Accueil > Services bancaires > Comment mettre en oeuvre un programme de cashback ? Comment mettre en oeuvre un programme de cashback ? BPCE, BNP Paribas ou encore le Crédit Agricole seraient en train de préparer des offres de fidélité liées aux dépenses de leurs clients pour se prémunir de la concurrence des nouveaux entrants. Mais les banques font face à un défi de taille : fournir une offre différenciante au client avec une expérience utilisateur optimale, tout en offrant de la valeur aux commerçants. mind Fintech fait le point sur les solutions disponibles et les initiatives en cours avec CFC Services, CDLK, Paylead, Transaction Connect, Plebicom et Wavestone. Par Aude Fredouelle. Publié le 28 mars 2018 à 8h48 - Mis à jour le 06 avril 2023 à 15h05 Ressources Sous l’effet combiné de la DSP2 puis de l’introduction progressive d’Instant Payment, les banques craignent de voir à terme la fréquence d’utilisation de leurs cartes bancaires diminuer au profit d’applications tierces permettant d’effectuer des virements instantanés de compte à compte. Une évolution qui mettrait à mal leurs revenus issus des commissions interbancaires, mais aussi la relation client. Pour s’y préparer et contrer la concurrence, les acteurs français qui s’étaient jusque-là peu penchés sur les offres de cashback, étudient tous plus sérieusement cette possibilité et plusieurs projets sont déjà en cours. De quoi peut-être remplacer chez certains les programmes de points de fidélité extrêmement onéreux (ils coûteraient 20 à 25 millions d’euros par an à maintenir chez les grands groupes) et dont le ROI est difficile à mesurer. LCL a été pionnier en matière de cashback, via son programme Avantage+ lancé en octobre 2015. Depuis la refonte du programme, le lancement d’un nouveau plan marketing et l’activation automatique d’une partie des offres début 2017, le programme est en croissance : un million de clients étaient enrôlés en novembre 2017, contre 600 000 en mai de la même année. Et plusieurs concurrents sont désormais sur les rangs. Selon Les Echos, BPCE mène un pilote en partenariat avec l’acteur historique du cashback Plebicom. Selon nos informations, la start-up CDLK a de son côté travaillé sur un projet de grande envergure avec le groupe Crédit Agricole, qui est cependant actuellement mis en pause. BNP Paribas expérimente également une offre et Société Générale devrait aussi faire évoluer son programme existant en ligne. CFC Services, filiale de FranFinance (groupe Société Générale) opérant une dizaine de programmes de cashback dont ceux du groupe (Grande Avenue dans le cas de SocGen), ne propose encore que des offres en ligne mais “travaille sur une offre en magasin”, assure ainsi Claudie Bonnotte, directrice commerciale. Récupération du flux monétique La mise en place du programme de fidélité et la mise en valeur des données liées aux transactions nécessitent en premier lieu d’être capable de les récupérer. Pour y parvenir, plusieurs solutions s’offrent aux banques. La première consiste à se baser sur les flux monétiques, comme le fait LCL. La banque peut ensuite se baser sur ces données pour identifier les transactions éligibles au programme de fidélité et en faire bénéficier le client… ou du moins faire appel à un prestataire spécialisé capable de déterminer quel marchand ou quel magasin se cache derrière la signature monétique. La solution CDLK, pionnière sur le créneau et qui travaille sur le programme Avantage+, permet ainsi d’identifier les marchands derrière chaque libellé et assure parvenir à catégoriser 99,7% des transactions cartes. “Nous avons créé plus de 3 000 règles algorithmiques et nous utilisons des techniques de machine-learning pour raffiner les éléments du flux monétique”, raconte Benoît Gruet, CEO. Inconvénient : ces offres de fidélisation requièrent un développement du côté de la banque. Mais, précise Patrick Labbé, DSI de CFC Services, “cette méthode, souvent internalisée par la banque, peut être un moyen pour les acteurs traditionnels d’analyser davantage la donnée client car le flux monétique véhicule beaucoup d’informations.” Account-Linked Offer Depuis l’émergence des solutions d’agrégation, une deuxième solution s’offre désormais aux banques : se baser sur les données de transactions cartes aspirées par web scraping par des acteurs tiers (et bientôt récupérées via les API dans le cadre de la DSP2). Selon ses adeptes, cette solution d’ALO (account-linked offer) donne une vision plus globale du client puisqu’elle inclut, outre ses dépenses cartes, les virements, prélèvements et entrées d’argent. Elle ouvrirait donc la voie à une personnalisation accrue des offres de fidélité. Mais dans le camp du flux monétique, Benoît Gruet, CEO de CDLK, assure que “l’analyse s’étend aussi au niveau du compte à vue et peut prendre en compte les virements et prélèvements SEPA”. L’agrégation est en tout cas la méthode choisie par la start-up PayLead, qui travaille avec l’agrégateur Linxo sur un projet qui s’apprête à entrer en production avec Crédit Agricole Centre France et avec Budget Insight pour une autre banque. Transaction Connect passe aussi par Budget Insight mais la société se différencie en ciblant les centres commerciaux en premier lieu, pour mettre en place des programmes de fidélité ciblés. Inconvénient : les données récupérées dans les synthèses de comptes par les agrégateurs sont pauvres et les commerçants peuvent être difficiles à identifier. Le libellé affiché sur la synthèse de compte est souvent peu explicite quant à l’enseigne et surtout, il n’indique pas de quel magasin il s’agit précisément. “On retrouve le commerçant dans 90% des cas et le point de vente dans 76% des cas”, assure Charles de Gastines, CEO de PayLead. Dans ces conditions, difficile de garantir une opération ciblée sur certains magasins d’une chaîne, par exemple, ou de travailler avec une chaîne constituée à la fois de franchisés et de non franchisés. Résultat : le CEO de PayLead reconnaît avoir été obligé, pour son pilote avec Crédit Agricole Centre France, de récupérer les flux monétiques en se branchant à une API. Passer par le TPE Une dernière solution de récupération des données peut être envisagée : Ingenico et Plebicom ont noué un partenariat permettant à Plebicom de récupérer les informations des transactions directement sur les terminaux de paiement. De quoi ouvrir aux clients d’eBuyClub (l’offre de cashback BtoC de Plebicom) des promotions en boutique, alors que l’offre traditionnelle était réservée aux e-commerçants. Avantage : “l’information peut remonter très rapidement, alors qu’avec un agrégateur, il faut attendre que le paiement s’affiche sur la synthèse des comptes et avec le flux monétique, que le paiement soit passé dans les comptes de la banque”, assure Gilles Nectoux, CEO de Plebicom. Chez LCL, par exemple, le cashback apparaît dans l’espace Avantage+ du client 2 à 7 jours après l’achat. Inconvénient : encore faut-il que les clients de Plebicom acceptent d’enregistrer leurs cartes, alors que l’offre était jusqu’ici uniquement en ligne et ne nécessitait pas de partager cette information. Par ailleurs, seules les transactions cartes sont remontées par les TPE. On-premise ou SaaS Seul CDLK propose aux banques de développer le programme dans son SI ou bien en SaaS. Les autres acteurs, qui utilisent des agrégateurs, fonctionnent obligatoirement en SaaS. “La méthode on-premise est souvent préférée par les banques pour une question de sensibilité des données, commente Benoît Gruet. Mais pour des questions de time-to-market, nous pouvons démarrer en SaaS puis intégrer des briques en interne au fur et à mesure, pour les données clients sensibles.” Patrick Labbé le confirme, un développement sur site “permet à la banque de rester maître de ses données et de ce qui est transmis”. Et cela lui évite aussi de devoir mentionner à ses clients l’existence d’un tiers pour le traitement des données personnelles. Les états-unis, un marché à succès pour le cashback Aux Etats-Unis, où le cashback est extrêmement développé, “les commerçants participant au programme peuvent interroger une base mise à disposition par la banque ou le consortium de banques pour cibler leurs offres promotionnelles, raconte Pierre de Brabois, Partner chez Wavestone. Les données clients sont anonymisées, mais le commerçant peut proposer son offre uniquement à ceux qui se rendent dans sa zone de chalandise tous les midis mais n’ont encore jamais acheté chez lui, par exemple. Chacune des banques donne donc accès à des bons plans adaptés aux attitudes d’achat de ses clients.” Certaines offres de cashback sont disponibles pour tous les clients, mais d’autres sont ciblées et plus limitées. De quoi proposer des remises importantes à un segment restreint à une zone de chalandise par exemple. Par ailleurs, le succès des offres de cashback outre-Atlantique découle de la capacité des banques à créer des consortiums pour proposer aux commerçants une base agrégée importante, selon Pierre de Brabois. En France, pourtant, le consortium Paylib se refuse à lancer des offres de fidélité. Seule l’initiative Lyf Pay ébauche une tentative groupée en la matière, avec le soutien du Crédit Mutuel et de BNP Paribas. Différenciation vs automatisation Une fois les données récupérées, les acteurs bancaires devront faire le choix de la forme que prendra l’offre de fidélité et de l’expérience utilisateur… et le curseur peut être difficile à placer, entre simplicité de l’offre et segmentation poussée pour satisfaire les commerçants partenaires. “Pour que les offres soient adoptées par les porteurs de carte, il faut qu’elles soient simples et intuitives”, argue Benoît Gruet, de CDLK. A ses débuts, le programme Avantage+ de LCL obligeait systématiquement les utilisateurs à se rendre sur le site du programme et à activer les offres pour pouvoir bénéficier du cashback en ligne ou en magasin. De quoi donner de la visibilité aux commerçants et pousser les clients vers ceux qui offrent les meilleures promotions. Dans ce cas de figure, il est intéressant pour les commerçants de proposer des offres différenciantes car il s’agit d’un coût d’acquisition qui va pousser le client à les préférer à leur concurrent. Mais l’expérience utilisateur n’est pas très fluide. “D’expérience, soit les clients se rendent sur le site et pré-activent toutes les offres indistinctement, soit ils oublient de le faire ou ne comprennent pas bien le fonctionnement et ne bénéficient pas du cashback espéré, ce qui peut créer plus de frustration que d’engagement”, regrette Benoît Gruet. Face aux difficultés rencontrées pour populariser le programme auprès des adhérents, LCL a donc décidé de faire évoluer son offre. Depuis quelques mois, de nouveaux partenariats apparaissent : une partie des commerçants sont “déjà activés” : le simple fait de payer avec sa carte LCL permet de bénéficier du cashback. Certes, le commerçant perd en visibilité… et sera sans doute moins enclin à concéder des offres intéressantes. Les enseignes ne proposeront pas des pourcentages extrêmement élevés sur ces programmes de cashback automatisés et généralisés à tous les clients. Mais LCL espère multiplier les remises de quelques pourcents pour rendre son programme indispensable aux clients. Pour Benoît Gruet, cette nouvelle stratégie pourra permettre aux banques de populariser les programmes de cashback. “Lors de la consultation de ses comptes en ligne, le client remarque qu’il bénéficie d’une cagnotte. En cliquant sur sa cagnotte, il accède aux détails de ses cashbacks, l’invitant ainsi à privilégier les enseignes partenaires et à s’informer sur les autres offres dont il n’a pas encore profité.” Ciblage des clients Tous les prestataires opérant sur le CLO ou l’ALO mettent pourtant l’accent sur leur capacité à mettre en oeuvre un ciblage précis des clients pour améliorer le marketing des enseignes. CDLK propose un module de “targeting” pour cibler les clients sur la base de leur comportement d’achat. Plebicom édite aussi une plateforme de publication des offres qui permet aussi d’englober “targeting, tracking et calcul de cashback”, précise Gilles Nectoux. PayLead met en avant des “algorithmes de segmentation capables de dire par exemple que tel segment de la population est très appétent pour tel type de marchand”. Reste qu’aucune offre de cashback extrêmement personnalisée n’a encore vu le jour. Actuellement, chez LCL, les offres sont les mêmes pour tous les clients même si celles qui sont mises en avant sur le site le sont de manière personnalisée, notamment en fonction de la localisation. Les banques sont freinées par la réticence des clients à voir leurs données analysées et scrutées et préfèrent populariser des programmes généralistes plutôt que de heurter leur base, quitte à offrir le même type de récompenses que des acteurs traditionnels comme Plebicom ou iGraal. En 2012, Fortuneo s’était bien essayé au lancement de “bons plans” liés à l’agrégateur (géré par Linxo) en communiquant sur un programme “respectant le secret bancaire”, mais le projet a depuis été abandonné. “Les prestataires sont capables de personnaliser les offres mais les banques sont frileuses, résume Pierre de Brabois, Partner chez Wavestone. Une mauvaise compréhension de l’approche par les clients peut leur porter préjudice.” Pour Benoît Gruet, dont la solution CDLK permet déjà aux commerçants de surveiller la performance des programmes de cashback en déterminant le “statut” du client (ancien, nouveau, régulier…), “dans cette phase d’apprentissage, la pré-activation est une bonne solution à condition d’avoir une plateforme capable de mesurer les résultats des offres pour en démontrer la performance aux commerçants, avec l’analyse de l’évolution du taux de transformation des non-clients et du RFM [Récence, Fréquence, Valeur, ndlr] sur les clients existants.” Selon lui, “la personnalisation des offres sera intégrée petit à petit, mais l’objectif à court terme est l’adoption du CLO par le marché, tant côté clients que commerçants”. Les nouveaux entrants se positionnent “Le problème de toutes ces nouvelles offres de cashback, c’est qu’elles ne seront pas différenciantes : toutes les banques proposeront les mêmes enseignes et le même niveau de remise”, déplore Claudie Bonnotte, de CFC Services. Pourtant, comme pour les agrégateurs et PFM par exemple, les acteurs traditionnels pourraient à terme être poussés à offrir des offres de cashback non pas pour se différencier, mais pour rester au niveau des nouveaux acteurs. Plusieurs nouveaux entrants préparent en effet des offres de cashback : max, la filiale du Crédit Mutuel Arkéa, en intégrera une en 2018, a annoncé son directeur général Didier Ardouin à mind Fintech en octobre dernier. Du côté des start-up, SoShop, lancé fin 2017, propose une carte bancaire prépayée couplée d’une offre de cashback, en partenariat avec Plebicom. Yeeld, ex-Piggou, lance également un programme de cashback et a choisi de s’associer avec des partenaires commerciaux en propre. Amazon et Sushi Shop ont signé et d’autres seront annoncés sous peu, assure Nagib Beydoun, CEO. “L’expérience utilisateur sera parfaite car elle passera uniquement par l’utilisation de la Mastercard virtuelle ou physique Yeeld, et le cashback sera instantané”, souligne-t-il. Cliquer sur le tableau pour l’agrandir Aude Fredouelle agrégateurcarte bancairecashback Besoin d’informations complémentaires ? Contactez le service d’études à la demande de mind