Accueil > Services bancaires > Laurent Blanchard (Ingenico) : “Nous consacrons 17 % de notre chiffre d’affaires à la R&D” Laurent Blanchard (Ingenico) : “Nous consacrons 17 % de notre chiffre d’affaires à la R&D” Arrivé à la tête d’Ingenico au printemps 2023, après un passage chez Cegid, Laurent Blanchard impulse la nouvelle stratégie du spécialiste des solutions d’acceptation. Sa feuille de route réserve une place privilégiée à l’innovation et aux partenariats. mind Fintech l’a rencontré à Madrid à l’occasion de l’événement Paytech 2024. Par Antoine Duroyon. Publié le 09 février 2024 à 9h00 - Mis à jour le 28 janvier 2025 à 15h48 Ressources Quels sont les besoins prioritaires de vos clients, qu’ils soient acquéreurs, banques, fintech ou commerçants ? J’en distingue trois principaux. Premièrement : baisser les coûts de gestion de leurs actifs, c’est-à-dire de leurs terminaux. J’ai rencontré plus de 70 CEO, et à chaque fois, il s’agit du premier sujet soulevé. Pourquoi c’est important ? Parce que cette activité n’est pas cœur pour nos clients. Deuxièmement : réduire le churn pour les banques et les acquéreurs. L’industrie affiche un taux moyen d’attrition de 20 à 25 % sur les clients commerçants, ce qui est considérable. Nous voulons renforcer sa capacité à augmenter l’adhérence des clients grâce à des solutions à forte valeur ajoutée. Troisièmement : contrer les ruptures venant de nouveaux acteurs comme Stripe ou Square. Compte tenu de ces enjeux, quelle stratégie déployez-vous ? La stratégie s’articule autour de trois axes : l’acceptation des paiements, la gestion des terminaux et l’amélioration de l’expérience des marchands et des consommateurs. En anglais, nous la résumons par le triptyque : “accept, manage, enhance”. Cela passe par une démarche de simplification et de standardisation, en s’appuyant sur un ensemble de briques pour constituer une infrastructure cloud. Ce socle vise par ailleurs à développer une plateforme ouverte, qui permet d’intégrer des méthodes de paiement alternatives et d’adopter de nouvelles approches comme le paiement de compte à compte ou en cryptoactifs. Compte tenu de ces enjeux, quelle stratégie déployez-vous ? Il faut d’abord rappeler un chiffre : en moyenne, les opérateurs de terminaux ne disposent d’aucune information sur 25 % du parc. En associant les caractéristiques et les performances techniques d’un terminal à la localisation d’un commerçant, nous pouvons contribuer à réduire le churn. Ce volet “management” couvre donc une dimension logicielle basée sur une infrastructure cloud et une démarche servicielle pour intervenir à distance sur les périphériques, qu’ils soient conçus par Ingenico ou non. C’est ce que nous faisons déjà en Espagne pour Comercia Global Payments, filiale de CaixaBank spécialisée dans les paiements. Nous gérons le cycle de vie de leurs 600 000 terminaux. En passant de la partie “accept” à la partie “manage”, nous pouvons doubler le marché adressable et accéder à un potentiel de 5 milliards d’euros. C’est un marché en devenir et un moteur de croissance extraordinaire pour Ingenico, avec des pays en avance de phase, comme l’Australie. Vous avez évoqué les ruptures provoquées par de nouveaux entrants. Pouvez-vous illustrer ce point ? Par exemple, l’un de nos très grands clients américains, JPMorgan, qui a adopté notre stratégie autour de l’acceptation et de la gestion de terminaux, vient contrer le modèle intégré d’un Stripe en formalisant une approche innovante par l’intégration de solutions tierces (authentification biométrique, comptabilité, etc.), avec un résultat très intéressant. Notre approche ne consiste pas à concevoir nous-mêmes un modèle intégré, mais à collaborer avec divers partenaires en vue d’être l’une des briques d’un modèle intégré qu’ils voudront développer. Et cela n’empêche pas que nous pouvons être amenés à travailler sur certains sujets avec ces nouveaux acteurs. Une étude à paraître menée par Edgar, Dunn & Company montre que l’enjeu de la durabilité n’est pas jugé prioritaire au sein de l’industrie. Quelle est votre analyse ? Ce constat m’a étonné et je ne le partage pas. Mon rôle en tant que CEO vise à apporter des solutions d’acceptation, de gestion et d’amélioration qui soient les plus durables possible. Nous le faisons déjà avec le recyclage de nos terminaux de paiement et l’intégration de matériaux de plus en plus écoresponsables. Vous allez voir dans un avenir proche un certain nombre d’annonces qui vont être assez impactantes sur le marché. Nous travaillons en particulier sur le scope 3, puisque 75 % des émissions de CO2 proviennent de l’utilisation et du cycle de vie de nos terminaux. En 2023, Ingenico a acquis Phos, un spécialiste du SoftPOS. Quel regard portez-vous sur ce marché ? Sur le SoftPOS [solution d’acceptation 100 % logicielle sur un smartphone conventionnel, Ndlr], nos clients se montrent extrêmement intéressés. Il s’agit d’un marché qui est encore fragmenté avec des acteurs qui peuvent être des acquéreurs ou des start-up. C’est donc un marché qui va se consolider et des acteurs tels que nous allons y prendre une très grande place, car c’est complémentaire des terminaux physiques que nous fournissons. Deux approches se distinguent : l’ajout d’un compagnon aux terminaux physiques chez les grands retailers, pour réduire les files d’attente ou fournir une solution de secours, ainsi que la transformation de l’ensemble des périphériques NFC compatibles en terminaux de paiement. Nous poussons ces deux approches. Début 2024, Ingenico a fait état d’avancées sur l’authentification biométrique palmaire. Où en êtes-vous ? Nous en sommes encore à l’étape du “proof of concept”, non pas d’un point de vue technologique parce que cela fonctionne, mais il faut désormais passer de l’idée à la réalité économique. Nous sommes en grande discussion avec Mastercard sur la transformation de cette innovation en vraie valeur ajoutée pour les consommateurs et les marchands. Et nous avons initié cinq pilotes dans différentes régions du monde qui vont nous permettre de gagner de l’expérience. Quelle place prend l’innovation au sein du groupe ? L’innovation est absolument clé pour Ingenico. Nous consacrons chaque année 17 % de notre chiffre d’affaires à la R&D et nous détenons plus de 400 brevets actifs. Le groupe compte deux “laboratoires d’innovation” en France et en Inde, qui réunissent au total une centaine de personnes. Nous déployons dans ce domaine une stratégie “make, partner or buy” [développer, s’associer ou acquérir, Ndlr], avec un écosystème de partenaires comme Zone2boost [un programme d’open innovation cocréé par Ingenico, CaixaBank et Global Payments, Ndlr] à Barcelone et notre programme StartupIN. Et si c’est pertinent, nous sommes ouverts à des acquisitions. Antoine Duroyon paiement en magasinsoftposterminal de paiement Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind À lire Ingenico voit dans la gestion des terminaux un relais de croissance Splitit accélère le traitement du paiement fractionné Ingenico rachète le spécialiste du SoftPOS Phos Entretien Neil Pein (BNP Paribas) : "L'intégration de Floa est une force pour les solutions d'encaissement d'Axepta" Entretien Alice Zhan : “Avec Alipay+, nous voulons répondre à la fragmentation du paiement mobile”