas de L’Obs, qui est en train d’imaginer et de développer avec Digiteka un dispositif pour diffuser ses lives sur toutes les pages de ses sites en même temps, en plus des réseaux sociaux. S’ils n’en sont pas encore à tirer des revenus de ces formats, les éditeurs comptent sur Facebook et Twitter pour leur permettre d’y placer un jour des pré-rolls ou mid-rolls. Les contenus sponsorisés par des marques sont une autre piste ; Facebook a d’ailleurs récemment assoupli ses règles sur ce sujet. “Nous construisons d’abord l’usage, la monétisation viendra ensuite”, explique ainsi Thomas Doduik. Bertrand Gié, directeur des nouveaux médias du Figaro, est plus sceptique : “Nos tests ont été concluants du point de vue de l’audience, mais la question de la monétisation et de la comptabilisation des audiences reste un vrai souci”. Facebook ouvre son “Live” aux acteurs BtoB Facebook a annoncé, mardi 12 avril, ouvrir sa plateforme live aux acteurs BtoB afin d’en étendre l’usage. A cette occasion, le réseau social a donné le nom de deux sociétés spécialisées sélectionnées pour connecter leur plateforme de diffusion avec celle de Facebook Live : Grabyo, spécialiste du clipping, et Ooyala. Cette filiale de Telstra permet désormais à ses clients – parmi lesquels ESPN, Univision, Vice, RTL Group, M6 ou encore 21st Century Fox – de diffuser leurs contenus live sur leurs pages Facebook simplement en cochant une case dans leur interface. Ooyala, qui est aussi un adserver, n’a en revanche aucun contrôle sur la monétisation. Ce mouvement illustre la volonté de Facebook de laisser les éditeurs utiliser leur propre régie vidéo dans Live, de façon à améliorer la qualité des diffusions et le montage. Une menace pour les chaînes d’information ? L’adoption du live vidéo par des éditeurs papier constitue-t-elle une menace pour les chaînes d’information en continu ? A L’Obs, Aurélien Viers souligne que l’objectif n’est pas de les concurrencer. “Nous voulons proposer une autre façon de couvrir des événements, en restant par exemple plus longtemps sur le terrain, ou en faisant du journaliste le relai des questions des internautes”, indique-t-il. A NextRadioTV (BFMTV, BFM Business, RMC, RMC Découverte), son rédacteur en chef numérique, Julien Mielcarek, ne voit pas ce mouvement d’un mauvais oeil. “Il est normal que les marques de presse écrite essaient de se renforcer sur la brique vidéo, qui leur manquait. Mais il est impossible pour un journal d’avoir les moyens d’une chaîne de télévision : BFMTV a 250 journalistes, et propose des images qui viennent de la France entière.” La différence est aussi qualitative : pour l’heure, les images sont captées à l’aide d’un smartphone ou d’une tablette par une seule personne, qui gère parfois en même temps les commentaires. Le montage est donc impossible, le son pas toujours optimal, et la retransmission hors des rédactions souvent menacée par des problèmes de connexion. Mais la donne va changer, puisque Facebook a annoncé lors de sa conférence F8 que les éditeurs pourront bientôt diffuser des flux issus d’une console de réalisation (voir encadré page précédente), ouvrant ainsi la porte aux caméras haute définition et aux drones. De son côté, BFMTV s’apprête à tester Facebook Live, mais seulement pour ouvrir ses coulisses aux internautes. Le flux de la chaîne reste, lui, réservé à ses sites desktop et mobile et à son application, sur lesquels elle revendique plusieurs dizaines de millions de vidéos vues. Il n’est pas encore prévu de le diffuser sur les réseaux sociaux : “Fabriquer de la vidéo coûte cher, il faudra d’abord s’assurer de pouvoir la monétiser correctement sur ces plateformes. Et puis, il faudra que ces spectateurs puissent être comptabilisés dans notre audience globale”, souligne Julien Mielcarek. “””Il est normal que les marques de presse écrite essaient de se renforcer sur la brique vidéo, qui leur manquait.” Julien Mielcarek, NextRadioTV” Besoin d’informations complémentaires ? 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