Chef de file du crowdfunding immobilier, ClubFunding part à l’assaut du marché européen

L’histoire de l’entreprise familiale, Profina, débute dès 1994 mais prend un virage stratégique en 2014 lorsque David Péronnin, le fils de François et Brigitte Péronnin, crée ClubFunding. L’activité historique porte sur la commercialisation et la gestion de produits de défiscalisation en Girardin industriel, à laquelle s’ajoute une autre activité, plus anecdotique, de recouvrement de créances. Signal révélateur de l’évolution du modèle, ClubFunding Group, présidé par David Péronnin, est désormais la holding qui regroupe CF Profina, ClubFunding, CF Gestion, CF2C, ClubFunding Asset Management et CF Invest.

Démocratiser l’investissement immobilier

Au fil des années, le groupe a privilégié une approche de plus en plus financière, via par exemple la création d’une société de gestion en 2020. Le souhait a été de diversifier les investissements, au-delà des projets d’opérateurs immobiliers. Après un premier fonds clôturé avec un encours sous gestion de plus de 30 millions d’euros, la filiale a lancé à l’été 2022 un deuxième fonds commun de placement à risque (FCPR). Objectif : financer ou refinancer une cinquantaine de projets immobiliers en France et en Europe.

Toutefois, la plateforme de crowdfunding immobilier représente à elle seule 70 % du volume total des fonds collectés. “La plupart de nos projets, ce sont par exemple des opérateurs immobiliers qui font l’acquisition d’une maison et de son jardin et qui divisent en deux la parcelle pour vendre à la découpe et dégager de la marge, explique David Péronnin. C’est une opération de type marchand de biens assez classique. Nous en finançons régulièrement.” Le ticket d’entrée s’élève à 1 000 euros, tandis que le ticket moyen est d’environ 7 000 euros pour environ une dizaine de projets par investisseur. ClubFunding facture des frais de structuration au moment de la mise en place du financement et des frais de suivi, qui représentent environ 15 % du montant total de la commission.

Pour trouver et accompagner au mieux les projets, la plateforme s’appuie sur plusieurs équipes distinctes. Il y a l’équipe origination, chargée de trouver des projets éligibles au financement de ClubFunding, une équipe d’analystes, une équipe IT, une équipe de communication et de marketing, une équipe de relation client, une autre en charge du suivi des projets et, enfin, une équipe de juristes qui s’est étoffée de deux personnes supplémentaires cette année. Au total, la plateforme de crowdfunding compte aujourd’hui 70 collaborateurs. Au démarrage, l’enjeu était de “mettre en relation des investisseurs avec des projets qui avaient du sens et le faire d’une manière un peu innovante et avec notre propre technologie“, se souvient David Péronnin. La redistribution des coupons mensuels aux milliers d’investisseurs est le principal atout avancé, ainsi que le niveau des garanties proposées. Il y a d’abord les précautions prises en amont de la proposition de financement d’un projet : l’étude par l’équipe origination, les analystes et un comité d’investissement composé de personnes extérieures à l’entreprise qui vont éprouver le projet. Ensuite, viennent les garanties de solvabilité : fiducies sûretés, hypothèques, cautions personnelles et solidaires des dirigeants, nantissements, etc.

30 % de part de marché

Le groupe ClubFunding comptabilise un chiffre d’affaires d’environ 40 millions d’euros pour une marge d’EBITDA de l’ordre de 30 %. Le groupe est le leader incontesté du marché en France. “On fait deux, voire trois fois plus, en termes de fonds collectés et d’investissements, que le numéro deux du marché“, observe David Péronnin. Selon lui, cette avance est en partie le résultat d’un groupe intégré profitant d’un panel élargi d’expertises et de projets. “Nous pouvons accompagner les opérateurs immobiliers aussi bien sur des produits de court terme que de long terme, précise le président. Nous avons par exemple lancé récemment une offre d’immobilier fractionné avec une échéance longue.“

Savoir tirer profit d’une situation de crise

Cette position de leader permet de mieux résister dans les périodes de tension. La contraction du marché s’est accentuée progressivement depuis 2022. “C’est paradoxal, mais le marché se porte très bien, tranche David Péronnin. Les produits que nous présentons actuellement sont ceux avec les meilleures rémunérations et les meilleures garanties. Et de loin.” Les produits sur lesquels ClubFunding connaît des difficultés ou des défauts de paiement sont ceux de la génération précédente où l’immobilier se portait mieux. “Aujourd’hui, nous finançons en moyenne les nouveaux projets à un taux de 11,5 % et à des niveaux de risques qui sont quasiment ceux que les banques prenaient il y a encore un an et demi, constate David Péronnin. Nous sommes très régulièrement les seuls financeurs sur les projets, ce qui nous permet d’imposer nos conditions. Nous pouvons prendre des garanties de premier rang, récupérer la propriété des actifs et les vendre en cas de difficultés. Il y a moins de concurrence entre plateformes également.“

Néanmoins, la collecte de fonds est plus délicate en 2023 qu’elle ne l’était encore en 2021. Les délais ont également tendance à s’allonger pour les opérateurs. “La commercialisation des biens s’avère beaucoup plus compliquée dans l’environnement actuel. De nombreux acquéreurs finaux ont eu des difficultés à trouver des financements auprès des banques en début d’année en raison de problèmes réglementaires.” Cette problématique n’a cependant affecté ni les garanties ni les taux proposés. “Il y a beaucoup moins de risques, analyse David Péronnin. Le taux servi est passé de 9,8 à 11,2%.“

Évolution de la réglementation et nouvelles opportunités

Il y a deux mois, le 10 novembre 2023, l’agrément européen de prestataire de services de financement participatif (PSFP) s’est substitué aux anciens régimes CIP et IFP requis pour les plateformes existantes de crowdfunding en France. ClubFunding l’a obtenu au tout début du mois de décembre. “On va pouvoir aller jouer non plus uniquement en France, mais dans tous les pays d’Europe, se réjouit le président. Jusqu’à présent, on avait commencé à financer des projets dans d’autres pays d’Europe, mais on était systématiquement obligés de passer par des entités françaises. À présent, on va pouvoir s’adresser à ces pays sans aucune contrainte. Donc, là où notre marché, c’était la France, désormais, il y aura aussi l’Espagne, la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Italie. Voilà des pays qui nous intéressent.” L’Espagne est le premier territoire que l’entreprise a choisi d’explorer avec l’ouverture d’un bureau à Barcelone, copiloté par Antoine Bailly (directeur immobilier) et Grégory Torrents (directeur investissement). La plateforme indique avoir déjà financé depuis 2022 en Espagne et au Portugal pour des opérateurs basés en France 31 projets pour un montant cumulé de plus de 84 millions d’euros.

Grâce à cette internationalisation, la plateforme “pourrait facilement grossir encore, doubler ou tripler de taille sans difficulté grâce aux nouveaux marchés qui s’ouvrent à nous“. En 2022, la fintech réalisait déjà un volume de collecte de 500 millions d’euros pour 300 projets. L’année 2023 devrait connaître une tendance similaire. Depuis son lancement, la plateforme a financé au total 1 023 projets pour un montant cumulé de 1,5 milliards d’euros. La même année, en septembre, le groupe ClubFunding a levé 125 millions d’euros pour accélérer sa croissance. En février 2023, il rejoignait pour la première fois le Next40, un programme destiné à favoriser l’internationalisation des entreprises innovantes. Une ambition que la plateforme va pouvoir concrétiser avec son nouvel agrément européen.