Accueil > Investissement > Yuzu recentre sa proposition de valeur sur le conseil Yuzu recentre sa proposition de valeur sur le conseil L’application d'investissement en cryptoactifs fondée par l’ancien président de Budget Insight renonce à son produit phare, dont le sous-jacent a été consommateur de fonds propres. Le pivot consiste à développer le conseil personnalisé tout en contribuant à la lutte contre le dérèglement climatique. Par Antoine Duroyon. Publié le 21 juin 2023 à 10h43 - Mis à jour le 22 juin 2023 à 13h58 Ressources Cofondateur et président de la plateforme d’open banking Budget Insight pendant près de dix ans, Clément Coeurdeuil a toujours été fasciné par l’univers des cryptoactifs. Après la cession de la majorité du capital au Crédit Mutuel Arkéa et avant la revente à PSG Equity, l’entrepreneur saute le pas. Début 2022, il crée la société Redpills avec son associé Stanislas de Quénetain, un ancien banquier (Goldman Sachs, JPMorgan, Caceis…) reconverti dans les cryptoactifs. En septembre 2022, les deux partenaires présentent la version bêta de l’application Yuzu puis obtiennent l’enregistrement PSAN (prestataire de services sur actifs numériques) le mois suivant. Leur produit phare : le livret Yuzu, qui convertit les fonds confiés en euros en stablecoins (essentiellement en dollars comme l’USDT ou l’USDC). En jouant notamment le rôle d’apporteur de liquidité auprès de pools de liquidité via des protocoles DeFi (Uniswap, Curve, Quickswap…) la plateforme vise un rendement (non garanti) pour l’investisseur de 6 %. Les investisseurs perçoivent des intérêts dès le premier jour et le premier euro déposé. En outre, la plateforme leur assure une liquidité en maintenant un niveau de fonds propres par rapport aux encours de plus de 8 %. Un modèle intenable Sur le papier, la mécanique était bien huilée, mais la crise bancaire aux Etats-Unis début 2023 l’a fait dérailler. “Lors de la faillite de SVB [qui a entraîné le blocage d’une partie de la liquidité en dollar de Circle, émetteur du stablecoin USDC, Ndlr], nous avons dû puiser dans nos fonds propres pour protéger les fonds de nos clients, se souvient Clément Coeurdeuil. Nous arrivions à dégager 8 % à 9 % de rendement, mais il aurait fallu atteindre 20 %. C’était impossible dans les conditions de sécurité que je voulais respecter. Le livret euro représentait 80 % de l’activité et rapportait des encours (60 % de la collecte), jusqu’à 300 000 euros par mois, mais pas de rentabilité pour nous. Il n’y avait pas de modèle viable là-dessus”. En mars 2023, la société annonce l’arrêt de son produit rendement en euros. Heureusement, Yuzu proposait aussi d’autres produits : le staking, l’achat-vente de cryptoactifs et l’échange de pair à pair, qui vont perdurer. “J’ai restructuré la société autour d’une nouvelle proposition de valeur qui est la suivante : la stratégie crypto facile et écolo”, annonce Clément Coeurdeuil, désormais seul aux commandes après le départ de son associé. Un secteur très concurrentiel L’idée consiste à apporter une brique de conseil en intégrant la gestion pour compte de tiers à destination d’une cible “Nous allons analyser le profil de l’investisseur, en particulier son appétence au risque, et lui proposer une stratégie personnalisée et principalement un système de prise de profit automatique”, explique Clément Coeurdeuil. Une approche qui rapproche Yuzu d’acteurs comme CryptoSimple, voire de plateformes qui s’adresse à des investisseurs plus avertis à l’image de Coinhouse ou SwissBorg. Le marché est très concurrentiel et des plateformes initialement tournées vers les particuliers, comme Mon Livret C, ont choisi de se réorienter vers le BtoBtoC. Il sera donc essentiel de se démarquer parmi de nombreuses offres. L’une des pistes pourrait être de valoriser l’intégration dans son modèle de la lutte contre le dérèglement climatique. Une partie du rendement du staking est allouée au financement de projets de compensation carbone en France grâce à la start-up Stock CO2. Il s’agit notamment de projets labellisés Bas-Carbone de reforestation dans la Mayenne (région Pays de la Loire) et de valorisation des déchets agricoles via la méthanisation. Subventionnement de projets bas carbone Ces projets sont aujourd’hui essentiellement subventionnés par Yuzu puisque la plateforme consacre 10 % de son chiffre d’affaires issue de l’achat-vente de cryptoactifs à l’achat de crédits carbone. La société propose à ses clients d’affecter de 10 % à 100 % de leurs intérêts provenant du staking à ces projets. Mais à ce jour, seulement 4 % des utilisateurs ont choisi de s’associer à cet effort. Ce qui explique une contribution encore modeste : le premier projet de reforestation représente 100 tonnes d’équivalent CO2 captés pour un effort financier d’environ 5 000 euros. Afin de dynamiser le mouvement, Yuzu prévoit de fixer par défaut un reversement à 10 %, libre à l’utilisateur d’y renoncer. Avec son pivot et sa nouvelle feuille de route, Yuzu assure tenir un modèle viable. Avec le staking (35 % des récompenses vont au frais de fonctionnement) et l’achat-vente de cryptoactifs (commission de 1,5 % sur le montant de la transaction), la plateforme perçoit en moyenne 5 euros par client chaque mois. Avec un coût d’acquisition sous les 20 euros par mois, Yuzu atteint ainsi un payback de seulement 4 mois. “L’argent qui devrait être consacré à la publicité, nous préférons le redonner aux clients et favoriser le bouche à oreille”, souligne Clément Coeurdeuil. 5 euros sont ainsi versés pour toute nouvelle inscription. Aujourd’hui, Yuzu, qui compte 6 personnes dans l’équipe, revendique 750 clients, après avoir atteint la barre des 1 000 grâce au succès du Livret Yuzu. Dans un contexte tendu pour les start-up, Clément Coeurdeuil assure pouvoir financer la poursuite de l’activité sur ses fonds propres. À ce stade, il a injecté 900 000 euros dans la société et Bpifrance a investi 500 000 euros. Antoine Duroyon cryptoactifépargnestablecoin Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Notes de synthèse gratuit Comprendre les crypto-actifs Les Français détiennent moins de cryptoactifs que leurs voisins Comment les pure players de l'épargne ont revu leurs modèles économiques