[Info mind Fintech] Ingrid Bocris, Pascal Bied-Charreton : “Moonshot Insurance débute une collaboration avec Stocard”

Comment se porte l’activité de Moonshot Insurance ?

Pascal Bied-Charreton : Depuis son lancement en 2017, Moonshot Insurance (auparavant Moonshot-Internet, ndlr) a vendu plus de 500 000 polices, dont plus de 400 000 sur la seule année 2020. Nos efforts de prospection s’orientent vers trois univers principaux : les acteurs de l’e-commerce, du voyage et du paiement. Sur le premier axe, nous développons par exemple depuis deux ans un partenariat avec Rakuten autour d’une assurance “écran mobile cassé” qui produit de très bons résultats. En ce qui concerne le segment du voyage, l’année 2020 a bien entendu été difficile pour les acteurs de ce secteur et cela s’est ressenti dans nos chiffres. Mais nous voulons être présents lorsque ce marché redémarrera et nous sommes persuadés que la crise devrait renforcer l’appétit des clients pour l’assurance voyage. Enfin, nous montons en puissance auprès des acteurs du paiement qui incluent les néobanques. Nous avons signé Pledg dans le paiement fractionné et nous démarrons début mai une collaboration avec Stocard, une application d’origine allemande qui propose des services de gestion des cartes de fidélité et de paiement.

Sur quoi porte ce contrat ?

PB-C : Moonshot Insurance fournit une assurance protection des achats à l’ensemble des utilisateurs de Stocard Pay, le service de paiement de Stocard. Cette garantie incluse par défaut couvre la casse dans les 45 premiers jours, avec une indemnisation sur facture pouvant atteindre 250 euros. Le bien concerné doit avoir été payé via l’application Stocard. Ce service est déployé dans cinq pays : France, Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas et Italie. C’est un partenariat prometteur et qui fait beaucoup de sens dans la mesure où nous avons chacun pour inspiration un succès asiatique : WeChat pour Stocard et ZhongAn pour Moonshot Insurance.

L’insurtech Roadzen est entrée au capital de Moonshot Insurance. Pouvez-vous revenir sur cette opération ?

IB : Roadzen est entrée au capital de Moonshot Insurance fin 2020 en tant qu’actionnaire minoritaire à l’occasion d’une augmentation de capital (pour un montant non précisé, ndlr) à laquelle a également participé Société Générale Assurances. C’est un acteur présent en Inde, en Chine et aux Etats-Unis avec lequel nous avons de fortes complémentarités, notamment en matière d’analyse de données et d’intelligence artificielle. Nous allons pouvoir partager des expertises, bénéficier de solutions additionnelles pour optimiser l’offre de Moonshot Insurance, mais aussi profiter de synergies commerciales. 

Avez-vous déjà commencé à coopérer ?

PB-C : C’est effectivement déjà le cas. Roadzen est une assurtech qui met au service des assureurs ses technologies de reconnaissance d’images (photos, vidéos) pour traiter les sinistres. La société a racheté l’activité d’AXA Assistance en Inde et propose ce service d’assistance et d’expertise en cas de sinistre à des assureurs indiens et chinois. Moonshot Insurance a intégré une brique provenant de Roadzen pour le diagnostic écran cassé. En outre, nous comptons capitaliser l’expérience de Roadzen dans le domaine des mobilités.

Quelles sont les synergies avec la maison-mère ?

IB : Il y a des synergies possibles avec le groupe sur plusieurs plans. D’abord au niveau commercial puisque Moonshot Insurance présente des atouts pour adresser de grands corporates et des retailers qui cherchent des propositions de valeur différenciantes autour de l’assurance. Ce sont des acteurs avec lesquels le groupe Société Générale peut être en contact sur d’autres sujets. Il nous semble intéressant de pouvoir faire bénéficier Moonshot Insurance de ce réseau relationnel. L’assurtech constitue un atout et un élément clé de la stratégie du groupe Société Générale qui passe par le développement de partenariats. C’est une brique essentielle pour apporter de l’innovation avec des acteurs de l’économie des plateformes, du retail, du paiement. Ces distributeurs cherchent la rapidité d’exécution, avec un déploiement en moins de 90 jours, l’intégration contextualisée dans un parcours d’achat et la modularité offerte par les APIs, avec une adaptation des offres et du prix en fonction du contexte, mais aussi une souplesse dans l’indemnisation. La capacité à utiliser la donnée pour identifier le contexte et affiner la proposition d’assurance peut d’ailleurs se faire au moment de la transaction ou après l’achat.

Puis, il y a aussi des synergies en aval. Nous avons décidé au moment de la création de la société que le risque assurantiel de Moonshot Insurance serait porté par Société Générale Assurances, en l’occurrence Sogessur puisqu’il s’agit d’assurance dommages. Ce n’est pas une obligation : Moonshot Insurance peut se tourner vers d’autres porteurs de risques. Cette synergie permet à Moonshot Insurance de ne pas avoir à mettre ses produits sur le marché et à convaincre différents assureurs via des appels d’offres. Cela offre une ligne directe avec le portage de risques, Société Générale Assurances ayant les moyens d’accepter des risques nouveaux et donc d’accélérer le “time to market” de Moonshot Insurance. 

PB-C : Ce travail sur le risque se fait en étroite collaboration avec Société Générale Assurances. Moonshot Insurance compte dans son équipe 3 data analystes et actuaires qui échangent au quotidien avec l’assureur sur l’analyse du risque, la tarification, le pilotage de portefeuille, etc.

Moonshot Insurance et Société Générale Assurances peuvent-ils développer des offres conjointes ?

IB : La principale leçon de ces quatre dernières années, c’est de voir les équipes de Moonshot Insurance travailler en synergies avec les équipes partenariats de Société Générale Assurances. En fonction des opportunités, la valeur sera amenée par du 100 % Moonshot ou par un mix d’une solution Société Générale Assurances et d’une solution Moonshot. Je pense notamment aux banques en ligne ou aux acteurs du retail.

PB-C : Si demain une néobanque souhaite une assurance moyens de paiement conçue par Moonshot Insurance et une assurance habitation, nous n’avons pas vocation à réinventer cette dernière qui existe dans le portefeuille de Société Générale Assurances. Mais nous serons en mesure de proposer un produit repensé pour le monde digital. 

Quelles perspectives voyez-vous pour l’assurance embarquée et contextualisée ?

IB : Notre conviction, c’est que la crise va accélérer un certain nombre de comportements clients. Les atouts que propose Moonshot en matière d’immédiateté, de personnalisation de l’offre d’assurance par rapport au contexte, de transparence sur les garanties s’appliquent aux univers du voyage, du paiement, mais plus largement à n’importe quel acte d’achat. L’autonomie des clients va croissante et leur attente en matière de proposition de valeur des services fournis est énorme.

P-BC : L’assurance contextuelle embarquée a d’ailleurs un champ d’application plus large que la seule assurance embarquée au sens où elle peut adresser des besoins qui viennent naturellement dans un contexte même s’ils ne s’attachent pas directement au service ou au produit vendu. Ainsi, on peut imaginer proposer une assurance voyage à un client qui réalise un achat lié au voyage mais qui n’est pas en soi en voyage (par exemple, l’achat de matériel pour les vacances).