Comment avec Innove2020, BPCE s’est transformé dans l’assurance IARD

Le parcours du groupe BPCE dans le monde de l’assurance ne tient pas de la ligne droite. Il se caractérisait même par des pratiques différentes selon ses réseaux. Jusqu’au milieu des années 90, l’assurance IARD n’appartient ainsi pas au cœur d’activité de ses réseaux Banque Populaire et Caisse d’Epargne.
Des choix distincts s’opèreront par la suite. Le premier choisit de se cantonner, pour l’assurance IARD (auto, habitation et deux roues), à un rôle de distributeur pour son partenaire historique, la Maaf. La Caisse d’Epargne rompt avec ce mode de distribution et lance sa propre entité, BPCE Assurances.

Faire de l’assurance un “core business” de BPCE

L’assurance est désormais une activité stratégique pour le groupe. L’ambition de ses dirigeants est même d’en faire un des deux “core business”. Le programme Innove2020, initié en 2018, devait y contribuer et réunir autour de ce même objectif Banque Populaire et Caisse d’Epargne. Comment ? En les dotant d’une même plateforme industrielle de fabrication et de gestion de produits d’assurance à destination des particuliers.
BPCE souhaitait ainsi réintégrer l’ensemble des éléments de la chaîne de valeur. Ce projet s’appuie sur la structure BPCE Assurances. Et l’objectif était donc d’en faire une plateforme commune pour la distribution des produits d’assurance IARD des deux réseaux. Toutefois, les offres aussi devaient évoluer, en particulier pour les banques populaires, qui ne disposaient pas de leurs propres produits.

“Nous avons choisi de renouveler une partie de l’offre, mais nous sommes partis d’une feuille blanche pour créer une nouvelle MRH“, déclare Alain Bensimhon, directeur général adjoint de BPCE Assurances. Sur le volet auto, l’offre évolue également pour tenir compte des attentes du marché.
La révolution s’étend aussi à la distribution en agence. Le groupe se fixait comme cap une refonte de l’ensemble des parcours afin de les rendre plus facilement accessibles par les conseillers. Il s’agissait ainsi de se doter de “parcours fluides, rapides et conviviaux“. Ceux-ci devaient en outre embarquer des outils d’aide afin de permettre aux vendeurs d’être les plus autonomes possibles face aux clients.

Des parcours omnicanaux et digitaux

Dans le domaine de l’assurance, impossible cependant de se cantonner à la seule distribution physique. Avec Innove2020, BPCE repense donc le volet self-care et l’accessibilité des offres sur Internet (site et applications mobiles). L’idée est de proposer, quel que soit le canal, des parcours identiques dans le cadre d’une démarche omnicanale.

A terme, le client pourra commencer une simulation sur un produit depuis son mobile, mais finaliser la souscription via une plateforme téléphonique dédiée grâce à des outils de signature à distance. Mais le parcours doit aussi pouvoir commencer en agence et se terminer en ligne, et inversement. Cette approche repose sur la notion de “symétrie des attentions”.

En clair, le client, qu’il soit en agence ou chez lui, retrouve la même ergonomie et la même charte sur les parcours. “Cela amène à avoir des parcours totalement identiques sur le self-care et la partie agence, mais aussi à retrouver sur le self-care, en digital, l’ensemble du transactionnel disponible en agence“, précise Alain Bensimhon.

Mais pour y parvenir, BPCE a dû faire évoluer ses outils et habitudes en ce qui concerne le développement numérique. Première pour le groupe, et “décision majeure“, celui-ci décidait de basculer dans le cloud au travers de l’exploitation de la solution Pegasystems, hébergée dans le cloud d’AWS.

Le cloud, condition de la transformation sur l’assurance

Il a cependant fallu auparavant convaincre en interne parmi les réseaux Banque Populaire et Caisse d’Epargne. Cette option cloud, qui émerge dans le groupe dès 2018, s’imposait toutefois comme une condition incontournable à long terme, notamment afin de déployer des usages liés à l’intelligence artificielle.

“Innove 2020, ce sont des produits grand public avec des volumes très importants, mais également une concurrence très forte sur le marché. Le fait de se mettre dans le cloud facilitait l’omnicanalité, et permettait de se conformer à des standards techniques plus difficiles à atteindre avec le on-premise. Et surtout, le cloud permettra d’implémenter des outils modernes comme le co-browsing ou le chat pour assister le conseiller ou le client dans les démarches“, justifie le directeur adjoint.

2020 a été l’année de la concrétisation pour ce programme stratégique – mais pas celle de son achèvement cependant. En novembre dernier, le groupe finalisait le déploiement de ses offres auto et habitation dans les deux réseaux. Des expérimentations sur de premiers établissements avaient au préalable été menées avant l’été.

Une seconde étape est à présent en cours. Elle porte cette fois sur le volet self-care. Depuis l’été 2020, des fonctionnalités “de base” ont été mises en ligne. Les clients ont par exemple accès à la déclaration de sinistre pour les nouvelles offres depuis le site ou sur mobile. Ils peuvent aussi consulter leurs contrats. En décembre 2020, une consultation plus détaillée était en cours de déploiement. Elle s’accompagnera d’outils supplémentaires de self-care comme l’édition d’attestations et l’accès à de nouveaux services disponibles uniquement en ligne (aide au déménagement, interventions de dépannage et mises à disposition de partenaires agréés pour réaliser des travaux).

Une vue 360 pour les collaborateurs de BPCE Assurances

Le projet se poursuit en 2021. Au cours du second trimestre, l’entreprise ajoutera à l’offre auto et habitation l’ensemble des fonctionnalités de souscription. Ainsi, d’ici mai, le client aura la possibilité de réaliser en ligne l’ensemble des actes de gestion, de simulation et de souscription pour ces deux offres.

Innove2020, c’est aussi des évolutions côté back-office, middle office et sinistres, c’est-à-dire pour les collaborateurs de BPCE Assurances et la plateforme de production. La principale innovation concerne la “vue 360”. Cette vue “panoramique” permet aux employés de disposer d’une vision synthétique des interactions des conseillers et clients avec les produits. Cette fonctionnalité, déployée progressivement courant 2020, vise à garantir une meilleure qualité de service.

Ce “changement majeur” apporté à l’environnement de travail des collaborateurs se double d’une rationalisation de leurs outils applicatifs. L’objectif était de “leur simplifier la vie“, notamment sur la partie éditique. Pour générer des documents, comme des contrats ou des attestations, plusieurs applications étaient installées. Désormais, une seule concentre l’ensemble des fonctionnalités nécessaires.

Pour faire aboutir ce “changement radical” au sein de BPCE Assurances, la “gestion du changement a été un élément essentiel“, témoigne son dirigeant. Mais les retours terrain sont aujourd’hui positifs, assure-t-il. Le dispositif comprenait notamment des formations de 2 à 5 jours. Du côté des agences, aussi, le bilan se veut favorable selon la banque-assurance.

“L’accueil par les conseillers est à la hauteur de nos attentes. Ils s’approprient très facilement les nouvelles offres“, se félicite Alain Bensimhon. Malgré les confinements de 2020, le groupe réalise des “performances commerciales assez époustouflantes“, revendique-t-il encore. Ainsi, le réseau Banque Populaire affiche des taux de croissance hebdomadaires à deux chiffres. Début décembre 2020, BPCE passait en outre le cap symbolique du 100.000e contrat auto-habitation Innove2020.

La performance commerciale au rendez-vous

Le programme affiche néanmoins du retard, “assumé“, assure-t-on cependant au sein de la direction. Cela s’explique par une démarche de co-construction, en proximité avec les métiers et les clients. Le confinement a également pesé, reconnaît l’entreprise, notamment pour organiser le travail en mode agile du plateau technique réunissant 200 personnes, dont une bonne part de prestataires.

Ce retard oblige donc BPCE à différer l’implémentation de fonctions comme un moteur de recommandations. ” Toutes les perspectives qu’on aurait pu se donner en 2021 pour travailler autour de l’intelligence artificielle sont repoussées, je l’espère, à 2022. Mais c’est un enjeu important. C’est pourquoi nous avons choisi Pegasystems et aussi d’aller dans le cloud“, déclare le directeur du programme Innove 2020.

2021 s’annonce néanmoins déjà chargée. Le groupe prévoit d’achever durant le premier semestre le déploiement des parcours self-care (MRH pour le réseau Caisse d’Épargne, et MRH et auto pour Banque Populaire). Sur la seconde moitié de l’année, seront aussi finalisés les parcours deux-roues pour Banque Populaire.

En raison du ” succès” constaté, l’assureur ambitionne enfin de déployer les parcours auto et deux-roues aussi dans les Caisses d’Épargne en 2021/2022. Les conseillers, eux, sont prêts. En 2020, ils sont pratiquement 40.000 à avoir été formés à distance sur les offres, les parcours et à la vente. Et avec succès puisque le dirigeant de BPCE confie que les résultats “vont au-delà des attentes“.

“Depuis la généralisation dans les agences, de plus en plus de conseillers parviennent à vendre au moins un contrat d’assurance par semaine. Cela se traduit par une progression de la base de vendeurs et de la régularité dans la vente. Et cela aussi, ce sont des indicateurs de succès du programme“, conclut le cadre.